Risque thromboembolique veineux au cours des affections médicales aiguës. Partie 2 : situations à risque en milieu ambulatoire, en milieu médical hospitalier et en médecine interne

Risque thromboembolique veineux au cours des affections médicales aiguës. Partie 2 : situations à risque en milieu ambulatoire, en milieu médical hospitalier et en médecine interne

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La Revue de médecine interne 29 (2008) 462–475

Mise au point

Risque thromboembolique veineux au cours des affections médicales aiguës. Partie 2 : situations à risque en milieu ambulatoire, en milieu médical hospitalier et en médecine interne Risk of venous thromboembolism in acute medical illnesses. Part 2: Situations at risk in ambulatory, hospital and internal medicine settings S. Le Jeune ∗ , M.-A. Pistorius, B. Planchon, P. Pottier Service de médecine interne, CHU Hôtel-Dieu, 1, place Alexis-Ricordeau, 44093 Nantes cedex 1, France Disponible sur Internet le 8 avril 2008

Résumé Propos. – Certaines affections médicales aiguës (AMA) s’accompagnent d’une augmentation du risque thromboembolique veineux, dont l’évaluation précise reste complexe. La première partie de cette mise au point était consacrée aux méthodes d’analyse du risque thromboembolique veineux en situation médicale. Cette deuxième partie s’attache à décrire le risque inhérent à certaines AMA rencontrées en milieu hospitalier, ambulatoire ou relevant plus spécifiquement d’une prise en charge en médecine interne. Actualités et points forts. – Le risque thromboembolique veineux en milieu médical varie considérablement selon la nature de l’AMA en cause. Ce risque apparaît notablement élevé en milieu hospitalier, même s’il reste significatif en milieu ambulatoire. L’accident vasculaire cérébral et l’hospitalisation en unité de soins intensifs constituent des situations à risque très élevé. Certaines pathologies prises en charge spécifiquement par l’interniste se compliquent fréquemment de manifestations thrombotiques veineuses, parmi lesquelles le lupus érythémateux systémique, la maladie de Wegener, les maladies chroniques inflammatoires intestinales et la maladie de Behc¸et. Perspectives et projets. – L’appréciation du poids thrombotique spécifique d’une AMA constitue un outil supplémentaire permettant de reconnaître les patients médicaux à haut risque. Cette revue systématique de la littérature fait apparaître des incertitudes concernant le poids thrombogène de certains facteurs de risque tels que l’alitement ou le syndrome inflammatoire aigu biologique. Compte tenu des difficultés méthodologiques inhérentes aux études épidémiologiques prospectives, une méta-analyse centrée sur le risque thromboembolique veineux lié à ces deux facteurs en milieu médical pourrait s’avérer utile au clinicien pour adapter au mieux les mesures de prévention de la maladie thromboembolique veineuse. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract Purpose. – The increased risk of thromboembolism in acute medical illnesses (AMI) is difficult to assess because of the diversity of medical conditions. The first part of this review of the literature was dedicated to methods of risk analysis based on our current pathophysiological knowledge. This second part describes more specifically the risk of venous thrombosis linked to AMI in hospital, ambulatory and internal medicine settings. Current knowledge and key points. – The incidence of venous thromboembolism is higher in hospital than in ambulatory setting, albeit the latter remains significant. Stroke and affections leading to intensive care management represent conditions at great risk. Several mechanisms leading to a prothrombotic state have been identified, explaining the increased risk observed during relapses of pathologies specifically treated in internal medicine such as lupus erythematosus, Wegener granulomatosis, inflammatory bowel diseases and Behcet’s disease. Future prospects and projects. – Next to the pathophysiological understanding of venous thrombosis, the assessment of the specific thrombogenic burden of an AMI is an additive tool to screen medical patients at high risk. This systematic review of the literature shows uncertainties towards some risk factors as bedrest or acute inflammatory response. Taking into account the methodological difficulties inherent to prospective and



Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (S. Le Jeune).

0248-8663/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.revmed.2008.01.023

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epidemiological studies, a meta-analysis focussing on these factors would be useful to refine prevention guidelines for venous thromboembolism in medical setting. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Maladie thromboembolique veineuse ; Affections médicales aiguës ; Facteurs de risque Keywords: Venous thromboembolism; Medical diseases; Risk factors

1. Introduction La maladie thromboembolique veineuse (MTV) reste une cause majeure de morbi-mortalité dans les pays occidentaux avec une incidence annuelle moyenne évaluée à 50–200 cas pour 100 000 habitants [1]. Une proportion significative de ces évènements thromboemboliques veineux (ETV) complique l’évolution de pathologies médicales aiguës [2–4]. Les conférences de consensus récentes [5] ont intégré ce risque en proposant des mesures spécifiquement ciblées sur la prévention de la MTV en milieu médical. Dans la première partie de cette mise au point, nous avons montré que l’évaluation du risque thromboembolique veineux au cours d’une situation médicale devait s’appuyer sur la reconnaissance de facteurs de risque (FDR) élémentaires, sur leur catégorisation en FDR transitoire ou permanent et en FDR majeur ou non, ainsi que sur l’emploi de modèles épidémiologiques pathogéniques. Nous présenterons dans cette deuxième partie les données issues d’une revue de la littérature appréciant le risque thromboembolique veineux inhérent à différentes affections médicales aiguës (AMA). Nous développerons successivement les principales caractéristiques de ce risque en milieu hospitalier, ambulatoire, ainsi qu’au cours de pathologies plus spécifiquement prises en charge par l’interniste. 2. Affections médicales aiguës en milieu hospitalier 2.1. Données générales Les études épidémiologiques et les principaux essais thérapeutiques de prévention de la MTV en milieu médical hospitalier ont permis de vérifier que la plupart des AMA sans critères de sévérité s’associent à un risque thromboembolique veineux compris entre 10 et 30 % en dépistage systématique, donc de niveau moyen selon la classification Thrift [5–7]. La probabilité de survenue d’un ETV symptomatique est relativement faible dans cette population (0,5–2 %), comme cela est souvent noté dans les groupes à risque modéré. La mortalité par MTV varie entre 5 et 15 % à trois mois. Certaines situations cliniques s’accompagnent, cependant, d’un risque plus élevé (notamment les décompensations cardiaques et respiratoires sévères) [8], voire majeur (paralysies des membres inférieurs d’origine neurologique) [9] (Tableau 1). Au cours d’une situation médicale à risque, le rôle de l’alitement dans le risque thromboembolique veineux global reste souvent difficile à évaluer [10,11]. Ainsi, près de 40 % des patients hospitalisés en service médical présentent une perte de déambulation aiguë [12]. L’évaluation du poids thrombotique de l’alitement, par la stase veineuse qu’il engendre, varie,

