Traitement chirurgical du prolapsus génital chez les femmes âgées de plus de 80 ans

Traitement chirurgical du prolapsus génital chez les femmes âgées de plus de 80 ans

J Gynecol Obstet Biol Reprod 2006 ; 35 : 685-690. Travail original Traitement chirurgical du prolapsus génital chez les femmes âgées de plus de 80 an...

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J Gynecol Obstet Biol Reprod 2006 ; 35 : 685-690.

Travail original Traitement chirurgical du prolapsus génital chez les femmes âgées de plus de 80 ans À propos de 48 patientes opérées par voie vaginale L. Boulanger, J.-P. Lucot, M. Boukerrou, P. Collinet, M. Cosson Service de Gynécologie Médico-Chirurgicale, Hôpital Jeanne-de-Flandre, Centre Hospitalier Régional et Universitaire, 2, avenue Oscar-Lambret, 59037 Lille Cedex. RÉSUMÉ But. Étudier l’innocuité et les résultats fonctionnels du traitement chirurgical complet par voie vaginal du prolapsus génital chez des patientes de plus de 80 ans. Matériels et méthodes. Nous avons réalisé une étude rétrospective sur les patientes de plus de 80 ans opérées dans notre service entre 1996 et 2003. Nos critères de jugement étaient l’innocuité de la chirurgie et le résultat anatomique et fonctionnel de la chirurgie. Résultats. Quarante-huit patientes ont été opérées durant cette période. Aucun colpocléisis n’a été réalisé. L’intervention la plus fréquemment pratiquée était la correction des 3 étages par l’association des techniques de plastron, de sacrospinofixation de Richter et de périnéorraphie postérieure. Aucune complication majeure n’est survenue en cours d’intervention ou en période postopératoire. Une seule patiente a dû être transfusée pour une anémie mal tolérée. La complication la plus fréquemment retrouvée était la rétention urinaire persistante (12 %) qui n’existait plus à 3 mois de l’opération. Une sténose partielle post opératoire de l’uretère pelvien gauche associée à une urétéro-hydronéphrose a nécessité une dilatation endoscopique. 92 % des patientes avaient un résultat anatomique et fonctionnel satisfaisant à 3 mois. À un an, le trop grand nombre de perdus de vue ne permettait pas de conclure. Conclusion. Le traitement complet du prolapsus génital par voie vaginale est une technique sûre chez les patientes âgées, avec un résultat anatomique et fonctionnel satisfaisant à court terme. Mots-clés : Prolapsus génital • Chirurgie vaginale • Chirurgie chez les patients âgés. SUMMARY: Transvaginal surgery for genital prolapse in women aged over 80 years: results in 48 procedures. Objectives. The aim of this study was to assess the morbidity and the effectiveness of the vaginal surgical treatment for women over 80 years of age with genital prolapse. Materials and methods. All the women over 80 years operated in our institution between 1996 and 2003 were reviewed retrospectively. We examined the risk and the effectiveness of this surgery. Results. Forty-eight women underwent surgery during this period. No colpocleisis was performed. The most frequent surgery was a combination of vaginal patch plastron, Richter’s spinous fixation and posterior perineorrhaphy. No major intra- or post-operative complication occurred. One woman required blood transfusion. The most frequent postoperative complication was voiding difficulties (12%), which had disappeared 3 months later. A partial stenosis of a left ureter with ureterohydronephrosis occurred, requiring endoscopic dilatation. At 3 months, anatomic and functional outcome was good in 92% of women. The number of patients lost to follow-up at one year was to large to draw any conclusion. Conclusion. Complete transvaginal surgical treatment is a safe procedure for elderly women which provides good shortterm effectiveness. Key words: Pelvic organ prolapse • Vaginal surgery • Surgery in elderly patients.

