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www.sciencedirect.com Chirurgie de la main 31 (2012) 337–343
Article original
Traitement chirurgical par embrochage percutané des fractures articulaires de la base du cinquième métacarpien (étude descriptive à propos de 20 cas) Surgical treatment by percutaneous pinning of articular fractures of the base of the fifth metacarpal (descriptive study about 20 cases) K. Ibn el kadi *, B. Chbani, M. Benabid, S. Almoubaker, F. Boutayeb Service de traumatologie orthopédie A, CHU Hassan II de Fès, résidence Bilal, no 10, boulevard Almadina Mounaouara, Hay Amal, Narjiss, Fès, Maroc Reçu le 22 janvier 2012 ; reçu sous la forme révisée le 3 septembre 2012 ; accepté le 11 octobre 2012
Résumé Objectifs. – L’intérêt de ce travail est de montrer les avantages du traitement chirurgical des fractures articulaires de la base du cinquième métacarpien par double embrochage intermétacarpien. Patients et méthodes. – C’est une étude rétrospective de 20 cas de fractures articulaires de la base du cinquième métacarpien traités par embrochage percutané, entre janvier 2004 et décembre 2010. Le traitement était chirurgical chez tous nos patients après réduction fermée associé à un double embrochage transversal intermétacarpien. Résultats. – Après un recul moyen de 19 mois, on n’a pu suivre que 18 patients. Les résultats globaux étaient satisfaisants, à part deux patients qui ont rapporté des douleurs intermittentes en cas de changement météorologiques et d’utilisation intense de la main, et un cas de syndrome algodystrophique postopératoire. L’évaluation des résultats était basée sur des critères cliniques intéressant : la douleur, la mobilité, la force de préhension, et sur des critères radiologiques après l’analyse des radiographies spécifiques de l’hamato-métacarpienne. Conclusion. – Le double embrochage intermétacarpien est une technique de choix dans le traitement chirurgical des fractures articulaires du cinquième métacarpien. Il permet de garantir une meilleure réduction à foyer fermé, ainsi qu’un résultat fonctionnel satisfaisant. # 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Équivalent de la fracture de Bennett ; Base du cinquième métacarpien ; Traitement chirurgical
Abstract Objectives. – The aim of this study is to show the benefits of surgical treatment of intra articular fractures of the base of the fifth metacarpal by intermetacarpal double pinning. Patients and methods. – It is a retrospective study of 20 cases of intra-articular fractures of the base of the fifth metacarpal treated by percutaneous pinning, between January 2004 and December 2010. All patients had a closed reduction and intermetacarpal double pinning. Results. – After a mean of 19 months, we could review only 18 patients. The overall results were satisfactory, except for two patients who reported intermittent pain with changing weather and intense use of the hand, and a case of reflex sympathetic dystrophy syndrome after surgery. The evaluation of results was based on clinical criteria related to pain, mobility and grip strength, and on radiological criteria after analysis of specific hemato-metacarpal radiographs. Conclusion. – Intermetacarpal double pinning is a technique of choice in surgical treatment of intra-articular fractures of the base of the fifth metacarpal. It ensures good closed reduction and a satisfactory functional result. # 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Baby Bennett fracture; Fifth metacarpal base fracture; Surgical treatment
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (K. Ibn el kadi). 1297-3203/$ – see front matter # 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2012.10.165
