Sérologies parasitaires en pratique courante: Intérêt et limites

Sérologies parasitaires en pratique courante: Intérêt et limites

Analyses s~rologiques sp~cifiques au cours de processus infectieux : int~rCts et limites St ROLOG IES PARASITAI RES EN PRATIQUE COURANTE : INTE RI T ...

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Analyses s~rologiques sp~cifiques au cours de processus infectieux : int~rCts et limites

St ROLOG IES PARASITAI RES EN PRATIQUE COURANTE : INTE RI T ET LI M ITES Patrice Bouree a,*, Fran?oise Botterel a, Paula Resende b

RCsum6

1. Introduction

Les serologies parasitaires sent des methodes diagnostiques tres utiles, et parfois indispensables dans le diagnostic des affections parasitaires, en particulier quand il est impossible de mettre en evidence le parasite lui-mCme. Plusieurs techniques sent disponibles et doivent 6tre associees comme I'agglutination, I'electrosynerese, I'hemagglutination, I'immunofluorescence, I'Elisa et le western-blot. Dans certaines parasitoses, le serodiagnostic est I'element le plus precoce (trichinellose) ou le seul argument qui permet le diagnostic et le suivi therapeutique (toxoplasmose, amoebose hepatique ou Larva migrans viscerale). Dans les nematodoses, il s'agit d'une reaction de groupe. Les serodiagnostics sent egalement utiles dans la surveillance post-therapeutique et dans les enquetes epidemiologiques.

es serologies parasitaires sent demandees de plus en plus fiequemment comme etant une panacee, et mCme trop souvent avant les examens directs de recherche des parasites ! En effet, outre I'epidemiologie (pays visites et mode de vie sur place) et les symptCmes ctiniques, le meilleur argument diagnostique pour affirmer une parasitose est la raise en evidence du parasite dans les prelevements de selles, d'urines, de sang, de peau ou autres. Neanmoins, les serediagnostics sent utiles dans plusieurs cas : diagnostique, suivi posttherapeutique ou enquetes epidemiologiques. Mais quand dolt-on les demander ? Jk quel rythme ? Quelle technique utiliser ? Ces questions ont des incidences medicales et economiques importantes.

SCrologie parasitaire - hCmagglutination - Elisa - immunefluorescence - western-blot,

[.'indication majeure est celle oQ on ne peut pas retrouver le parasite lui-meme, situation rencontree dans six circonstances. En effet, les parasites evoluent dans I'organisme, en effectuant un cycle plus ou moins complique selon le parasite en cause. Au debut, le parasite migre sous forme larvaire, dans diffCrents organes, et devient peu & peu adulte dans son organe d'election, qui sera sa Iocalisation deftnitive, d'oQ il va emettre des oeufs ou des larves. Mais, il arrive que certains parasites restent dans un organe (foie, cerveau) oQ il est difficile de les deceler directement. Dans d'autres cas, le cycle ne peut pas s'accomplir completement pour diverses raisons et le parasite reste & I'etat larvaire.

S u m m a r y : I m m u n o l o g i c diagnosis in parasitic disease in practice : benefit and limits

Immunodiagnosis in parasitologic diseases are widely used and are sometimes necessary, in particular when we cannot detect the parasite itself. Several technics are available, and must be associated, as immuno-e/ectrophoresis, indirect hemagglutination test, immunofluorescence, Elisa and western-blot. In some parasitic diseases, serologic tests are early method of diagnosis (trichineflosis), or the only one as for toxoplasmosis, hepatic amoebiasis, hydatidosis or visceral Larva migrans. Immunodiagnosis of filariasis has a poor specificity (cross-reactions with other helminths). Serologic tests are also useful in the foflow-up after treatment and in the epidemiologic surveys. Immunologic diagnosis - parasitic diseases - hemagglutination - Elisa - immunofluorescence - western-blot,

aUnite de parasitologie HCpital de Bic~tre 78, rue du GCn~raI-Leclerc 94275 Le Kremlin-Bic~trecedex b Service de microbiologie Faculte de pharmacie- Universitede Lisbonne (Portugal) * Correspondance [email protected] article requ le 22 juillet, accept6 le 16 septembre 2004. © ElsevierSAS. RevueFranoaisedes Laboratoires,octobre2004,N° 366

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2. Quand les demander ?