cependant, considérablement d’une étude à l’autre (OR de 0,8 à plus de dix) [12–16] et reste souvent difficile à discriminer du risque intrinsèque lié à l’AMA. Si l’alitement pour une pathologie médicale aiguë est généralement considéré comme un FDR transitoire significatif, il ne peut, cependant, à lui seul constituer une indication de prévention de la MTV [17]. Son association à certaines AMA et à un terrain à risque doit, en revanche, faire discuter une prophylaxie des ETV. Il est de même bien montré que l’alitement prolongé ne constitue pas un FDR permanent justifiant à lui seul une thromboprophylaxie [18]. Une évaluation de l’incidence globale de la MTV en milieu médical est complexe compte tenu de l’hétérogénéité des études réalisées, en particulier vis-à-vis des critères d’inclusion sélectionnés (notamment nature et sévérité des AMA), des critères diagnostiques utilisés (cliniques versus paracliniques, phlébographie versus écho-doppler) ou des FDR intrinsèques retenus et évalués. Nous présenterons donc de fac¸on successive les données de la littérature concernant les différentes AMA associées à un risque thromboembolique veineux significatif. Nous ne traiterons pas des affections chroniques constituant un terrain à risque et n’évoquerons pas en particulier la pathologie cancéreuse, qui a déjà fait l’objet d’une mise au point récente [19]. 2.2. Accident vasculaire cérébral L’incidence de survenue d’une thrombose veineuse profonde (TVP) asymptomatique dans les suites d’un accident vasculaire cérébral (AVC) avec hémiplégie est très élevée en l’absence de prophylaxie, évaluée à 55 % en moyenne dans le membre paralysé dans les deux semaines suivant l’accident [20]. L’apparition d’une sidération motrice de membre augmente, ainsi, le risque thromboembolique veineux d’un facteur 13 [10] et constitue donc une situation à risque majeur, comparable aux chirurgies de la hanche ou du genou [21]. Une revue de la littérature récente s’est penchée sur les caractéristiques de la MTV suivant un AVC [22] : deux tiers des TVP sont distales et sont le plus souvent asymptomatiques. Elles concernent surtout le membre paralysé, le risque de TVP apparaissant globalement corrélé au degré de paralysie du membre inférieur. Le pic d’incidence se situe entre le deuxième et le septième jour suivant l’AVC. Certains facteurs augmentent considérablement le risque thromboembolique, particulièrement l’âge élevé, l’existence d’une fibrillation auriculaire ou d’une insuffisance cardiaque. L’incidence de l’embolie pulmonaire (EP) symptomatique en l’absence de prophylaxie varie considérablement suivant les études (de 0,8 à 13 % dans les deux semaines suivant l’AVC), ce qui témoigne des difficultés diagnostiques que pose l’EP chez le patient hémiplégique. Une étude réalisant un dépistage systématique de l’EP par scintigraphie pulmonaire dans

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Tableau 1 Affections médicales aiguës en milieu hospitalier et risque de thromboses veineuses profondes Pathologie

Données épidémiologiques (pays occidentaux)

Risque thromboembolique veineux

Mécanismes physiopathologiques suspectés

Accident vasculaire cérébral

150–200 pour 100 000 (IcC)

TVP : 55 % (IcI) EP : 0,8 à 13 % (IcC)

Infarctus du myocarde

450 pour 100 000 homme > 55 ans (IcC)

TVP : 25 % (IcI) EP : 4 % (IcC)

Insuffisance cardiaque aiguë

2 à 60 pour 1000 (IcC)

Méconnu

Exacerbations de BPCO

BPCO : 7 % (PvC) 2 exacerbations/an Pneumopathie aiguë communautaire de l’adulte : 10–16 pour 1000 (IcC) Méconnues

TVP : 28 % (IcI)

Stase veineuse Hypercoagulabilité Dysfonction endothéliale Activation plaquettaire Hypercoagulabilité Dysfonction endothéliale Activation plaquettaire Stase veineuse Hypercoagulabilité Dysfonction endothéliale Activation plaquettaire Inflammation Systèmes neuroendocrines Poids des FDR associés

Méconnues chez l’adulte (SN secondaires)

TVR : 25 % (PvC) EP : 5 % (PvC)

Infection aiguë

Hospitalisation en reanimation

Syndrome néphrotique

Méconnu

TVP 13–31 % (PvI)

Hypercoagulabilité Dysfonction endothéliale Inflammation Multiples FDR associés Thérapeutiques invasives Stase veineuse Thrombophilies acquises Hypercoagulabilité circulante et intraglomérulaire Hypofibrinolyse Hyperagrégabilité plaquettaire

BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive ; EP : embolie pulmonaire ; FDR : facteur de risque thromboembolique veineux ; IcC : incidence en dépistage clinique ; IcI : incidence en dépistage infraclinique ; PvC : prévalence en dépistage clinique ; PvI : prévalence en dépistage infraclinique ; SN : syndrome néphrotique ; TVP : thrombose veineuse profonde ; TVR : thrombose des veines rénales.

les dix jours suivant un AVC hémorragique a mis en évidence jusqu’à 39 % d’évènements emboliques asymptomatiques [23]. L’EP serait à l’origine de 13 à 25 % de la mortalité précoce suivant un AVC [5,20], particulièrement entre la deuxième et la quatrième semaine après l’accident [22]. Son incidence semble également corrélée au degré de paralysie du membre inférieur, mais un évènement embolique peut aussi survenir après récupération du déficit moteur. Le pronostic de l’EP apparaît plus défavorable chez le patient hémiplégique : l’EP se présente, en effet, plus fréquemment sous forme de mort subite et est souvent à l’origine d’un handicap cardiorespiratoire marqué, affectant la phase de rééducation et susceptible de compromettre les chances de récupération fonctionnelle. La stase veineuse dans le membre paralysé est probablement le facteur physiopathologique prépondérant à l’origine des manifestations thrombotiques veineuses suivant un AVC. 2.3. Infarctus du myocarde Des données épidémiologiques anciennes font état dans le postinfarctus d’un risque accru de survenue de TVP asymptomatique (incidence évaluée à environ 25 %), et d’EP symptomatique (incidence évaluée à 4 %) en l’absence de tout traitement antithrombotique [24]. L’avènement d’une prise en charge « agressive » du syndrome coronaire aigu, associant antiagrégants, anticoagulants et fibrinolytiques, a considérablement

réduit ce risque et a relégué la prévention de la MTV au second plan dans la stratégie thérapeutique. L’incidence de la MTV chez les patients bénéficiant d’une prise en charge optimale de l’infarctus du myocarde est encore mal évaluée [25]. Le risque thromboembolique veineux chez ces patients doit, cependant, être gardé en mémoire, notamment lors de contre-indications aux traitements antithrombotiques [20]. 2.4. Insuffisance cardiaque aiguë L’insuffisance cardiaque (IC) est depuis longtemps considérée comme favorisant la survenue d’ETV [26]. Plusieurs études menées chez des patients pris en charge en milieu hospitalier ou ambulatoire ont, ainsi, identifié l’insuffisance cardiaque chronique (ICC) comme un FDR intermédiaire de MTV (OR entre 1,8 et 3) [14,27,28] et notamment d’EP [29]. Plusieurs études autopsiques mettent, de plus, en évidence une augmentation significative de la prévalence de l’EP parmi les patients décédés d’IC [15,30]. La fréquence de la MTV au cours de l’IC varie, cependant, considérablement dans la littérature, avec une incidence évaluée entre 10 et 59 % pour la TVP et entre 1 et 39 % pour l’EP [29,31]. . . L’écart entre ces résultats pouvant être expliqué par le mode de dépistage utilisé, mais aussi par le degré d’IC des patients inclus dans ces études. De solides arguments permettent, en effet, d’affirmer que le risque thromboembolique veineux croît avec le stade clinique d’IC [8,32],

