Traitement chirurgical percutané de la bunionette : résultats d’une étude rétrospective de 49 cas au recul moyen de 34 mois

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Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique 101 (2015) 128–133

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Mémoire original

Traitement chirurgical percutané de la bunionette : résultats d’une étude rétrospective de 49 cas au recul moyen de 34 mois夽 Percutaneous bunionette correction: Results of a 49-case retrospective study at a mean 34 months’ follow-up O. Laffenêtre a,∗,c , B. Millet-Barbé a , V. Darcel b , J. Lucas y Hernandez a , D. Chauveaux a a

Centre médico-chirurgical universitaire du pied, CHU Pellegrin, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux cedex, France Hôpital d’instruction des armées Robert-Piqué, 351, route de Toulouse, 33550 Villenave-d’Ornon, France c Clinique Geoffroy-Saint-Hilaire, 59, rue Geoffroy-Saint-Hilaire, 75005 Paris, France b

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Rec¸u le 26 janvier 2014 ´ Accepté le 23 decembre 2014 Mots clés : Bunionette 5e métatarsien Quintus varus Chirurgie percutanée Chirurgie mini-invasive

r é s u m é Introduction. – La bunionette est une saillie latérale de la tête du 5e métatarsien (M5) à l’origine d’un durillon, la malposition de l’orteil déterminant les formes en varus, supra- ou infradductus. Hypothèse. – Pour 38 patients présentant cette déformation, nous avons évalué une méthode percutanée sans ostéosynthèse. Matériel et méthodes. – Nous avons analysé une série continue rétrospective monocentrique de patients opérés par un seul opérateur entre mai 2005 et janvier 2012, au recul moyen de 34 mois. Les critères d’inclusion étaient une bunionette associée ou non à un quintus varus. Tous les patients ont été opérés sans garrot ni ostéosynthèse, en ambulatoire. Ils ont tous été évalués cliniquement avant, et au plus grand recul par une échelle analogique visuelle de la douleur (EVA), les scores AOFAS et de Coughlin, la présence de durillons. Une évaluation radiologique standard était réalisée avec suivi des angles inter-métatarsien (M4M5) et métatarso-phalangien (M5P1). Résultats. – L’EVA passait de 8 (6–9) en pré-opératoire à 0,3 (0–1)/10 au recul maximal, le score AOFAS de 58 (52–75) à 97 (80–100)/100. Parmi les patients, 97,5 % étaient satisfaits ou très satisfaits selon le score de Coughlin. La correction de la déformation a toujours été obtenue avec disparition du durillon pré-opératoire. Les angles M4M5 et M5P1 sont passés de 10,0◦ (6–13) et 16,2◦ (8–24) en pré-opératoire à 5,5◦ (4–8) et 4,3◦ (2–9). On notait comme complications un syndrome douloureux régional et un retard de consolidation. Discussion. – Cette procédure apparaît fiable pour corriger tous les types de déformation. Les autres méthodes mini-invasives aux résultats comparables ont recours à une fixation par broche. Les avantages par rapport aux techniques conventionnelles sont la qualité du résultat, une faible morbidité, l’absence de matériel d’ostéosynthèse. L’utilisation de la technique percutanée mérite, à notre sens, d’être largement diffusée dans cette indication. Niveau de preuve. – IV. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

1. Introduction

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.otsr.2014.11.017. 夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Orthopaedics & Traumatology: Surgery & Research, en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Clinique Geoffreoy St Hilaire, 59, rue Geoffroy-St-Hilaire, 75005 Paris, France. Adresse e-mail : [email protected] (O. Laffenêtre). http://dx.doi.org/10.1016/j.rcot.2015.01.016 1877-0517/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

La déformation dite en « bunionette » se caractérise par la proéminence latérale de la tête du cinquième métatarsien (M5) souvent à l’origine d’un durillon au niveau du bord latéral de sa tête, ou encore plantaire. Elle est trois à dix fois plus fréquente chez les femmes que chez les hommes [1]. Par analogie avec l’hallux valgus, il n’existe pas d’exostose au niveau de la tête métatarsienne : il s’agit en fait d’une migration latérale de M5 parfois combinée à une anomalie morphologique. Coughlin s’appuyant sur les travaux de

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Tableau 1 Répartition des différents gestes effectués durant la procédure chirurgicale (n = 49). Geste technique réalisé