1) En phase de migration larvaire, le parasite immature effectue son cycle dans I'organisme et n'emet pas encore d'oeufs (par exemple, la douve pendant 90 jours, I'ascaris et les bilharzies pendant 60 jours) (tableau I). 2) Devant une Iocalisation uniquement viscerale des parasites, il est tres traumatisant et, de plus, assez illusoire, d'essayer de les retrouver dans les ponctions. C'est le cas, par exemple, des amibes dans I'amibiase hepatique ou pulmonaire, ou du toxoplasme dans la toxoplasmose cerebrale ou encore de la larve de Taeniasolium dans la cysticercose [13, 39]. 3) Au stade chronique d'affections ayant (~volud vers une sequestration des parasites dans certains organes, la ponctionbiopsie est trop aleatoire (par exemple, Trichinella dans les muscles, Trypanosoma cruzi dans le muscle cardiaque). 4) Darts les ,, impasses parasitaires >,, un parasite animal, sous forme larvaire le plus souvent, et non adapte & I'homme, migre au hasard : Larva migrans cutanee ou viscerale. Seule cette derniere Iocalisation va provoquer la formation d'anticorps (par exemple, Toxocara canis ou ascaris de chien). 5) De rn~me, quand le parasite reste ~ I'etat larvaire chez I'homme, qui est, dans ce cas, un hCte intermediaire dans le cycle evolutif de la maladie : il n'y a jamais d'emission de stade larvaire (par

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~11'immunoelectrophorese, I'electrosynerese, ou le western-blot sont qualitatifs et assez sensibles, mais necessitent un delai de plusieurs heures & plusieurs jours.

Ascaris

20e j

60j

Trichocephales

25 e j

30j

Anguillules

40 e j

27j

Bothriocephale

40 e j

d ~

Taenias

60 e j

Ankylostomes

80el

Grande douve

90e J

Bilharzies

60e J

Larva migrans

3O ~ j

exemple, kyste hydatique, echinococcose alveolaire). En outre, en cas de kyste hydatique, la ponction est contre-indiquee, car il y a des risques de choc anaphylactique et de dissemination secondaire des scolex. 6) Enfin, te s e r o d i a g n o s t i c est utile I o r s q u e la c h a r g e parasitaire est faible ou Iorsque le parasitisme est intermittent (par exemple, paludisme en dehors des acces, trypanosomose).

[] Les tests intradermiques, comme le test de Casoni (hydatidose), ou I'intra-dermo de Montenegro (leishmaniose) sent tombes en desuetude et ne sont plus pratiques que dans quelques pays ayant des moyens limites.

5. Techniques Les techniques utilisees en serologie parasitaire sont des methodes classiques en immunologie. Aucune de ces techniques n'etant parfaite, et chaque technique serologique presentant des avantages et des inconvenients, il faut, dans la mesure du possible, d'apres les textes officiels, toujours associer au minimum deux techniques differentes [44, 45] associant des tests de depistage et de confirmation (tableau II). Les anticorps produits par I'organisme peuvent #tre recherches dans le serum et dans le LCR, voire dans d'autres liquides biologiques. Les methodes serologiques sont basees sur I'utilisation d'antigenes figures (antigenes complets ou coupes de parasites) dans les reactions d'immunofluorescence ou d'agglutination, ou d'antigenes solubles dans les reactions d'hemagglutination, d'electrosynerese, d'immunoelectrophor¢se, d'Elisa ou de western-blot. Ces differentes techniques sont utilisees en fonction des antigenes disponibles selon les parasitoses recherchees [12]. 5.1. Deviation du complement (RDC)

