Cancer du sein infiltrant chez les femmes de moins de 25 ans

Cancer du sein infiltrant chez les femmes de moins de 25 ans

Presse Med. 2006; 35: 1618-24 © 2006. Elsevier Masson SAS Tous droits réservés en ligne sur/ on line on Article original www.masson.fr/revues/pm C...

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Cancer du sein infiltrant chez les femmes de moins de 25 ans À propos de 13 cas

Nicolas Paillocher1, Sophie Abadie Lacourtoisie2, Éric Fondrinier3, Laurent Catala1, Clothilde Morand2, Jérôme Boursier4, Olivier Guerin5, Philippe Descamps1 1. Service de gynécologie-obstétrique, CHU, Angers (49) 2. Service d’oncologie médicale, centre Paul Papin, Angers (49) 3. Service d’oncologie chirurgicale, centre Paul Papin, Angers (49) 4. Service de gastro-entérologie, CHU, Angers (49) 5. Service d’épidémiologie, centre Paul Papin, Angers (49)

Correspondance : Reçu le 24 novembre 2005 Accepté le 8 juin 2006

Nicolas Paillocher, Service de gynécologie-obstétrique, CHU d’Angers, 49000 Angers. Tél. : 02 41 35 48 99 Fax : 02 41 35 35 32 [email protected]

■ Summary

■ Résumé

Infiltrating breast cancer in women younger than 25 years: 13 cases

Objectif > Étudier le pronostic du cancer du sein chez la femme de moins de 25 ans et le comparer aux autres tranches d’âge pour identifier des facteurs histopronostiques. Méthodes > Étude rétrospective de cas de carcinomes infiltrants du sein. Recueil des paramètres cliniques, histologiques et thérapeutiques. Établissement des taux de survie sans récidive et de survie globale à 5 ans. Résultats > Treize cas de carcinomes ont été observés parmi les 9900 cas traités de janvier 1977 à juillet 2005. L’âge moyen des patientes au moment du diagnostic était de 23,3 ans (IC = 1). Le délai diagnostique était de 6,6 mois (IC = 2,5). Cliniquement, la taille tumorale moyenne était de 28,78 mm (IC = 6,06) se répartissant en 46 % de T1, 31 % de T2 et 23 % de T4d. Nous retrouvions 92,3 % de carcinome canalaire infiltrant, avec dans 30 % des cas une composante in situ, dans 53,8 % des cas un grade 3 histopronostique et dans 23 % des cas un envahissement ganglionnaire axillaire. Les récepteurs hormonaux étaient positifs dans 61,5 % des cas. Au cours du suivi de la maladie, nous avons déploré deux décès soit un taux de survie globale à 5 ans de 91 % et 6 récidives soit un taux de survie sans récidive à 5 ans de 66,5 %.

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Objective > To study the prognosis of breast cancer in woman younger than 25 years and to compare it with that of other age groups to identify prognostic and histologic factors specific to this group. Method > Retrospective study of all cases of infiltrating ductal carcinoma treated at our hospital from January 1977 through July 2005, examining clinical, histologic, and treatment variables as well as 5year overall survival and 5-years disease-free survival rates. Results > The study included 13 women younger than 25 years at diagnosis. Their average age at diagnosis was 23.3 years (CI=1 year). Time from initial signs of disease until diagnosis averaged 6.6 months (CI=2.5). Clinically, the average tumor size was 28.78 mm (CI=6.06), with 46% classified as T1, 31% as T2 and 23% as T4d. We found 92.3% to be invasive ductal carcinoma, with 30% including an insitu component; 53.8% were SBR grade 3 and 23% included axillary node invasion. Hormone receptors were present in 61.5% of tumors.

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During the follow-up period, we observed two deaths (with a 5-year overall survival rate, however, of 91%) and 6 recurrences (5-year disease-free survival: 66.5%). Conclusion > Prognosis appears unfavorable among young women (younger than 40 years) with breast cancer. In our series,neither prognosis nor clinical or histologic characteristics differed in the subgroup of very young women (younger than 26 years).

Conclusion > Globalement le pronostic du cancer du sein chez les femmes jeunes (âge < 40 ans) apparaît plus défavorable. Dans notre série, nous n’avons pas retrouvé de différence pronostique dans le sous-groupe des femmes très jeunes (âge < 26 ans), ni de caractéristiques propres, sur le plan clinique ou histologique.

