Editorial
Quelle place pour les radio-isotopes
en biologie
?
Le 25 septembre dernier, j’ai eu I’occasion de prononcer une conference devant les membres de I’Academie nationale de pharmacie, conference qui portait sur les applications des radio-isotopes artificiels en biologie 100 ans apres la decouverte de Becquerel. Je me suis efforce de faire le point en elargissant cette mise a jour, c’est-a-dire en y incluant recherche biologique et biologie medicale. Si on cherche a comprendre pourquoi les radio-isotopes n’ont plus la preeminence qu’ils avaient lors des an&es 70-80, il faut prendre en compte les facteurs d’evolution inherents & toute situation : de meilleures performances sur des parametres dejja abordes, la possibilite d’etudier de nouveaux parametres, I’accession du plus grand nombre pour des causes diverses (certaines pouvant Btre reglementaires). Qu’en est-il dans les secteurs de la biologie ou I’emploi des marqueurs, isotopiques ou non, joue un role preponderant ? l En immunoanalyse, I’illustration du transfert est aisee. En biologie clinique, les analyses effect&es a I’aide de radio-isotopes (iode 125 et tritium) participent en France pour environ 25 % du <( marche )a, sur des domaines restant privilegies (steroi’des) et d’autres pratiquement desert& (maladies infectieuses et medicaments). Les effets de la nomenclature des actes de biologie medicale, depuis 1985, ne sont pas seuls en cause. II faut aussi remarquer que le signal radioactif est parfois depasse par certains signaux luminescents. Les reactifs de dosage de la TSH dits de troisieme generation sont la pour en temoigner. l En biologie mokulaire, dans la mesure ou le phosphore est un element constitutif des acides nucleiques, le phosphore 32 demeure le marqueur d’excellence. Mais des considerations de praticabilite ont conduit g I’introduction d’autres marques. l En enzymologie, la part des radio-isotopes depend des orientations du laboratoire. La mesure d’une activite enzymatique releve essentiellement de mesures spectrophotometriques ; I’etude des effets de la diaminoxydase sur la putrescine-Cl4 pour deceler une rupture prematuree des membranes f&ales ne passe pas pour une analyse de routine. Par contre, de nombreuses publications font etat de recherches sur des enzymes pouvant reveler une presence virale. l L’une des forces des traceurs isotopiques consiste en une possibilite d’0tude des r6cepteurs. Par exemple, en biologie clinique, I’hormonodependance des cancers du sein peut etre caracterisee a partir de la presence de recepteurs a I’estradiol et a la progesterone. L’industrie pharmaceutique est egalement une grande consommatrice de tests destines a etablir la localisation et I’intensite d’une interaction d’un medicament. l La biologie cellulaire, enfin, s’interesse au signal radioactif, que ce soit pour mettre en evidence une cytotoxicite (chrome 51), suivre une incorporation (thymidine tritiee), etudier le mecanisme d’une apoptose, etc. Mais la encore, on voit se multiplier des applications oti d’autres signaux, notamment ceux de la fluorescence, gagnent du terrain. En toute objectivite, je ne crois pas etre en train d’ecrire la chronique d’une mot-l annoncee. Je me souviens d’une diapositive projetee lors d’un congres aux Etats-Unis en 1985 oti I’on voyait une Pierre tombale avec I’inscription : RIA RIP (reguiescat
in pace) !
La place des radio-isotopes se dessine mieux maintenant ; en biologie clinique, je continue a deplorer que de nombreux biologistes francais n’aient pas la liberte de decision pour leurs techniques. Quel casse-We, en effet, au moment de faire le meilleur choix parmi tous les automates performants en immunoanalyse... Mais nous aurons surement a revenir sur la dualite instrument-reactifs. A bientot. Pr J lngrand R6dacteur en chef