3. Un seui pr~lbvernent est-il a|ors suffisant ? C'est le cas si la clinique est suffisamment parlante et le resultat du test nettement au-dessus du seuil significatif. Ceci est d'autant plus vrai qu'on s'etoigne de la phase d'invasion, le taux d'anticorps s'etant nettement eleve. Ainsi, devant un tableau infectieux, avec une lacune & I'echographie hepatique, une serologie tres positive permet d'affirmer d'emblee le diagnostic d'abces amibien du foie. Mais les parasites sont formes d'une mosai"que d'antigenes, dont certains sont communs a plusieurs esp~ces, provoquant de frequentes reactions croisees. Par ailleurs, la reaction immunologique peut 6tre proche du seuit de pesitivite, rendant son interpretation difficile. II faut donc toujours associer les resultats serologiques aux symptemes eliniques et biologiques pour pouvoir en tirer des conclusions valables. Pour les reactions quantitatives, il faut definir un seuil significatif. Chaque laboratoire dolt indiquer son interpretation en fonction des reactions utilisees et du taux seuil retenu. Souvent, deux prelevements sont necessaires, et I'elevation significative des taux & deux examens successifs b. 15 jours d'intervalle est te meilleur critere du caractere evolutif de I'affection suspectee.

4, Quels tests utiliser ? E Si I'on veut un diagnostic rapide, les tests au latex permettent un resultat en quelques minutes, mais sont surtout qualitatifs [7]. Cependant, ils peuvent ¢tre realises partout, meme dans les dispensaires ne disposant que d'un petit laboratoire d'urgence. @ Si I'on veut un diagnostic quantitatif, les reactions d'immunofluorescence indirecte, d'Elisa ou d'hemagglutination permettent d'obtenir un taux qui servira de comparaison avec les contreles ulterieurs. 52

La mise en presence du serum, d'un antigene soluble, d'un complement et d'un systeme hemolytique (hematies de mouton et anticorps antihematies de mouton) provoque une hemolyse en cas de negativite (donc absence d'anticorps). La positivite de la reaction (presence d'anticorps) se manifeste par une absence d'hemolyse. Cette reaction est de moins en moins pratiquee. 5.2. Double diffusion en gel (methode d'Ouchterlony) (DDG) Le serum et I'antig~ne soluble sont deposes dans deux puits creuses proximite dans une plaque d'agarose. La positivite est marquee par la formation d'arcs de precipitation, & la rencontre des zones de migration (figure 1). 5.3. Analyse immuno-electrophoretique (ALE) Eantigene est introduit dans un puits de gel d'agarose et soumis & une migration electrophoretique. Puis le serum est depose dans une rigole parallele A la migration. La positivite se manifeste par la formation d'arcs specifiques, a la rencontre des zones de migration : par exemple, arc 2 (distomatose), arc 5 (hydatidose) [19] (figures 2 et 3), arcs 4 et 8 (schistosomoses). 5.4. Enzyme-finked immunofi/tration assay (ELI FA) Lors de la migration sur gel d'acetate de cellulose, la rencontre d'antigenes solubilises et de serums forme des arcs de precipitation de classe IgG, IgA, IgM. Ceux-ci peuvent 6tre reveles par des antiglobulines conjuguees, et une migration parallele par immunofiltration permet la comparaison des systemes precipitants de differents serums. 5.5. Agglutination directe (AD) Diverses dilutions de serum sont raises en presence de suspension d'antigenes figures (ex : toxoplasmes). La presence d'anticorps se manifeste par une agglutination visible sous forme d'un voile dans les cupules. L'absence d'anticorps provoque la formation d'un <,bouton ,> au fond de la cupule. RevueFran?aisedes Laboratoires,octobre2004,N° 366

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212

1 4-4-

+4-4-

4-+4-

4-4-4-

2h

4h

2h

4-4-

4-4-+

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40

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4-

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Trichinellose

4-

4-

4-

Trypanosomoses I D : Immunodiffusion en gelose (Ouchterlony). EI.S : electrosynerese. H A l : hemagglutination. F-.IA : immunoenzymologie. I FI ."immunofluorescence indirecte. Latex : particules pour agglutination. C O E $ : coelectrosynerese. A l E : analyse immunoelectrophoretique. W B ". western-blot. * T y p e I : Reaction qualitative