L’allongement de l’espérance de vie, l’amélioration de l’information médicale, le désir d’une qualité de vie meilleure sont autant de facteurs qui expliquent que des femmes de plus en plus âgées souhaitent une prise en charge active de leur prolapsus uro-génital. On estime ainsi qu’avant 80 ans 11,1 % des femmes

seront traitées chirurgicalement pour un prolapsus génital symptomatique [1]. Le choix thérapeutique pour ces patientes se fait entre l’abstention thérapeutique, la mise en place d’un pessaire et la chirurgie réparatrice. Les traitements chirurgicaux peuvent être réalisés par voie vaginale,

Correspondance : J.-P. Lucot, à l’adresse ci-dessus. E-mail : [email protected] Reçu le 20 février 2006. Avis du Comité de Lecture le 30 mai 2006. Définitivement accepté le 16 août 2006.

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par laparotomie ou par cœlioscopie. Par voie vaginale, on distingue les opérations qui cloisonnent l’orifice vulvaire (colpocléisis) des chirurgies fonctionnelles conservatrices. L’évolution de l’anesthésie, et plus particulièrement de la pharmacologie et des techniques locorégionales, mais aussi le développement des techniques chirurgicales peu invasives par voie vaginale permettent désormais de proposer ces opérations à des femmes âgées. Des études ont montré chez des patientes âgées l’intérêt de la chirurgie de l’incontinence urinaire et en particulier du TVT (Tension free Vaginal Tape) [2, 3]. Mais on retrouve peu d’étude s’intéressant à l’innocuité de la chirurgie du prolapsus chez les femmes âgées [4, 5]. Le but de notre étude était de déterminer l’innocuité et l’efficacité du traitement chirurgical du prolapsus génital par voie vaginale chez des patientes âgées. Nous rapportons notre expérience de chirurgie complète du prolapsus par voie vaginale, associée ou non à un geste urinaire, chez 48 femmes âgées de 80 ans et plus. Nous n’avons jamais pratiqué de colpocléisis. MATÉRIEL ET MÉTHODES

Nous avons étudié rétrospectivement les dossiers des patientes de plus de 80 ans opérées entre 1996 et 2003 dans le service de chirurgie gynécologique de l’hôpital Jeanne-de-Flandre, à Lille. Nous avons relevé les données concernant les caractéristiques gynécologiques de ces patientes, les co-morbidités, la présence d’une incontinence urinaire associée, le type de chirurgie pratiquée et les complications per et postopératoires. La classification utilisée pour décrire le prolapsus était celle de Baden et Walker [6]. Nous nous sommes intéressés aux résultats anatomiques et fonctionnels à 3 mois et à 1 an. Les interventions chirurgicales de correction du prolapsus pouvaient être : — pour la cystocèle, la technique du plastron vaginal [7] qui consiste en un soutènement vésical par lambeau vaginal (de 6 à 8 cm de hauteur et 4 cm de large). Il est isolé à partir de la colpocèle antérieure, laissé accolé à la vessie, et suspendu par fixation à l’arc tendineux du fascia pelvien par 3 points de chaque côté. L’autre technique employée était celle de Campbell [8] ;

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— la sacrospinofixation de Richter [9] pour traiter l’étage médian et postérieur céphalique et une plastie périnéale postérieure pour l’étage postérieur podalique ; — la technique Tension free Vaginal Mesh (TVM) [10] qui consiste en la correction des 3 étages par l’interposition de prothèses antérieure et postérieure posées par voie vaginale avec passage trans-obturateur et trans-sacrospinal. Pour le traitement de l’incontinence urinaire, les interventions réalisées pouvaient être : — la fronde sous-urétrale de Crépin [11] ; — la technique TVT (Tension free Vaginal Tape) [12] ; — la technique de Bologna [8] ; — le procédé de Marion-Kelly [8]. Nos critères de jugement étaient l’innocuité de la chirurgie et le résultat anatomique et fonctionnel de la chirurgie. L’état physiologique préopératoire des patientes était évalué par le score ASA (American Society of Anesthesiologists) [13]. Le type d’anesthésie et de chirurgie réalisée, la durée de la chirurgie et de l’hospitalisation, les complications per et postopératoires immédiates et les complications à long terme étaient relevés. Une évaluation des pertes sanguine était réalisée en calculant la différence entre le taux d’hémoglobine préopératoire et celui réalisé deux jours après l’intervention. Les patientes étaient revues à 3 mois et à un an. Un examen pelvi-périnéal était réalisé et le résultat fonctionnel de la chirurgie de l’incontinence éventuelle évalué. RÉSULTATS

