Sympathectomie thoracique

Sympathectomie thoracique

EMC-Chirurgie 2 (2005) 453–464 www.elsevier.com/locate/emcchi Sympathectomie thoracique Thoracic sympathectomy A. Barret (Professeur) *, X. Chaufour...

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EMC-Chirurgie 2 (2005) 453–464

www.elsevier.com/locate/emcchi

Sympathectomie thoracique Thoracic sympathectomy A. Barret (Professeur) *, X. Chaufour (Praticien hospitalo-universitaire), L. Casbas (Chef de clinique-assistant), J.-P. Bossavy (Professeur) Service de chirurgie vasculaire et angiologie, Hôpital Purpan, place du Docteur-Baylac, TSA 40031, 31059 Toulouse cedex 9, France

MOTS CLÉS Hyperhidrose ; Sympathectomie ; Thorax ; Raynaud ; Causalgies

KEYWORDS Hyperhidrosis; Sympathectomy; Thorax; Raynaud’s disease; Causalgia

Résumé La sympathectomie thoracique haute, le plus souvent réalisée à l’heure actuelle par cœlioscopie, est devenue une intervention peu agressive. Elle est indiquée essentiellement pour traiter l’hyperhidrose palmaire et axillaire, mais aussi les syndromes de Raynaud invalidants au cours des collagénoses par exemple, les causalgies, les occlusions artérielles distales avec lésions digitales par thrombose ou embolie, les lésions de la maladie de Buerger. La thoracotomie n’est effectuée qu’en cas d’impossibilité ou d’échec de la thoracoscopie. Les autres voies d’abord sont beaucoup plus rarement utilisées. L’ablation des 2e et 3e ganglions sympathiques thoraciques est suffisante pour les lésions de la main ; en cas d’hyperhidrose axillaire, l’exérèse, en outre, des 4e et 5e ganglions est nécessaire. Le seul inconvénient réel dans cette indication est l’hypersudation compensatrice postopératoire fréquente qui intéresse le thorax, les lombes, mais dont les malades s’accommodent en général assez bien. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Upper thoracic sympathectomies, performed most of the time by coelioscopy, have become mildly aggressive interventions. Such procedure is primarily indicated for palmar and axillary hyperhidroses; it is also indicated in case of collagenosis-related disabling syndromes of Raynaud’s disease, causalgias, distal arterial occlusions with thrombotic or embolic digital lesions, and lesions due to Buerger’s disease. Thoracotomy is considered only in case of thoracoscopy failure or infeasibility. Other accesses are far less utilized. Ablation of the 2nd and 3rd thoracic sympathetic ganglia is sufficient for hand lesions; in case of axillary hyperhidrosis, further exeresis of the 4th and 5th ganglia is necessary. The only disadvantage related to this indication is the frequent postoperative compensatory hypersudation that involves both the thorax and the lumbar area, but which doesn’t constitute a real complaint for the patients. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Introduction Nous n’envisagerons que la sympathectomie thoracique haute. La stellectomie isolée, les sympathectomies thoraciques basses et les splanchnisym* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Barret).

pathectomies dorsolombaires (intervention de Smithwick) sont tombées en désuétude.

Anatomie La chaîne sympathique thoracique est située en avant des articulations costovertébrales ; elle est

1762-570X/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi: 10.1016/j.emcchi.2005.07.004

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généralement visible à travers la plèvre médiastinale surtout chez les sujets maigres, et comprend 12 ganglions reliés par un cordon intermédiaire mince le plus souvent simple, parfois dédoublé.1 Les ganglions sont reliés au système nerveux cérébrospinal par un ou plusieurs filets nerveux, les rameaux communicants ; les rameaux communicants blancs sont formés de fibres allant des centres végétatifs du névraxe aux ganglions latérovertébraux et comprennent aussi des fibres sensitives dépendant des cellules des ganglions spinaux (Fig. 1) (d’après Rouvière). Les rameaux communicants gris formés de fibres sans myéline vont des ganglions latérovertébraux aux nerfs intercostaux ; ils assurent l’innervation sympathique du territoire de ces nerfs. Les vaisseaux intercostaux, artères et veines, sont situés en général en arrière de la chaîne sympathique, mais parfois en avant ; la dissection devra alors être prudente pour ne pas causer d’hémorragie difficile à contrôler. Le 1er ganglion dorsal est fusionné avec le dernier ganglion cervical pour former le ganglion stellaire. La main est sous la dépendance de la chaîne sympathique s’étendant de D2 à D4, la région axillaire sous la dépendance de D3 à D5.