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de fac¸on inversement proportionnelle à la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) [27,33]. Le risque semble également influencé par la nature de la cardiopathie : il pourrait être, ainsi, plus élevé au cours des cardiopathies rhumatismales ou ischémiques et plus faible dans les atteintes congénitales ou dégénératives [15]. D’autres facteurs, enfin, sont susceptibles d’augmenter ce risque : existence d’une fibrillation auriculaire ou d’un thrombus pariétal ventriculaire droit [15], jeune âge, sexe féminin, et ethnie afroaméricaine [29]. Peu d’études se sont intéressées, en revanche, au risque thromboembolique veineux associé aux décompensations cardiaque aiguës. Plusieurs études de prophylaxie de la MTV par antivitamines K ou par héparine chez les patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque aiguë (ICA) ont, cependant, montré il y a plusieurs dizaines d’années l’existence d’une réduction significative de la mortalité dans le groupe traité [34,35]. Dans une analyse en sous-groupes de l’essai Medenox [36], testant l’efficacité d’une héparine de bas poids moléculaire dans la prévention des ETV au sein d’une population médicale hospitalière, le risque thromboembolique veineux ne paraissait pourtant pas significativement augmenté 14 jours après un épisode d’ICA. Ce risque devenait presque significatif si l’on ne tenait compte que des décompensations sévères chez les patients non traités. Il faut, cependant, souligner que la puissance de cette analyse en sous-groupe restait relativement faible. L’ICA est actuellement considérée dans les recommandations internationales comme un FDR majeur de MTV [5]. Plusieurs pistes physiopathologiques peuvent expliquer l’association entre IC et MTV. L’élément prépondérant est probablement la stase sanguine intracardiaque liée à la baisse du débit cardiaque, à l’hypocinésie et à la dilatation des parois ventriculaires, favorisant la formation d’un thrombus dans les cavités droites. Plus la FEVG va s’altérer et plus la stase intracardiaque va s’aggraver, mais également plus la tolérance à l’effort du patient et donc la déambulation vont diminuer [27]. Il existe, en outre, au cours de l’IC un état d’hypercoagulabilité, caractérisé par l’élévation des taux circulants de différents marqueurs d’activation de la coagulation plasmatique (DDimères, complexes thrombine–antithrombine, fibrinogène, facteur VII. . .), s’accentuant avec la baisse de la FEVG. Il s’y associe également un certain degré de dysfonction endothéliale (élévation du vWF, de la thrombomoduline. . .) [37,38] Au stade d’ICC stable, l’activation plaquettaire reste modérée alors qu’elle devient beaucoup plus marquée au cours de l’ICA ou de l’ICC sévère. Les systèmes neuroendocrines (système rénine-angiotensine et système sympathique) et la réaction inflammatoire, en régulant les anomalies hémodynamiques et l’état d’hypercoagulabilité associés à l’IC, pourraient également favoriser les manifestations thromboemboliques veineuses. 2.5. Décompensation aiguë de bronchopneumopathie chronique obstructive Il y a peu de données précises concernant l’épidémiologie de la MTV chez les patients hospitalisés pour une décompensation aiguë de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) : la prévalence des manifestations thrombotiques vei-

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neuses est globalement estimée entre 8 et 30 % et il s’agit préférentiellement de TVP distales asymptomatiques [39–41]. Une étude menée chez des patients hospitalisés pour décompensation sévère de BPCO a permis d’évaluer l’incidence de la TVP en cours d’hospitalisation à 28 % par dépistage phlébographique. Une autre étude rapporte une prévalence de l’EP d’environ 3 % le jour de l’admission pour décompensation aiguë de BPCO [42]. L’EP serait à l’origine d’environ 30 % des insuffisances respiratoires mortelles chez des patients hospitalisés en service de soins intensifs pneumologiques [43]. Il est, cependant, souvent difficile de discriminer les ETV favorisés par l’insuffisance respiratoire aiguë des ETV à l’origine de l’insuffisance respiratoire. L’EP pourrait, ainsi, représenter jusqu’à 30 % des causes d’exacerbations aiguës de BPCO d’origine non-infectieuse [44]. Les manifestations thromboemboliques veineuses sont ici probablement favorisées par la multiplicité des FDR présentés par ces patients : âge élevé, obésité, insuffisance veineuse chronique [8]. . . S’y associe dans les cas les plus sévères le risque propre lié à la ventilation mécanique, à la sédation et à l’insuffisance cardiaque droite. L’insuffisance respiratoire aiguë est considérée comme un FDR thromboembolique veineux majeur dans les conférences de consensus récentes [5]. On notera que quelques études font, en revanche, mention d’un effet protecteur de l’insuffisance respiratoire chronique sur le risque thromboembolique veineux [36]. 2.6. Infection aiguë De nombreuses situations cliniques voient s’associer un foyer infectieux localisé à une thrombose veineuse de contiguité : on peut notamment citer l’exemple du syndrome de Lemierre, où une cellulite faciale se complique d’une thrombose septique locale. Il est, cependant, plus difficile d’affirmer que la survenue d’une infection systémique constitue un FDR thromboembolique veineux significatif. Des arguments indirects nous sont fournis par diverses études cas témoin étudiant la prévalence de certaines infections dans la population médicale atteinte de MTV : la sérologie immunoglobuline G Chlamydiae pneumoniae et la sérologie CMV semblent, ainsi, plus fréquemment positives chez les patients ayant présenté un ETV [45] même si certains résultats apparaissent divergents en fonction du type d’ETV et des populations étudiées [46,47]. Il existe, par ailleurs, une élévation des marqueurs d’hypercoagulabilité au cours des infections sévères susceptible de favoriser le processus thromboembolique veineux. Une étude cas témoin franc¸aise, consacrée à l’analyse des FDR en milieu ambulatoire (Sirius Study) [14], a rapporté une association significative entre infection active et MTV (OR 1,95). Dans une analyse en sous-groupes de l’essai Medenox, le risque relatif de survenue d’un ETV dans les suites d’une infection était également élevé de manière significative, évalué à 1,47 pour l’ensemble de la population [36]. Le type d’infection associé au risque thromboembolique veineux n’était, cependant, pas précisé dans ces deux études. D’autres résultats convaincants sont issus d’une étude cas témoin présentant l’évolution du risque thromboembolique veineux dans les suites d’une patho-

