Syndrome d’emphysème et fibrose pulmonaires combinés : comprendre le profil fonctionnel

Syndrome d’emphysème et fibrose pulmonaires combinés : comprendre le profil fonctionnel

Revue des Maladies Respiratoires (2013) 30, 173—175 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com ÉDITORIAL Syndrome d’emphysème et fibrose pulmona...

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Revue des Maladies Respiratoires (2013) 30, 173—175

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

ÉDITORIAL

Syndrome d’emphysème et fibrose pulmonaires combinés : comprendre le profil fonctionnel Syndrome of combined pulmonary fibrosis and emphysema: Understanding the functional profile

La première description d’un emphysème associé à une fibrose pulmonaire, et de ses conséquences sur la fonction respiratoire, date déjà d’une vingtaine d’années [1]. Mais c’est plus récemment, en 2005, que l’association d’un emphysème et d’une fibrose pulmonaire a été individualisée comme entité radioclinique par le groupe d’études et de recherche sur les maladies « orphelines » pulmonaires (GERM« O »P) [2], dans une étude réunissant 61 observations et mettant d’emblée en évidence les principales caractéristiques de cette association, peu après identifiée comme un syndrome [3]. Le syndrome d’emphysème et fibrose (SEF) pulmonaires combinés n’est pas exceptionnel, et ses principales caractéristiques sont maintenant bien connues. Même si la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) répond à la définition d’une maladie rare en Europe, avec une prévalence inférieure à une personne atteinte sur 2000 (la prévalence de la FPI est estimée entre 14 et 28 cas sur 100 000 [4]), un emphysème est associé dans 21 à 33 % des cas à l’imagerie. Le SEF est un syndrome, qui s’observe principalement chez les fumeurs ou anciens fumeurs, mais peut également se rencontrer au cours des connectivites dont surtout la polyarthrite rhumatoïde et la sclérodermie systémique (parfois chez des nonfumeurs) [5], ainsi que chez des sujets exposés à des agents agrochimiques [6], ou dans le cadre d’une cause génétique [7]. La présentation clinique et fonctionnelle du SEF est bien particulière, avec un tabagisme presque constant souvent important, une dyspnée d’effort marquée avec limitation à l’exercice, des volumes et débits pulmonaires préservés à la spirométrie, une diminution très importante de la capacité de diffusion du monoxyde de carbone, une diminution marquée de la saturation en oxygène et de PaO2 , et un risque très élevé (près de 50 %) de développer une hypertension pulmonaire. Le pronostic du SEF est mauvais, avec une médiane de survie de l’ordre de six ans ; l’apparition d’une hypertension pulmonaire précapillaire marque un tournant évolutif défavorable [8,9], la survie médiane n’étant que de 16 mois à partir du diagnostic d’hypertension pulmonaire au cathétérisme cardiaque droit [8]. Le cancer bronchopulmonaire semble également représenter une complication assez fréquente chez ces patients fumeurs ou anciens fumeurs [10].

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.rmr.2012.06.002. e par Elsevier Masson SAS pour la SPLF. 0761-8425/$ — see front matter © 2013 Publi´ http://dx.doi.org/10.1016/j.rmr.2013.02.013

174 Le SEF pose des difficultés et interrogations particulières de diagnostic et de prise en charge. Sur le plan de l’imagerie, il s’agit très souvent d’un emphysème paraseptal [2,6], sans que l’on sache pourquoi cette forme d’emphysème par ailleurs peu fréquente est caractéristique de ce syndrome. L’emphysème modifie l’aspect tomodensitométrique des anomalies interstitielles ; ainsi en présence d’un emphysème, des lésions histologiques de pneumopathie interstitielle non spécifique peuvent prendre un aspect pseudokystique en rayon de miel au scanner, conduisant à évoquer à tort un aspect de pneumopathie interstitielle commune [11]. Ainsi, il est plus difficile d’appliquer les critères diagnostiques de la FPI [12] lorsqu’un emphysème est associé, d’autant que les opacités en verre dépoli (qui sont plutôt en défaveur de la FPI lorsqu’elles sont importantes) sont assez fréquentes au cours du SEF. Sur le plan histologique, les lésions observées au cours du SEF ont été peu décrites et semblent relativement variées. La prise en charge thérapeutique du SEF n’est pas codifiée. Sur le plan fonctionnel respiratoire, le SEF amène également un certain nombre de commentaires et d’interrogations. Malgré un emphysème parfois marqué, il n’y a le plus souvent pas ou peu de trouble ventilatoire obstructif [2]. À l’inverse, les volumes pulmonaires sont conservés malgré la présence de fibrose pulmonaire. Ces observations ont été interprétées comme liées aux effets contraires de l’emphysème et de la fibrose sur les propriétés élastiques du poumon, mais peu de données objectives sont disponibles pour conforter cette hypothèse. Lorsque l’on quantifie l’emphysème et la fibrose indépendamment l’un de l’autre, on observe une corrélation du score d’emphysème avec les volumes pulmonaires (et une corrélation inverse avec le rapport de Tiffeneau) ; et une corrélation du score de fibrose avec le rapport de Tiffeneau (et une corrélation inverse avec les volumes pulmonaires) [13]. Lors de l’évolution de la maladie, dont on a pourtant rappelé le sombre pronostic, il y a peu de diminution de la capacité vitale et de la capacité de diffusion du monoxyde de carbone, en comparaison à des patients atteints de FPI sans emphysème [14], ce qui représente l’une des difficultés pour d’éventuels essais thérapeutiques. Dans ce numéro de la Revue des Maladies Respiratoires, Ponc ¸ot-Mongars et al. [15] décrivent l’évolution longitudinale des caractéristiques fonctionnelles respiratoires d’un patient en parallèle de son évolution tomodensitométrique, illustrant avec élégance les interactions possibles entre l’emphysème et la fibrose. En effet dans cette observation, un patient suivi pour une bronchopneumopathie chronique obstructive avec emphysème a développé secondairement une fibrose pulmonaire, ce qui s’est accompagné d’une diminution des volumes pulmonaires (restant dans les limites de la normale) et de la normalisation du rapport de Tiffeneau initialement bas. L’évolution a été marquée par une hypertension pulmonaire avec hypoxémie profonde et des syncopes d’effort puis le décès. Il avait déjà été établi que l’emphysème précède habituellement la fibrose au cours du SEF [2], mais l’impact de cette chronologie sur le profil fonctionnel n’avait pas été décrit. Cette observation illustre les interactions entre emphysème et fibrose, avec la correction de la distension thoracique et de l’obstruction par la fibrose, et un profil fonctionnel respiratoire devenant

