Prothèses totale de hanche à col modulaire titane de première intention. Résultats d’une étude prospective de 170 PTH cimentées en titane avec un recul minimum de 5 ans

Prothèses totale de hanche à col modulaire titane de première intention. Résultats d’une étude prospective de 170 PTH cimentées en titane avec un recul minimum de 5 ans

Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique 101 (2015) 98–103 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com Mémoire original ...

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Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique 101 (2015) 98–103

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Mémoire original

Prothèses totale de hanche à col modulaire titane de première intention. Résultats d’une étude prospective de 170 PTH cimentées en titane avec un recul minimum de 5 ans夽 Titanium-titanium modular neck for primary THA. Result of a prospective series of 170 cemented THA with a minimum follow-up of 5 years M. Ollivier , S. Parratte ∗ , A. Galland , A. Lunebourg , X. Flecher , J.-N. Argenson Institut du mouvement et de l’appareil locomoteur, UMR CNRS 787/AMU, hôpital Sainte-Marguerite, CHU Sud, boulevard de Sainte-Marguerite, 13009 Marseille, France

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Rec¸u le 13 juin 2012 ´ Accepté le 29 decembre 2014 Mots clés : Prothèse totale de hanche Anatomie de la hanche Col modulaire

r é s u m é Introduction. – Les cols modulaires en titane sont exposés au risque de corrosion et de rupture et bien qu’ils soient utilisés depuis la fin des années 1980, leur sécurité, remise en cause récemment, n’a pas été évaluée sur une série continue. Le but cette étude était d’évaluer : (1) la survie sans révision de ces implants après un recul minimal de 5 ans, (2) les résultats cliniques et radiographiques, (3) les complications potentielles liées à l’utilisation de cols modulaires en titane. Hypothèse. – L’utilisation de prothèses totales de hanche (PTH) modulaires cimentées en alliage de titane est sûre au recul minimal de 5 ans. Patients et méthodes. – Nous avons inclus prospectivement janvier 2006 et décembre 2008 170 patients (170 hanches) opérés pour PTH primaire avec une tige modulaire en alliage de titane, anatomique, cimentée. Les indications étaient PTH unilatérale pour coxarthrose primitive (n = 160) ou secondaire (n = 10) (ostéonécrose aseptique de la tête fémorale ou dysplasie). Les patients étaient âgés en moyenne de 75,4 ± 5,8 ans (52–85), avec un IMC de 26,1 ± 4,5 kg/m2 (16,6–42,1). Les patients étaient opérés par voie antérolatérale après planification 2D. Tous les patients ont été revus cliniquement et radiologiquement au cours d’un suivi annuel par un observateur non opérateur. Résultats. – Au recul moyen de 71 ± 8 mois (60–84), 5 patients étaient décédés et 7 perdus de vue. Aucune révision d’implant n’était à déplorer au recul maximal de 84 mois. Le score de Harris avait progressé significativement de 50,4 ± 11,3 (0–76) en préopératoire à 84,5 ± 15,2 (14–100) au recul. En postopératoire, il n’existait pas de différence en termes de déport fémoral et de positionnement du centre de rotation de la hanche par rapport au côté controlatéral. En revanche l’angle CC’D était modifié de 2 ± 5◦ (–11◦ à +14◦ ) et l’inégalité de longueur des membres de 2,16 ± 3,6 mm (–7,4 mm à +12,7 mm). Quinze patients (9 %) avaient une inégalité de longueur de plus de 5 mm et 4 patients (2 %) de plus de 10 mm. Aucune complication propre à la modularité n’a été relevée. Discussion. – Notre étude suggère que l’utilisation de prothèses en titane scellées disposant d’un col modulaire en titane est sûre au recul de 5 ans. La modularité ne permet pas d’éviter les inégalités de longueur mais permet de reproduire le déport fémoral. Niveau de preuve. – Niveau IV : étude prospective non comparative. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