Physiologie et physiopathologie Le système sympathique est vasoconstricteur. Son « hypertonie » est un facteur aggravant les artériopathies distales du membre supérieur. Il est responsable aussi, par ses fibres cholinergiques, de la sécrétion des glandes eccrines qui produisent une sudation isotonique ; celle-ci assure au niveau des mains, des aisselles, la thermorégulation et l’hydratation cutanée. L’hypertonie sympathique sera responsable de l’hyperhidrose. Certaines douleurs de type causalgique, complex regional pain syndrome des Anglo-Saxons,2 ailleurs dénommées : dystrophie sympathique réflexe, atrophie de Sudeck, algoneurodystrophie, allodynie, hyperalgie, ont une composante sympathique certaine. Pour affirmer ce diagnostic, plusieurs critères sont nécessaires : événement nociceptif au départ ou immobilisation, douleur permanente disproportionnée par rapport à l’épisode initial, œdème et hypersudation locale, élimination de toute cause autre qui pourrait être responsable de l’état clinique et de l’intensité de la douleur.

Indications Elles résultent des notions précédentes de physiopathologie.

Figure 1 Grand sympathique : connexions. 1. Racine postérieure ; 2. ganglion spinal ; 3. cordon intermédiaire ; 4. nerf rachidien ; 5. rameau communicant gris ; 6. ganglion latérovertébral ; 7. cordon intermédiaire ; 8. rameau sympathique périphérique ; 9. ganglion périphérique ; 10. rameau communicant blanc ; 11. racine antérieure.

Hyperhidrose palmaire Associée ou non à une hyperhidrose axillaire, ce trouble commence à la puberté, mais peut se rencontrer aussi dans l’enfance. La sudation est peu influencée par l’effort ou la saison chaude, mais est augmentée par l’émotion, les stress ; elle cesse pendant le sommeil. Elle peut être invalidante au point d’empêcher l’usage d’un stylo ; la sympathectomie s’adresse à ces formes graves qui n’ont

Sympathectomie thoracique pas réagi à un traitement médical bien conduit ou à l’ionisation.3,4 Les améliorations obtenues par l’intervention se maintiennent à long terme.

Maladie de Raynaud En règle bilatérale, sans étiologie décelable, sans trouble trophique, évoluant depuis 2 ans au moins, respectant le pouce, elle relève rarement de la sympathectomie. Les résultats favorables obtenus dans les suites immédiates pour 85 % des cas se dégradent par la suite, pour n’être plus que de 25 % à 5 ans.5

Artérites inflammatoires La sympathectomie est peu efficace pour guérir les syndromes de Raynaud du lupus érythémateux, du syndrome de SHARP, de la périartérite noueuse, de l’arthrite rhumatoïde, de la sclérodermie ; mais l’apparition de troubles trophiques des doigts peut la rendre nécessaire ; elle soulage le malade au moins temporairement. La maladie de Buerger réagit un peu mieux que les collagénoses, à condition de corriger parallèlement les facteurs de risque, le tabac en particulier, et les facteurs psychologiques.

