Pseudotumeur inflammatoire de la rate et corrélation radio-anatomopathologique

Pseudotumeur inflammatoire de la rate et corrélation radio-anatomopathologique

J Radiol 2006;87:1894-6 © Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2006 Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés fait clinique digestif ...

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J Radiol 2006;87:1894-6 © Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2006 Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

fait clinique

digestif

Pseudotumeur inflammatoire de la rate et corrélation radio-anatomopathologique I Hamdi (1), I Marzouk (1), L Toulali (1), H Amara (1), I Bellara (1), I Ridene (1), A Ben Abdelkader (2), M Khila (3) et Ch Kraiem (1)

Abstract

Résumé

Inflammatory pseudotumor of the spleen and radiopathologic correlation J Radiol 2006;87:1894-6

Les pseudotumeurs inflammatoires de la rate (PTIR) sont rares. Nous rapportons un cas PTIR chez une femme âgée de 48 ans, hospitalisée en dermatologie pour toxidermie. Lors de son hospitalisation, la patiente a présenté des douleurs au niveau de l’hypochondre droit. L’examen clinique et les examens biologiques habituels sont revenus normaux. L’échographie ainsi que l’IRM hépatique ont découvert au niveau de la rate, une lésion médio splénique hétérogène de 5 cm de grand axe. Une splénectomie partielle a été réalisée et l’examen anatomopathologique de la masse a trouvé l’association d’éléments inflammatoires polymorphes avec des foyers de remaniement hémorragique et scléreux, évoquant une PTIR. Les suites opératoires ont été favorables. Le but de ce travail est d’illustrer un cas de PTIR en essayant de faire une corrélation radio anatomopathologique.

Inflammatory pseudotumors of the spleen (IPTS) are rare. We report a case of an IPTS in a 48-year-old woman who was admitted for drug eruption. During her hospitalization, she complained of abdominal pain. Physical examination and laboratory investigations were unremarkable. The abdominal ultrasonography and hepatic MRI detected a heterogeneous mass in the spleen measuring approximately 5 cm in diameter. Partial splenectomy was performed. Histologically, the splenic mass was composed of an admixture of inflammatory cellular elements with hemorrhage and sclerosis, suggestive of an IPTS. The postoperative course was uneventful. The authors attempt to make a radiopathologic correlation of this rare tumor. Key words: Inflammatory pseudotumor. MRI. Spleen. Ultrasonography.

es pseudotumeurs inflammatoires sont des affections bénignes d’étiopathogénie inconnue. Elles correspondent à des proliférations fibroblastiques, infiltrées de cellules inflammatoires polymorphes, de nature réactionnelle. Tous les organes peuvent être atteints avec une prédilection pour les orbites et l’appareil respiratoire. La localisation splénique est extrêmement rare et seulement 74 cas ont été décrits dans la littérature (1). Le diagnostic préopératoire des pseudotumeurs inflammatoires de la rate (PTIR) est difficile, rarement posé malgré le progrès des moyens d’imagerie.

L

Observation Il s’agit d’une femme âgée de 48 ans, suivie en dermatologie pour dermatophytie pubienne traitée par griséofulvine, et qui a été hospitalisée pour une toxidermie allergique. Lors de son hospitalisation, la patiente a présenté des douleurs

(1) Service d’imagerie médicale, (2) Service d’anatomopathologie, (3) Service de chirurgie générale, CHU Farhat Hached, Avenue Ibn El Jazzar, Sousse 4000, Tunisie. Correspondance : I Hamdi E-mail : [email protected]

Mots-clés : Échographie. IRM. Pseudotumeur inflammatoire. Rate.