Quarante-huit patientes de plus de 80 ans ont été opérées d’un prolapsus génital dans notre service durant la période d’étude. Le tableau I rapporte leurs caractéristiques cliniques. L’âge moyen était de 83,8 ans, l’âge maximum était 95 ans et sept patientes avaient plus de 88 ans. Quatre (8 %) avaient eu un infarctus du myocarde. Six patientes (12,5 %) étaient sous aspirine à visée anti-agrégant plaquettaire au long cours et deux (4 %) sous antivitamine K relayés par héparine de bas poids moléculaire avant l’opération. Six ne prenaient aucun traitement médicamenteux. Trois patientes avaient des antécédents personnels de cancer du sein, deux de cancer de l’utérus et une de cancer de l’ovaire. Les caractéristiques uro-gynécologiques des patientes sont résumées dans le tableau II. Toutes avaient au

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Tableau I

Caractéristiques cliniques des 48 patientes opérées d’un prolapsus par voie vaginale (n (%) ou écart-type [ ]). Clinical history of the 48 patients.

Âge (année)

83,8

[3, 2]

Tableau III

Techniques chirurgicales utilisées pour traiter le prolapsus génital et l’incontinence urinaire. Surgical treatments used to treat pelvic organ prolapse and stress urinary incontinence.

Interventions réalisées Prolapsus

Parité moyenne

3,0

Antécédent cardiovasculaire

34

(71 %)

Hystérectomie vaginale

4

(8 %)

Amputation du col restant

Cardiopathie post-ischémique

n (%) 33 (68,7 %) 3 (6,2 %)

Angor

4

(8 %)

Plastron de Crépin

Hypertension artérielle

32

(67 %)

Intervention de Campbell

2

(4 %)

Sacrospinofixation de Richter

33 (68,7 %)

2

(4 %)

Périnéorraphie postérieure

40 (83,3 %)

TVM antérieur et postérieur

5 (10,4 %)

AVC Diabète ID et NID Altération des fonctions supérieures

2

(4 %)

Aucune comorbidité

5

(10 %)

Caractéristiques uro-gynécologiques des patientes [n (%)]. Uro-gynecological characteristics of the patients.

Caractéristiques

Nombre de patientes

8 (16,7 %)

(dont 4 avec une hystérectomie vaginale) TVM postérieur seul

Tableau II

27 (56,2 %)

1 (2,1 %)

Incontinence urinaire Fronde sous-urétrale

11 (23 %)

TVT

7 (14,6 %)

Intervention de Bologna

7 (14,6 %)

Intervention de Marion-Kelly

1 (2 %)

Antécédents : Intervention antérieure pour prolapsus

3

(6,2 %)

Hystérectomie totale ou sub-totale antérieure

11

(23 %)

Utilisation antérieure d’un pessaire

8

(16,7 %)

26

(54,2 %)

Incontinence urinaire associée Examen clinique : Cystocèle

III

12

(25 %)

IV

19

(39,6 %)

Hystérocèle III

4

(8,3 %)

IV

19

(39,6 %)

III

6

(12,5 %)

IV

11

(22,9 %)

Rectocèle

moins accouché une fois par voie vaginale. Onze (23 %) avaient déjà eu une hystérectomie totale ou sub-totale. Trois femmes (6 %) avaient déjà été traitées chirurgicalement pour un prolapsus. Le prolapsus était complètement extériorisé (stade 4) chez 31 patientes (65 %) et était au moins au stade 3 sur un des étages chez les autres patientes. Sur les huit patientes (17 %) qui avaient déjà utilisé un pessaire, trois présentaient une ulcération vaginale et il était devenu inefficace chez les autres. Cinq autres patientes avaient des ulcérations vaginales sur des prolapsus extériorisés. Une incontinence urinaire d’effort,