Artériopathie oblitérante digitale Au cours des syndromes du défilé thoracobrachial, on associe une résection de la chaîne sympathique thoracique à la décompression chirurgicale, si existent des occlusions artérielles distales par embolies, parties de l’artère sous-clavière ou axillaire. Ces occlusions peuvent être imputables aussi à des embolies à point de départ cardiaque ou à une artériopathie oblitérante athéromateuse. S’il existe des troubles trophiques, la sympathectomie peut apporter une guérison spectaculaire ; le résultat reste bon à 5 ans dans 78 à 92 % des cas.5,6 Les gelures, enfin, sont retenues par certains comme une indication.7

455 lent des lésions fibreuses irréversibles, la sympathectomie peut avoir des résultats très bénéfiques en termes de réduction de la douleur.2 De bons résultats ont été rapportés dans les séquelles de plaies de guerre avec traumatisme nerveux responsable de causalgie.8 L’ostéoporose, l’œdème, le refroidissement, l’hypersudation réagissent très bien à la sympathectomie à la phase aiguë du syndrome algodystrophique.

Techniques La sympathectomie thoracique endoscopique décrite initialement par Kux9 est devenue la technique habituelle ; les abords chirurgicaux sont réservés aux contre-indications ou aux impossibilités de la voie endoscopique.

Sympathectomie par thoracoscopie Installation du patient Le patient est installé confortablement en décubitus latéral ; un billot permet de dégager le bras inférieur et de faciliter la respiration, le bras supérieur est fixé au zénith sur un repose-bras ou sur le cadre qui sert de support aux champs opératoires. L’opérateur principal est en arrière du patient, l’aide en avant (Fig. 2, 3) ; cette installation permettra une conversion aisée en thoracotomie si nécessaire. Le moniteur télévisuel est situé en avant de l’opérateur principal ; un deuxième moniteur en face de l’aide qui tient la caméra est fort utile. Les instruments sont disposés sur une table-pont au-dessus des cuisses du patient. Le malade est intubé de façon sélective avec une sonde de Carlens pour mettre au repos le poumon du côté opéré. Instruments (Fig. 4) Ils comportent trois trocarts de 5 mm pour la caméra et les instruments nécessaires à la sympa-

Causalgies, syndromes algodystrophiques Qu’elles surviennent après un traumatisme neurologique ou une autre agression, elles relèvent en premier du traitement médical (antidépresseurs tricycliques, Tégrétol®, corticoïdes, calcitonine, drogues sympatholytiques). Ces différents médicaments peuvent être combinés mais peuvent avoir des effets secondaires néfastes. La physiothérapie, l’ergothérapie peuvent aussi être utiles. Dans les formes rebelles cependant et avant que ne s’instal-

Figure 2 Position en décubitus latéral avec endoscope de 5 mm introduit dans le cinquième espace intercostal et deux instruments de 3 mm introduits sur les lignes axillaires antérieure et postérieure.

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Figure 3 Disposition de l’opérateur, de l’assistant et des moniteurs.

A. Barret et al. Intervention L’endoscope est introduit dans le 5e ou 6e espace intercostal à la partie moyenne du creux axillaire ; un 2e trocart est introduit au niveau du 3e espace intercostal sur la ligne axillaire antérieure ; le 3e et dernier trocart sur la ligne axillaire postérieure au niveau du 4e ou 5e espace intercostal. Les trocarts passent exactement au bord supérieur des côtes après une incision cutanée aussi limitée que possible. On travaille ainsi aisément en triangulation ; la caméra récline le poumon affaissé, en même temps qu’elle repère la chaîne sympathique sous la plèvre pariétale. Celle-ci est ouverte aux ciseaux coagulateurs ou au crochet coagulateur jusqu’au bord inférieur du ganglion stellaire. Le crochet soulève la chaîne sympathique sans s’égarer en arrière pour ne pas léser un vaisseau. Une section est effectuée au ras du ganglion stellaire puis la chaîne est prise avec une pince et soulevée par une traction douce et libérée de ses attaches, rameaux communicants blancs et gris. On peut ainsi enlever aisément les 2e, 3e 4e et 5e ganglions thoraciques, ce qui garantira une efficacité sur les téguments de la main, mais aussi de l’aisselle. Après vérification de l’hémostase, une compresse hémostatique pourra être laissée en place ainsi qu’un petit drain thoracique d’aspiration type Monaldi. À ce moment-là, l’intubation sélective peut être supprimée ; on vérifie l’expansion pulmonaire et les orifices cutanés seront refermés par un ou deux points musculoaponévrotiques et un surjet intradermique au fil résorbable. Variantes Position du malade Plusieurs installations différentes du malade ont été décrites : • décubitus ventral ;9,10 • décubitus dorsal ou ; • position demi-assise.11,12 Elles permettent une intervention bilatérale en un temps.