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1. Introduction Les fractures articulaires de la base du cinquième métacarpien sont des lésions rares. Mais elles peuvent provoquer des complications graves si elles sont mal gérées, tel que la faiblesse de la force de préhension et l’extension du poignet, diminution de l’amplitude des mouvements, arthrose, rupture tendineuse, et instabilité du carpe [1–3]. Elles ressemblent aux fractures de Bennett et Rolando concernant leur mécanismes et tendance à l’instabilité [4,5]. Leur traitement reste un sujet controversé [6]. À travers une série de 20 fractures articulaires de la base du cinquième métacarpien colligées entre janvier 2004 et décembre 2010 et une revue de la littérature, nous passons en revue les données de l’anatomie, la biomécanique, la physiopathologie, les moyens diagnostiques et thérapeutiques et le pronostic de l’équivalent de la fracture de Bennett en montrant l’intérêt de l’ostéosynthèse par double embrochage intermétacarpien. 2. Patients et méthodes C’est une étude rétrospective portant sur 20 cas de fractures articulaires de la base du cinquième métacarpien colligés entre janvier 2004 et décembre 2010. L’âge moyen de nos patients était de 31 ans (extrêmes : 20–48 ans), on notait une prédominance masculine (15 hommes et cinq femmes). Le côté droit a été atteint dans 13 cas et le côté gauche dans sept cas. Un patient avait une fracture associée du col du cinquième métacarpien traitée par embrochage en L de Vives. Le mécanisme par coup de poing contre un plan dur, représentaient l’étiologie la plus fréquente (14 cas), suivi par les accidents de la voie publique (quatre cas) avec un mécanisme lésionnel difficilement appréciable, et les chutes d’escaliers (deux cas). les fractures ont été fermées. L’examen clinique initial [(Fig._Toutes 1)TD$FIG]
retrouvait une douleur localisée au niveau de la base du cinquième métacarpien avec œdème le long la région dorsoulnaire de la main. L’examen vasculonerveux était sans particularité. Un bilan radiologique comportant des radiographies standard de la main et du poignet de face, de profil et oblique, nous a permis de bien étudier les lésions en objectivant la fracture et éliminant une luxation hamato-métacarpienne associée (Fig. 1). Le traitement était chirurgical chez tous nos patients après réduction fermée par manœuvre de pression sur la partie dorsale et proximale de la base du métacarpien par l’index et le médius avec extension du métacarpien par le pouce, suivie d’une fixation par embrochage percutané transversal intermétacarpien chez tous nos patients dont un était associé à un embrochage en L de Vives pour la fracture du col du cinquième métacarpien (Fig. 2). Le contrôle radiologique était satisfaisant (Fig. 3 et 4). Une immobilisation par attelle antébrachio-palmodigitale en position intrinsèque plus des quatrième et cinquième rayons, était mise en place pour une durée de quatre semaines. Les broches ont été retirées deux semaines après l’ablation du plâtre. Une rééducation du poignet et des doigts a été entreprise. 3. Résultats Après un recul moyen de 19 mois, on n’a pu suivre en consultation que 18 patients. L’évaluation des résultats a été basée sur des critères cliniques incluant la douleur, la mobilité en flexion-extension des doigts, la force de serrage subjective et un bilan radiologique incluant des radiographies de face et de profil, centrées sur la région carpo-métacarpienne. La douleur a été étudiée en cinq stades : nulle, climatique, occasionnelle, fréquente et invalidante. Sur les 18 patients, 16 ne signalaient aucune douleur, deux ressentaient des douleurs climatiques et lors des efforts intenses. La mesure de
Fig. 1. Image radiologique de face et oblique montrant une fracture articulaire de la base du cinquiéme métacarpien droit.
[(Fig._ 2)TD$FIG]
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Fig. 2. Image radiologique de face et oblique montrant une fracture articulaire de la base du cinquiéme métacarpien droit associée à une fracture du col du cinquième métacarpien.