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Cancer du sein infiltrant chez les femmes de moins de 25 ans

Paillocher N, Abadie Lacourtoisie S, Fondrinier É, Catala L, Morand C, Boursier J et al. Cancer du sein infiltrant chez les femmes de moins de 25 ans. À propos de 13 cas. Presse Med. 2006 ; 35: 1618-24 © 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

e cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. Son diagnostic est souvent établi après la ménopause. D’après la base de données du collège américain de chirurgie, seulement 0,8 % des cancers du sein sont diagnostiqués chez les femmes de moins de 30 ans [1]. Kollias et al. [2] ont estimé que pour les femmes de 26 à 35 ans, le risque de développer un cancer du sein était de 1,1 pour 10000 femmes. En Angleterre, l’incidence du cancer du sein chez les femmes âgées de 19 à 25 ans est de 1,2 cancer diagnostiqué pour 100000 femmes et l’incidence chez les femmes âgées de 15 à 19 ans est de 0,3 pour 100000 femmes [3]. Une seule étude a analysé 13 cas de cancer du sein diagnostiqué chez des femmes de moins de 25 ans nommant cette tranche d’âge les “femmes très jeunes” comparativement aux femmes âgées de 26 à 35 ans nommées les “femmes jeunes” [4]. Nous avons observé 13 cas de cancer du sein dont le diagnostic a été fait chez des patientes âgées de moins de 25 ans. Les caractéristiques tumorales et les différents facteurs pronostiques concernant ces 13 patientes ont été comparés aux données connues de la littérature chez des femmes de tranches d’âge différentes.

Ce qui était connu • Le pronostic péjoratif des cancers du sein chez les femmes jeunes. • Les facteurs histopronostiques.

Ce qu’apporte l’article • Nouvelle étude de cas avec évaluation de la survie sans récidive

Méthodes Paramètres cliniques Nous avons recherché les cancers infiltrants du sein avant 25 ans et pris en charge, de janvier 1977 à juillet 2005, dans le centre de recherche et de lutte contre le cancer d’Angers (centre Paul Papin). Pour chaque patiente, la recherche d’antécédents familiaux ou personnels de cancer était effectuée. Le délai entre les premiers signes de la maladie et le diagnostic était également noté. Enfin, nous nous sommes intéressés à la prise éventuelle d’œstroprogestatif pendant la période précédant le diagnostic. Cliniquement, la tumeur était évaluée selon la classification internationale TNM.

Paramètres histologiques Nous avons analysé à partir du compte rendu anatomopathologique: • la taille tumorale; • le nombre de ganglions métastatiques sur le curage axillaire; • la présence ou non d’une composante in situ; • le grade histologique selon la classification de Scarff Bloom et Richardson; • la présence d’éventuels emboles vasculaires tumoraux. Une étude imuno-histochimique a complété l’analyse, à la recherche: • des récepteurs tumoraux aux œstrogènes et à la progestérone; • d’une surexpression de l’oncogène HER2.

Modalités thérapeutiques

et de la survie globale.

Nous avons recueilli les informations sur les différents traitements.

• Rappeler que le cancer du sein chez les femmes très jeunes existe

Traitements chirurgicaux

et que le diagnostic doit être évoqué. • Mise au point thérapeutique, notamment sur l’hormonothérapie adjuvante chez les femmes jeunes et sur l’intérêt des analogues.

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Selon la taille tumorale (avec une limite classique fixée à 30 mm), le geste chirurgical était soit une tumorectomie avec ou sans curage axillaire, soit une mastectomie avec curage axillaire. Le curage axillaire était homolatéral à la lésion.

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Traitements médicaux • Radiothérapie: quand l’indication était retenue, les ganglions lymphatiques supraclaviculaires et la chaîne mammaire interne étaient irradiés et, pour les tumorectomies, une irradiation du sein et un complément d’irradiation sur le site de tumorectomie étaient réalisés. • Chimiothérapie: plusieurs types de chimiothérapie ont été réalisées, en fonction de la date du diagnostic: soit cyclophosphamide, 5 fluoro-uracile et méthotrexate (ou protocole CMF), soit doxorubicine, 5 fluoro-uracile, cyclophosfamide (ou protocole FAC), soit 5 fluoro-uracile, cyclophosfamide et novantrone (protocole FNC). • Hormonothérapie: les patientes dont le diagnostic a été établi après 1994 pouvaient avoir une hormonothérapie par tamoxifène pour les tumeurs récepteurs hormonaux (RH) positifs. Avant 1994, cette prescription n’était pas systématique. • Blocage de l’axe hypothalamo-hypophysaire: l’administration d’agonistes de la LH-RH ou la radiothérapie ovarienne pouvait également être effectuée.