Figure 4 Instrumentation pour sympathectomie thoracique.

thectomie : pince à préhension, ciseaux, crochet coagulateur, aspirateur. L’intubation sélective permet de se passer de matériel d’insufflation et de rétracteur pulmonaire. Ceux-ci deviennent nécessaires en cas d’intubation trachéale standard.

Variantes techniques • La position des trocarts et leur nombre peuvent varier selon l’habitude des opérateurs. L’absence d’intubation bronchique sélective imposera un matériel d’insufflation de CO2 et un écarteur pulmonaire (« main pulmonaire »). Certains ne pratiquent à l’extrême qu’un seul orifice grâce à l’utilisation d’un électrorésectoscope transurétral 24 F, après création d’un pneumothorax apical par insufflation de 1,8 l de CO2 par une aiguille de ponction.12 Ils se contentent d’électrocoaguler dans les hyperhidroses

Sympathectomie thoracique palmaires le 2e et le 3e ganglions sympathiques thoraciques, le 2e, 3e et 4e ganglions si une atteinte axillaire est associée. L’intervention est bilatérale en un temps. Pour les auteurs, cette intervention est efficace, sûre et peu agressive dans le traitement de l’hyperhidrose, la maladie de Raynaud et la maladie de Buerger. • La sympathectomie « sélective »13 respecte les ganglions et ne sectionne que les rameaux communicants. Cette intervention semble aussi efficace que la sympathectomie tronculaire, mais donne autant d’hypersudation compensatrice en cas d’intervention pour hyperhidrose. L’innervation sympathique au niveau thoracique étant métamérique, nous ne voyons pas l’intérêt de préserver les connexions grêles qui cheminent dans le cordon intermédiaire entre chaque ganglion. Elle risque en outre d’être incomplète en négligeant des rameaux communicants postérieurs ou des fibres récurrentes. La coagulation du périoste costal sur une longueur de 4 cm paraît plus agressive que la sympathectomie tronculaire pour un bénéfice incertain. • Sympathectomie par injection percutanée de sérum chaud. Un neurochirurgien de Hanoï, Nguyen Thuong Xuan,14 a rapporté en 1979 une technique d’injection de sérum très chaud à l’aide d’une aiguille à ponction lombaire, par voie postérieure, en regard des 3e et 4e ganglions thoraciques. L’obtention immédiate d’une hyperthermie palmaire est un test de succès durable (Fig. 5). Pour l’auteur qui a développé cette technique simple et peu coûteuse, pour le traitement de l’hyperhidrose très fréquente au Viêt-Nam, le taux de succès est de 90 %, les complications sont exceptionnelles. Il en a par la suite étendu les indications à la maladie de Buerger, à la maladie de Raynaud, aux causalgies, avec des résultats comparables à ceux obtenus par sympathectomie à ciel ouvert. Il ne semble pas que des techniques d’alcoolisation ou de phénolisation par voie percutanée sous amplificateur de brillance ou sous tomodensitométrie aient été décrites, ou en tout cas appliquées à grande échelle, au niveau de la chaîne sympathique thoracique haute. • Sympathectomie par destruction électrique percutanée. Dans cette technique décrite par Wilkinson,15 une électrode à extrémité chauffante est mise en place sous contrôle radiologique et sous anesthésie locale, en regard des ganglions thoraciques supérieurs ; ces derniers sont détruits successivement de bas en haut, en portant chaque fois la température de l’électrode à 90 °C pendant 180 secondes.

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Figure 5 Technique de Nguyen Thuong Xuan. 1. Ganglion sympathique ; 2. plèvre ; 3. trachée ; 4. œsophage ; 5. récurrent ; 6. artère carotide primitive gauche ; 7. artère sous-clavière gauche ; 8. canal thoracique ; 9. trou de conjugaison.