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objectivée en urodynamique, était associée chez 26 patientes (54 %). Le score ASA moyen était 2,1 (+/– 0,4). Le score minimal était 1 (3 patientes) et le score maximal 3 (7 patientes). Une anesthésie générale a été réalisée chez 31 patientes (64 %). Les anesthésies locorégionales se répartissaient en rachianesthésie (15 %), anesthésie péridurale (19 %) et rachianesthésie/péridurale combinée (2 %). Toutes les patientes ont reçu une antibioprophylaxie peropératoire et une prophylaxie antithrombotique par héparine de bas poids moléculaire durant leur hospitalisation. Toutes les patientes ont été opérées par voie vaginale. Les techniques employées pour traiter le prolapsus et l’incontinence urinaire sont rapportées dans le tableau III. Aucun colpocléisis n’a été réalisé. Huit chirurgiens ont effectué les interventions. Tous formés à la même « école », leur technique était similaire. Il s’agissait de 4 praticiens seniors et de 4 chefs de clinique. Une majorité de patientes (27) a été opérée par le même chirurgien senior. Les techniques TVM ont été réalisées par un seul chirurgien à partir de 2002. Pour le traitement du prolapsus, 42 patientes (87,5 %) ont été opérées sans interposition prothétique et 6 avec utilisation de prothèses. Pour traiter l’incontinence urinaire, une fronde sous-urétrale a été réalisée le plus souvent (23 %).

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Il n’y a pas eu de conversion en laparotomie en cours d’intervention. La durée opératoire moyenne était de 120 min (+/– 40 min). Il n’y a eu aucune complication majeure au cours des interventions chirurgicales. Une seule patiente a été transférée durant 48 h en réanimation chirurgicale. Ce transfert était prévu à cause des antécédents cardiaques de la patiente. La chute moyenne d’hémoglobine était de 2,1 g/dl (+/– 1,4). Trois patientes ont eu une chute d’hémoglobine de plus de 4 g. Une patiente a reçu 2 concentrés globulaires deux jours après l’intervention pour une anémie à 8,6 g/dl mal tolérée. Sa sortie a pu être autorisée au 6e jour postopératoire. La durée moyenne d’hospitalisation était de 7,4 jours (+/– 2,5). Les principales complications postopératoires observées étaient des rétentions urinaires persistantes nécessitant des auto-sondages après la sortie du service. Sur les 6 patientes (12 %) concernées, 4 avaient eu un traitement d’une incontinence urinaire. À 3 mois, ces patientes ne présentaient plus de trouble. Une patiente a eu une fracture de l’humérus au 4e jour postopératoire suite à une chute dans sa chambre. Elle a eu un traitement orthopédique. Une sténose partielle de l’uretère pelvien gauche associée à une urétéro-hydronéphrose a été diagnostiquée chez une patiente 3 mois après l’opération devant des douleurs abdominales persistantes. Cette patiente, avec antécédent d’hystérectomie sub-totale, avait un prolapsus extériorisé traité par résection du col restant, plastron, sacrospinofixation de Richter et périnéorraphie postérieure. Une fronde sous-urétrale avait aussi été réalisée pour traiter une incontinence urinaire d’effort associée. Une dilatation endoscopique a été pratiquée avec un bon résultat fonctionnel. À 3 mois, trente neuf patientes (81 %) ont été revues. Trente-sept patientes présentaient un bon résultat anatomique et fonctionnel. Aucune ne présentait d’altération de son autonomie à l’interrogatoire. Une présentait une cystocèle de grade II après la réalisation d’une intervention associant hystérectomie vaginale, plastron, sacrospinofixation de Richter et périnéorraphie postérieure. La seconde présentait une rectocèle de grade II dans les suites d’un TVM postérieur isolé pour une rectocèle extériorisée. À un an, 10 % des patientes ont été revues. La patiente qui présentait une récidive de cystocèle a été opérée avec mise en place d’une prothèse TVM antérieure. La patiente qui avait une récidive de rectocèle présentait le même examen clinique qu’à 3 mois. Enfin, une patiente traitée par résection col, plastron,