; type 2 : reaction quantitative ; ** numero des bandes Kda ; ~ * S h • Schistosma haemotobium, S m : Schistosma mansonL

5.6. A g g l u t i n a t i o n passive (AP)

5.8. I m m u n o f l u o r e s c e n c e

Le serum du patient est mis en contact avec des particules inertes (latex) sur lesquelles ont ete fixes des antigenes. La positivite de la reaction se manifeste par I'agglutination de ces particules (voile), la negativite par le dep6t, en ,, bouton ,,, des particules dans le fond de la cupule.

Le serum est depose sur une lame sur laquelle a ete prealablement fixe I'antigene figure (coupe de filaires, de schistosomes, de douves, frottis de sang parasite). Puis est ajoute une antigamma-globuline (globale ou specifique : IgG, IgM), couplee ~. un conjugue fluorescent. La positivite se manifeste par une fluorescence verte, et la negativit6 par une couleur rouge [24] (figure 5 a et b).

5.7. H e m a g g l u t i n a t i o n

passive (HAP)

Le serum du patient est mis en contact avec des hematies recouvertes d'antigenes. La positivite se manifeste par I'agglutination des hematies (ou hemagglutination). Au contraire, la negativite provoque la chute des hematies dans le fond des cupules, formant un ,, bouton ,, (figure 4). Revue Frangaise des Laboratoires, octobre 2004, N ° 3 6 6

i n d i r e c t e (IFI)

5.9. Enzyme-finked i m m u n o sorbent assay (Elisa) La technique Etisa consiste & fixer des antigenes solubles sur un support en polystyrene (plaques de microtitration). Puis le serum est 53

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m n" @

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Revue Franoaise des Laboratoires, oetobre 2004, N ° 366

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mis en contact avec ces antigenes. Une fixation antigene-anticorps est revelee par addition d'un conjugue antiglobuline couple & la peroxydase et A un chromogene (par exemple I'orthophenylenediamine) et de I'eau oxygenee. La lecture s'effectue au spectrophotometre & 492 nm. Cette technique a I'avantage d'etre automatisable et peut 6tre repetee (avec un serum precedent) pour le suivi post-therapeutique [30, 40]. 5.1 0. W e s t e r n - b l o t ( W B ) Dans cette technique, les proteines de I'antigene sont separees selon leur poids moleculaire par electrophorese sur gel de polyacrylamide, puis transferees sur un filtre de nitrocellulose. Ce filtre (sous la forme de bandelette) est incube avec le serum & tester. La reaction antigeneanticorps se manifeste par I'apparition d'une bande coloree, identifiee par rapport b, des temoins positifs. Cette bande est revelee par un enzyme (peroxydase) puis un substrat insoluble. Cette technique permet la detection specifique d'anticorps diriges contre les differentes proteines antigeniques [18, 21,43]. 5.1 1. R e a c t i o n s utilisant d e s a n t i g e n e s vivants Parmi les reactions utilisant des antigenes complets, sur parasites vivants, certaines sont specifiques de parasitoses, comme le dye-test pour la toxoplasmose ou les anciens serodiagnostics de bilharziose. Le dye-test, longtemps considere comme test de reference, est une reaction actuellement reservee aux laboratoires tres specialises. II consiste A mettre en presence des formes vegetatives (vivantes) de toxoptasmes et le serum du patient, avec un colorant vital (Bleu de methylene). Si le serum contient des anticorps, ceux-ci lysent les toxoplasmes, qui sont detruits et ne prennent pas le colorant. Si au contraire, les toxoplasmes restent bien visibles, le serum ne contient pas d'anticorps. Dans la bilharziose, certaines reactions, uniquement qualitatives et necessitant d'entretenir un cycle au laboratoire, sont actuellement tombees en desuetude, et sont remplacees par les methodes modernes standardisees. Cependant, elles sont parfois encore utilisees. Ainsi, la mise en contact d'oeufs de schistosomes et de serums contenant des anticorps provoque la formation de precipites digitiformes autour des ceufs (reaction d'Oliver Gonzales ou circum ova precipitation) (figure 6). La meme technique avec des furcocercaires provoque un dedoublement de la membrane (reaction peri-cercarienne ou VSgeI-Minning) (figure 7). Un test base sur le meme principe a ete utilise dans la trichinellose avec des larves vivantes (test de Roth) (figure 8).