Statistiques Les courbes de survie globale et de survie sans récidive ont été obtenues en utilisant la méthode de Kaplan-Meier [5].

Résultats De janvier 1977 à juillet 2005, 9990 cancers infiltrants du sein ont été pris en charge. Il y avait 14 patientes dont le diagnostic du cancer infiltrant du sein avait été effectué avant l’âge de 25 ans, soit 0,14 % des cancers infiltrants du sein suivis. Nous avons analysé rétrospectivement les dossiers de ces 14 patientes. Pour 1 cas, le diagnostic histologique principal était celui d’un angiosarcome. Ce type histologique possédant un traitement et un pronostic très différents des carcinomes mammaires habituels, la patiente a été exclue de l’étude. Nous avons analysé les données de 13 patientes.

Caractéristiques cliniques

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La moyenne d’âge au diagnostic était de 23,3 ans (intervalle de confiance ou IC de 1) avec des extrêmes allant de 19 à 25 ans. Six patientes sur 13 avaient eu, antérieurement au diagnostic, au moins une grossesse. Chez une patiente, le diagnostic était établi au cours d’une grossesse. Le délai entre les premiers symptômes et le diagnostic étiologique était de 6,6 mois (IC de 2,5). Trois patientes avaient des antécédents familiaux de cancer. Il s’agissait d’antécédents de cancer du sein au premier degré. Chez 1 patiente, il y avait un cancer du sein chez sa sœur, diagnostiqué en préménopause et un cancer du sein chez son père. La prise d’une contraception œstroprogestative au moment du diagnostic concernait 69 % des patientes (n = 9). Nous n’avons pas pu évaluer la durée de la prise de cette contraception hormonale.

Il y avait 6 cas de T1 (46 %), 3 cas de T2 (23 %) et 3 cas de T4d (23 %). Dans 1 cas, la taille tumorale n’était pas notée. Sur l’ensemble des tumeurs mesurables (n = 9), la taille tumorale moyenne était de 22,78 mm (IC = 6,06). Aucune patiente n’avait une symptomatologie évoquant des métastases à distance (tableau I).

Caractéristiques histologiques Il s’agissait histologiquement d’un carcinome canalaire infiltrant dans 12 cas (92,3 %). Seule 1 patiente avait une histologie différente à type de carcinome indifférencié. Chez 1 patiente, le carcinome canalaire infiltrant était associé à des lésions de lymphangites carcinomateuses. La composante in situ était trouvée dans 4 cas (31 %). il s’agissait de carcinome intracanalaire de haut grade dans 3 cas (75 %) (tableau I). L’analyse des curages ganglionnaires axillaires trouvait au moins 1 ganglion métastatique dans 3 cas (23 %). Le nombre de ganglions présent dans les curages allait de 6 à 21 et, dans les curages métastatiques, au maximum 50 % des ganglions étaient atteints. La présence d’emboles tumoraux était observée dans 3 cas (23 %). La tumeur était de grade 3 dans 7 cas (53,8 %), de grade 2 dans 5 cas (38,5 %) et de grade 1 dans 1 cas (7,7 %). Des récepteurs aux œstrogènes et à la progestérone étaient positifs dans 8 cas (61,5 %). L’étude de la surexpression de HER2 a également été effectuée, à 3 reprises (23 %). Un cas était positif (33,3 %).