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sacrospinofixation de Richter, périnéorraphie postérieure et fronde a présenté une récidive de son incontinence urinaire nécessitant la pose d’un TVT. DISCUSSION

Cette étude rétrospective rapporte notre expérience, chez des femmes âgées, du traitement chirurgical complet par voie vaginale exclusive de prolapsus vaginaux massifs et symptomatiques. Cette prise en charge apparaît sûre et présente un résultat anatomique satisfaisant à 3 mois. Chez les femmes âgées, le choix d’un traitement du prolapsus se fait entre un traitement conservateur par pessaire, un traitement chirurgical par colpocléisis ou une chirurgie fonctionnelle conservatrice. L’utilisation d’un pessaire est limitée car le prolapsus à traiter est souvent volumineux et extériorisé. Il est responsable à la longue d’une ulcération vaginale qui entraîne des saignements empêchant dès lors son utilisation [14], ce que nous retrouvons dans notre étude. Seulement 17 % des patientes que nous avons opérées avaient précédemment utilisées un pessaire. Ce taux est faible par rapport aux données de la littérature puisque 55 % des patientes opérées par Schweitzer [5] et 44 % par Nieminen [4] avaient déjà utilisé un pessaire. Notre politique de service de favoriser une réparation chirurgicale chez toutes les patientes en bonne santé explique sans doute ces résultats. Le nombre élevé de prolapsus extériorisés, difficiles à contrôler avec un pessaire, explique aussi ces chiffres. Les patientes porteuses d’un pessaire souhaitent un traitement chirurgical de leur prolapsus si elles sont âgées de moins de 65 ans, si le prolapsus est supérieur au stade III à l’étage postérieure et si désiraient déjà être opérées lors de la première consultation [14, 15]. Le colpocléisis est une intervention qui ne renforce pas le plancher pelvien défaillant mais qui oblitère le vagin. Ses avantages sont la rapidité d’intervention et la réalisation possible sous anesthésie locale. Mais il compromet la fonction sexuelle et le diagnostic précoce d’un cancer utérin [16, 17]. Le problème de la préservation de la fonction sexuelle semble cependant marginal chez les femmes âgées car dans une population de femmes britanniques, Barlow relève 4 % des femmes actives sexuellement entre 75 et 84 ans et aucune après 85 ans [18]. Il était aussi classiquement reproché au colpocléisis d’augmenter l’incontinence urinaire d’effort, mais cela n’est pas retrouvé dans des séries récentes [19-21]. Il faut toutefois souligner que dans ces publications le colpocléisis est souvent asso-

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cié à un geste urinaire et une colpopérinéorraphie postérieure pour en améliorer les résultats fonctionnels. La durée d’intervention moyenne s’élève alors à 75 min pour Denehy [21] et 101 min pour DeLancey [20], contre 120 min dans notre série et 93 min dans celle de Nieminen [4] où toutes les patientes avaient une fixation vaginale au ligament sacrospinal. Le principal avantage du colpocléisis, c’est-à-dire sa rapidité est alors discutable. C’est pourquoi nous n’en avons plus réalisé aucun dans notre service depuis 8 ans. Seule la perte sanguine apparaît plus importante en cas de traitement conservateur puisque dans sa série de colpocléisis DeLancey l’estime à 206 ml (+/– 171) alors que Nieminen dans sa série de sacrospinofixation l’estime à 350 ml (+/– 300). Peu d’études se sont intéressées au traitement chirurgical conservateur par voie vaginale du prolapsus génital chez les femmes âgées de plus de 80 ans [4, 5]. Cette chirurgie y apparaît sûre dans une population de patientes sélectionnées. Les femmes que nous avons opérées étaient ainsi en bonne santé puisque leur score ASA les classaient majoritairement comme « patientes avec atteinte systémique légère ». 71 % avaient des pathologies cardiovasculaires, essentiellement une hypertension artérielle. Notre population est en cela superposable aux données de la littérature qui retrouvent des pathologies cardiovasculaires associés autour de 60 % lors d’opération pour prolapsus chez des femmes âgées [22]. Il apparaît aussi que peu de patientes présentant une démence soient prise en charge chirurgicalement (4 % dans notre étude). Aucun décès n’est survenu en cours d’intervention ou durant l’hospitalisation dans notre série. Les taux retrouvés de décès peropératoire oscillant entre 1 et 5 % selon le type de chirurgie pratiquée [4, 5, 21]. Nous n’avons noté aucune perte d’autonomie secondaire à l’intervention chez les patientes revues à 3 mois. Notre taux d’anesthésie locorégionale (36 %) était nettement inférieur à celui de l’étude de Schweitzer [5] où 81,25 % des interventions étaient réalisées sous anesthésie locorégionale. Ce faible taux s’explique par des habitudes anesthésiques locales plus tournées vers l’anesthésie générale. Le temps opératoire moyen (120 min) était plus long que dans la série de Nieminen [4] (93 min), mais elle était inférieure à celle de Denehy [21] (150 min) qui réalisait systématiquement une hystérectomie et une colpopérinéorraphie antérieure et postérieure. Il faut souligner le nombre d’opérateurs important (8) de notre série alors que dans la plupart des séries on