La constitution d’un syndrome de Claude BernardHorner est contrôlée et prévenue par une stimulation préalable réversible à 60 °C. L’efficacité au niveau de la main est mise en évidence par mesure de la température cutanée et pléthysmographie. En vérité, ces deux techniques pratiquées pour éviter une thoracotomie ont perdu pratiquement tout leur intérêt depuis le développement de la thoracoscopie. Complications per- et postopératoires • Une plaie vasculaire peut entraîner un hémothorax qui peut au maximum imposer une conversion chirurgicale en thoracotomie. En général une électrocoagulation, un tamponnement local, la mise en place d’une gaze hémostatique sont suffisants pour assurer l’hémostase. • Un pneumothorax postopératoire peut nécessiter un drainage pleural prolongé pendant quelques heures ou quelques jours. Dans une étude récente, Ojimba16 rapporte neuf décès connus mais non publiés dont cinq par hémorragie intrathoracique et trois par complication anesthésique. Il estime à plus de 5 % les malades qui présentent un saignement intrathoracique, mais une minorité seulement requiert une thoracotomie ; un pneumothorax apparaît chez 2 % des patients et deux cas de souffrance cérébrale sont connus de lui.

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Techniques chirurgicales conventionnelles Il est indispensable de les connaître si la thoracoscopie est impossible ou si une conversion devient nécessaire en cours de thoracoscopie pour sympathectomie thoracique haute. Trois techniques peuvent être utilisées : • la voie postérieure extrapleurale, de plus en plus délaissée ; • la voie sus-claviculaire, qui a la faveur de certains ; • et surtout la voie axillaire. La voie thoracique antérieure ne semble pas avoir de réel avantage par rapport à la voie axillaire. Voie postérieure extrapleurale Mise en honneur par Smithwick17 en 1936, son avantage est de pouvoir à la rigueur être réalisée sous anesthésie locale plan par plan chez un patient très âgé ou insuffisant respiratoire. Sur le malade en décubitus ventral, une incision verticale de 8 à 10 cm est réalisée à deux travers de doigt en dehors de la ligne médiane, en regard des 2e, 3e, et 4e articulations vertébrocostales, repérées au préalable par radiographie ou amplificateur de brillance (Fig. 6). Deux couches musculaires épaisses doivent être traversées : trapèze, rhomboïde et petit dentelé, puis splénius et complexus (Fig. 7). La 3e côte est réséquée à la pince-gouge, de même que l’apophyse transverse de la 3e vertèbre (Fig. 8). La plèvre pariétale postérieure est décollée au tampon monté ; la chaîne sympathique sera réséquée sur quelques centimètres ; deux ganglions au

Figure 7 Découverte du plan costovertébral.

Figure 8 Résection de la 3e côte et découverte de la chaîne sympathique.

moins peuvent être enlevés, mais l’extension vers l’amont et l’aval est difficile. Le jour est étroit, le champ profond, l’hémostase malaisée.

Figure 6 Incision cutanée.

Voie sus-claviculaire Décrite initialement par Gask et Ross en 1937,18 elle était utilisée surtout pour réaliser une stellectomie ; actuellement, on effectue seulement

Sympathectomie thoracique l’ablation des 2e et 3e ganglions thoraciques. L’exérèse associée du pôle inférieur du ganglion stellaire assure une dénervation plus complète du membre supérieur, mais n’exclut pas totalement la possibilité d’un syndrome de Claude Bernard-Horner. Le malade est en décubitus dorsal, la tête tournée du côté opposé. Sous anesthésie générale, avec intubation trachéale en raison du risque de lésion du dôme pleural, on réalise une incision horizontale 1 cm au-dessus du bord supérieur de la clavicule, en regard du chef claviculaire du sterno-cléidomastoïdien. Cette incision, large de 5 à 6 cm, traverse le peaucier du cou et peut nécessiter la ligature de la veine jugulaire externe (Fig. 9). Le chef claviculaire du sterno-cléido-mastoïdien est sectionné un peu à distance de ses insertions claviculaires, pour permettre la réfection en fin d’intervention (Fig. 10). L’omohyoïdien, qui croise le champ opératoire de dehors en dedans et de bas en haut, peut lui aussi être sectionné sans inconvénient. La veine jugulaire interne est repérée ; du tissu cellulograisseux et lymphatique sectionné entre ligatures est écarté ; on verra alors le muscle scalène