Nombre de patients

Ostéotomie métatarsienne M5

49

Condylectomie latérale M5

37

Ténotomie dorsale des extenseurs (long, court)

9

Ténotomie plantaire du long fléchisseur

11

Arthrolyse médiale MP sélective

38

Ostéotomie proximale P1 (même voie plantaire que fléchisseur) Ostéotomie proximale P1 (voie dorso-latérale)

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traitement conservateur. Les critères d’exclusion comprenaient les antécédents chirurgicaux, un varus de l’arrière-pied, une pathologie inflammatoire rhumatismale, un syndrome polymalformatif ou la présence d’une infection évolutive locale. 2.2. La série

Fig. 1. Les trois stades de bunionette selon Du Vries et la position théorique des traits d’ostéotomies : en rouge : celle de de Prado dans le 1/3 distal, de fermeture médiale à charnière latérale ; en jaune : celle plus distale complète permettant une translation directe de la tête ; stade 1 (A), stade 2 (B), stade 3 (C).

Du Vries a distingué trois types de bunionette selon l’aspect de M5 (Fig. 1) : le type 1 caractérisé par l’augmentation de volume de la tête métatarsienne avec un condyle latéral proéminent (16–33 %), le type 2 où la déformation en lame de sabre entraîne une proéminence symptomatologique du condyle latéral de sa tête (10 %), et le type 3 où l’angle entre le 4e (M4) et le 5e métatarsien est augmenté (n < 12◦ ) sans déformation particulière distale de M5 (57–74 %) [2,3]. Il peut s’y associer une malposition du cinquième orteil réalisant un quintus varus infra- ou supradductus, plus souvent d’origine congénitale. L’objectif principal de ce travail rétrospectif était l’analyse des résultats fonctionnels et radiographiques d’une cohorte présentant une bunionette ou un quintus varus infra- ou supradductus opérés selon une technique percutanée. Les objectifs secondaires étaient d’en évaluer la morbidité et situer la place de la chirurgie percutanée dans cette indication. 2. Matériel et méthodes 2.1. Le protocole Il s’agissait d’une série de bunionettes opérées en première intention par un seul opérateur (O.L.) dans 2 centres selon une technique chirurgicale percutanée entre mai 2005 et janvier 2012. Les critères d’inclusion étaient une bunionette de type 1 à 3 associée ou non à un quintus varus supra- ou infradductus non soulagés par le

Il s’agissait de 49 cas opérés chez 38 patients dont 34 femmes, d’âge moyen 50 ± 19 ans sans aucun perdu de vue. On notait dans la classification de Du Vries 34 (69,4 %) types 1, 5 (10,2 %) types 2 et 10 (20,4 %) type 3. Avant l’intervention, on retrouvait un valgus de l’arrière-pied dans 7 cas (14 %) en podométrie statique, toujours associé à un hallux valgus, les autres arrière-pieds étant jugés neutres. Les empreintes étaient creuses dans 12 %, plates dans 27 % et normales 61 % des cas. Aucune démarche supinatrice n’était mise en évidence en dynamique. Treize patients (35,1 %) ont été opérés de fac¸on bilatérale dont quatre dans un même temps opératoire. Le pied droit a été opéré dans 30 cas. Tous les patients ont été opérés sous anesthésie locorégionale (ALR) complétée dans 5 % des cas par une anesthésie générale. La répartition des différents gestes est précisée dans le Tableau 1. La durée moyenne de l’acte opératoire sur le cinquième rayon comprenant le pansement était de 14 ± 4 minutes. L’ensemble des patients a été revu au recul moyen de 34 ± 22 mois (24–61). 2.3. Technique opératoire La prise en charge était ambulatoire, sous ALR (bloc poplité dans le centre 1, bloc de cheville dans le centre 2). Le patient était installé en décubitus dorsal, le pied opéré dépassant de la table pour la fluoroscopie, sans garrot, le membre inférieur controlatéral fléchi à 90◦ . Dans 21 cas (42,8 %), un ou plusieurs gestes étaient associés. Il s’agissait soit d’un geste sur l’hallux (14,3 %) lui-même combiné à une ou plusieurs autres ostéotomies percutanées latérales (12,2 %), soit d’un geste latéral seulement (16,3 %). Dans le cas d’une chirurgie mini-invasive associée du 1er rayon (26,5 %), le garrot était gonflé secondairement. Selon la proéminence latérale de la tête (type 1) et l’importance de l’angle M4M5, l’intervention commenc¸ait par une condylectomie latérale de M5 réalisée par une incision au coin plantaire et latéral de sa tête, lame parallèle à l’os jusqu’à obtenir un contact osseux [4]. Après réalisation d’une chambre de travail à l’aide d’un élévateur, cette résection était réalisée à l’aide d’une fraise de type Shannon courte (8 × 2 mm) selon un mouvement d’essuie-glace pour obtenir une surface plane (Fig. 2). Le temps principal consistait en une ostéotomie métatarsienne dont le siège variait avec le type de déformation.

