Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile

Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile

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ARTICLE IN PRESS

ANNDER-2315; No. of Pages 6

Annales de dermatologie et de vénéréologie (2017) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur

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CAS CLINIQUE

Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile Pyoderma gangrenosum associated with anti-proteinase 3 antineutrophil cytoplasmic antibodies (PR3-ANCA) induced by propylthiouracil A. Coster a,∗, J.-L. Dargent b, N. de Visscher c, P. Levecque c,1, P.-P. Roquet-Gravy a a

Département de dermatologie, grand hôpital de Charleroi (GHDC), Grand’Rue 3, 6000 Charleroi, Belgique b Département d’anatomie pathologique, institut de pathologie et de génétique (IPG), 25, avenue Georges-Lemaître, 6041 Gosselies, Belgique c Département de médecine interne, grand hôpital de Charleroi (GHDC), Grand’Rue 3, 6000 Charleroi, Belgique Rec ¸u le 23 novembre 2015 ; accepté le 13 janvier 2017

MOTS CLÉS Pyoderma gangrenosum ; Propylthiouracile ; Anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles (ANCA) ; ANCA anti-protéinase 3 (PR3-ANCA)

∗ 1

Résumé Introduction. — Les antithyroïdiens de synthèse peuvent être responsables du développement d’anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles (ANCA) et de vasculites liées à la présence de ces ANCA, ou de dermatoses neutrophiliques. Le propylthiouracile (PTU) est l’antithyroïdien de synthèse le plus souvent incriminé et ces ANCA sont surtout de type anti-myélopéroxydase (MPOANCA). À notre connaissance, aucune publication n’a rapporté d’association entre pyoderma gangrenosum (PG) et ANCA anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le PTU. Observation. — Une femme de 68 ans était traitée par du PTU pour un goitre multinodulaire toxique. Elle se présentait en raison d’une ulcération nécrotique étendue de la partie inférieure de l’abdomen. L’anamnèse, la clinique, les prélèvements bactériologiques et histologiques permettaient de poser le diagnostic de pyoderma gangrenosum. Celui-ci était accompagné d’ANCA

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Coster). Auteur décédé.

http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2017.01.018 0151-9638/© 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Coster A, et al. Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile. Ann Dermatol Venereol (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2017.01.018

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A. Coster et al. de spécificité antigénique anti-protéinase 3. L’arrêt du PTU, associé à une courte cure de corticothérapie générale et de ciclosporine, permettait une résolution rapide et complète du pyoderma gangrenosum, parallèlement à une décroissance des ANCA. Aucune rechute n’était objectivée à un an de l’arrêt de tout traitement. Discussion Nous rapportons un cas de PG accompagné de PR3-ANCA induits par le PTU, en l’absence de toute vasculite démontrable. © 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Pyoderma gangrenosum; Propylthiouracil; Anti-neutrophil cytoplasmic antibody (ANCA); Proteinase3-ANCA (PR3-ANCA)

Summary Background. — Synthetic antithyroid drugs are often used in the treatment of hyperthyroidism, regardless of aetiology. They may cause various side effects, including the development of anti-neutrophil cytoplasmic antibodies (ANCA), ANCA-associated vasculitis, and neutrophilic dermatoses. Propylthiouracil (PTU) is the antithyroid drug most frequently implicated in ANCA-associated diseases specifically involving anti-myeloperoxidase ANCA (MPO-ANCA). To our knowledge, there are no clinical reports describing the association of pyoderma gangrenosum (PG) and anti-proteinase3-ANCA (PR3-ANCA) induced by PTU, with ANCA levels decreasing after antithyroid drug withdrawal. Patients and methods. — A 68-year-old woman was treated with propylthiouracil (PTU) for toxic multinodular goitre. She presented necrotic ulceration of the lower abdomen. The patient’s history, physical examination, and bacteriological and histological samples led to a diagnosis of pyoderma gangrenosum. This pyoderma involved ANCA with antigenic specificity for proteinase 3. Withdrawal of PTU and a short course of corticosteroids and cyclosporine resulted in rapid and complete resolution of the pyoderma gangrenosum as well as a decrease in ANCA. No relapse was observed one year after cessation of treatment. Discussion. — We report a case of PG associated with PR3-ANCA induced by PTU, without any demonstrable vasculitis. © 2017 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Les antithyroïdiens de synthèse sont fréquemment utilisés dans le traitement de l’hyperthyroïdie, quelle qu’en soit l’étiologie. Ils peuvent être responsables de divers effets secondaires tels que le développement d’anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles (ANCA), de vasculites liées à la présence de ces ANCA ou de dermatoses neutrophiliques. Le propylthiouracile (PTU) est l’antithyroïdien de synthèse le plus souvent incriminé dans les pathologies avec présence d’ANCA. Ces derniers sont plus spécifiquement des ANCA anti-myélopéroxydase (MPO-ANCA). À notre connaissance, aucune publication n’a décrit d’association entre pyoderma gangrenosum (PG) et ANCA anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le PTU. Nous en présentons une observation, avec décroissance des taux d’ANCA à l’arrêt de l’antithyroïdien.