459 antérieur, en avant duquel chemine de dehors en dedans et de haut en bas le nerf phrénique, dans l’aponévrose musculaire ; ce nerf doit être libéré, isolé sur un lacs souple et récliné doucement en dedans. Le muscle scalène (Fig. 11) est sectionné au niveau de son insertion sur le tubercule de Lisfranc de la 1ère côte au bistouri électrique, prudemment pour ne pas léser les structures vasculaires postérieures ; quand toutes les fibres du scalène antérieur sont sectionnées, le muscle se rétracte vers le haut et laisse apparaître l’artère sousclavière et l’artère vertébrale. Le canal thoracique, à gauche, sous-croise l’artère sous-clavière pour aller se jeter dans la veine sous-clavière près du confluent de Pirogoff ; à droite, une veine lymphatique moins volumineuse peut exister aussi. L’artère sous-clavière doit être disséquée et mobilisée (Fig. 12) ; le tronc artériel thyro-bicervicoscapulaire peut être ligaturé et sectionné. À l’aide d’écarteurs, l’artère est soulevée ou abaissée, laissant apparaître le dôme pleural et ses ligaments suspenseurs supérieurs et postérieurs qui seront sectionnés. On pénètre ainsi dans l’espace rétropleural ; la plèvre est décollée au tampon, progressivement et prudemment, de dedans en dehors. L’index pourra alors abaisser le dôme pleural, le sommet pulmonaire, et reconnaître le ganglion stellaire et la chaîne sympathique. L’orientation du scialytique est essentielle ; un écarteur éclairant à lumière froide ou un éclairage frontal sont utiles. Le ganglion stellaire a une forme d’haltère et donne de nombreux rameaux aux branches du plexus brachial ; sa partie inférieure est située en regard du col de la 1ère côte ; un crochet soulève la chaîne sympathique, facilitant sa dissection jus-

Figure 9 Tracé cutané.

Figure 10 Section du chef claviculaire du sterno-cléidomastoïdien. 1. Veine jugulaire interne ; 2. veine jugulaire externe ; 3. muscle omo-hyoïdien.

Figure 11 Section du scalène antérieur. 1. Nerf phrénique ; 2. muscle scalène antérieur ; 3. plexus brachial ; 4. artère sousclavière.

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Figure 12 Abaissement du dôme pleural. 1. Plexus brachial ; 2. artère sous-clavière qui peut être soulevée ou abaissée ; 3. ligaments suspenseurs du dôme pleural ; 4. dôme pleural.

qu’au 3e ganglion thoracique. Pour assurer une dénervation complète du membre supérieur, il faut enlever la moitié inférieure du ganglion stellaire, puis les 2e et 3e ganglions thoraciques. Le niveau de section est repéré par des clips. Les artères et veines intercostales doivent être soigneusement respectées (Fig. 13). Après contrôle de l’hémostase, on dispose un drain de Redon dans l’espace extrapleural. Le muscle sterno-cléido-mastoïdien est reconstruit (Fig. 14, 15). Il n’est pas nécessaire de suturer le scalène antérieur ni l’omohyoïdien. Le peaucier du cou est suturé au fil résorbable fin. L’anesthésiste doit, par une hyperpression, assurer une bonne expansion pulmonaire. Après suture cutanée, le drain est mis en aspiration pendant 24 heures. Une radiographie pulmonaire est demandée en salle de réveil. Complications L’étroitesse du champ opératoire peut conduire à des complications diverses. Owens19 rapporte des lésions iatrogènes de la carotide, de la veine jugulaire, du canal thoracique, du plexus brachial, du nerf phrénique, de la plèvre, de l’artère sousclavière..., et pense que cette voie doit être abandonnée. En réalité, ceci paraît excessif ; une bonne connaissance de cette région anatomique, une chirurgie prudente et rigoureuse doivent permettre l’exérèse de la partie haute de la chaîne sympathique sans difficulté majeure. Cette voie est celle que l’on adopte dans le traitement des syndromes du défilé thoracobrachial quand la sympathectomie est indiquée en complément de l’ablation de la côte cervicale ou de la 1ère côte.