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Fig. 4. Ostéotomie plus distale et complète réservée aux types 1. Associée ici à une ostéotomie complète de la base de P1.

Fig. 2. Condylectomie latérale à la fraise Shannon courte.

Réalisée à l’aide d’une fraise type Shannon longue (12 × 2 mm) placée au contact de la face médiale de M5 de distal dorsal à plantaire proximal avec une orientation de 45◦ et conservant une charnière latérale (Fig. 3), elle siégeait au sommet de l’arc dans les déformations de type 2 ou plus distalement dans les types 1. Dans ce cas, elle était complète (Fig. 4). En cas de supradductus, une ténotomie percutanée dorsale des tendons extenseurs

(long, court) était réalisée et inversement en cas d’infradductus, une ténotomie percutanée du long fléchisseur selon une voie plantaire en regard de la métaphyse proximale de la phalange proximale. En cas d’adduction du cinquième orteil, une arthrolyse métatarso-phalangienne médiale sélective était réalisée par une incision dorso-médiale. Si cela était insuffisant ou en cas de rotation de l’orteil, une ostéotomie métaphysaire proximale complète (Fig. 4) de la phalange proximale était réalisée à la fraise Shannon courte, par la voie plantaire utilisée pour la ténotomie du fléchisseur ou par une voie dorso-latérale [5]. Les différentes incisions cutanées n’étaient pas suturées. Un pansement en huit de chiffre était réalisé permettant de maintenir les corrections obtenues en positionnant l’orteil à l’inverse de la déformation initiale, et devant particulièrement s’attacher à fermer l’angle M4M5, contrôlé fluoroscopiquement. Le pansement était refait entre 10e et 15e jour post-opératoire. Selon l’importance des déformations préopératoires et la nécessité de maintenir une correction jusqu’à la 6e semaine, des bandelettes auto-adhésives et/ou une orthoplastie en élastomère de silicone réalisée sur mesure au 15e jour étaient proposés. Ces dispositifs autorisaient la douche et le démarrage de la rééducation après la troisième semaine. Un appui protégé était conseillé au patient pendant trois à quatre semaines dans une chaussure médicalisée plate. La prophylaxie anti-thrombotique était réalisée seulement en cas de facteur de risque tel que défini

Fig. 3. Ostéotomie de M5 au 1/3 distal respectant une charnière latérale. Une fraise Shannon longue de 2 mm de diamètre permet environ 10◦ de correction.

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transfert, d’infection, de pseudarthrose ou de thrombophlébite. Aucun des cas n’a nécessité une réintervention. 3.2. Les résultats cliniques et fonctionnels

Fig. 5. Traitement d’un type 2 ; aspects radiographiques de face pré- et postopératoires (A et B).