Observation Une femme de 68 ans était traitée depuis 3 ans et 11 mois par du PTU à la dose de 50 mg/j les cinq premiers mois, puis 100 mg/j, pour une hyperthyroïdie secondaire à un goitre multinodulaire toxique. Son état thyroïdien était stabilisé. Elle se présentait en raison d’une ulcération nécrotique étendue de la partie inférieure de l’abdomen.

À l’anamnèse, la patiente décrivait l’apparition, quatre mois auparavant, d’une papulopustule sous-ombilicale secondairement ulcérée et caractérisée par une extension impressionnante, malgré des soins locaux et une antibiothérapie générale. En outre, elle signalait une lésion similaire d’évolution spontanément favorable, apparue plusieurs mois plus tôt sur le membre inférieur gauche. Elle ne formulait aucune autre plainte, notamment articulaire ou digestive. À l’examen clinique, la patiente était apyrétique et son état général était conservé. L’examen cardiopulmonaire et abdominal était sans particularité. L’ulcération mesurait 24 cm dans son plus grand axe et ses bords étaient violacés. On remarquait des « clapiers purulents ». L’aspect clinique évoquait un PG (Fig. 1 et 2). Les prélèvements bactériologiques et mycologiques étaient stériles. L’examen anatomopathologique des biopsies cutanées révélait une ulcération, accompagnée d’un infiltrat neutrophilique particulièrement abondant. Les berges de l’ulcération étaient faites d’un épiderme épaissi et hyperplasié. Le derme papillaire sous-jacent comportait de très nombreux neutrophiles disposés en nappes dissociant le tissu conjonctif. Parfois, on remarquait un capillaire à la paroi infiltrée par des polynucléaires ou des lymphocytes mais cependant sans altération typique de

Pour citer cet article : Coster A, et al. Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile. Ann Dermatol Venereol (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2017.01.018

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Figure 1. Ulcération étendue de la partie inférieure de l’abdomen évoquant un pyoderma gangrenosum.

Figure 2.

Ulcération à bordure violacée et « clapiers purulents ».

vasculite, notamment pas de vasculite leucocytoclasique. Plus en périphérie, l’infiltrat inflammatoire comprenait une composante lymphocytaire. Ces remaniements ulcéronécrotiques ne comportaient toutefois pas de composante granulomateuse. L’aspect histologique, quoique non

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spécifique, était bien compatible avec le diagnostic de PG évoqué cliniquement (Fig. 3a et b). Un bilan exhaustif permettait d’exclure les principales associations morbides telles qu’une arthrite, une maladie inflammatoire chronique de l’intestin ou une hémopathie. Une discrète gammapathie monoclonale de signification indéterminée (MGUS) à IgM lambda était mise en évidence, avec un taux d’IgM mesuré à 4,00 g/L (n : 0,40—2,30 g/L) et un très petit précipité d’allure monoclonale correspondant à une chaîne légère lambda détectée par immunofixation. Le taux sérique de la forme libre de cette chaîne légère était toutefois dans les normes : 19,7 mg/L (n : 5,70—26,30 g/L). L’immunofixation urinaire était négative. Afin d’exclure une affection hématologique débutante, une biopsie ostéomédullaire était prélevée ; elle montrait quelques signes de dysmyélopoïèse, un caryotype médullaire normal et une faible augmentation polyclonale de la population lymphocytaire B. Biologiquement, il existait un syndrome inflammatoire (CRP à 49 mg/L) sans hyperleucocytose, notamment neutrophile. Les tests rénaux, hépatiques et thyroïdiens étaient normaux. L’analyse d’urine mettait en évidence une protéinurie de 340 mg/24 h en l’absence d’hématurie, associée et un rapport protéinurie sur créatininurie préservé. Des anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles (ANCA) étaient détectés par immunofluorescence indirecte (IFI) à une dilution de 1/320 (seuil de positivité < 1/40) avec un profil cytoplasmique (cANCA) et une spécificité antigénique anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) en Elisa. Le titre d’ANCA anti-protéinase 3 était élevé, mesuré à 8,1 UI/mL (positif si > 3 UI/mL), incitant à la recherche d’une granulomatose avec polyangéite (GPA). Ce diagnostic pouvait toutefois être écarté en raison de l’aspect histologique de l’ulcération, qui n’était pas celui d’une vasculite granulomateuse, et de l’absence d’atteinte d’organe pouvant témoigner d’une vasculite systémique chez notre patiente : absence d’atteinte rénale avec hématurie microscopique, absence d’atteinte ORL, absence de lésion parenchymateuse pulmonaire à la radiographie de thorax. Le PTU étant suspecté de jouer un rôle dans le tableau présenté par la patiente, il était remplacé par ® du thiamazol (Strumazol ). Une corticothérapie générale