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logie infectieuse aiguë, urinaire ou respiratoire [48] : ce risque apparaît doubler dans les premières semaines, puis décroître progressivement pour revenir à l’état basal un an après l’épisode infectieux. Cet effet semble persister après ajustement sur l’âge, la saison ou l’existence d’un cancer et est indépendant du type d’infection. Une autre étude rapporte une prévalence élevée des EP mortelles dans les suites d’une infection aiguë, estimée à 0,5 % dans les deux mois suivant l’infection, surtout en cas d’atteinte pulmonaire, cutanée ou des tissus mous [49,50]. La survenue d’une infection aiguë est, ainsi, reconnue comme un FDR thromboembolique veineux significatif dans les conférences de consensus les plus récentes [5]. 2.7. Affection médicale aiguë nécessitant une hospitalisation en service de réanimation médicale Les patients hospitalisés en service de réanimation médicale semblent présenter un risque thromboembolique veineux moyen à élevé. Plusieurs revues de la littérature se sont intéressées de fac¸on spécifique à l’épidémiologie de la MTV chez ces patients [51–54]. La prévalence moyenne du diagnostic de TVP par écho-doppler systématique à l’admission dans un service de réanimation est d’environ 5 %. L’incidence de survenue d’une TVP asymptomatique en cours d’hospitalisation, en l’absence de prophylaxie, est évaluée entre 13 à 31 %. Une EP est découverte dans 13 % des autopsies de patients décédés en secteur de soins intensifs. Dans 70 % des cas, le diagnostic n’est pas évoqué avant le décès. Malgré l’utilisation d’une thromboprophylaxie adaptée, l’incidence de la MTV en service de réanimation reste élevée, estimée entre 7 et 30 %, même si son évaluation reste complexe (populations hétérogènes, modalités de prophylaxie variables). La survenue d’un ETV prolonge la durée de ventilation mécanique, de séjour en service de réanimation et d’hospitalisation, et doit donc être considérée comme un élément de mauvais pronostic. La fréquence particulière de la MTV en service de réanimation s’explique avant tout par la prévalence élevée des FDR dans cette population [53] : insuffisance cardiaque ou respiratoire, sepsis, alitement, AVC. . . Ce risque est encore accru par les différentes thérapeutiques invasives entreprises : sédation, curarisation, ventilation mécanique, substances vasopressives, transfusion plaquettaire, cathéter veineux central, monitorage invasif, chirurgie, hémodialyse. . . Des thrombophilies acquises (déficits en protéine C, protéine S ou antithrombine, résistance à la protéine C activée, élévation du PAI-1. . .) ont, par ailleurs, été décrites chez ces malades. 2.8. Pathologie rhumatologique aiguë Peu d’études ont évalué de fac¸on indépendante le risque thromboembolique veineux associé aux affections rhumatologiques aiguës. Dans une analyse en sous-groupes issue de l’essai contrôlé randomisé Medenox [36], l’existence d’une pathologie rhumatologique aiguë n’augmentait pas de fac¸on significative le risque de présenter un ETV 14 jours après une hospitalisation en service médical. De même dans la Sirius Study [14], il n’était pas mis en évidence d’association significative entre

affection rhumatologique aiguë et MTV. Au cours de la polyarthrite rhumatoïde (PR), la prévalence de la MTV (évaluée entre 2 à 3,8 %) et son incidence (estimée à 0,3 % par an) [55,56] ne semblent pas significativement élevées par rapport à la population générale, sauf dans une étude portant sur une petite cohorte de patients relativement sélectionnés (atteinte extra-articulaire prédominante) [57]. Il pourrait, cependant, exister une tendance à l’augmentation du risque thromboembolique chez les patients présentant des anticorps anticardiolipine [58]. Ces données sont également vérifiées en milieu chirurgical : la fréquence des ETV n’apparaît, ainsi, pas significativement élevée après chirurgie orthopédique chez les patients atteints de PR par rapport aux patients arthrosiques [59,60], même si l’hypercoagulabilité circulante paraît quant à elle plus marquée [61]. Concernant les autres rhumatismes inflammatoires, seules quelques observations de complications thrombotiques veineuses, souvent de localisations inhabituelles (veines rétiniennes, cérébrales. . .) [62,63] ont été rapportées. Le syndrome Sapho peut, par ailleurs, rarement se compliquer de thromboses des troncs veineux proximaux des membres supérieurs ou inférieurs, par compression vertébrale [64,65]. On peut, cependant, intuitivement penser que la stase veineuse induite par l’alitement souvent contemporain des douleurs articulaires peut augmenter transitoirement le risque thromboembolique veineux [66]. Les trois grands essais prospectifs de prévention de la MTV en milieu médical par HBPM ont d’ailleurs considéré l’existence d’une affection rhumatologique aiguë comme un FDR transitoire significatif [67–69]. 2.9. Syndrome néphrotique Le syndrome néphrotique (SN), défini chez l’adulte par une protéinurie supérieure à 3 g par 24 heures et une hypoalbuminémie inférieure à 30 g/l, se complique fréquemment de manifestations thromboemboliques veineuses [70,71]. La thrombose des veines rénales (TVR), souvent asymptomatique, complique ainsi près d’un quart des SN toutes étiologies confondues [72]. Le risque apparaît plus marqué au cours des glomérulonéphrites extramembraneuses, suggérant un rôle de l’affection sous-jacente dans le processus thrombotique. Ce risque paraît également corrélé à l’âge et au degré d’hypoalbuminémie. Parmi les SN, 5 % se compliquent d’EP symptomatique et il existe dans 15 à 20 % des cas de SN des signes d’EP sur la scintigraphie pulmonaire réalisée de manière systématique. La fréquence de l’EP est encore plus élevée en cas de TVR chronique, évaluée entre 33 à 50 %. Plusieurs mécanismes physiopathologiques ont été évoqués pour expliquer le surcroît de risque thromboembolique veineux au cours du SN [70,71]. Il existe en premier lieu un état d’hypercoagulabilité circulant, caractérisé par l’élévation des taux plasmatiques de certains facteurs de la coagulation (comme le facteur V, le facteur VIII, le facteur von Willebrand ou le fibrinogène) et par la diminution des taux circulants en divers inhibiteurs de la coagulation (comme l’antithrombine, et de fac¸on moins nette la protéine S libre, la protéine C). Cela semble lié à la perte urinaire en protéines de petit poids moléculaire, non suffisamment compensée par l’augmentation de leur

