Rétrécissement aortique

Rétrécissement aortique

Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 54 (2005) 105–106 http://france.elsevier.com/direct/ANCAAN/ Éditorial Rétrécissement aortique Aortic Stenosi...

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Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 54 (2005) 105–106 http://france.elsevier.com/direct/ANCAAN/

Éditorial

Rétrécissement aortique Aortic Stenosis La prise en charge du rétrécissement aortique est un problème fréquent dans la pratique cardiologique d’aujourd’hui. C’est aussi un sujet en « plein mouvement » grâce à une meilleure connaissance de la physiopathologie, mais aussi de l’histoire naturelle et des résultats chirurgicaux qui permettent de mieux préciser les indications thérapeutiques. Dans l’étude Euro Heart Survey récemment menée en Europe, la sténose aortique est la valvulopathie la plus fréquente et représente près de la moitié des valvulopathies natives devant l’insuffisance mitrale et très largement devant la sténose mitrale et de l’insuffisance aortique. L’étiologie dégénérative est largement dominante. La prévalence de la sténose aortique augmente après l’âge de 70 ans et ce phénomène ne pourra que s’amplifier avec le vieillissement de la population. Un bon nombre d’études expérimentales et cliniques ont montré que le terme de sténose aortique « dégénérative » n’est probablement pas le bon et que la sténose est la conséquence d’un phénomène actif, proche de celui de l’athérosclérose. Les arguments sont d’ordre clinique, fondés sur les études épidémiologiques suggérant que les facteurs de risque pour la progression de la sténose aortique dégénérative et la maladie coronarienne sont souvent les mêmes. Des travaux histologiques ont documenté la présence de particules lipidiques et d’infiltrats inflammatoires qui contribuent à l’atteinte valvulaire initiale. Enfin, des équipes françaises ont récemment montré le rôle possible de facteurs génétiques. Aujourd’hui, l’échographie est le « maître examen » pour le diagnostic et l’évaluation des sténoses aortiques et a très largement supplanté le cathétérisme qui est de réalisation difficile et comporte un certain risque. À côté de l’évaluation « à l’état de base », il apparaît important de recourir, lorsque cela est nécessaire, à des explorations dynamiques. Il peut s’agir de l’épreuve d’effort qui a une excellente valeur pronostique et qui est maintenant recommandée dans toutes les recommandations internationales pour fixer le pronostic chez les patients asymptomatiques. À l’autre extrême, Jean-Luc Monin, de l’équipe d’Henri Mondor a souligné l’intérêt de l’échographie dobutamine pour la stratification du risque dans les sténoses aortiques en bas débit avec mauvaise fonction ventriculaire gauche. Enfin des travaux plus récents, émanant de la Mayo Clinic, ont suggéré que le scanner multibarrettes pourrait être un outil très utile pour la quantification. 0003-3928/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.ancard.2005.04.002

Tout patient symptomatique devrait être opéré s’il n’a pas de contre-indication. Cette recommandation, qui peut paraître évidente, n’est malheureusement pas toujours suivie dans la pratique. Ainsi dans l’étude Euro Heart Survey, un tiers des patients symptomatiques n’a pas été adressé en chirurgie. Cela justifie une meilleure éducation des médecins mais aussi le développement de scores de risque pour aider à une décision plus objective. La décision thérapeutique chez les patients asymptomatiques est aujourd’hui plus facile grâce à une meilleure connaissance de l’histoire naturelle des sténoses aortiques dégénératives utilisant largement l’échographie quantitative. Ainsi, l’équipe Rosenheck à Vienne, à la suite de Catherine Otto de Washington, a souligné la valeur pronostique de l’augmentation du pic de vélocité maximum au-delà de 3 m/seconde et aussi celle des modifications de cette vitesse sur les examens successifs, et enfin le pronostic péjoratif de l’existence de calcifications valvulaires importantes. Néanmoins, les choses ne sont pas si faciles parce que toutes ces études concordent pour dire qu’il y a une grande variabilité interindividuelle ce qui amène à souligner l’importance d’un suivi régulier et de l’éducation des patients lorsque l’on prend en charge un patient asymptomatique qui ne présente pas encore les critères chirurgicaux La chirurgie de remplacement valvulaire aortique est le traitement de référence des sténoses aortiques. La technique est maintenant bien réglée avec une mortalité immédiate faible et d’excellents résultats à long terme. Néanmoins, tous les registres récents soulignent le fait que la chirurgie de rétrécissement aortique est aujourd’hui une chirurgie du sujet âgé dans laquelle les comorbidités pèsent lourd. Par conséquent, il est impératif de procéder à une évaluation individuelle du rapport bénéfice/risque tenant largement compte des facteurs extracardiaques lorsqu’on discute une indication chirurgicale. Plus personne ne discute l’intérêt de la revascularisation coronaire associée en cas de lésions coronaires concomitantes, ce qui est le cas de plus d’un patient sur deux. Dans ce cadre, le développement grandissant de la cardiologie interventionnelle a amené à envisager un traitement « hybride » associant remplacement valvulaire aortique chirurgical et dilatation coronaire pour diminuer le risque opératoire. Cette stratégie, proposée notamment par l’équipe rennaise, demande, elle aussi, à être validée par des résultats comparatifs à long