6. Comment surveiller P~volution sous traitement ? Du fait de I'efficacite therapeutique et de la lyse parasitaire, il y a souvent, au debut du traitement une liberation d'antigenes, provoquant en consequence, une augmentation d'anticorps. II faut donc eviter de prendre cette ,, augmentation soudaine ,, pour un echec therapeutique, et expliquer cette reaction au patient qui s'inquiete. Au cours des trois mois suivants, les taux vont baisser pour passer en dessous du seuil significatif en 12 & 18 mois. Une persistance ou une remontee des anticorps doit faire envisager une recidive ou une recontamination. C'est le cas par exemple du serodiagnostic de rhydatidose qui permet la surveillance postchirurgicale tous les 3 & 6 mois. Les taux augmentent temporairement apres I'intervention, puis vent diminuer lentement pour disparaftre en 1 a 2 ans. La persistance ou la remontee des anticorps font rechercher une nouvelle Iocalisation par echographie ou scanner. RevueFran?aisedes Laboratoires,octobre 2004, N° 366

7, Particularitds ~ connaitre seion ies parasitoses Un certain nombre d'affections parasitaires ont des reponses serologiques particulieres. Selon la Nomenclature des actes de biologie medicale, les techniques & utiliser pour les parasitoses, sont divisees en deux groupes : depistage (tests de sensibilite) et confirmation (tests de specificite) (tableau II). Dans certains cas, si deux tests de depistage sont positifs ou discordants, une technique de confirmation est exigee. 7.1. P r o t o z o o s e s [] A m o e b o s e :dans la dysenterie amibienne, le diagnostic repose uniquement sur I'examen parasitologique des selles, la serologie etant inutile car elle est habituellement negative. Au contraire, dans les atteintes viscerales (foie, poumons), seule I'immunologie confirme le diagnostic [36, 44]. En effet, la presence d'amibes dans les selles n'est qu'un argument supplementaire, mais la negativite n'elimine pas le diagnostic d'amoebose hepatique. Uelevation du taux serologique est tres frequente dans les suites immediates du traitement, avant de regresser en plusieurs tools.

II Giaedose : le diagnostic de la giardiose, responsable d'epigastralgies et de diarrhees parfois profuses, est base sur rexamen parasitologique des selles. Cependant, le serodiagnostic est parfois utile [23, 41], mais n'est pas realise en pratique courante. [] Leishmanioses : le serodiagnostic est peu utile dans les leishmanioses cutanees car il est habituellement negatif. Mais il est toujours positif dans les leishmanioses viscerales (Kalar-azar) [15]. Le diagnostic est suspecte sur des arguments cliniques (asthenie, fievre irreguliere, hepatosplenomegalie, polyadenopathies) et biologique (pancytopenie, augmentation de la VS et des IgG) et confirme par la recherche des leishmanies dans la moelle. II y a des interferences serologiques (faux positif) chez les sujets atteints de paludisme ou de trypanosomose [28], et des difficultes d'interpretation chez les sujets VIH positifs [17]. Recemment, ont ete mis au point des tests Elisa et d'agglutination directe utilisables dans le serum et dans les urines [20]. Le western-blot montre des bandes specifiques (14 et 16 kDa) (figure 9). l i Paludisme : le diagnostic de I'acces palustre repose sur le frottis sanguin et la goutte epaisse realises en urgence. Recemment ont ete mis au point des tests de diagnostic rapide de recherches d'antigenes plasmodiaux : Histidin Rich Protein (Now ICT ~) et Plasmodium lacticodeshydrogenase (Optimal ®) [29]. Mais la serologie est indiquee dans les cas suivants : depistage des donneurs de sang (infestes mais asymptomatiques), diagnostic retrospectif d'une fievre tropicale autotraitee ou non, sujets provenant d'une zone tropicale presentant une splenomegalie, une hepatomegalie, une anemie ou une fievre au long cours, et enfin enquete epidemiologique [4]. [] Toxoplasmose : le depistage est systematique Iors de I'examen prenuptial et chez la femme enceinte, du fait de la gravite potentielle des atteintes congenitales [38]. La presence d'lgM, mais mieux encore, I'elevation des titres des IgG Iors des deux examens successifs & 15 jours d'intervalle reste alors le meilleur critere du caractere evolutif de la maladie [10] (tableau III). Les IgM peuvent ~tre detectes pendant Iongtemps avec les techniques actuelles plus sophistiquees, ce qui diminue leur critere ,, d'affection evolutive ,,. Un traitement pris entre les serologies peut abaisser les taux et rendre le diagnostic plus aleatoire. En cas de toxoplasmose congenitale, le taux d'lgA ainsi que le test d'avidite des IgG peuvent permettre de dater approximativement I'infestation [31]. II est toujours important de pouvoir comparer les serums de la mere et de I'enfant, et la technique Elifa est tout & fait adaptee [34]. [] Trypanosomoses :dans la maladie du sommeil, le diagnostic est etabli par la mise en evidence des parasites dans le sang, le LCR ou 55