Figure 13 A, B. Abord du sympathique. 1. Veine jugulaire interne ; 2. dôme pleural ; 3. chaîne sympathique.

Figure 14 Réfection du sterno-cléido-mastoïdien.

Sympathectomie thoracique

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Figure 15 Suture du muscle peaucier du cou.

Voie axillaire transpleurale C’est la plus utilisée, sinon la seule. Ses avantages sont certains : cicatrice peu visible, abord aisé de la chaîne sympathique, respect du ganglion stellaire, hémostase facile. Campbell20 préconise la sympathectomie bilatérale au cours de la même anesthésie ; en général, toutefois, les deux côtés sont opérés à quelques semaines d’intervalle. Atkins,21 en 1949, a été le premier à décrire cette voie. Le malade anesthésié et intubé est installé en décubitus latéral, le bras en abduction à 90°, l’avant-bras et la main enveloppés dans du coton et fixés confortablement à un support. L’intubation par sonde armée ou par sonde Carlens n’est pas nécessaire (Fig. 16). L’incision cutanée s’étend du bord postérieur du grand pectoral au bord antérieur du grand dorsal, au-dessous de la pilosité axillaire : elle est de 8 à 10 cm de long. Campbell20 préconise une incision plus verticale, parallèle au bord postérieur du grand pectoral, qui serait plus esthétique (Fig. 17), mieux cachée par le muscle, moins visible de face et de profil. Le tissu cellulograisseux axillaire est ensuite incisé jusqu’au muscle grand dentelé ; le nerf de ce

Figure 16 Position du malade.

Figure 17 Incision cutanée. 1. Muscle grand dorsal ; 2. muscle grand pectoral.

muscle, ou nerf de Charles Bell, est situé à la partie postérieure de l’incision et doit être respecté ; sectionné, il sera responsable d’une « scapula alata ». Le nerf accessoire du brachial cutané interne, au bord inférieur de la 2e côte, doit lui aussi être respecté (Fig. 18). Les côtes sont repérées ; il est plus confortable de pénétrer dans le 3e espace intercostal, c’est-àdire au bord supérieur de la 4e côte, et non dans le 2e espace (Fig. 19) ; l’incision des muscles intercostaux peut se poursuivre en avant sous le grand

Figure 18 Incision thoracique. 1. Muscle grand dorsal ; 2. muscle grand pectoral.

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Figure 19 Thoracotomie dans le 3e espace intercostal. 1. 3e côte ; 2. plèvre pariétale ; 3. muscles intercostaux.

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Figure 20 Découverte de la chaîne sympathique. 1. Trachée ; 2. tronc veineux brachiocéphalique et veine cave supérieure ; 3. veine azygos ; 4. poumon droit ; T5. 5e ganglion sympathique thoracique.

pectoral et en arrière sous le grand dorsal, permettant une meilleure ouverture, évitant les fractures de côte. L’écarteur de Finochietto doit être mis en tension très progressivement. Le poumon est refoulé vers le bas par un champ humide et une longue lame malléable. Quelques adhérences pleurales doivent parfois être libérées. La chaîne sympathique est facilement repérée à travers la plèvre pariétale postérieure translucide. Celle-ci est incisée en regard de la chaîne sympathique qui sera soulevée à l’aide d’un crochet ; les rameaux communicants sont sectionnés, en prenant grand soin de ne pas blesser les vaisseaux intercostaux situés juste en arrière. La résection s’étend en bas sans difficulté jusqu’aux 4e et 5e ganglions thoraciques (Fig. 20–22). L’hémostase d’une plaie intercostale sera réalisée par coagulation ou clip. La zone opératoire est lavée au sérum. Un drain pleural aspiratif est mis en place par une contre-incision au niveau de la ligne axillaire antérieure du 5e espace. On demandera à l’anesthésiste de réaliser une hyperpression par insufflations forcées ; on vérifie l’absence de fuite aérienne et la bonne expansion pulmonaire. Les côtes sont rapprochées par des fils non résorbables ou à résorption lente en prenant soin de ne pas léser les pédicules intercostaux. Un plan musculaire, un plan sous-cutané, enfin un plan cutané sont confectionnés (Fig. 23). Une radiographie thoracique est demandée en salle de réveil puis les jours suivants. La kinésithérapie respiratoire doit être attentive ; le drain pleural peut être enlevé au bout de 48 heures.