Figure 3. a et b : aspect histologique de la lésion. Le prélèvement intéresse une zone ulcérée, caractérisée par un tissu de granulation inflammatoire où abondent les polynucléaires neutrophiles. Les bords de l’ulcération sont constitués d’un épiderme acanthosique infiltré par ces polynucléaires neutrophiles.

Pour citer cet article : Coster A, et al. Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile. Ann Dermatol Venereol (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2017.01.018

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A. Coster et al.

Figure 4. Cicatrice atrophique et pigmentée résiduelle du pyoderma gangrenosum à 4 mois de l’arrêt de tout traitement.

(méthylprednisolone, 1 mg/kg) était également administrée. On constatait alors une amélioration clinique rapide, avec une cicatrisation progressive et une décroissance du taux des ANCA. Face à la corticodépendance de la patiente, de la ciclosporine était introduite à raison de 3 mg/kg/j pendant deux mois, diminués ensuite à 2,5 mg/kg/j pendant un mois avant l’arrêt. Par ailleurs, la patiente bénéficiait d’un traitement par iode radioactif permettant l’arrêt du ® Strumazol . Un an après l’arrêt de tout traitement, les ANCA revenaient à des valeurs normales (ANCA détectés par IFI à la dilution de 1/40 et le titre d’ANCAc anti-PR3 mesuré par Elisa à 0,3 UI/mL), les tests rénaux restaient stables (protéinurie inchangée et absence d’hématurie microscopique) et le taux d’IgM était revenu dans la norme (1,28 g/L). L’ulcération avait laissé place à une cicatrice atrophique et pigmentée (Fig. 4). Par ailleurs, la patiente était euthyroïdienne, sans le moindre traitement.

Discussion Le PG est une dermatose neutrophilique dont le diagnostic reste surtout clinique, l’examen anatomopathologique étant relativement peu spécifique. Des critères diagnostiques ont été proposés [1]. Un bilan exhaustif doit être réalisé afin de rechercher une association morbide, présente dans près de la moitié des cas.

Étiologie du PG Les trois principales affections pouvant être associées à un PG sont une maladie inflammatoire chronique de l’intestin, une arthrite séronégative ou une hémopathie, telle qu’une gammapathie monoclonale (GM) par exemple. D’autres affections peuvent cependant être associées, notamment une endocrinopathie, un néoplasie, une sarcoïdose, une hépatite auto-immune ou un lupus érythémateux [2,3]. Le PG peut être révélateur d’une GM, présente dans 10 % des cas selon une étude de la Mayo Clinic [4]. Cette incidence varie toutefois selon les publications [5]. Il s’agit le plus souvent d’une GM ou d’une gammapathie polyclonale à IgA [3,6—8]. Dans l’étude de la Mayo Clinic, sur les 86 cas

de PG, 9 présentaient une GM : sept à IgA, une à IgG et une à IgM [4]. Dans le cas présenté ici, il est donc assez peu probable que le PG soit lié à la paraprotéinémie à IgM. Selon une étude multicentrique et rétrospective, jusqu’à 36,7 % des PG sont associés à une endocrinopathie, qui concerne la thyroïde dans moins d’un tiers des cas [5]. Cette association n’est décrite qu’avec la thyroïdite d’Hashimoto et la maladie de Basedow, dont le PG peut même être une manifestation clinique initiale [3,9]. À notre connaissance, l’association d’un PG et d’un goitre multinodulaire toxique n’est pas décrite. Des PG médicamenteux sont rapportés avec ® l’isotrétinoïne, le pegfilgrastim (Neulasta , G-CSF), divers anti-TNF, le géfitinib et le PTU [2]. Il est intéressant de noter que le PTU, et dans une moindre mesure d’autres antithyroïdiens de synthèse comme le benzylthiouracile, le méthimazole et le carbimazole, peuvent être responsables de l’apparition d’ANCA, de vasculites à ANCA [10—12] et, plus rarement, de dermatoses neutrophiliques [11,13].