1. Introduction DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.otsr.2014.12.013. 夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Orthopaedics &Traumatology: Surgery & Research, en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Service de chirurgie orthopédique, hôpital SainteMarguerite, boulevard de Sainte-Marguerite, 13009 Marseille, France. Adresse e-mail : [email protected] (S. Parratte). http://dx.doi.org/10.1016/j.rcot.2015.01.012 1877-0517/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Le remplacement prothétique de la hanche procure de manière fiable un soulagement des douleurs et une amélioration de la fonction, avec des résultats en termes de survie des implants régulièrement supérieurs à 95 % à 10 ans [1]. D’importantes variations anatomiques de l’extrémité proximale du fémur ont été décrites (antéversion fémorale, déport fémoral et angle

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cervicodiaphysaire) [2–4]. La modularité dans les prothèses totales de hanche (PTH) offre la possibilité d’optimiser la restauration de la biomécanique de la hanche incluant une correction dans les trois plans de l’espace du déport fémoral, de la longueur des membres inférieurs, de l’antéversion fémorale et de l’angle cervicodiaphysaire [5,6], notamment pour une anatomie variante de la normale [7–9]. Suite au développement de ces nouveaux systèmes, des préoccupations ont été exprimées, inhérentes à toute modularité, au sujet de la corrosion et de l’usure par frottement des jonctions modulaires [10–13], ainsi que des risques de décoaptation ou de fracture du col modulaire [14–17]. Les alliages de titane utilisés dans certains implants modulaires permettent d’éviter les problèmes de corrosion à l’interface observés avec les cols modulaires en chrome-cobalt, les matériaux se faisant face étant identiques [11]. Des fractures de cols ont cependant été observées avec les premières générations de cols modulaires en titane [18]. Néanmoins, il n’existe pas à notre connaissance dans la littérature d’étude de série continue de patients s’intéressant à l’efficacité et la sécurité d’emploi de ces implants. Les objectifs de notre travail étaient donc d’évaluer dans une série prospective continue de PTH modulaires cimentées en alliage de titane : (1) la survie sans révision de ces implants au recul minimal de 5 ans, (2) les résultats cliniques et radiographiques, (3) les complications potentielles liées à l’utilisation de cols modulaires en titane. L’hypothèse de notre travail était que l’utilisation de PTH modulaires cimentées en alliage de titane est sûre au recul minimal de 5 ans. 2. Patients et méthodes 2.1. Patients Dans cette étude prospective, monocentrique, continue, non randomisée, tous les patients opérés d’une arthroplastie totale de hanche de première intention entre janvier 2006 et décembre 2008, avec utilisation d’une tige fémorale anatomique cimentée incluant un système de modularité du col fémoral dans les trois plans de l’espace (valgus/varus, antéversion/rétroversion, longueur) ont été inclus. Les critères d’inclusions étaient : PTH de première intention, patients opérés pour une arthrose primitive ou secondaire (ostéonécrose aseptique de la tête fémorale ou dysplasie, stade 1,2 de Crowe), âge compris entre 18 et 85 ans, acceptation du protocole de suivi. Tous les patients inclus se voyaient proposer un protocole de suivi annuel par un évaluateur non opérateur et étaient inclus après signature d’un consentement écrit. La Fig. 1 présente le diagramme de flux de notre série. Durant cette période, 170 prothèses anatomiques à cols modulaires ont été implantées chez 170 patients (exclusion des cas bilatéraux ou PTH controlatérale préalable). Il s’agissait de 49 hommes (29 %) et 121 femmes (71 %), d’âge moyen de 75,4 ± 5,8 ans (52–85 ans) et d’indice de masse corporelle (IMC) moyen de 26,17 ± 4,5 kg/m2 (16,6–42,1), 51 patients (19,2 %) avaient un IMC supérieur à 30 (obésité modérée à massive). 2.2. Technique opératoire L’intervention était réalisée pour tous les patients par une voie antérolatérale de Watson Jones, en décubitus dorsal sous anesthésie générale dans 119 cas (71 %) ou sous rachianesthésie dans 51 cas (29 %). La planification 2D préopératoire des implants était réalisée via TraumacadTM (Voyant Health, Petach-Tikva, Israël). Tous les patients ont eu une cupule non cimentée à couple de frottement céramique-polyéthylène (Trilogy TMTTM - Zimmer, Warsaw, In, États-Unis). Le diamètre moyen des cupules était de 52 mm (48–60). La stabilité primaire de la cupule était sécurisée par un

Fig. 1. Diagramme de flux de la série.