[(Fig._ 3)TD$FIG]
Fig. 3. Image de contrôle scopique de face et profil après réduction et embrochage transversal inter métacarpien.
la force au dynamomètre hydraulique de la main Jamar1 n’était pas assez systématique pour que les données puissent être exploitées. La force de préhension a été corrélée subjectivement au côté sain, jugée soit identique, légèrement diminuée, ou très diminuée. Elle était normale chez 15 patients (84 %), légèrement diminuée chez deux patients (11 %) et diminuée de façon importante chez un patient (5 %). La mobilité des doigts après l’ablation des broches était satisfaisante chez tous nos malades. La consolidation osseuse des foyers de fracture a été obtenue pour tous les patients dans un délai moyen de 45 jours. La qualité de réduction chirurgicale a été maintenue et aucun cas d’arthrose hamato-métacarpienne n’a été relevé. On a adopté la classification de Niechajev–Kjaer-Peterson et al. (le groupe
A est un équivalent de la fracture de Bennett avec une subluxation carpo-métacarpienne – le groupe B inclut les fractures avec un seul fragment – le groupe C comprend les fractures bicondyliennes, fractures en T ou en forme de Y et le groupe D sont les fractures avec un ou plusieurs fragments intermédiaires) [5–7]. Le bilan radiologique initial nous a permis de noter les différents types de fractures suivantes (Fig. 5). Les résultats globaux étaient satisfaisants, à part deux patients qui ont rapporté des douleurs intermittentes en cas de changement météorologiques et utilisation intense de la main et un cas de syndrome algodystrophique postopératoire qui a retardé la récupération avec persistance de la douleur et la gêne fonctionnelle à six mois, la patiente n’a ensuite plus consulté (cas no 20) (Tableau 1).
[(Fig._3404)TD$FIG]
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Fig. 4. Image de contrôle radiologique de face et oblique après embrochage intermétacarpien de la fracture de la base et embrochage en L de Vives de la fracture du col.
[(Fig._ 5)TD$FIG]
Fig. 5. Répartition des cas de la série en fonction des types de la classification de Niechajev–Kjaer-Peterson et al.
4. Discussion Les fractures de la base du cinquième métacarpien sont des lésions rares par rapport aux fractures de la base du premier métacarpien (y compris les fractures de Bennett), elles ont été peu étudiées. Clément (1945) a été le premier à décrire la fracture intra-articulaire isolée de la base du cinquième
métacarpien. Dès lors, plusieurs séries ont été publiées (Bora et Didizian, 1974 ; Hagstrom, 1975 ; Hus et Curtis, 1970 ; Hunter et Cowen, 1970 ; Kjaer-Petersen et al., 1992 ; Lilling et Weinberg, 1979 ; Niechajev, 1985 ; Petrie et Lamb, 1974 ; Salgeback et al., 1971) [8]. Elles sont dues le plus souvent à une flexion forcée du poignet avec extension simultanée du bras, comme c’est le cas d’un coup de poing ou d’une chute. Le
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Tableau 1 Présentation de la série. Patient
Côté
Étiologie
Type de fracture
Lésion associée
Délai diagnostique
Traitement
Immobilisation
Ablation de broches
Suivi
1
Drt (D)
Cdp
Groupe A
–
Immédiat
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
1 an
2
Drt (D)
Cdp
Groupe A
–
Immédiat
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
2 ans
3
Drt (D)
Avp
Groupe A
Fr col M5
Immédiat
RFF + KM/M+K en L vives
I+ (45 jours)
45 jours
3 ans
4
Drt (D)
Cdp
Groupe C
–
Immédiat
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
1,5 an
5
Drt (D)
Cdp
Groupe A
–
J + 2 jours
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
2 ans
6
Drt (D)
Cdp
Groupe A
–
J + 4 jours
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
3 ans
7
Drt (ND)
Avp
Groupe C
–
Immédiat
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
2 ans
8
Gch
Cdp
Groupe B
–
J + 2 jours
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
2 ans
9
Gch
Cdp
Groupe C
–
Immédiat
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
1,5 an
10
Gch
Cdp
Groupe D
–
J + 7 jours
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
2 ans
11
Gch (D)
Chute escaliers
Groupe C
–
Immédiat
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
1 an
12
Drt (D)
Cdp
Groupe A
–
J + 3 jours
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
1 an
13
Drt (D)
Cdp
Groupe A
–
J + 2 jours
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
1,5 ans
14
Gch
Avp
Groupe D
–
Immédiat
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
6 mois
15
Drt (ND)
Chute escaliers
Groupe A
–
Immédiat
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
2 ans
16
Gch
Avp
Groupe A
–
J + 2 jours
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
2,5 mois
1 an
17
Drt (D)
Cdp
Groupe C
–
Immédiat
RFF + KM/M
?