Ta b l e a u I Synthèse des données cliniques et histologiques de 13 cas de cancers du sein infiltrant chez des femmes de moins de 25 ans Caractéristiques cliniques Âge moyen Antécédents familiaux Délai diagnostique Taille tumorale moyenne Seins inflammatoires

23,3 ans 3/13 6,6 mois 22,78 mm 3/13 (23 %)

Caractéristiques histologiques CCI Composante in situ

12/13 (92,3 %) 4/13 (30 %)

N+

3/13 (23,1 %)

Grade 3

7/13 (53,8 %)

RH +

8/13 (61,5 %)

CCI = carcinome canalaire infiltrant RH + = récepteurs hormonaux positifs

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Caractéristiques thérapeutiques

Délai diagnostique

Sur le plan chirurgical, 11 tumorectomies ont été réalisées associées à 9 curages axillaires et 1 mastectomie avec curage axillaire. Dans un cas, la prise en charge fut différente puisque la patiente n’a pas été opérée en raison d’une réponse complète à une association radiochiomiothérapie néoadjuvante. Les 13 patientes suivies ont eu une radiothérapie. Toutes les patientes, exceptées une dont la tumeur avait été classée de bon pronostic (T1, grade 1), ont eu une chimiothérapie soit en situation adjuvante dans 7 cas, soit en situation néoadjuvante dans 5 cas. Le protocole CMF a été administré à 3 patientes, le protocole FAC à 8 patientes et 1 patiente a été incluse dans le protocole FNC. Au total, 4 patientes ont reçu un traitement par tamoxifène. Par ailleurs, un blocage de l’axe hypothalamohypophysaire par administration d’agonistes de la LH-RH dans 3 cas ou par radiothérapie ovarienne dans 1 cas a également été effectué.

Le délai diagnostique peut être incriminé. Notre série rapporte un délai moyen > 6 mois. Ce délai plus long pourrait expliquer un diagnostic à des stades plus avancés de la maladie [8]. Deux hypothèses peuvent expliquer l’allongement du délai : la hiérarchisation des hypothèses diagnostiques qui ne fait pas évoquer le cancer en premier lieu chez les patientes très jeunes, et la difficulté d’interprétation des mammographies liée à la densité du tissu mammaire des femmes jeunes (sensibilité de 68 % versus 91 % chez les femmes de plus de 50 ans) [11].

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Mutations génétiques Les mutations génétiques semblent aussi jouer un rôle avec, dans les familles à haut risque de cancer du sein (mutation des gènes BRCA1 ou BRCA2), une incidence plus importante des cancers invasifs de haut grade [4, 12], des cancers bilatéraux et/ou multifocaux et des tumeurs n’exprimant pas les récepteurs aux

Suivi et évolution des patientes

Discussion Facteurs pronostiques Le pronostic des cancers du sein diagnostiqués chez les femmes jeunes a longtemps été un sujet de controverse [6, 7]. Selon Chung et al. [8], sur plus de 3700 patientes, la survie sans récidive apparaissait significativement plus faible à 5 ans chez les femmes de moins de 40 ans par rapport aux autres tranches d’âge et ce, quel que soit le stade initial de la maladie (60,8 % versus 73,2 % pour la tranche d’âge de 41 à 50 ans). Des résultats semblables, portant sur la survie globale, ont été observés par Kothari et al. [4] avec, en plus, une distinction faite sur la tranche des moins de 26 ans (regroupant 13 patientes), où le taux de survie globale à 10 ans était plus faible que celui de la tranche d’âge de 26 à 35 ans (sans que la différence soit significative). Plusieurs facteurs peuvent expliquer le mauvais pronostic des cancers du sein de la femme jeune (encadré 1). Âge L’âge est reconnu depuis longtemps comme étant un facteur pronostique indépendant dans le cancer du sein, notamment chez les patientes de moins de 35 ans [9, 10]. tome 35 > n° 11 > novembre 2006 > cahier 1

Ta b l e a u I I Comparaison des caractéristiques cliniques, histologiques et thérapeutiques entre les patientes qui ont récidivé et celles qui n’ont pas récidivé Récidive Âge (ans)

Pas de récidive

(n = 6)

(n = 7)

23,1 (IC = 1,8)

23,4 (IC = 1,3)

Délai diagnostique (ans)

7,5 (IC = 4,7)

5,9 (IC = 2,7)

Taille (mm)

19,3 (IC = 9,6)

25,6 (IC = 10,9)

CCI

CCI

2

5

3

2

Histologie Grade 3 2 1

1

Curage

2 N+

1 N+

RH

4 RH+

4 RH+

Encadré 1 Facteurs pronostiques péjoratifs principaux des cancers du sein de la femme jeune 1. le délai diagnostique 2. les mutations génétiques 3. la taille tumorale initiale 4. le grade histopronostique 5. le taux d’envahissement ganglionnaire 6. la sous-expression des récepteurs hormonaux 7. la surexpression de l’oncogène c-erb 2