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terme. Enfin, la pratique très large de l’échographie, mais aussi les mauvaises expériences d’interventions « redux » pour remplacement valvulaire chez des patients déjà pontés, font discuter de plus en plus souvent de la conduite à tenir en cas de sténose modérée associée à des lésions coronaires. Ici, la stratégie sera guidée par le risque de progression de la valvulopathie, le risque chirurgical cardiaque et extracardiaque, et la faisabilité d’une revascularisation percutanée. La dilatation aortique percutanée introduite il y a près de 20 ans par Alain Cribier est abandonnée par la plupart des équipes parce qu’elle n’entraîne qu’une amélioration clinique transitoire au prix d’une morbidité restant élevée. Elle n’est éventuellement utilisée que dans de rares de chocs cardiogéniques, comme « préparation » à la chirurgie de remplacement valvulaire, bien que cette indication ne repose que sur un niveau de preuve très bas. Mais cette technique a eu pour mérite d’ouvrir la voie à l’implantation percutanée de prothèses valvulaires aortiques qui a été réalisée, là aussi, par Alain Cribier en 2002. L’expérience du remplacement percutané est tout à fait débutante puisque cette méthode n’a été utilisée que chez un peu plus de 20 patients dans des indications compassionnelles. On peut dire aujourd’hui que l’implantation percutanée est faisable mais qu’il est beaucoup trop tôt pour en apprécier l’efficacité clinique. Le grand enthousiasme suscité par cette nouvelle technique invite à une évaluation très soigneuse pour préciser sa place exacte qui pourra certainement concerner les contre-indications à la chirurgie ou les patients à très haut risque pour la chirurgie et peutêtre, dans un deuxième temps, s’étendre vers des patients dans un état moins précaire. Le traitement médical n’est que palliatif dans la sténose aortique. Des séries récentes ont suggéré l’intérêt potentiel des statines ou des inhibiteurs de l’enzyme de conversion, pour ralentir la progression de la sténose aortique. Néanmoins, ces résultats doivent être confirmés par des études prospectives randomisées ayant des objectifs cliniques. Cela vien-

dra bientôt parce que la première de ces études a terminé son recrutement. Le nombre sans cesse croissant de patients avec sténose aortique et le vieillissement de ces patients posent toute une série de problèmes dans la gestion quotidienne et, en particulier la question fréquente de la faisabilité d’une chirurgie extracardiaque. Ces situations justifient une évaluation très précise par tous les intervenants : cardiologues, anesthésistes, chirurgiens pour décider de l’indication et de la date d’une chirurgie cardiaque par rapport à la chirurgie extracardiaque. Enfin, la discussion du type de prothèse idéale reste d’actualité entre les tenants des bioprothèses qui proposent d’en élargir les indications en diminuant l’âge d’implantation sous l’argument de durabilité des nouvelles bioprothèses qui est excellente. À l’inverse, les partisans des prothèses mécaniques insistent sur les nouvelles modalités du traitement anticoagulant par l’autoévaluation qui réduit les complications thromboemboliques et hémorragiques et fonde des espoirs sur les nouvelles antithrombines directes administrées par voie orale bien que les récentes décisions de la FDA retardent certainement de quelques années l’utilisation de ces molécules. Toutes ces questions seront largement abordées dans ce numéro qui vous permettra d’avoir une large revue du présent et du futur de ce qui sera « la valvulopathie du siècle » à moins que nous ne parvenions à ralentir sa progression comme nous avons pu enrayer celle du rhumatisme articulaire aigu dans les dernières décades... A. Vahanian Service de cardiologie, hôpital Bichat, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France Adresse e-mail : [email protected] (A. Vahanian). Disponible sur internet le 28 avril 2005