abdominales diffuses prédominant au niveau de l’hypochondre droit. L’examen clinique était normal et les examens biologiques habituels sont revenus normaux. L’échographie abdominale a découvert au sein d’un foie stéatosique trois petites lésions hypoéchogènes de 1 à 2 cm de diamètre au niveau des segments III, VI et VIII. Au niveau de la rate, elle a décelé une lésion médio splénique hypoéchogène hétérogène de 5 cm de diamètre (fig. 1). L’IRM a montré cinq lésions hépatiques en hypersignal T2 qui augmente en deuxième écho, hypointenses en T1 ; trois sont au niveau du segment II (sous capsulaire de 1 à 2 cm de diamètre) et deux au niveau des segments VI et VIII. Ces lésions prennent le contraste en périphérie puis en motte de façon centripète avec homogénéisation tardive ; cet aspect est typique d’angiomes hépatiques. La rate est le siège d’une lésion arrondie médiosplénique de 5,5 cm de diamètre à limites nettes et de signal hétérogène. Elle est en iso signal T1 (fig. 2), de signal hétérogène en T2 (fig. 3), sans capsule individualisable avec des cloisons en hyposignal T2 disposées de façon radiaire (fig. 4). L’étude dynamique montre un rehaussement précoce mais plus lent que le paren-

chyme splénique, une homogénéisation sur les temps tardifs avec un centre lésionnel demeurant hypo intense (fig. 5). L’aspect et le comportement de la masse splénique après injection ont évoqué en premier lieu la nature bénigne tel qu’un hamartome fibreux, un hémangiome atypique, en effet l’hémangiome a typiquement un fort signal en T2 comme pour sa localisation hépatique ; mais une tumeur maligne ne pouvait être écartée. Deux mois après l’IRM, la patiente a été opérée avec splénectomie partielle polaire inférieure. La pièce pesait 147 g, mesurait 6 × 6 × 4,5 cm et, à la section, la masse était bien limitée de consistance ferme, de couleur blanchâtre avec foyers de remaniement hémorragique. L’examen histologique a montré une masse multinodulaire faite par l’association d’éléments inflammatoires polymorphes représentés par des lymphocytes, des plasmocytes, des polynucléaires éosinophiles et des histiocytes ; les cellules fusiformes étaient dépourvues d’anomalies cytonucléaires ; la lésion était assez bien limitée par rapport au parenchyme splénique avoisinant mais sans véritable capsule ; elle comportait souvent des foyers de remaniement hémorragique et scléreux avec des lésions de nécrose

I Hamdi et al.

Pseudotumeur Inflammatoire de la Rate et Corrélation Radio-anatomopathologique

Fig. 1 :

Coupe ultrasonographique de la rate montrant la masse splénique d’échostructure hypoéchogène hétérogène de 5 cm de diamètre.

Fig. 2 :

IRM séquence axiale pondérée en T1 (avec saturation de graisse), la masse est en isosignal au parenchyme splénique.

Fig. 1:

Abdominal ultrasonography showing a splenic hypoechogenic and heterogeneous mass measuring approximately 5 cm in diameter.

Fig. 2:

Hepatic MRI T1-weighted image; the mass showed isointensity.

Fig. 4 :

IRM séquence axiale pondérée en T2 2e écho la masse est le siège de cloisons en hyposignal disposées de façon radiaire.

Fig. 4:

MRI T2 second echo-weighted image; the hypointense radial layout of the mass partitions.

ischémique par endroit. Le diagnostic final de pseudotumeur inflammatoire de la rate a été établi (fig. 6). Une biopsie d’une des lésions hépatique a été faite au cours de la laparotomie pour une certitude diagnostique, devant la hantise de lésion maligne splénique avant l’examen extemporané, confirmant sa nature hémangiomateuse. Les suites opératoires ont été favorables.

Discussion Les PTIR sont extrêmement rares (incidence de 0,007 %) avec seulement 74 cas J Radiol 2006;87