Pdv
Pdv
18
Drt (D)
Cdp
Groupe A
Plaie dorsale
Immédiat
RFF + KM/M
Oui
Pdv
Pdv
19
Drt (D)
Cdp
Groupe C
–
J + 7 jours
RFF + KM/M
I+ (45 jours)
2 mois
3 mois
20
Gch
Cdp
Groupe C
–
J + 4 jours
RFF + KM/M
I+ (30 jours)
45 jours
6 mois
Drt : droit ; Gch : gauche ; D : dominant ; ND : non dominant ; Cdp : coup-de-poing ; Avp : accident de la voie publique ; Fr : fracture ; M : métacarpien ; classification de Niechajev–Kjaer-Peterson et al. : Groupe A : équivalent de la Fracture de Bennett (avec une subluxation de l’arbre) ; Groupe B : fractures avec un seul fragment ; groupe C : fractures bi-condyliennes, fractures en T ou en forme de Y ; Groupe D : fractures avec un (ou plusieurs) fragments intermédiaires) ; RFF : réduction foyer fermé ; K : embrochage ; M/M : métacarpométacarpien ; Pdv : perdu de vue ; I+ : attelle intrinsèque plus.
mécanisme principal semble être une force appliquée le long de l’axe du métacarpien associée à une hyperextension de l’articulation hamato-métacarpienne (Domisse et Lloyd, 1979 ; Rawles, 1988) [4,7]. La rareté dans la littérature de ces fractures est due en partie à la structure anatomique stable de la région, en raison de la résistance des ligaments dorsaux et palmaires carpo-métacarpiens et les ligaments interosseux. Le cinquième métacarpien s’articule avec l’hamatum par une base convexe dans le sens dorsopalmaire, lui autorisant un mouvement d’opposition de 15 à 20 degrés. La pente ulnaire de l’articulation hamato-métacarpienne, due à l’orientation de l’ hamatum, et l’absence d’un soutien sur le côté ulnaire de la main, contribuent à l’instabilité ulnaire dirigée de cette articulation. La traction exercée par le tendon cubital postérieur (extensor carpi ulnaris) sur la base du cinquième métacarpien conduit au déplacement proximal et ulnaire de la base (Fig. 6) [2,6,9–11]. Le diagnostic clinique est suspecté devant la douleur et le gonflement de la région dorso-ulnaire de la main [5,12]. L’intégrité de la branche profonde du nerf ulnaire peut être
menacée, d’où l’importance de l’examen vasculonerveux dans ces fractures [13,14]. Dans notre série on n’a pas noté de cas d’atteinte de la branche profonde du nerf ulnaire. L’évaluation radiologique des lésions repose sur des radiographies standard de face et de profil pour éliminer des luxations carpométacarpiennes associées dont le diagnostic nécessite de rechercher sur le cliché de face une disparition des interlignes, une diminution de la hauteur du carpe médial et une dysharmonie de l’arc de Gilula (ligne épousant la courbure proximale du carpe distal) [15–17], et sur le cliché de profil la recherche d’un défaut d’alignement entre les métacarpiens et la seconde rangée du carpe, l’augmentation du diamètre palmodorsal du carpe est souvent masqué par les métacarpiens centraux [18]. Un cliché de trois-quarts, l’avant-bras en pronation de 308, diminue les superpositions articulaires [6,19]. La TDM permet l’exploration et l’analyse précise des lésions carpiennes, le type de luxation, les fractures associées et la rotation des fragments, ce qui justifie d’élargir ses indications. Elle peut inclure des reconstructions 3D [15,20– 22]. Malheureusement, dans notre série, la réalisation de la
[(Fig._3426)TD$FIG]
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Fig. 6. Le déplacement caractéristique de la fracture du cinquième métacarpien dû à l’action des muscles hypothénariens et tendon du cubital postérieur (extensor carpi ulnaris). Rôle du ligament intermétacarpien entre le quatrième et cinquième métacarpien dans la stabilisation de l’équivalent de la fracture de Bennet du cinquième métacarpien.