Analyses s#rologiques sp#cifiques au cours de processus infectieux : inter#ts et limites

la moelle. On recherche une augmentation des IgM, la presence d'anticorps specifiques dans le sang et dans le LCR. En raison de I'existence de fausse positivite en cas de leishmaniose et de paludisme, il est necessaire d'effectuer une recherche simultanee d'anticorps contre ces deux affections. Par ailleurs, les campagnes de depistage en brousse sont effectuees avec un test simple d'agglutination : le CATT (card agglutination trypanosomiasis test), qui permet d'eliminer les sujets negatifs, et, au contraire, de poursuivre le bilan diagnostique des sujets positifs. @ £)ans la trypanosomose amdricaine, ou maladie de Chagas, le diagnostic est fait par des methodes directes en phase aigu& Mais ]a serologie est indispensable en phase chronique. Dans certains pays d'Amerique du Sud, le serodiagnostic est effectue chez les donneurs de sang pour eliminer les donneurs infestes, jusqu'& 10 % dans certaines vines de cette region, la transfusion etant un des modes de transmission, 7.2. H e l m i n t h o s e s Seuls les helminthes effectuant un cycle dans I'organisme (par exemple : ascaris, schistosomes, anguillules) provoquent la formation d'anticorps, contrairement aux parasites restant dans I'intestin (oxyure, trichooephale, tenia). I AnguiBulose : I'anguillulose est une parasitose intestinale frequente en zone tropicale et subtropicale qui peut etre particulierement grave chez les sujets immunodeprimes. Le diagnostic est affirme par la mise en evidence des larves dans les selles. Un serodiagnostic est possible, mais n'est pas realis¢ en pratique courante [26]. I Bilharzioses ; le diagnostic se fait par I'examen parasitologique des selles et/ou des urines et eventuellement la biopsie rectale. La serologie est utile en periode d'invasion, I'¢mission des ceufs ne debutant qu'au bout de deux mois. Inversement, apres plusieurs annees, les malades emettent des oeufs facilement detectab}es, mais le serodiagnostic peut etre faiblement positif ou m¢me negatif, les schistosomes se recouvrant des proteines de I'hete, realisant ainsi une sorte de ,, camouflage immunologique >,. 56

RevueFran?aisedes Laboratoires,octobre 2004, N° 366

Analyses serologiques sp#cifiques au cours de processus infectieux : int~r~ts et limites

[] Cysticercose : complication de I'infestation par Taenia sofium, la cysticercose est une Iocalisation sous-cutanee musculaire, oculaire ou neurologique des formes larvaires du parasite. Apres intervention neurochirurgicale, dans le cas d'une neurocysticercose, le serodiagnostic permet de suivre la guerison par la regression des taux [14]. Cependant, en cas d'infestation ancienne, montrant des images calcifiees, le serodiagnostic reste negatif.