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Deux décès ont été observés, à 35 mois du diagnostic pour l’un et à 85 mois pour l’autre. Pour les 2 patientes, la cause du décès était imputable à l’évolution de la maladie. Le taux de survie globale était donc de 91 % à 5 ans (figure 1). Le taux de récidive était de 46,2 % (n = 6) (tableau II). Le délai de survenue de ces récidives était de 49,6 mois (IC = 36,6). Dans 3 cas, la récidive était locale, dans 1 cas, la récidive était controlatérale et dans 2 cas, elle était métastatique avec une forme osseuse et une forme multi-métastatique. Au total, le taux de survie sans récidive à 5 ans était de 66,5 % (figure 2).

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œstrogènes et à la progestérone [12]. Pour autant, l’incidence de ces cancers ne semble pas varier selon les tranches d’âge parmi les femmes jeunes [4, 13]. Caractéristiques tumorales Les caractéristiques tumorales ont des particularités chez les femmes jeunes. • La taille tumorale, pour certains, est plus importante chez les femmes de moins de 35 ans [14, 15]. • Le grade histologique est souvent plus élevé, comme dans notre série (53,8 % de grade 3). En revanche, la présence d’hyperplasie atypique apparaît plus rare chez les femmes jeunes, ce qui laisse supposer la formation de novo de ces cancers très agressifs car à grade nucléaire élevé [16]. • Le taux d’envahissement ganglionnaire de notre étude (23 % des cas) apparaît peu important au vu des autres résultats de la littérature. En effet, Fisher et al. [17] ont observé un taux de 60 % chez les patientes de moins de 39 ans, Walker et al. [13] un taux de 69 % chez les patientes de moins de 30 ans. L’incidence des métastases ganglionnaires chez les femmes très jeunes (moins de 26 ans) n’apparaît pas significativement plus importante que celle des femmes jeunes (26-35 ans) dans la série de Kothari et al. [4] avec un taux estimé à 33 %. Ces résultats montrent une certaine hétérogénéité, et la comparaison entre les tranches d’âge ne retrouve pas de différence significative dans l’incidence de l’envahissement ganglionnaire [18].

• L’expression des récepteurs aux œstrogènes et à la progestérone est, dans la littérature, plus faible chez les patientes jeunes (Albain et al. ont observé une expression des récepteurs aux œstrogènes dans 57 % des cas dans une population de femmes âgées de 30 à 34 ans) [15]. Or, il est prouvé que la présence des récepteurs hormonaux et notamment celle des œstrogènes est associée à une meilleure différenciation tumorale et donc de meilleur pronostic [19]. L’absence d’expressivité des récepteurs hormonaux était associée de façon significative à une plus faible survie sans récidive et une plus faible survie globale [20]. • L’oncogène c-erb2 est aussi un facteur pronostique important. Même s’il semble qu’il n’existe pas de différence d’expression de l’oncogène c-erb2 entre les différentes tranches d’âge, son expression est associée à une mauvaise différenciation tumorale [21, 22] et plus spécifiquement chez les femmes jeunes à un risque de récidive plus important [16]. De plus, d’après une étude de population, le polymorphisme génétique HER2 est corrélé à une augmentation du risque de cancer du sein, surtout chez les femmes jeunes [23]. • L’augmentation de l’incidence de la mutation de la protéine p53 [13] ou encore d’autres facteurs histopronostiques (Ki67, le pourcentage de cellules en phase de synthèse d’ADN) [13] sont mis en cause chez les femmes jeunes pour tenter d’expliquer le pronostic plus défavorable des cancers du sein à cet âge.