TDM n’était pas systématique à cause de la difficulté financière des patients et de l’indisponibilité en urgence de cet examen complémentaire. L’approche thérapeutique de ces fractures articulaires reste un sujet controversé. L’objectif est double : obtenir une réduction anatomique, qui garantit un bon résultat fonctionnel et prévient l’apparition de l’arthrose ; et maintenir la réduction pour permettre la cicatrisation ligamentaire [15]. Niechajev, Kjaer-Peterson et al. ont proposé une classification pour ces fractures, mais sans impact direct sur les décisions thérapeutiques [5,6]. Le traitement orthopédique de ces fractures en cas de déplacement minime par réduction fermée et immobilisation plâtrée a été adopté par plusieurs auteurs (série de 14 patients de Petrie and Lamb, série de 22 patients de J.M. Lundeen et A.Y. Shin). Mais l’instabilité reconnue de ce type de lésion et le déplacement secondaire des fragments articulaires pouvant entraîner des lésions destructives de l’articulation hamato-métacarpienne, doit limiter le traitement orthopédique à de rares indications [6,8,15,23]. Les auteurs recommandent soit une réduction fermée avec fixation percutanée, réduction ouverte et fixation interne en cas de déplacement marqué, de comminution, fragmentation, ou arrachement complet d’une insertion tendineuse [6]. La réduction à ciel ouvert en cas de luxation associée est indiquée en cas de réduction impossible, instable ou non anatomique. Elle permet de contrôler visuellement la réduction, de supprimer les interpositions capsulaires, d’enlever les fragments ostéochondraux et de fixer les fractures associées [15]. Certains auteurs parlent de la difficulté de la correction de la
surface articulaire à ciel ouvert, car ces fractures sont souvent plus fragmentées que l’image suggérée par les radiographies. Cela peut expliquer la mauvaise évolution des patients traités par réduction à ciel ouvert dans la série de K. Kjar-Petersen [5,6]. Aucune étude comparative n’a démontré la supériorité d’une prise en charge par rapport à l’autre ; Gangloff et al., dans une série de 31 cas de luxations carpo-métacarpiennes (LCM) du cinquième rayon, proposent de s’aider à la classification de Cain pour ordonner les choix thérapeutiques, le traitement par réduction à foyer fermé et embrochage percutané pour les lésions relativement stables (type Ia et Ib) et réduction à ciel ouvert pour les autres lésions (type II, III, IV) [12,15,20]. Le traitement chirurgical par réduction à foyer fermé avec embrochage percutané a donné de bons résultats fonctionnels dans la série de 23 cas de Niechajev et dans la série de KjarPetersen et al. (neuf cas, recul moyen de 4,3 ans) avec reprise du travail chez tous les malades, mais avec persistance des douleurs résiduelles de la main dans 40 % des cas. Dans notre série bien que le recul soit plus faible (19 mois), le traitement chirurgical par réduction à foyer fermé et embrochage percutané transversal intermétacarpien de type Mitz-Vilain [24] a donné des résultats satisfaisants avec récupération d’une force de serrage et mobilité proche de la normale mais persistance de douleurs résiduelles dans 12 % des cas. Deux autres séries publiées par Goedkoop et Calif parlent des avantages de la réduction à foyer fermé avec embrochage percutanée pour les fractures simples et peu comminutives (méthode non invasive, risque infectieux minime et suites opératoires simples) [25,26]. Les deux séries de Gangloff de 31 cas de LCM du cinquième rayon et de Herzberg de 100 cas de luxations fraîches des doigts longs, montrent que