vissage dans 158 cas (93 %). En moyenne une seule vis était utilisée (0–3). Sur le versant fémoral, une tige anatomique en alliage de titane Ti6A14V cimentée a été utilisée dans tous les cas (AptaTM cimentée, Adler-Ortho, Milan, Italie). Un col modulaire dans les trois plans de l’espace (Adler-Ortho, ModulaTM System, réalisé en alliage de titane Ti6A14V) (Fig. 2) était encastré dans la tige fémorale et équipé d’une tête de 28 mm en céramique. Le Tableau 1 résume la fréquence d’utilisation des différents cols modulaires. L’utilisation d’un col non standard (standard : défini comme un col 135◦ d’angle CC’D, antéversion de 13◦ , longueur moyenne : offset fémoral résultant 38 à 44 mm selon la taille de la tige) était nécessaire dans 28 % des cas. Les différentes possibilités offertes par la matrice linéaire de modularité utilisée sont présentées sur la Fig. 2. Le protocole postopératoire d’antalgie et de rééducation était identique pour tous les patients avec une reprise de l’appui dans

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Fig. 2. Possibilité de cols modulaires : matrice linéaire de modularité (plan frontal).

Tableau 1 Cols modulaires utilisés dans la série. Type de col

Dessin de l’implant : CC’D (◦ )/version (◦ )/offset induit (mm)

Nombre

Pourcentage

Standard moyen Standard court Standard long Varus long Av◦ standard Valgus long Av◦ standard

135/13/38–44a 135/13/33–39a 135/13/48–54a 128/13/48–54a 140/13/48–54a

122 22 13 10 3

72 13 8 7 2

Av◦ : antéversion de la tige ; CC’D : angle col-tige prothétique. a L’importance de l’offset dépendant de la taille de la tige.

les 48 premières heures. Un traitement anticoagulant par héparine de bas poids moléculaire pendant 45 jours pour tous les patients.

opérée étaient comparés à la hanche controlatérale native dans tous les cas grâce au logiciel CentricityTM (GE Healthcare, Barrington, IL, États-Unis). Les paramètres mesurés étaient (Fig. 3) : l’angle CC’D, le déport fémoral [20], la différence de longueur de membre inférieur (mesurée par la distance de la ligne des « U » radiologiques au petit trochanter) [21], la position du centre de rotation selon l’index de Pierchon horizontal C/D et vertical A/E [22]. Les signes radiologiques en faveur d’une complication liée à l’utilisation des cols modulaires étaient analysés et définis par : une ostéolyse périprothétique fémorale proximale en rapport avec un phénomène de corrosion (zone 1 et 7 de Gruen) [23]. Les ossifications hétérotopiques étaient décrites selon la classification de Brooker et al. [24]. Les fractures périprothétiques per- et postopératoires ont été colligées et classifiées selon Masri et Duncan (classification de Vancouver) [25]. 2.4. Méthodes statistiques

2.3. Méthodes d’évaluation Les patients étaient revus cliniquement et radiologiquement par leur chirurgien à 3 mois et 1 an puis annuellement dans le cadre du suivi systématique par un examinateur non opérateur. La fonction était évaluée aux différentes étapes au moyen du score de Harris [19]. Une étude de la survie sans révision des implants était réalisée sur la période de suivi avec comme critère principal (événement indésirable), une ré-intervention avec changement d’implant quelle qu’en soit la raison. Les radiographies (bassin face et hanche opérée de profil) au dernier recul étaient comparées avec les clichés préopératoires et intermédiaires, tous les clichés étaient réalisés dans le même centre, en position debout avec contrôle de la rotation du membre inférieur (rotation interne de 15◦ en postopératoire et rotation interne la plus proche possible de 15◦ en préopératoire), par un opérateur entraîné. Les paramètres anatomiques de la hanche

L’analyse statistique était réalisée grâce au logiciel SPSSTM 22 software (SPSS Inc., Chicago, Il). L’analyse de survie était réalisée selon la méthode de Kaplan-Meier en considérant comme évènement de fin une révision des implants, le décès ou l’absence de nouvelle au dernier recul. Les intervalles de confiance ont été déterminés à 95 % et le degré de significativité statistique était de 5 % (p < 0,05). Le score préopératoire de Harris était comparé aux scores postopératoires par un test-t de Student pour échantillon apparié. Pour l’étude des facteurs influenc¸ant l’utilisation de col modulaire, les variables quantitatives ont été analysées par un testt de Student et les variables qualitatives ont été comparées par un test du Chi2 selon un modèle d’analyse univariée. 3. Résultats Au recul moyen de 71 ± 8 mois (60–84), 5 patients étaient décédés (2,9 %) et 7 (4,1 %) perdus de vue. Aucune révision d’implant