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synthèse, et à l’opposé par la production accrue des facteurs de haut poids moléculaire, largement supérieure à leur déperdition urinaire. Des anomalies de la fibrinolyse et de l’agrégation plaquettaire ont, en outre, été rapportées, de même qu’une activation intraglomérulaire de la coagulation favorisant la thrombose intraglomérulaire (notamment au cours de la glomérulonéphrite poststreptococcique, diabétique et lupique). Cette particularité pourrait expliquer le tropisme spécifique de la MTV pour les veines rénales au cours du SN. 3. Affections médicales aiguës prises en charge en milieu ambulatoire La plupart des études évaluant le risque thromboembolique veineux chez les patients atteints d’AMA ont été menées en milieu hospitalier. Une proportion élevée d’ETV surviennent pourtant dans la population ambulatoire [26,73]. Dans une étude franc¸aise menée en Bretagne occidentale et portant sur plus de 342 000 sujets, 63 % des cas de MTV affectaient, ainsi, des patients ambulatoires, et le diagnostic d’ETV était réalisé dans 50 % des cas par des angiologues libéraux [2]. Le risque thromboembolique veineux absolu reste, toutefois, plus élevé chez les patients hospitalisés [74] et l’hospitalisation en elle-même est considérée comme un FDR majeur et indépendant de MTV [75]. Ainsi, dans la vaste étude cas témoin américaine rapportée par Heit et al. [76,77], l’hospitalisation pour une AMA augmentaitelle le risque thromboembolique veineux d’un facteur huit après ajustement pour les principaux FDR connus. Il faut, de plus, remarquer d’emblée que plus d’un tiers des patients ambulatoires présentant un ETV ont été hospitalisés dans les trois mois précédents, et que près d’un quart d’entre eux ont bénéficié d’une chirurgie récente. Il s’agit dans ce cas souvent d’un oubli de prescription de prophylaxie de la MTV durant l’hospitalisation [73]. Le risque thromboembolique veineux est donc loin d’être négligeable en milieu ambulatoire comme l’attestent plusieurs études épidémiologiques évaluant l’incidence et la prévalence de la MTV dans cette population [2,3,75]. Plusieurs études se sont consacrées spécifiquement à l’analyse des FDR en milieu extrahospitalier [3,14,28,73,74,76,78] et ont montré que les patients ambulatoires atteints de MTV présentent fréquemment des FDR majeurs (chirurgie récente, néoplasie, infection récente. . .) et qu’ils cumulent souvent plusieurs FDR permanents et transitoires. Ils apparaissent, cependant, globalement plus jeunes que les patients hospitalisés et atteints d’un moins grand nombre de comorbidités, particulièrement d’affections cardiovasculaires [4,26,73,79]. On retrouve également plus fréquemment dans la population ambulatoire l’existence d’un antécédent thromboembolique veineux personnel ou la prise d’un traitement hormonal. L’AMA déclenchant l’ETV apparaît souvent de poids thrombotique moins élevé que dans la population hospitalière et l’alitement occasionné y est souvent moins prolongé [11]. On peut, cependant, remarquer que l’existence de structures de soins à domicile permet désormais la prise en charge ambulatoire de pathologies sévères jusqu’ici traitées à l’hôpital [11], et que le risque thromboembolique veineux de ces patients est sans doute notablement élevé.

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Les modèles pathogéniques de la MTV établis pour les malades hospitalisés devraient pouvoir être extrapolés aux malades pris en charge à domicile, même si aucune étude ne permet encore de l’affirmer avec certitude. Compte tenu de l’efficacité bien démontrée des mesures préventives de la MTV en milieu hospitalier [80], il semble donc impératif d’évaluer le rapport bénéfice–risque de la thromboprophylaxie chez les patients atteints d’AMA en milieu ambulatoire, probablement en ciblant avant tout les patients sortant d’hospitalisation, les patients présentant le plus de FDR ou certains FDR majeurs comme la maladie cancéreuse. 4. Affections médicales aiguës prises en charge plus spécifiquement par l’interniste 4.1. Maladies inflammatoires chroniques intestinales Il est maintenant bien établi que les maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI), maladie de Crohn (MC) ou rectocolite hémorragique (RCH), s’associent à un risque thromboembolique veineux significatif. La prévalence globale de la MTV au cours de ces affections serait d’environ 6 % (évalué entre 1,2 et 6,7 %) [55]. Une étude de cohorte rétrospective canadienne cumulant un suivi d’environ 20 000 patients–année sur 13 ans [81] a estimé l’incidence globale de la MTV au cours des MICI à 0,45 % par an, avec des chiffres un peu plus élevés pour la RCH (0,5 % par an) par rapport à la MC (0,42 % par an). Le risque thromboembolique veineux semblait, ainsi, multiplié par 3,5 après ajustement sur l’âge avec un risque cette fois légèrement supérieur pour la MC par rapport à la RCH. La prévalence de la MTV au cours des MICI augmente significativement avec l’âge, mais de fac¸on plus marquée que dans la population générale, suggérant un effet synergique [55]. Il ne semble pas exister de différence significative entre les sexes, même si la prévalence de la MTV augmente plus rapidement avec l’âge chez les femmes. Il faut noter qu’une EP est retrouvée à l’autopsie dans près de 40 % des cas de décès au cours de ces affections et que la mortalité après un ETV est élevée, approchant 22 % à deux ans. Dans la série canadienne précédemment citée [81], la RCH se compliquait plus fréquemment d’EP que la MC ; cette différence n’était, cependant, plus significative après ajustement sur l’âge. Si la TVP des membres inférieurs et l’EP restent l’expression la plus habituelle de la MTV au cours des MICI, des localisations thrombotiques plus rares ont également été décrites (veines des membres supérieurs [82], sinus cérébraux [83], veine porte [84], veines sus-hépatiques [85], veine rénale [86]. . .) (Tableau 2). Il existe un faisceau d’arguments pour penser que le risque thromboembolique veineux est surtout élevé en période inflammatoire au cours des MICI. L’incidence de la MTV apparaît, ainsi, particulièrement élevée pendant les cinq premières années suivant le diagnostic [55]. Dans une étude, l’affection digestive apparaît en cours d’évolution dans 60 à 80 % des cas au moment de survenue de l’ETV (activité de la maladie ou complication : abcès, fistule, sténose) et s’associe alors fréquemment à un syndrome inflammatoire biologique [82]. Il semble exister dans cette même étude une corrélation entre la fréquence des complications thrombotiques et l’extension intestinale de

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Tableau 2 Affections médicales aiguës prises en charge plus spécifiquement par l’interniste et risque de thromboses veineuses profondes Pathologie

Incidence (pays occidentaux)

Risque de MTV (dépistage clinique)

Mécanismes physiopathologiques suspectés

MICI

MC : 0,5 à 50 pour 100 000 RCH : 2 à 15 pour 100 000

MC : 0,5 % (Pv) RCH : 6 % (Pv)

Lupus érythémateux systémique

5 pour 100 000

1 % (Ic)

Maladie de Wegener

2 à 12 pour 1 000 000

7 % (Ic)

Maladie de Churg-Strauss

1 à 3 pour 1 000 000

2 % (Pv)

Maladie de Behc¸et

0,1 à 0,6 pour 100 000

10–45 % (Pv)

Maladie de Buerger

8 pour 100 000

40 % (Pv des TVS)

Polychondrite atrophiante HPN

3,5 pour 1 000 000 Rare

24 % (Pv) 15 % (Pv)

Hypercoagulabilité Dysfonction endothéliale Activation plaquettaire Hypofibrinolyse Inflammation CD40-ligand et endotoxine APL Syndrome néphrotique Corticothérapie Dysfonction endothéliale Hypercoagulabilité Vascularite veineuse Dysfonction endothéliale Hypercoagulabilité Hypofibrinolyse Syndrome néphrotique Corticothérapie Hyperéosinophilie Vascularite Vascularite veineuse Dysfonction endothéliale Hypercoagulabilité Hypofibrinolyse APL, homocystéine Dysfonction endothéliale Inflammation Méconnue Hémolyse Interactions membrane complément Mécanisme rhéologique lié à la taille du clone HPN

10 % (Pv)

APL : anticorps antiphospholipides ; FDR : facteur de risque thromboembolique veineux ; HPN : hémoglobinurie paroxystique nocturne ; Ic : incidence ; MC : maladie de Crohn ; MICI : maladies inflammatoires chroniques de l’intestin ; MTV : maladie thromboembolique veineuse ; Pv : prévalence ; RCH : rectocolite hémorragique ; TVS : thrombose veineuse superficielle.