Éditorial finalement caractéristique du SEF. Elle illustre également comment une observation clinique bien décrite et interprétée peut contribuer à une meilleure connaissance d’une situation clinique.

Déclaration d’intérêts V. Cottin déclare avoir participé comme membre du comité de pilotage, investigateur, membre du comité d’adjudication, ou membre du comité de surveillance, à des essais thérapeutiques sur la fibrose pulmonaire idiopathiques dont la promotion était assurée par Actelion, Boehringer Ingelheim, Gilead, Intermune, et Johnson et Johnson, et avoir participé à des actions de formation, communications, et groupes de travail avec Actelion, Boehringer Ingelheim et Intermune.

Références [1] Hiwatari N, Shimura S, Takishima T. Pulmonary emphysema followed by pulmonary fibrosis of undetermined cause. Respiration 1993;60:354—8. [2] Cottin V, Cordier JF. Combined pulmonary fibrosis and emphysema: an experimental and clinically relevant phenotype. Am J Respir Crit Care Med 2005;172:1605, author reply-6. [3] Cottin V, Cordier JF. The syndrome of combined pulmonary fibrosis and emphysema. Chest 2009;136:1—2. [4] Nalysnyk L, Cid-Ruzafa J, Rotella P, et al. Incidence and prevalence of idiopathic pulmonary fibrosis: review of the literature. Eur Respir Rev 2012;21:355—61. [5] Cottin V, Nunes H, Mouthon L, et al. Combined pulmonary fibrosis and emphysema syndrome in connective tissue disease. Arthritis Rheum 2011;63:295—304. [6] Daniil Z, Koutsokera A, Gourgoulianis K. Combined pulmonary fibrosis and emphysema in patients exposed to agrochemical compounds. Eur Respir J 2006;27:434. [7] Cottin V, Reix P, Khouatra C, et al. Combined pulmonary fibrosis and emphysema syndrome associated with familial SFTPC mutation. Thorax 2011;66:918—9. [8] Cottin V, Le Pavec J, Prevot G, et al. Pulmonary hypertension in patients with combined pulmonary fibrosis and emphysema syndrome. Eur Respir J 2010;35:105—11. [9] Mejia M, Carrillo G, Rojas-Serrano J, et al. Idiopathic pulmonary fibrosis and emphysema: decreased survival associated with severe pulmonary arterial hypertension. Chest 2009;136:10—5. [10] Usui K, Tanai C, Tanaka Y, et al. The prevalence of pulmonary fibrosis combined with emphysema in patients with lung cancer. Respirology 2011;16:326—31. [11] Akira M, Inoue Y, Kitaichi M, et al. Usual interstitial pneumonia and nonspecific interstitial pneumonia with and without concurrent emphysema: thin-section CT findings. Radiology 2009;251:271—9. [12] Raghu G, Collard HR, Egan JJ, et al. An Official ATS/ERS/JRS/ALAT statement: idiopathic pulmonary fibrosis: evidence-based guidelines for diagnosis and management. Am J Respir Crit Care Med 2011;183:788—824. [13] Brillet P, Cottin V, Letoumelin P, et al. Combined apical emphysema and basal fibrosis syndrome (emphysema/fibrosis syndrome): CT imaging features and pulmonary function tests. J Radiol 2009;90:43—51. [14] Akagi T, Matsumoto T, Harada T, et al. Coexistent emphysema delays the decrease of vital capacity in idiopathic pulmonary fibrosis. Respir Med 2009;103:1209—15.

Syndrome d’emphysème et fibrose pulmonaires combinés : comprendre le profil fonctionnel [15] Ponc ¸ot-Mongars R, Zysman M, Regent D, et al. Syndrome emphysème — fibrose pulmonaire : histoire naturelle de la maladie. Évolution chronologique clinique, fonctionnelle respiratoire et scanographique. Rev Mal Respir 2013.(sous presse).

V. Cottin a,b,∗ a Service de pneumologie, centre national de référence des maladies pulmonaires rares, centre de compétences de l’hypertension pulmonaire, hôpital Louis-Pradel, hospices civils de Lyon, Lyon, France

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b Inra, UMR754, IFR 128, université de Lyon, université Claude-Bernard Lyon 1, 28, avenue Doyen-Lepine, Lyon, France ∗ Inra,

UMR754, IFR 128, 28, université de Lyon, université Claude-Bernard Lyon 1, avenue Doyen-Lepine, Lyon, France. Adresse e-mail : [email protected]