NEG

[] Echinoeoccoses : les echinococcoses comprennent les infestations par deux cestodes ayant des reactions serologiques communes. Le tenia du chien (Echinococcus granulosus) est responsable de l'hydatidose (developpement de la larve chez I'homme sous forme d'une cavite liquidienne surtout hepatique ou pulmonaire). Le tenia du renard (Echinococcus multilocularis) est responsable de I'echinococcose alveolaire [16], provoquant de multiples lacunes de taille variable dans le foie, de tres mauvais pronostic. Le diagnostic est evoque par I'imagerie medicale [3], et confirme par le serodiagnostic [37] qui est indispensable pour le suivi post-operatoire. La specificite de I'echinococcose alveolaire est apportee par I'Elisa en utilisant I'antigene Em 2, ou I'apparition de bandes specifiques en western-blot [25] (figure 10). Cependant, un serodiagnostic negatif n'elimine pas le diagnostic, quand un kyste est bien hermetique ou ancien et calcifie. [] Distomatose : I'infestation par Fasciola hepatica est cosmopolite. Elle provoque une hepatalgie febrile avec une hypereosinophilie tres marquee [6]. La serologie est le seul argument specifique en phase d'invasion. Fasciola hepatica n'emettant des oeufs qu'au stade adulte, et I'emission de ces oeufs n'etant jamais tres importante quantitativement, le serodiagnostic apporte souvent un argument decisif. De plus, il permet de suivre I'evolution apres le traitement. L'interet du serodiagnostic est moins net en cas d'infestation par la douve de Chine (Clonorchis sinensis), car & defaut de l'antigene specifique, il faut se contenter de reaction de groupe. En echange, les oeufs sent tres faciles ~. identifier dans les selles. [] Filarioses : te diagnostic est etabli par la mise en evidence des parasites sur le frottis sanguin vers 12 h (Lea lea) ou 24 h (Wuchereria bancrofti) ou une biopsie cutanee exsangue (onchocercose) completee par la serologie [9, 42]. Le serodiagnostic est surtout utile pour la surveillance post-therapeutique et les enquetes epidemiologiques. Les reactions faussement negatives sent frequentes, malgre la presence d'une microfilaremie. Les anticorps peuvent persister jusqu'& un an apres le traitement [35]. II s'agit d'une reaction de groupe. Cependant, I'Elisa utilisant des antigenes frO. volvulus s'est montree assez specifique de cette affection [1 ]. [] Myiases : la plupart du temps, les larves de mouches sent Iocalisees sous la peau (myiases furonculdfdes), dans une cavite naturelle (myiases cavitaires) ou dans une plaie (myiases de plaies) et le diagnostic se fait & I'inspection. Cependant, en cas de Iocalisation profonde, les larves provoquent une formation d'anticorps et donc le serodiagnostic est le seul argument possible [11 ]. [] Toxocarose : Larva migrans viscerale [4, 33] ou oculaire [32] et anisakidose (ascaris de poisson ingere accidentellement par I'homme) [8] : dans ce cas, le parasite restant h I'etat larvaire, I'infestation ne peut etre affirmee que par la production d'anticorps par I'hete [22]. En western-blot, la presence d'au minimum deux bandes dans la zone 24-35 kDa est significative d'une positivite pour Toxocara [27] (figure 11). [] Trichinellose : la serologie a un rele important, le diagnostic direct etant impossible pendant la phase d'invasion, c'est-&-dire de migration dans I'organisme..b, la phase d'etat, au bout d'un mois, les kystes sent retrouves & la biopsie musculaire. Le serodiagnostic est donc la seule methode possible et efficace [2] de diagnostic rapide, les troubles cliniques (fievre, diarrhee, myalgies, oedeme) et biologiques (hypereosinophilie, elevation des enzymes musculaires) etant dejh evocateurs mais non specifiques [5]. Le western-blot detecte deux bandes specifiques (figure 12). Revue Fran?aise des Laboratoires, octobre 2004, N ° 366