l’affection. Un FDR transitoire supplémentaire est, cependant, fréquemment observé lors du diagnostic de MTV au cours d’une poussée inflammatoire de MICI. Cette poussée évolutive peut, par ailleurs, rendre nécessaire une intervention chirurgicale ou une hospitalisation, augmentant par elles-mêmes le risque thromboembolique [81]. L’existence de localisations thrombotiques veineuses inhabituelles au cours des MICI suggère la participation d’un mécanisme autre que la stase veineuse dans l’initiation du phénomène thromboembolique. De nombreux arguments d’ordre physiopathologique plaident pour un rôle spécifique de l’inflammation dans les complications thrombotiques : de nombreuses études ont, ainsi, décrit lors des poussées de MICI un état d’hypercoagulabilité circulant, associé à un certain degré de dysfonction endothéliale, d’activation plaquettaire et d’hypofibrinolyse [55,81]. Cet état prothrombotique existe à un moindre degré en phase quiescente de la maladie. Un rôle central semble être joué par le CD40-ligand et par l’endotoxine [87]. Une diminution de cet état d’hypercoagulabilité est rapportée après administration d’infliximab lors de poussées sévères de MC ; le rôle de cette thérapeutique dans la prévention des ETV associés aux MICI reste, cependant, à évaluer. Une riche litté-

rature s’est également consacrée à l’étude des anomalies de la coagulation, congénitales ou acquises, au cours des MICI. Si le risque thromboembolique veineux paraît augmenté lors de l’association à un facteur V Leiden [81], le rôle de ces anomalies dans le processus thrombotique veineux paraît, cependant, assez modeste [88]. 4.2. Lupus érythémateux systémique et syndrome des anticorps antiphospholipides De nombreuses publications font état d’une fréquence élevée de complications thromboemboliques, artérielles et veineuses, au cours de l’évolution du lupus érythémateux systémique (LES), avec une incidence globale évaluée entre 7,2 et 12 % [89,90]. Ces évènements thrombotiques sont à l’origine d’une mortalité significative, essentiellement cardio et cérébrovasculaire, qui représenterait jusqu’à 27 % de la mortalité totale au cours de cette maladie [91]. La prévalence spécifique de la MTV au cours du LES est estimée en moyenne à 10 % (3 à 16 %) vingt ans après le diagnostic de la maladie [91]. L’incidence annuelle de survenue d’un premier ETV au cours du lupus varie entre 5,1 à 13 pour 1000 [89] et est donc cinq à dix fois supérieure à celle

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de la population générale. La MTV apparaît volontiers récidivante (un tiers des cas) [92]. Son expression la plus fréquente reste la TVP des membres inférieurs, plus ou moins associée à une EP, mais des localisations plus rares peuvent survenir (thromboses veineuses cérébrales, atteintes de la veine centrale de la rétine, syndrome de Budd-Chiari, thromboses veineuses sous-clavières. . .). Aucune étude épidémiologique ne permet à ce jour d’affirmer de fac¸on certaine que le risque thromboembolique veineux est surtout marqué au cours des poussées inflammatoires de la maladie lupique. En effet, aucune étude prospective ou rétrospective n’a évalué de manière systématique l’activité du lupus au moment précis de l’ETV. Des scores d’activité du LES ont été recueillis dans diverses cohortes, mais l’évaluation était le plus souvent réalisée à distance de l’ETV et ne permettait donc pas de juger de l’activité de la maladie au moment exact de la thrombose veineuse. Les données apparaissent, ainsi, très divergentes : dans certaines études, ces scores d’activité ne sont pas corrélés au risque thromboembolique veineux [89,92,93]. Dans d’autres études, à l’inverse, ces scores apparaissent plus élevés chez les patients atteints de MTV et sont même parfois prédictifs du risque thrombotique [94]. Comme cela est noté pour les MICI, le risque thromboembolique veineux est, par ailleurs, plus élevé pendant les premières années et surtout les premiers mois suivant le diagnostic de lupus, puis s’atténue ensuite progressivement [92,95]. Une corrélation significative a également été mise en évidence entre le risque thromboembolique veineux et la dose de corticoïdes utilisée qui pourrait en partie refléter le degré d’activité de la maladie lupique. La présence d’anticorps antiphospholipides (APL) dans le sang circulant des patients porteurs d’un LES est fréquemment rapportée. Il s’agit surtout d’anticorps anticardiolipines (aCL) et d’anticoagulant circulant de type lupique (LAC). La prévalence des aCL au cours du LES est, ainsi, évaluée en moyenne à 44 % et celle de LAC à 34 % [92,96], avec une variabilité entre études s’expliquant par l’hétérogénéité des critères diagnostiques retenus et par la sensibilité des techniques utilisées. Dans une méta-analyse d’études essentiellement rétrospectives, le risque thromboembolique veineux apparaissait augmenté de 5,6 fois en moyenne chez un patient lupique présentant un LAC et de 2,2 fois en moyenne chez un patient lupique porteur d’un aCL [97]. Dans une étude prospective plus récente [89], l’existence d’un aCL au cours du LES n’apparaissait, cependant, plus significativement corrélée au risque thromboembolique veineux après ajustement sur l’existence d’un LAC, alors que le LAC restait, en revanche, un FDR indépendant significatif de MTV. L’association d’un LAC à un anticorps antiprothrombine de type immunoglobuline G potentialiserait, en outre, fortement le risque thromboembolique veineux (OR 19) [98]. Les APL peuvent également être découverts en dehors du LES, soit en association à certaines situations cliniques (maladies auto-immunes, néoplasies, médicaments, infections. . .), soit de fac¸on isolée. La présence d’APL sans LES semble également fortement corrélée au risque thromboembolique veineux. Plusieurs méta-analyses récentes [99,100] ont, ainsi, montré que le LAC pouvait être considéré comme un FDR majeur de MTV (OR moyen 11,1). Les résultats apparaissent plus diver-