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4. Discussion

Fig. 3. Mesure des critères de jugement radiologique postopératoire sur CentricityTM .

n’était à déplorer au dernier contrôle. La survie cumulée sans révision était ainsi de 100 % à recul maximal de 84 mois. Le score de Harris moyen (Tableau 1) pour l’ensemble de la série était, au dernier recul, de 84,5 ± 15,2 (14–100). On observait une amélioration postopératoire du score de Harris moyen passant de 50,4 à 84,5 points (p < 0,001). Les résultats de l’étude radiographique sont présentés dans le Tableau 2. Aucune différence significative entre la hanche opérée et la hanche controlatérale pour le déport fémoral et la position horizontale du centre de rotation n’était retrouvée. Il existait une différence significative entre la hanche opérée et la hanche controlatérale pour l’angle CC’D (« valgisation moyenne » plus 2 ± 5◦ [–11◦ à +14◦ ] p = 0,02), et pour la différence de longueur de membre inférieur (allongement moyen 2 ± 3,6 mm [–7,4 mm à 12,7 mm] p = 0,01). Quinze patients présentaient une inégalité de longueur radiographique de plus de 5 mm, 13 patients (7,6 %) une inégalité supérieure à 7 mm, et 4 patients (2,3 %) une inégalité supérieure à 10 mm. Deux patients présentaient des ossifications de stade 3 et un de stade 4 selon la classification de Brooker [24]. Aucune complication spécifique aux cols modulaires n’a été relevée au cours du suivi : pas d’ostéolyse périprothétique fémorale proximale > 2 mm (zone 1 et 7 de Gruen) ni de faillite mécanique de cols modulaires. Trois patients (1,7 %) ont présenté une complication grave au cours du suivi : une infection précoce d’évolution favorable traitée par lavage chirurgical associé à une antibiothérapie adaptée postopératoire pendant 3 mois. Deux autres (1,1 %) patients ont présenté au cours du suivi (l’un à 8 mois, l’autre à 31 mois) une fracture fémorale périprothétique Vancouver B1 traitée par ostéosynthèse interne à foyer ouvert sans changement d’implants. Deux (1,1 %) patients ont présenté une irritation du psoas par conflit du rebord antérieur de la cupule avec la face profonde du psoas d’évolution favorable après infiltration.