c’est le bilan exact des lésions au stade aigu qui orientera le traitement plutôt vers une ostéosynthèse percutanée ou plutôt vers une chirurgie à ciel ouvert s’il existe une fracture complexe associée et que le principal facteur pronostique reste la précocité du diagnostic et du traitement [15,20].L’absence de prise en charge initiale ou un traitement mal conduit est de mauvais pronostic, en raison des risques d’arthrose post-traumatique, de raideur ou d’instabilité [15,27]. Mais les séquelles à ce niveau sont peu fréquentes, car souvent bien tolérées, et il existe peu d’études sur ce sujet [15,16]. Le recul insuffisant de notre série ne permet pas de suivre et juger l’évolution arthrosique à long terme de l’articulation hamatométacarpienne. Dans ces cas l’alternative thérapeutique est palliative à type d’arthrodèse carpo-métacarpienne [20] ou d’arthroplastie stabilisé qui a été proposée par Dubert [28]. 5. Conclusion Les fractures articulaires de la base du cinquième métacarpien sont des lésions rares. Mais elles peuvent provoquer des complications graves. Elles sont le plus souvent sous-diagnostiquées. Leur prise en charge doit être adéquate. Elles nécessitent un diagnostic précoce parfaitement réalisable grâce à un examen clinique soigneux, et une lecture rigoureuse des clichés radiographiques standard dans un contexte
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évocateur. Il ne faut pas hésiter à compléter le bilan par la réalisation d’un scanner pour dépister toutes les lésions associées et permettre un choix thérapeutique approprié. Cependant, le traitement de ces fractures reste un sujet controversé et de nombreuses études s’avèrent nécessaires pour déterminer le meilleur traitement de ces fractures, en particulier en cas de comminution importante et de déformation en rotation. Le traitement chirurgical par réduction à foyer fermé et embrochage percutané à notre préférence, reste une technique sûre, efficace et sans danger, en cas d’absence de lésions complexes associées. Néanmoins, la surveillance et l’évaluation à long terme est nécessaire pour évaluer la stabilité de ce résultat avec le temps. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Jessa KK, Hodge JC. Avulsion fracture of tendon of extensor carpi radialis longus: unknown mechanism. J Emerg Med 1997;15:201–7. [2] Treble N, Arif S. Avulsion fracture of the index metacarpal. J Hand Surg 1987;12B:38–9. [3] Cobbs KF, Owens WS, Berg EE. Extensor carpi radialis brevis avulsion fracture of the long finger metacarpal: a case report. J Hand Surg 1996;21A:684–6. [4] Dommisse IG, Lloyd GJ. Injuries to the fifth carpometacarpal region. Can J Surg 1979;22(3):24–244. [5] Niechajev I. Dislocated intra-articular fracture of the base of the fifth metacarpal: a clinical study of 23 patients. Plast Reconstr Surg 1985; 75(3):40–410. [6] Bushnell BD, Draeger RW, Crosby CG, Bynum DK. Management of intraarticular metacarpal base fractures of the second through fifth metacarpals. J Hand Surg 2008;33A. [7] Kjaer-Petersen K, Jurik AG, Petersen LK. Intra-articular fractures at the base of the fifth metacarpal. A clinical and radiographical study of 64 cases. J Hand Surg 1992;17B:144–7. [8] Lundeen JM, Shin AY. Clinical results results of intraarticular fractures of the base of the fifth metacarpal treated by closed reduction and cast immobilization. J Hand Surg [Br] 2000;25B(3):258–61. [9] Crichlow TP, Hoskinson J. Avulsion fracture of the index metacarpal base: three case reports. J Hand Surg 1988;13A:212–4.
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