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gents pour les aCL, avec notamment deux études prospectives négatives [98,101,102], mais la plupart des études ne font pas mention de l’isotype d’aCL, de son taux, de sa persistance, de son association à l’anticorps anti-␤2-GPI, et de l’existence d’une pathologie sous-jacente [99]. Certaines anomalies de la coagulation (mutation Leiden du facteur V ou mutation G20210A de la prothrombine) peuvent, par ailleurs, potentialiser significativement le risque thromboembolique veineux associé aux APL [92]. 4.3. Maladie de Wegener L’incidence de la MTV au cours de la maladie de Wegener (MW) est notablement élevée et probablement sous-estimée. Dans un essai thérapeutique récent (Wegener’s Granulomatosis Etanercept Trial) [56] évaluant l’efficacité de l’etanercept en association au traitement immunosuppresseur conventionnel chez des patients présentant une poussée sévère de MW, l’incidence de survenue d’ETV cliniques dans les deux groupes confondus a été évaluée à 7 % par an, donc 22 fois plus élevée que dans la population générale. Ces résultats reflètent principalement le risque thromboembolique veineux associé aux périodes d’activité de la MW : en effet, 81 % des patients atteints d’ETV dans cette étude présentaient une poussée récente de leur maladie. La survenue d’un ETV était associée à une forte morbidité et au risque de rejet de greffe rénale. Plusieurs FDR potentialisant le risque thromboembolique veineux au cours de la MW ont été décrits : l’âge, le syndrome néphrotique, les anomalies génétiques de la coagulation, le traitement corticoïde à forte dose, l’immobilisation en phase d’activité. Les APL ont une prévalence moyenne de 17 % au cours de la MW (11,5–23 %). Il s’agit souvent de LAC, mais leur titre est souvent faible et non-persistant et ils sont rarement associés à l’anticorps anti-␤2-GPI [103]. Il n’a pas été retrouvé d’association significative entre APL et ETV cliniques dans deux séries de MW [103]. Les APL devraient donc peut-être être considérés plus comme un épiphénomène (résultant par exemple de l’exposition d’antigènes du sous-endothélium suite à l’atteinte inflammatoire de l’endothélium) et non comme des anticorps réellement pathogènes au cours de la MW. Des cas de thrombose veineuse cérébrale [104,105], d’occlusion de la veine centrale de la rétine [106], de thrombose portale, ou de thrombose des veines des membres supérieurs ont été rapportés au cours de la MW [107]. Il s’agit là d’arguments en faveur du rôle spécifique de la vascularite dans le risque thromboembolique veineux lié à cette affection. Plusieurs pistes physiopathologiques ont été avancées pour tenter de l’expliquer : il pourrait, ainsi, exister en phase active de la MW une atteinte inflammatoire spécifique de l’endothélium des veines de moyen et de gros calibre, en plus de l’atteinte des petits vaisseaux, exposant le sous-endothélium thrombogénique et favorisant le phénomène thrombotique local. Il pourrait aussi s’agir d’une activation endothéliale sans réelle lésion associée, ce que suggère l’élévation des taux plasmatiques de thrombomoduline [108]. Cette dysfonction endothéliale pourrait être favorisée par la réaction inflammatoire (et notamment par le TNF circulant) ou directement par les anticorps anti-PR3 [107]. Le rôle de

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l’hypercoagulabilité circulante et de l’hypofibrinolyse retrouvées en phase d’activité de la MW reste, par ailleurs, à préciser [109]. Un cas de thrombose des sinus cérébraux liée à l’extension intracrânienne de lésions granulomateuses issues de la cavité nasale a également été rapporté.

boliques veineuses de la MB. La diminution de synthèse de prostacycline a été également incriminée. L’hypercoagulabilité est également marquée au cours des poussées, et s’associe à certain degré d’hypofibrinolyse [114]. Certains auteurs suggèrent un rôle potentialisant possible des APL et de l’hyperhomocystéinémie [122,123].

4.4. Maladie de Churg-Strauss 4.6. Maladie de Buerger La fréquence de la MTV apparaît plutôt faible au cours de la maladie de Churg-Strauss (MCS). Sa prévalence est, ainsi, évaluée à 2 % dans le série de Guillevain et al. [110]. Quelques cas de TVP des membres inférieurs, le plus souvent proximales et compliquées d’EP sévères ont, cependant, été rapportés dans la littérature [111–113], et sont généralement contemporaines de poussées de la vascularite. La physiopathologie des ETV au cours de la MCS pourrait faire intervenir l’hyperéosinophilie sanguine, notamment par le biais d’une interaction entre la protéine cationique éosinophile et le facteur XII, à l’origine d’une initiation de la voie intrinsèque de la coagulation [110,111]. 4.5. Maladie de Beh¸cet Environ 20 à 30% des cas de maladie de Behc¸et (MB) semblent se compliquer de thromboses veineuses, superficielles ou profondes [114]. L’atteinte veineuse apparaît plus fréquente que l’atteinte artérielle dans les différentes séries de la littérature [115–118]. La MTV survient avec prédilection chez les hommes [114,116], généralement dans les dix premières années suivant le diagnostic [119], et peut être inaugurale. Les ETV sont souvent récidivants, multifocaux, et s’accompagnent volontiers d’un syndrome fébrile et inflammatoire marqué. Les thromboses veineuses superficielles (TVS) sont considérées comme l’une des atteintes vasculaires les plus fréquentes (entre 6 et 50 % des cas) dans la MB [114]. Elles surviennent surtout aux membres inférieurs et sont souvent fugaces et migratrices. On peut en rapprocher les lésions d’érythème noueux étagées sur les trajets veineux et l’hypersensibilité aux points de ponction qui correspondent en fait à des formes dégradées de thrombose veineuse [141]. Les TVP peuvent atteindre tous les sites veineux, mais touchent avec prédilection les gros troncs veineux (iliofémoraux, cave supérieur ou inférieur) notamment chez l’homme, et certaines localisations plus spécifiques (sinus cérébraux, veines sus-hépatiques, veines péri-occulaires, veines sous-clavières. . .). Leur fréquence est évaluée de 7 à 46 %. Le risque embolique associé est certain, mais plus faible que pour les TVP idiopathiques (10 à 15 % des cas en dépistage clinique), probablement du fait des phénomènes inflammatoires pariétaux [141]. Le syndrome de Hughes-Stovin correspond à l’association d’une thrombose cave à des anévrismes pulmonaires multiples, souvent mortels. Les mécanismes sous-tendant ce tropisme spécifiquement veineux de la MB ne sont que partiellement connus. Un rôle important semble joué par l’atteinte endothéliale liée à la vascularite et notamment aux interactions endothélium–leucocytes–plaquettes en phase active de la maladie [120,121]. Cela constitue un argument majeur pour l’utilisation de corticoïdes lors des manifestations thromboem-

L’artérite de Buerger s’accompagne fréquemment de TVS focales de petite taille, volontiers migratrices, particulièrement en phase active de la maladie (40 % des cas) [124]. L’atteinte veineuse superficielle peut même parfois précéder l’atteinte artérielle. L’incidence des TVP ne paraît pas, en revanche, significativement augmentée. Ces manifestations thrombotiques veineuses apparaissent essentiellement liées à la formation de thrombi intravasculaires inflammatoires occlusifs, l’atteinte de la paroi veineuse apparaissant généralement moins marquée. Plusieurs études montrent l’existence au cours de la maladie de Buerger d’une dysfonction endothéliale marquée dont l’origine n’est pas univoque [124]. 4.7. Polychondrite atrophiante La polychondrite atrophiante peut également se compliquer de manifestations thromboemboliques veineuses, le plus souvent sous la forme de TVS, mais aussi de TVP, parfois récidivantes, associées ou non à des migrations emboliques pulmonaires [125]. Dans une série de 29 patients atteints de PCA, un antécédent de MTV était retrouvé dans 24 % des cas [126]. Les manifestations vasculaires artérielles restent, cependant, plus fréquentes. Quelques observations de PCA révélées par une thrombose veineuse inexpliquée ont été, par ailleurs, rapportées, ainsi que certaines formes associées à des anticorps antiphospholipides [125,127]. Un cas de thrombose de la veine cave supérieure asymptomatique a été également décrit [126]. 4.8. Artérites gigantocellulaires Quelques observations d’EP isolées sans TVP des membres inférieurs ont été rapportées chez des patients présentant des artérites à cellules géantes telles que la maladie de Horton. Il s’agit alors le plus souvent de panartérite pulmonaire se compliquant de thrombose locale [128]. Il n’a pas été démontré, en revanche, d’augmentation spécifique du risque thromboembolique veineux au cours de ces pathologies. 4.9. Drépanocytose Si de nombreuses publications rapportent l’existence d’un état prothrombotique, d’une activation plaquettaire, d’une dysfonction endothéliale et d’une hypofibrinolyse au cours de la drépanocytose [129,130], la MTV n’est pas reconnue comme une complication habituelle de cette affection [131,132]. Une publication récente [133] fait, ainsi, état d’une prévalence identique des TVP en dépistage clinique chez des patients drépanocytaires afroaméricains hospitalisés par rapport à une