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ne retrouve qu’un seul opérateur. Cela montre la possibilité d’apprentissage au sein d’un service universitaire et la reproductibilité de la méthode. Ce temps opératoire est aussi probablement dû à la correction presque systématique des 3 « étages » pelviens. La durée moyenne d’hospitalisation de 7,4 jours dans notre étude était superposable à celle des autres études qui oscille entre 5 [21] et 10 jours [4, 5]. La principale limite de notre étude est le temps de suivi limité des patientes opérées. En effet, si 81 % ont été revues à 3 mois, seulement 10 % l’ont été à 1 an. Nous ne pouvons donc pas conclure quant au résultat anatomique et fonctionnel à long terme. Nous pouvons seulement souligner les bons résultats à court terme puisque 95 % des patientes présentaient un bon résultat anatomique et fonctionnel. L’innocuité de ces interventions est aussi à noter. En effet, aucun décès peropératoire n’est survenu et nous n’avons pas relevé de perte d’autonomie à 3 mois de l’intervention chez les patientes que nous avons revues. CONCLUSION

La correction du prolapsus par voie vaginale avec des techniques de réparation classique qui ne cloisonnent pas le vagin paraît sûre chez les femmes âgées, voire très âgées et présentant un score ASA allant jusqu’à 3. Nous pensons qu’on peut proposer à ces femmes une réparation complète de leur prolapsus, comme on le ferait pour des patientes plus jeunes. RÉFÉRENCES 1. Olsen AL, Smith VJ, Bergstrom JO, Colling JC, Clark AL. Epidemiology of surgically managed pelvic organ prolapse and urinary incontinence. Obstet Gynecol 1997; 89: 501-6. 2. Gordon D, Gold R, Pauzner D, Lessing JB, Groutz A. Tensionfree vaginal tape in the elderly: is it a safe procedure? Urology 2005; 65: 479-82. 3. Karantanis E, Fynes MM, Stanton SL. The tension-free vaginal tape in older women. Bjog 2004; 111: 837-41. 4. Nieminen K, Heinonen PK. Sacrospinous ligament fixation for massive genital prolapse in women aged over 80 years. BJOG 2001; 108: 817-21. 5. Schweitzer KJ, Vierhout ME, Milani AL. Surgery for pelvic organ prolapse in women of 80 years of age and older. Acta Obstet Gynecol Scand 2005; 84: 286-9. 6. Baden WF, Walker TA, Lindsey JH. The vaginal profile. Tex Med 1968; 64: 56-8. 7. Cosson M, Collinet P, Occelli B, Narducci F, Crepin G. The vaginal patch plastron for vaginal cure of cystocele. Preliminary results for 47 patients. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 2001; 95: 73-80.

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