publiés (1). L’âge moyen de survenue de cette affection est de 51,5 ans (16 à 87 ans), elle touche les femmes dans 60 % des cas (2). Les PTIR sont de découverte souvent fortuite, les signes cliniques et les symptômes sont non spécifiques, variables d’une personne à l’autre : douleurs de l’hypocondre ou du flanc gauche associées dans quelques cas à une fièvre ou une splénomégalie. Les constatations de l’imagerie dans les différents cas ne sont pas spécifiques, l’échotomographie, la tomodensitométrie voire l’IRM permettent de montrer soit une masse unique de la rate dont le grand axe varie de 0,5 à 12,5 cm (2) soit plusieurs nodules enchâssés dans le parenchyme splénique. À l’échographie, elle est habituellement hypoéchogène hétérogène à limites plus ou moins nettes (3) et en tomodensitométrie, hypodense de rehaussement variable, hétérogène après injection de produit de contraste. La présence sur le scanner d’une zone centrale hypodense stellaire est en rapport avec une plaque fibreuse ; cet aspect serait suggestif mais non spécifique d’une PTIR (4, 5). Dans notre observation l’IRM a permis de mieux étudier la structure interne de la masse ainsi que son extension locorégionale permettant de s’orienter vers une lésion à composante fibreuse. La lésion était bien limitée en iso signal T1, de signal hétérogène en T2 avec des cloisons radiaires en hyposignal T2 et une zone centrale hypo intense en T1. Les images radiaires en hyposignal T2 correspondaient aux remaniements scléreux en corrélation avec les données de l’anatomopa-

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Fig. 3 :

IRM séquence axiale pondérée en T2. La masse est de signal hétérogène avec des cloisons en hyposignal. Notez un angiome en hypersignal au segment III.

Fig. 3:

MRI T2-weighted image. The mass was heterogeneous with multiple hypointense partitions in radial layout. Hemangioma in liver.

thologie. Après injection de gadolinium et étude dynamique, il existe un rehaussement centripète précoce et progressif et un remplissage tardif témoignant de la présence d’un contingent fibreux. Le centre demeure non rehaussé par le Gadolinium, ceci est dû aux remaniements hémorragiques et nécrotiques. À l’histologie, la PTIR est caractérisée par un mélange de myofibroblastes fusiformes et de cellules inflammatoires polymorphes comprenant des cellules sanguines polyclonales et des lymphocytes dont la majorité sont des lymphocytes T (6). Plusieurs diagnostics différentiels peuvent être discutés en imagerie, l’hamartome et l’hémangiome ont également un rehaussement progressif, mais leur signal en T2 est élevé, surtout pour l’hémangiome. Le lymphome splénique est généralement infiltrant et les métastases sont rares avant 50 ans, et souvent associées a d’autres localisations métastatiques. En histologie, plusieurs diagnostics différentiels sont envisagés ; les plus cités sont le lymphome splénique primitif et l’hamartome (7). Ce dernier est habituellement bordé par une pulpe rouge comprimée sans fibrose associée. L’étude immunophénotypique et/ ou cytogénétique associée à l’étude morphologique peut aider à confirmer le lymphome (6, 8). La maladie de Hodgkin à localisation splénique primaire est exceptionnelle mais doit faire rechercher méticuleusement la cellule de Reed Strenberg (6). Le traitement des PTIR est chirurgical, avec une splénectomie totale dans la majorité

I Hamdi et al.

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des cas. La splénectomie partielle est rarement indiquée et ce lorsque la masse est unique et bien limitée sans effraction capsulaire ni envahissement des organes avoisinant ni adénopathies locorégionales.

Conclusion Les PTIR sont des lésions bénignes très rares dont le diagnostic de certitude est difficile à obtenir sans exérèse chirurgicale. Ce fait est dû à l’aspect variable et non spécifique de l’imagerie. La connaissance de cette entité par le radiologue est importante et doit être évoquée devant toute masse splénique, a contingent fibreux (hyposignal T2 et rehaussement progressif) et/ou avec une image stellaire centrale, chez un patient asymptomatique ou sans contexte clinique particulier.

Références 1.

2.

3.

Fig. 5 :

IRM dynamique (séquences axiales pondérées en T1 FATSAT avec injection de gadolinium, 30s, 60s, 2 minutes et 5minutes) prise de contraste progressive par la masse avec homogénéisation tardive. Le centre lésionnel reste en hyposignal et ne prend pas le contraste.

Fig. 5:

Dynamic MRI (30 s, 1 min, 3 min, and 5 min) showed that the mass enhanced gradually with homogenization at the later phase with high intensity compared to spleen. The center of the mass remains hypointense and not enhanced.

4.

5.

6.

7.

8.

Fig. 6 :

HE * 100 : proliferation de myofibroblastes dans un fond inflammatoire polymorphe.

Fig. 6:

HE * 100: proliferation of myofibroblastic cells associated with polymorphic inflammatory cells.

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