par la Société franc¸aise d’anesthésie-réanimation [6,7]. Il était procédé à une prophylaxie du syndrome douloureux régional de type 1 par la prise de vitamine C selon le protocole de Besse et al. [8]. 2.4. Critères d’évaluation L’évaluation fonctionnelle a été réalisée en pré-opératoire et au plus long recul à l’aide du score de l’American Orthopaedic Foot and Ankle Society (AOFAS) ou Lesser Toe MetatarsophalangealInterphalangeal Scale [9]. La satisfaction des patients a été évaluée à l’aide du score de Coughlin [2] (très satisfaisant, satisfaisant, décevant, non satisfaisant) et les douleurs par l’utilisation d’une EVA. Les mobilités métatarso-phalangiennes du 5e orteil ont été évaluées en chaîne ouverte à l’aide d’un goniomètre et la disparition ou non d’un éventuel durillon plantaire pré-opératoire a été notée. La reprise d’un chaussage « normal » incluant tout type de chaussure avec notamment la reprise d’un chaussage de type bottier avec une hauteur de talon de 3 à 4 cm a été précisée, prenant en compte les autres gestes associés. Les bilans radiographiques de face et de profil en charge en préopératoire, en post-opératoire immédiat, à 6 semaines, 3 mois et au plus grand recul ont permis l’analyse de la consolidation osseuse et les mesures des angles M4M5 et M5P1. L’évaluation clinique et radiologique au plus grand recul a été réalisée par un observateur indépendant (B.M.B.). Étaient appréciés dans l’examen podométrique, le type d’empreinte, l’axe de l’arrière-pied et d’éventuelles anomalies à la marche. Les données quantitatives ont été analysées à l’aide du test de Student (logiciel SAS® 9.2). Le seuil de significativité retenu était de 5 %. 3. Résultats 3.1. Les complications Un cas de syndrome douloureux régional complexe a été observé. Il a été résolutif sans aucune séquelle après traitement curatif adapté (Fig. 5C–E). Une patiente a présenté un retard de consolidation au niveau de l’ostéotomie métatarsienne diaphysaire lors d’une intervention bilatérale simultanée. La consolidation osseuse a été observée au 10e mois post-opératoire (Fig. 6E–G). Aucun cas de récidive de la déformation, de métatarsalgie de

Sur le plan podoscopique, on a noté une légère normalisation des empreintes préalablement plates (16 % contre 27 %), sans modification de celles étant creuses (12 %), et quasiment aucune modification de d’axe de l’arrière-pied (4 valgus contre 7 valgus, les autres étant jugés neutres). En dynamique, aucun trouble de la marche n’est apparu. La correction de la déformation initiale avec disparition du durillon a été obtenue à chaque fois. L’amplitude articulaire métatarso-phalangienne est passée d’une valeur moyenne de 90,5 ± 9,2◦ (50–120) à 93,7 ± 8,5◦ (50–120). Sept patients ont présenté des douleurs durant les trois premiers mois. Tous ont rapporté une diminution globale de la douleur, l’EVA moyenne passant de 8 ± 1 (6–9) en pré-opératoire à 0,3 ± 0,6 (0–1) au dernier recul. Dans 97 % des cas, les patients étaient satisfaits ou très satisfaits du résultat. Le score de l’AOFAS a été amélioré de fac¸on significative passant d’une valeur moyenne pré-opératoire de 58 ± 5 (52–75) à 97 ± 5 (80–100) au plus long recul (p < 0,05). La reprise d’un chaussage de type bottier avec talon de 3 cm a été effectuée en moyenne au 100e ± 27 jour (75–135) post-opératoire ; celle d’un chaussage normal, y compris les chaussures à talon de plus de 6 cm, a été effectuée en moyenne au 150e ± 38 jour (130–195) post-opératoire, prenant en compte les patients également opérés de l’hallux et/ou de gestes latéraux associés. La durée moyenne d’arrêt de travail pour les patients actifs était de 54 ± 8 jours. 3.3. Les résultats radiographiques Le suivi radiographique régulier a toujours montré l’apparition d’un cal. Il était hypertrophique dans six cas. Tous les cas ont consolidé avant le quatrième mois sauf un, dont la consolidation a été observée au dixième mois. Les angles M4M5 et M5P1 moyens ont diminué respectivement de 10,0 ± 2,7◦ (6–13) à 5,5 ± 1,9◦ (4–8) et de 16,2 ± 3,8◦ (8–24) à 4,3 ± 2,4◦ (2–9 ; p < 0,05). 4. Discussion Cette étude met en évidence l’excellence des résultats fonctionnels et cliniques du traitement chirurgical percutané des bunionettes au prix d’une morbidité quasi nulle et sans matériel d’ostéosynthèse. Les limites potentielles sont le caractère rétrospectif et l’association de gestes associés (43 % des cas) bien que nous n’ayons analysé que les résultats portant sur M5. Il s’agit cependant de l’un des rares travaux à rapporter les résultats de l’utilisation de l’outil percutané dans cette indication. De nombreuses techniques chirurgicales conventionnelles ont été décrites pour traiter cette pathologie y compris la résection phalangienne ou de la tête métatarsienne plus ou moins étendue à une partie de M5 [10–15]. La simple condylectomie latérale peut être responsable de douleurs latérales résiduelles jusqu’à 23 % des cas malgré une satisfaction importante patients [13] ; elle reste quand même insuffisante et le risque de récidive reste grand. C’est pourquoi tous les auteurs donnent la primauté aux ostéotomies métatarsiennes dont bien des variantes ont été décrites. Celles proximales permettent un degré de correction important mais elles peuvent toutefois altérer la vascularisation osseuse et conduire à des pseudarthroses [16]. Les ostéotomies diaphysaires respectent la vascularisation osseuse de la tête métatarsienne et n’entraînent pas de métatarsalgies de transfert, mais peuvent aboutir rarement à des retards de consolidation [17]. Les ostéotomies distales consolident rapidement avec un déplacement moindre [18–21] ; trop important, ce dernier peut entraîner un transfert sous