ANCA et antithyroïdiens de synthèse Sous PTU, des ANCA apparaissent dans 20 à 64 % des cas selon les auteurs [10,12—17]. Ces anticorps présentent majoritairement un profil périnucléaire (pANCA) en immunofluorescence, même si un profil cytoplasmique (cANCA) est décrit dans quelques cas [10,17]. Les cibles antigéniques de ces anticorps induits par les médicaments sont multiples (lactoferrine, élastase, cathepsine G, protéinase 3. . .) mais la myélopéroxidase (MPO) reste l’antigène le plus souvent détecté, les autres cibles n’étant probablement pas recherchées en pratique clinique [12,15,18,19]. Notons que dans l’étude de Gunton et al., sur huit patients qui avaient développé des ANCA sous-antithyroïdiens au long cours, deux avaient des cANCA, dont un avec une très forte positivité pour la protéinase 3 [17]. Ces ANCA peuvent ne pas se manifester cliniquement mais ils peuvent aussi être responsables de lésions cutanées ou systémiques sous forme d’une vasculite ou d’une dermatose neutrophilique.

ANCA, antithyroïdiens de synthèse et vasculites Les vasculites à ANCA liées aux antithyroïdiens de synthèse sont cliniquement semblables aux vasculites systémiques idiopathiques à ANCA [10,12]. Néanmoins, à l’arrêt de l’antithyroïdien, avec ou sans corticothérapie générale ou immunosuppresseur, les formes médicamenteuses ont une rémission clinique plus rapide que la chute des ANCA, avec un risque de rechute plus faible et un meilleur pronostic que les formes idiopathiques [12,20,21]. En présence de cANCA anti-PR3, une GPA doit être évoquée et recherchée, ce d’autant plus qu’il existe une atteinte ORL, pulmonaire, rénale ou cutanée concomitante. Actuellement, le rôle des ANCA anti-PR3 dans le développement d’une GPA ne semble plus aussi exclusif : des études expérimentales récentes suggèrent en effet que l’immunité cellulaire serait également impliquée dans la physiopathologie de la réaction granulomateuse observée dans cette forme de vasculite [22]. D’ailleurs, certains auteurs ont rapporté des cas de GPA associés à des ANCA anti-MPO [23].

Pour citer cet article : Coster A, et al. Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile. Ann Dermatol Venereol (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2017.01.018

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Pyoderma gangrenosum avec PR3-ANCA induits par le propylthiouracile Tableau 1

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Dermatoses neutrophiliques à ANCA sous ATS.

Seo et al. (2010) [28] Frigui et al. (2009) [25] Darné et al. (2009) [13] Gungor et al. (2006) [26] BoulengerVazel et al. (2005) [14] Hong et al. (2004) [19] Darben et al. (1999) [18] Miller et al. (1999) [27]

Dermatose(s) Neutrophilique(s)

Sexe

Âge (années)

Pathologie thyroïdienne

Médication et dosage

Durée du traitement

ANCA

PG

F

60

PTU (150 mg)

6 ans

PG et syndrome de Sweet Syndrome de Sweet PG

F

41 33

benzylthiouracile (100 mg/j) PTU

F

52

PTU

PG et pustulose sous-cornée de SneddonWilkinson PG

F

40

Maladie de Basedow Maladie de Basedow

1 9 1 1 2

pANCA anti-MPO pANCA

F

Maladie de Basedow Maladie de Basedow Non renseignée

PTU (100 mg/j)

2 ans et 4 mois

pANCA anti-MPO

F

27

PTU

2 ans

PG

F

44

PTU

3 ans

Syndrome de Sweet

F

37

Maladie de Basedow Maladie de Basedow Maladie de Basedow

PTU (100 mg 3 ×/jour les 3 derniers mois)

2 ans et 3 mois

pANCA anti-MPO pANCA anti-MPO pANCA anti-MPO

an et mois an et mois ans

pANCA anti-MPO pANCA

F : femme ; PTU : propylthiouracile ; pANCA : anticorps anticytoplasme des neutrophiles, fluorescence périnucléaire ; MPO : myéloperoxydase ; PG : pyoderma gangrenosum.