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population témoin appariée. Il n’existe pas de données disponibles sur le risque thromboembolique veineux infraclinique dans cette population. En revanche, dans certaines séries autopsiques, une EP est retrouvée dans 25 à 60 % des cas de décès chez les sujets drépanocytaires [134,135]. Dans l’étude précédemment citée [133], la prévalence de l’EP apparaît près de trois fois plus élevée chez les patients drépanocytaires. La fréquence exacte de l’EP est, cependant, complexe à déterminer, car il est souvent difficile de différencier un embol pulmonaire d’une thrombose in situ des artères pulmonaires. L’EP n’est habituellement pas considérée comme une cause de syndrome thoracique aigu (STA) au cours de la drépanocytose et la mise en place d’un traitement anticoagulant lors du STA ne semble pas en améliorer le pronostic [133]. Il a néanmoins été montré que la MTV peut aggraver le pronostic des patients drépanocytaires porteurs d’une hypertension artérielle pulmonaire séquellaire d’un STA [136]. La fréquence de l’EP au cours des symptômes respiratoires chez le patient drépanocytaire n’a, cependant, jamais été bien évaluée et il pourrait être intéressant de rechercher l’EP de fac¸on systématique lors de la survenue d’un STA [133]. 4.10. Hémoglobinurie paroxystique nocturne La MTV est une complication fréquente et sévère de l’hémoglobinurie paroxystique nocturne (HPN). La prévalence des « classiques » manifestations thrombotiques veineuses au cours de l’HPN est extrêmement variable dans la littérature en fonction des populations étudiées ; estimée en moyenne à 15 % (variant de 2,3 à 38,8 %) [137], elle pourrait atteindre 30 % dans les pays occidentaux (Europe, États-Unis). La MTV représente près d’un quart des complications mortelles au cours de cette maladie (et près d’un tiers dans les pays occidentaux). Les ETV touchent avec prédilection les veines hépatiques (40 % des cas) et peuvent être alors se traduire par un syndrome de Budd-Chiari [138]. Il s’agit aussi des localisations thrombotiques associées à la plus forte mortalité (23 % de la mortalité totale au cours de l’HPN). Les thromboses veineuses mésentériques et cérébrales sont également particulièrement fréquentes et sévères ; la TVP des membres inférieurs et l’EP représentent respectivement, 15 et 7 % des manifestations thrombotiques. La taille du clone HPN pourrait, par ailleurs, influencer le risque thromboembolique avec un risque plus élevé en cas de clone de grande taille [139]. Il n’existe pas d’éléments précis dans la littérature permettant d’affirmer que les ETV surviennent plutôt au cours des phases actives de la maladie, mais il semble cependant probable que l’hémolyse joue un rôle central dans ces complications thrombotiques : il faut, en effet, remarquer la fréquence de la MTV au cours d’autres maladies hémolytiques [140]. L’hémoglobine libérée lors des processus d’hémolyse pourrait favoriser l’activation plaquettaire et la cascade de la coagulation plasmatique en diminuant la biodisponibilité du NO [139]. L’hémolyse intravasculaire pourrait, par ailleurs, conduire à l’exposition de membranes procoagulantes favorisant l’activation des processus thrombotiques. Le déficit membranaire en CD59 des clones plaquettaires HPN pourrait, par

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ailleurs, les rendre plus sensibles à l’action du complément, conduisant à la formation de microparticules prothrombotiques. 5. Conclusion Le spectre du risque thrombotique veineux associé aux pathologies médicales aiguës est très large et dépend essentiellement de la nature de l’affection, de sa prise en charge hospitalière ou ambulatoire, et de l’existence d’autres FDR. Ce risque apparaît notablement élevé en milieu hospitalier, où la fréquence de la MTV asymptomatique associée aux AMA est estimée entre 10 et 30 % et la mortalité par ETV entre 5 et 15 % à trois mois. Ce risque apparaît majeur dans les suites d’un accident vasculaire cérébral avec paralysie de membre ou d’une hospitalisation en unité de soins intensifs. La stase veineuse liée à la perte de déambulation semble être un des mécanismes fondamentaux initiant la MTV en contexte hospitalier, bien que son rôle spécifique reste difficile à individualiser de celui de l’AMA sous-jacente. En milieu ambulatoire, la fréquence de la MTV reste très significative même si peu d’études se sont jusqu’à présent attachées à son évaluation. Les patients traités pour une AMA en contexte extrahospitalier cumulent, en effet, souvent de nombreux FDR permanents et transitoires ; l’intérêt d’une prophylaxie de la MTV en situation ambulatoire reste, cependant, encore à confirmer. Certaines pathologies plus spécifiquement prises en charge par l’interniste se compliquent fréquemment de manifestations thromboemboliques veineuses : il s’agit notamment du lupus érythémateux systémique et du syndrome des anticorps antiphospholipides, de la maladie de Wegener, des maladies inflammatoires chroniques intestinales et de la maladie de Behc¸et. Au cours de ces affections, l’inflammation paraît jouer un rôle prépondérant dans le processus thrombotique veineux, par l’intermédiaire d’une activation de la coagulation ou d’une atteinte endothéliale. Un faisceau d’arguments laisse penser que ces manifestations thrombotiques veineuses sont plus fréquentes lors des poussées aiguës de la maladie. En milieu médical, l’évaluation du risque thromboembolique veineux est souvent compliquée par le caractère polypathologique d’une majorité de patients cumulants les FDR, permanents ou transitoires. L’appréciation du poids thrombotique spécifique d’une AMA constitue donc un outil supplémentaire pour reconnaître les patients médicaux à haut risque. Le risque thromboembolique veineux spécifiquement lié à l’alitement et au syndrome inflammatoire est souvent difficile à individualiser du risque inhérent à l’AMA. Compte tenu des difficultés méthodologiques inhérentes aux études épidémiologiques prospectives, une méta-analyse des données disponibles sur le rôle thrombotique de l’alitement et de l’inflammation pourrait s’avérer utile au clinicien pour adapter au mieux la thromboprophylaxie de la MTV. Références [1] Fowkes FJ, Price JF, Fowkes FG. Incidence of diagnosed deep vein thrombosis in the general population: systematic review. Eur J Vasc Endovasc Surg 2003;25:1–5.

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