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Fig. 6. Traitement d’un type 1 bilatéral ; aspects pré-opératoires radiographique de face (A) et podométrique avec infradductus de l’orteil (B). Radiographie de face en charge à 4 mois consolidation acquise (C–E) et podométrique (F).

M4 ou une gêne par l’éperon osseux du fragment proximal devant être réséqué [19]. Par ailleurs, plus les ostéotomies sont verticales, moins elles sont stables [22]. Chaque technique a ses propres complications cutanées, infectieuses, osseuses (stabilité des moyens d’ostéosynthèse utilisés, pseudarthrose ou nécrose vasculaire) et, d’une manière générale, les auteurs recommandent de limiter ses déplacements durant la période de consolidation [23]. Le recours aux ostéosynthèses impose un respect des parties molles pour éviter les problèmes cicatriciels ou les rétractions cutanées postopératoires. Des techniques chirurgicales percutanées se sont inspirées de la technique de Boesch pour le premier rayon avec ostéosynthèse par broche console, ou de celle de Isham popularisée en Europe par de Prado et al. puis par le GRECMIP [24–30]. Nous n’avons retrouvé qu’une seule série à ce jour utilisant la technique percutanée évaluée dans notre série [31]. Cette évolution mini-invasive semble conforter une morbidité moindre, notamment concernant la cicatrisation, aucun des travaux précédents ne rapportant ce type de complication. L’absence de matériel d’ostéosynthèse, en particulier de broche, est toutefois un avantage certain par rapport aux autres techniques mini-invasives, la plupart rapportant des infections superficielles. La technique utilisée applique le concept d’auto-réglage des ostéotomies non fixées par la mise en tension des éléments tendineux qui normalisent les axes osseux « à la demande ». Le pansement post-opératoire revêt ainsi une importance capitale, ayant pour but de stabiliser les ostéotomies tant qu’il est en place. La nécessité d’un tel suivi post-opératoire rigoureux constitue probablement l’un des freins au développement de cette technique, alors qu’elle est paradoxalement bien vécue par les patients. Le score AOFAS est amélioré significativement de 57 à 97, restant en cela conforme aux résultats des techniques comparables (Tableau 2). La diminution statistiquement significative des angles M4M5 et M5P1 est comparable à un certain nombre de travaux de la littérature (Tableau 3).

La principale complication rencontrée est le retard de consolidation d’une ostéotomie métatarsienne (Fig. 6A–H). L’ostéotomie réalisée trop proximalement par rapport au côté controlatéral n’a consolidé qu’à 10 mois (Fig. 6H). Il nous semble important que le chirurgien résiste à la demande des patients d’effectuer un geste bilatéral, pourvoyeur de déplacements, voire de rupture de la charnière, malgré le port d’une paire de chaussures médicalisées. L’orientation à 45◦ du trait apporte une certaine stabilité malgré l’absence d’ostéosynthèse, rappelant en cela l’intérêt mécanique de l’horizontalité de la coupe [22]. Les douleurs des sept patients durant les 3 premiers mois correspondaient à chaque fois à un cal hypertrophique. Ceci est retrouvé par Magnan et serait plus important que lors d’une technique conventionnelle ouverte du fait de l’instabilité relative des ostéotomies métatarsiennes, même étant fixées par une broche [27]. En comparaison de la chirurgie classique avec ostéosynthèse, la résorption progressive d’éventuels cals hypertrophiques d’ostéotomies non fixées est parfaitement connue des habitués de ces techniques et survient la plupart du temps dans un délai inférieur à 6 mois, entraînant logiquement la régression des symptômes [25,29,31,32]. Comme dans les autres procédures, cette technique permet une adaptation des gestes selon le type de déformation « à la carte ». Tableau 2 Comparaison des scores AOFAS pré- et post-opératoires pour des techniques miniinvasives. Séries