La modularité cervicale des PTH permet en théorie d’optimiser la restauration de la biomécanique de la hanche (déport fémoral, longueur des membres inférieurs, antéversion, angle cervicodiaphysaire) [7,8]. Les alliages de titane utilisés dans certains implants modulaires permettent de limiter les problèmes de corrosion aux interfaces entre tige et col prothétique, mais les premières générations ont conduit à des cas de bris de matériel non tolérable [14–17]. Notre hypothèse a été confirmée puisque nous n’avons pas observé de complication liée à l’usage d’un col modulaire en alliage de titane implanté sur un pivot cimenté. Cela confirme des données in vitro soulignant l’avantage des alliages de titane sur le chrome-cobalt pour la sécurité des cols modulaires [18]. Notre étude comporte plusieurs limites : (1) l’absence de comparaison avec une arthroplastie de hanche utilisant un autre pivot fémoral sans système de modularité. Durant la période d’étude nous n’utilisions que des implants modulaires ou sur mesure, ce qui aurait impliqué pour réaliser une étude comparative l’association d’opérateur d’un autre centre et donc un biais méthodologique. De plus, notre étude d’analyse de sécurité et d’efficacité est purement descriptive, (2) nous n’avons pas effectué de tomodensitométries pré- et postopératoires, ce qui limite la fiabilité des mesures de géométrie proximale du fémur. Le nombre de patients inclus rendait complexe la réalisation de tomodensitométries. Nous avons appliqué un suivi radiographique uniforme mais avons sans doute sous-estimé le déport fémoral [20]. La comparaison avec la hanche controlatérale permet de s’affranchir de ce problème mais suppose un contrôle parfait de la rotation des membres inférieurs au moment des clichés. Nos résultats sont concordants avec ceux rapportés par Pasquier et al. [26] qui observaient en comparant radiologie et tomodensitométrie un offset préopératoire radiologique de 42,9 ± 5,4 mm contre 44,7 ± 6,3 mm en postopératoire. En revanche nous avons pu inclure un effectif important de patients (170 pour 170 hanches), opérés dans un seul centre selon une procédure chirurgicale identique, avec un faible taux de perdus de vue sur une période limitée (supposant peu de modifications des pratiques entre le début et la fin de l’étude) avec une évaluation au recul minimum de 5 ans. De nombreuses questions persistent concernant la valeur du déport fémoral idéal pour chaque patient. La hanche controlatérale lorsqu’elle est saine peut représenter un reflet de l’anatomie optimale à restaurer, la littérature actuelle ne répond pas à la question de l’anatomie permettant une biomécanique optimale de l’articulation prothétique [2,6,9]. Les cols modulaires permettent néanmoins d’adapter le déport fémoral tout en contrôlant dans le même temps l’angle cervicodiaphysaire et la différence de longueur des membres inférieurs, il existe néanmoins dans cette étude 8 % (n = 15) de nos patients présentant une ILMI > 5 mm, nous n’avons pas analysé le caractère gênant de cette inégalité, qui est un écueil peu décrit dans l’utilisation des cols modulaires et probablement lié à la planification 2D (pas de planification 3D disponible) de nos implants. La survie de notre série était comparable à celle des séries récentes concernant des implants modulaires ou monobloc [5,7,8,27–29]. De plus, notre étude n’a pas retrouvé d’échec mécanique spécifique à l’utilisation de col modulaire au dernier recul. Il a noté que l’utilisation d’implant en titane expose à un risque important d’ostéolyses périprothétiques fémorales à moyen et long terme [29] Nous n’avons pas, dans notre série, retrouvé d’observation de ce type mais notre recul est sans doute trop court. La création d’une interface supplémentaire entre la tige et le col est pourtant débattue [30], exposant à des micromouvements, favorisant des phénomènes de corrosion sous contrainte et exposant à des fissures dont la propagation peut aller jusqu’à la rupture [14–17]. L’usure de l’interface entraîne également la

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Tableau 2 Moyennes des paramètres radiographiques mesurés, test-t de Student.

Hanche controlatérale Hanche opérée Valeur p

Index de Pierchon horizontal (mm)

Index de Pierchon vertical (mm)

Angle CC’D

Offset (mm)

Différence de longueur de membres inférieurs

Angle de varisation de la tige fémorale

3,0 ± 0,5 (2,2–4,4) 3,1 ± 0,4 (2,2–4,3) NS

1,9 ± 0,6 (1,0–0,48) 2,1 ± 0,5 (1,1–4,5) NS

131,5 ± 4,77 (121–150) 134,15 ± 4,1 (129–140) 0,02

44,8 ± 7,6 (31–64) 44,2 ± 5,8 (35–60) NS





+2,16 ± 3,67 (−7–12) 0,01

2,4 ± 2,4 (0–10) –

CC’D : angle col-tige prothétique ; NS : différence non significative.

Tableau 3 Séries de la littérature rapportant les résultats des tiges anatomiques à col modulaire.

Blakey et al. [5]

Type de pivot

Effectif

Étiologie

Âge moyen

Anca-fitTM

352 88

Cox 79 % Cox sec 21 % Cox 56 % Cox sec 30,7 % F 1,4 % DDH 100 % Cox 83,5 % Cox sec 13,5 % F 3% Cox 93 % Cox sec 7 % Cox 90 % Cox sec 10 %

64,4

TM

Allouche et al. [27]

Anca-fit

Traina et al. [8] Loubignac et al. [28]

Anca-fitTM HelianteTM

61 103

Duwelius et al. [33]

ML Taper KinectivTM AptaTM cimentées

620

Notre série

170

Recul (mois)

Score clinique postopératoire

Nombre reprises

Fracture/dislocation Col modulaire

60

HHS 20

12 (3,4 %)