Standards de PM color6s (kDa)

POS

l 200 120

.q

80

7!(i

V16 P14

4

40

.t

30

.,i

20

q

8

_8

@ Interpretation •

La presencesur la bandelettede la bandeantigenique14 kDa et/ou 16 kDa permet d'interpreterle test commepositif et de conclure& la presenced'anticorpsIgG antiLeishmania dans I'echantillontest6 (le resultatpositif ci-dessusa 6t6 obtenuen utilisant le contrelepositif R5 fourni darts le kit).

oi,s

Mol~culaires (kDa)

E,orEm t P1

P2

P3

P4

P5

1 26-

.-8 L5 _J

Diagnostic differentiel entre kyste hydatiqueet 6chinococcose alveolaire 1. Diagnostic du genre Echinococcus : bandes 7 ou 26-28 kDa 2. Differencesentre les deux esp~ces : - Profil P1 ou P2 : Echinococcus granulosus (E.g.) - Profil P3 : Echinococcus multilocularis (E.m.) - Profil P4 ou P5 : E. multilocularis ou E. granulosus

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Analyses sdrologiques spdcifiques au cours de processus infectieux : intdr#ts et fimites

Standards PM NEG

POS

pr6-color6s

NEG

(kDa)

POS

Poids molEculaires

(kDa)

200 120

HPM

80

110

i!~!!i~ ::ri~!

BPM

{

.~.... 40 i:i]~'~: i/i

30

~i

i~

64

I-~-- 43-44

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~5 La zone de bas poids mol~culaire (BPM) est sp6cifique de la toxocarose : la presence d'au moins deux bandes entre 24 et 35 kDa permet d'interpreter le test cemme pesitif et de conclure & la pr6sence d'anticorps IgG anti-Toxocara dans 1'echantillon test& La zone de haut poids moleculaire (HPM > 80 kDa) est de moindre specificite et peut donner lieu & des reactions creisees, en particulier avec d'autres heF minthiases,

J @ Interpretation • La presence simultanee des deux bandes P43-44 + P64 est indicative d'une trichinellose.

8. Int6r~t en 6pidemiologie

9. Conclusion

Dans un but 6pidemiologique, les serodiagnostics sont utiles pour 6tablir la prevalence d'une maladie. Le taux de circulation d'un agent infectieux est en effet apprecie par le taux moyen d'anticorps retrouve dans la population concernee (exemple : paludisme). Dans la toxoplasmose, le serodiagnostic d'une population permet de prevoir le risque de survenue de seroconversion pendant la grossesse.

L

es methodes de diagnostic immunologique sont tres utiles, mais presentent encore certains defauts, et doivent completer et non se substituer aux recherches directes des parasites. II existe souvent des reactions croisees, la specificite des antigenes n'etant pas assez etroite. Dans certains cas (toxoplasmose chez la femme enceinte, toxocarose, hypodermose, hydatidose, amibiase hepatique), le serodiagnostic est I'argument fondamental.

Si le taux de serologie d'hydatidose est positif chez de nombreuses personnes (meme asymptomatiques) dans une region, il faut entreprendre des campagnes de depistage des patients (echographies) et de traitement ainsi que le depistage des chiens. Le coot de ces serodiagnostics est relativement faible, variant de B40 & B180 selon la technique utilis6e (et non la maladie recherchee).

Cependant, si un taux elev6 d'anticorps affirme un diagnostic, on ne peut ecarter d6finitivement un diagnostic devant une s6rologie negative. Le delai necessaire & I'apparition des anticorps ne permet pas un diagnostic serologique precoce. Enfin, le co0t mod6r6 d'un serodiagnostic, en fait un examen tres interessant, en fonction des renseignements qu'il peut apporter, quand il est demande & bon escient.

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Analyses s#rologiques sp~cifiques au cours de processus infectieux : intdr#ts et fimites

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