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Figure 1

Figure 2

Courbe de survie globale (%)

Courbe de survie sans récidive (%)

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Le traitement du cancer du sein chez la femme jeune suit les mêmes recommandations que chez la femme plus âgée. L’âge jeune, associé à un pronostic plus péjoratif, impose une chirurgie parfois plus mutilante [4]. Cependant, il faut informer les patientes des possibilités de reconstruction mammaire en cas de mastectomie et la faisabilité des techniques de chirurgie oncoplastique en cas de traitement conservateur [24]. Les traitements adjuvants sont le plus souvent indiqués chez les femmes jeunes [25, 26] avec comme chef de file les traitements à base de chimiothérapies dont les protocoles ne diffèrent pas ou peu de ceux institués chez les femmes ménopausées. L’indication d’un traitement par hormonothérapie, lorsque les récepteurs hormonaux sont positifs, est établie. Contrairement aux femmes ménopausées chez qui les antiaromatases ont leur place dans le traitement, l’hormonothérapie de la femme jeune reste l’apanage du tamoxifène dont la preuve de l’efficacité a été montrée par une méta-analyse en 1998 [27]. Sa prescription est effectuée après le traitement par chimiothérapie et reconduite pour une durée totale de traitement de 5 ans. La castration ovarienne est controversée. La méta-analyse de l’Early breast cancer trialist’s collaborative group, publiée en 1996, a montré une activité importante de la castration, similaire à la chimiothérapie, avec une réduction annuelle du risque de rechutes de 24 % et de la mortalité de 25 % [28]. Une autre étude a montré l’efficacité de l’association castration + tamoxifène après la chimiothérapie chez les patientes de moins de 40 ans non aménorrhéiques après la chimiothérapie [29]. Des interrogations subsistent, notamment concernant le traitement optimal à proposer (castration seule ou associée au tamoxifène voire à une antiaromatase), sur la durée optimale du traitement (les essais anciens se fondent sur un traitement définitif et les essais plus récents proposent des durées de 2 ou 3 ans), ou encore sur le meilleur moment pour installer la castration. Du point de vue des modalités de réalisation de la castration, les analogues de la LH-RH, qui induisent une aménorrhée temporaire, ont largement pris le pas sur les autres techniques de castration que sont l’ovariectomie et l’irradiation ovarienne, depuis qu’il a été démontré que leur efficacité était identique [30, 31].

Fertilité, grossesse et contraception après traitement Après un traitement adjuvant pour un cancer du sein chez une patiente de plus de 45 ans, on peut considérer que la ménopause va être avancée dans 80 à 100 % des cas [32]. Chez les

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patientes de moins de 40 ans, et avec les chimiothérapies par anthracyclines ou taxanes, ce taux est nettement réduit. La fertilité est conservée dans le cadre d’un traitement par tamoxifène, cependant ce médicament est tératogène chez l’animal imposant une contraception efficace pendant toute la durée de son administration. Le pronostic d’un cancer du sein traité n’est pas aggravé par la grossesse [33]. Il est cependant recommandé de respecter un délai, fondé sur le moment de survenue des récidives locorégionales et des métastases, afin d’éviter la survenue concomitante d’une grossesse et d’une récidive. Ainsi, il paraît raisonnable de proposer un délai de 2 à 3 ans pour les patientes ayant un cancer de bon pronostic et un délai de 5 ans pour les patientes ayant un cancer du sein de mauvais pronostic. La contraception des femmes jeunes aux antécédents de cancer du sein pose un vrai problème. Il n’existe pas d’études prospectives évaluant les effets d’une contraception hormonale chez une patiente ayant eu un cancer du sein. De ce fait, l’idéal est d’avoir recours à une contraception non hormonale (en particulier le stérilet au cuivre).

Conclusion L’étude du cancer du sein chez les femmes très jeunes (moins de 25 ans) est difficile puisque plus rare, impliquant une analyse rétrospective des dossiers sur une période assez longue, suggérant une hétérogénéité des prises en charge au fil du temps. Comparativement aux femmes jeunes (moins de 35 ans) étudiées dans la littérature, nous ne pouvons conclure à une différence de pronostic [4] et nous ne trouvons pas de caractéristiques spécifiques de la tranche d’âge moins de 25 ans tant cliniquement qu’histologiquement. Une étude complémentaire avec appariement à des patientes de 26 à 35 ans sur les caractéristiques tumorales principales pourrait peut-être permettre de mieux distinguer ces 2 sous-populations de femmes jeunes. Le pronostic reste globalement plus péjoratif chez les jeunes femmes atteintes d’un cancer du sein. Une prise en charge thérapeutique agressive est donc nécessaire avec le recours quasi systématique à un traitement adjuvant et une importante rigueur sur le contrôle local de la maladie même au prix d’une chirurgie plus mutilante.

Conflits d’intérêt : aucun

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Prise en charge thérapeutique

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tome 35 > n° 11 > novembre 2006 > cahier 1