AOFAS pré-opératoire

AOFAS post-opératoire

Martinelli et Valentini, 2007 [29] Weitzel et al., 2007 [30] Giannini et al., 2008 [24] Magnan et al., 2011 [27] Michels et al., 2013 [31] Notre série

Non renseigné Non renseigné 62 52 54,4 58

93 88 94 98 96,5 97

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Tableau 3 Comparaison des valeurs angulaires pré- et post-opératoires avec d’autres séries de la littérature. Séries

M4M5 préopératoire

M4M5 postopératoire

Gain

M5P1 préopératoire

M5P1 postopératoire

Gain

Kitaoka et Holiday, 1992 [12] Weitzel et al., 2007 [30] Giannini et al., 2008 [24] Coughlin, 2010 [17] Magnan et al., 2011 [27] Michels et al., 2013 [31] Notre série

11,8◦ 14,8◦ 12◦ 10,6◦ 10,5◦ 10,5◦ 9,98◦

9,2◦ 8,1◦ 6,7◦ 0,8◦ 7,1◦ 4,8◦ 5,51◦

2,6◦ 5,9◦ 5,3◦ 9,8◦ 3,4◦ 5,7◦ 4,47◦

20,7◦ 17,6◦ 16,8◦ 16◦ 16,1◦ 17,1◦ 16,24◦

12,8◦ 1,5◦ 7,9◦ 0,5◦ 5,2◦ 2,9◦ 4,26◦

7,9◦ 16,1◦ 8,9◦ 15,5◦ 10,9◦ 14,2◦ 11,98◦

Ainsi, la condylectomie est réalisée si la tête de M5 est large, dans les types 1, sans être toutefois systématique car le pouvoir de correction d’une ostéotomie de fermeture réalisée avec une fraise de 2 mm de diamètre est d’environ 10◦ sur l’axe osseux ; il est plus grand en cas d’ostéotomie bicorticale. Nous pensons que l’ostéotomie de M5 est le geste fondamental et nous le réalisons dans tous les cas [17]. 5. Conclusion Le traitement chirurgical percutané des déformations du 5e rayon apparaît comme reproductible, efficace en termes de résultats subjectifs, cliniques et radiographiques. Ces derniers, régulièrement excellents, sont conformes à ceux obtenus par des méthodes plus conventionnelles, sans aucun dommage pour les tissus mous et concordant avec ceux du seul travail utilisant la même procédure. La somme des gestes sur les parties molles et osseuses crée un nouvel équilibre et permet une correction fiable au prix d’une agression minime. Tous les types de déformations peuvent être pris en charge. L’absence d’ostéosynthèse s’avère ici un atout mais nous préconisons une chirurgie différée en cas d’indication bilatérale. Il s’agit probablement de la meilleure indication d’utilisation de l’outil percutané. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Roukis TS. The tailor’s bunionette deformity: a field guide to surgical correction. Clin Podiatr Med Surg 2005;22:223–45. [2] Coughlin MJ. Treatment of bunionette deformity with longitudinal diaphyseal osteotomy with distal soft tissue repair. Foot Ankle 1991;11:195–203. [3] Du Vries HL. Surgery of the foot. 2nd ed. St Louis: CV Mosby; 1965. p. 456–62. [4] Michels FGS. Bunionectomie du cinquième métatarsien. In: Cazeau C, GRECMIP, editors. Chirurgie mini-invasive et percutanée du pied. Montpellier: Sauramps Médical; 2009. p. 147–56. [5] Rabat-Ribes ELO. Traitement percutanée des déformations du cinquième rayon. In: Cazeau CG, editor. Chirurgie mini-invasive et percutanée du pied. Montpellier: Sauramps Médical; 2009. p. 135–46. [6] Steib A, Samama CM. Prévention de la maladie veineuse thromboembolique périopératoire. In: SFAR, editor. Conférences d’actualisation. Les essentiels. Paris: Elsevier; 2005. p. 309–22. [7] Samama CM. Perioperative venous thromboembolism prophylaxis; short review and recommendations. Ann Fr Anesth Reanim 2008;27(Suppl. 3): S2–8. [8] Besse JL, Gadeyne S, Galand-Desme S, Lerat JL, Moyen B. Effect of vitamin C on prevention of complex regional pain syndrome type I in foot and ankle surgery. Foot Ankle Surg 2009;15:179–82.

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