Figure 21 Résection de la chaîne sympathicothoracique haute.

Complications Elles tiennent à l’existence d’adhérences pleurales pouvant rendre l’accès et l’exposition de la chaîne sympathique difficiles et surtout à la possible bles-

Sympathectomie thoracique

463 sure d’un paquet intercostal au moment de la thoracotomie, de l’ablation du sympathique, de la mise en place du drain pleural, ou du rapprochement costal. La pénétration par le 2e espace n’est pas souhaitable car elle est trop étroite et risque de léser en arrière le nerf du grand dentelé.

Résultats et complications de la sympathectomie thoracique

Figure 22 Sympathectomie thoracique gauche. 1. Artère sousclavière gauche ; 2. crosse aortique.

Berguer22 fait sienne la réflexion de Telford : « Je ne pense pas qu’un chirurgien qui a acquis une expérience suffisante de la sympathectomie et a suivi ses malades pendant quelques années puisse considérer le devenir de son travail comme entièrement satisfaisant ». Si les résultats sont bons et se maintiennent bien dans l’hyperhidrose, l’artérite distale et les causalgies, ils sont en revanche inconstants et se dégradent dans la maladie de Raynaud ; ils sont très transitoires dans le syndrome de Raynaud des collagénoses. Par ailleurs, la sympathectomie thoracique a des inconvénients propres qu’il faut connaître.

Perturbations sudorales La sympathectomie assèche les sécrétions de la main et de la région axillaire. C’est l’effet recherché dans le traitement de l’hyperhidrose. Mais cet effet peut être compensé par une augmentation de la sécrétion dans les autres territoires : membre supérieur controlatéral, tronc, membres inférieurs. L’hypersudation de la face déclenchée par la gustation est bien classique. Elle apparaît surtout après les sympathectomies bilatérales.

Syndrome de Claude Bernard-Horner Il se caractérise par un myosis, une énophtalmie avec ptosis de la paupière supérieure, assèchement de la muqueuse nasale et de l’hémiface. Il régresse rarement et ne connaît pas de traitement curatif. Il doit être prévenu par le respect du ganglion stellaire, au moins dans sa moitié supérieure.

Névralgies « postsympathectomies »

Figure 23 Fermeture de la thoracotomie.

Très fréquentes après sympathectomie lombaire, elles sont rares après sympathectomie thoracique. Elles existent cependant, peuvent prêter à confusion à gauche avec une douleur angineuse ; elles disparaissent toujours et sont à différencier des douleurs par traumatisme des nerfs intercostaux.

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Dumont,4 sur une série de 124 patients dont 72 % de femmes, opérés tous pour hyperhidrose, retrouve des résultats favorables à 98 % pour les mains et à 63 % pour les aisselles. L’hypersudation compensatrice était présente dans 87 % des cas (sévère dans 36 % des cas, invalidante dans 6 % des cas). En dépit de cet inconvénient, 90 % des patients se sont déclarés très satisfaits ou satisfaits. Gossot13 a des résultats comparables en réalisant une sympathectomie sélective mais l’intensité de l’hypersudation compensatrice serait plus modérée. Lingh2 a obtenu de bons résultats dans les causalgies traitées précocement (moins de 3 mois) par sympathectomie réalisée par thoracoscopie.

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