0

52,2

69

PMA 16,9 HHS 94,8

5 (5,6 %)

0

49,4 78,6

117,2 80,4

HHS 74,7 PMA 16,4 HHS 91,3

1 (1,6 %) 8 (7,7 %)

0 0

63

14

HHS 91,3

20 (3,2 %)

0

75,4

56

HHS 84,5

3 (1,7 %) (1 infection, 2 F)

0

Cox : coxarthrose primaire ; Cox sec : coxarthrose secondaire ; F : fracture de l’extrémité proximale du femur ; DDH : dysplasie de hanche ; HHS : Harris Hip Score ; PMA : score de Postel-Merle d’Aubigné.

libération de microparticules métalliques [31] dont les effets pro-inflammatoires ont été décrits pour les prothèses à couple métal-métal en chrome-cobalt [11]. Nous n’avons relevé aucune fracture ou dislocation du col modulaire dans notre série et dans les 3 études existantes à notre connaissance sur des prothèses anatomiques à col modulaire titane/titane (aucun cas sur 1094 hanches au recul moyen de 66 mois) [5,7,8]. Afin de prévenir ces risques, un nettoyage des interfaces avant impaction, une impaction en bonne position avec ajustement parfait entre le col et la tige, et l’utilisation d’un alliage identique entre col et tige sont indispensables [11,12]. Nos résultats en termes de restauration de l’anatomie par l’utilisation d’implant modulaire confirment les résultats publiés par Bachour et al., [9] retrouvant dans leur série une réduction importante de l’offset fémoral planifié en cas d’utilisation d’implant monobloc. La planification préopératoire a permis l’obtention de paramètres anatomiques (positionnement du centre de rotation, déport fémoral) postopératoires non significativement différents de ceux retrouvés pour la hanche controlatérale (utilisé comme référence), seuls l’inégalité de longueur et l’angle CC’D étaient significativement différents entre les deux côtés. Ces résultats sont concordants avec ceux de González Della Valle et al. [32] qui observaient une adéquation optimale des paramètres anatomiques planifiés et postopératoires, excepté pour l’inégalité de longueur des membres inférieurs augmentée dans leur série, ainsi que l’angle CC’D imposé par le dessin des 116 PTH cimentées analysées. Le Tableau 3 présente une comparaison de nos résultats avec les principales études concernant les prothèses modulaires cimentées. Nous avons utilisé dans cette étude un pivot fémoral anatomique permettant une modularité cervicale, en effet, nous pratiquons une planification 2D (pas de planification 3D avec les implants utilisés sur le marché à l’époque) afin de restituer l’antéversion du col fémoral natif, avec la possibilité

(en cas d’instabilité ou d’inégalité de longueur au testing final) de modifier la longueur l’offset fémoral et la version du col. De même, les caractéristiques démographiques des patients de notre série expliquent l’utilisation systématique d’une fixation cimentée des implants fémoraux, devant le risque important de fractures liées à l’utilisation de tige anatomique sur os porotique. Enfin, nous n’avons pas utilisé de col varus long dans notre pratique quotidienne car leur dessin est le plus à risque vis-à-vis de potentielle fracture d’implant. Cette conduite a pu conduire à une « sous-estimation » du nombre de fractures d’implants dans notre expérience. Les résultats de notre étude semblent démontrer qu’un système de modularité en titane sur titane basé sur une matrice linéaire tridimensionnelle permet d’optimiser la restauration de l’anatomie de la hanche avec de bons résultats cliniques et radiologiques, sans complication propre à l’utilisation de la modularité. Des études à plus long terme, comparatives, randomisées doivent être réalisées pour confirmer les résultats obtenus dans cette série, cependant les éléments obtenus à moyen terme dans cette étude nous engagent à poursuivre l’utilisation de ces implants.

Déclaration d’intérêts Jean-Noël Argenson est consultant éducation et recherche pour Zimmer et rec¸oit de royalties de Zimmer. Sébastien Parratte est consultant pour Smith et Nephew, Graftys, Adler-Ortho et participe au programme d’éducation de Zimmer. Xavier Flecher est consultant pour Zimmer. Alexandre Lunebourg, Alexandre Galland et Matthieu Ollivier déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

M. Ollivier et al. / Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique 101 (2015) 98–103

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