En présence de pANCA anti-MPO, les vasculites sousantithyroïdiens de synthèse miment généralement une polyangéite microscopique. Dans cette éventualité, l’atteinte cutanée s’avère souvent polymorphe avec présence de livedo, de purpura, de nécrose cutanée et moins souvent de véritables ulcérations [24]. De plus, une atteinte systémique est fréquemment associée (90 % des cas), avec une prédilection pour les systèmes rénal et pulmonaire [10,12,23]. L’évolution est cependant souvent moins sévère dans ces formes induites [12]. Le rôle des ANCA anti-MPO est clairement reconnu dans la physiopathologie de la polyangéite microscopique, contrairement à celui des ANCA anti-PR3 dans la GPA [22].

ANCA, antithyroïdiens de synthèse et dermatoses neutrophiliques

évoquer autant une vasculite qu’un PG, d’autant que ces deux affections font intervenir des mécanismes physiopathologiques similaires, même si le rôle du PTU est moins clair dans la genèse du PG [19]. Outre l’histoire du patient, l’image clinique et l’atteinte systémique différentes, ainsi que l’étude histologique d’un prélèvement cutané peuvent également orienter le clinicien. Dans un PG, l’infiltrat neutrophilique dermique prédomine largement sur les images de vasculite qui, si elles sont présentes, sont des vasculites leucocytoclasiques avec ou sans thrombose intraluminale [2,3,13,25—27]. Dans une vasculite à ANCA, les images de vasculite sont majoritaires, avec dégénérescence fibrinoïde de la paroi des vaisseaux, associée à un infiltrat mixte à la fois neutrophilique et lymphocytaire [10,12,20,24]. En cas de GPA, des granulomes intra- ou extravasculaires sont également décrits.

Synthèse diagnostique Les antithyroïdiens de synthèse peuvent induire des dermatoses neutrophiliques en présence d’ANCA (Tableau 1). Huit cas ont été décrits dans la littérature [13,14,18,19,25—28], toujours chez des femmes âgées de 27 à 60 ans et traitées par PTU pour une maladie de Basedow (sauf une patiente recevant du benzylthiouracile). Il s’agissait majoritairement de lésions de PG et, à chaque fois, des pANCA anti-MPO étaient mis en évidence. Par ailleurs, des ulcérations cutanées profondes évoquant un PG ont été décrites chez des sujets traités par antithyroïdiens de synthèse pour une maladie de Basedow, mais ces lésions se sont révélées être des vasculites à ANCA et non de véritables dermatoses neutrophiliques [24]. Une ulcération cutanée faisant suite à la prise d’ATS et s’accompagnant de taux élevés d’ANCA peut donc

Le cas que nous rapportons est celui d’un PG induit par le PTU. Il est accompagné de cANCA anti-PR3, qui caractérisent classiquement la GPA, mais en l’absence de GPA chez notre patiente. Nous postulons donc que ces cANCA anti-PR3 ont pu être induits par le PTU au même titre que le PG qu’ils accompagnent. De fait, quelques rares publications rapportent des cas d’ANCA anti-PR3 induits par du PTU [10,17], même si ce dernier est plus classiquement considéré comme inducteur de pANCA anti-MPO. Chez notre patiente, l’arrêt de l’antithyroïdien, associé à un traitement immunosuppresseur court, a permis d’obtenir rapidement une amélioration clinique parallèlement à une diminution du titre d’ANCA. Après un an sans traitement, la patiente reste en rémission complète avec un taux

Pour citer cet article : Coster A, et al. Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile. Ann Dermatol Venereol (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2017.01.018

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A. Coster et al.

d’ANCA normal. Cette évolution favorable parallèle soutient l’hypothèse d’un lien entre la prise de l’antithyroïdien, le développement des ANCA et la survenue du PG. En pratique, devant un PG développé chez un patient sous-antithyroïdien de synthèse, après avoir exclu les principales associations morbides, le praticien est encouragé à doser le taux sérique d’ANCA. En présence d’un titre élevé d’ANCA, la responsabilité de l’antithyroïdien doit être évoquée et son interruption envisagée.

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

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Pour citer cet article : Coster A, et al. Pyoderma gangrenosum avec anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles de type anti-protéinase 3 (PR3-ANCA) induits par le propylthiouracile. Ann Dermatol Venereol (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2017.01.018