Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015

Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015

Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulca...

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Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019 Bull Cancer 2016; //: ///

Synthèse

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Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015 Grégoire Marret, Cindy Neuzillet, Benoît Rousseau, Christophe Tournigand

Reçu le 29 novembre 2015 Accepté le 19 janvier 2016 Disponible sur internet le :

Assistance publique–Hôpitaux de Paris (AP–HP), université Paris Est Créteil (UPEC), hôpital Henri-Mondor, service d'oncologie médicale, 51, avenue du Maréchal-deLattre-de-Tassigny, 94000 Créteil, France

Correspondance : Cindy Neuzillet, Assistance publique–Hôpitaux de Paris (AP–HP), université Paris Est Créteil (UPEC), hôpital Henri-Mondor, service d'oncologie médicale, 51, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94000 Créteil, France. [email protected]

Mots clés Antiangiogéniques Anti-EGFR Cancer des voies biliaires Chimiothérapie Cholangiocarcinome Thérapies ciblées

Keywords Antiangiogenics Anti-EGFR Biliary tract carcinoma Chemotherapy Cholangiocarcinoma Targeted therapies

Résumé Le cholangiocarcinome est une tumeur rare, de pronostic sombre, diagnostiqué le plus souvent à un stade avancé le rendant inaccessible à une résection chirurgicale, seule modalité thérapeutique potentiellement curative. L'objectif de cet article est de proposer une revue actualisée des données relatives aux traitements médicaux (chimiothérapie et thérapies ciblées) dans la prise en charge des patients atteints de cholangiocarcinome. La place des traitements adjuvants dans les formes résécables est en cours d'évaluation. Dans les formes localement avancées et métastatiques, le doublet de chimiothérapie gemcitabine-platine (GEMCIS ou GEMOX) est la référence en première ligne. Aucune thérapie ciblée n'est à ce jour validée dans cette indication. Il n'existe pas de standard thérapeutique de deuxième ligne ; l'identification de facteurs pronostiques et prédictifs pour affiner la sélection des patients dans cette situation est un enjeu majeur. De nouvelles pistes thérapeutiques pourraient émerger de la meilleure compréhension des mécanismes biologiques et moléculaires impliqués dans la carcinogenèse et l'hétérogénéité phénotypique des cholangiocarcinomes.

Summary Medical management of cholangiocarcinomas in 2015 Cholangiocarcinoma is a rare malignancy carrying a poor prognosis. Most patients are diagnosed with advanced-stage disease and are then ineligible for surgical resection, which is the only potentially curative therapeutic modality. The aim of this article is to provide an up-to-date review of medical management of patients with cholangiocarcinoma. The benefit of adjuvant therapy in patients undergoing curative-intent surgery is under evaluation. Combination chemotherapy with gemcitabine and platinum is the standard first-line treatment for patients with advanced cholangiocarcinoma. Targeted agents are not currently recommended due to limited data on use in this setting. The role of second-line chemotherapy is not established in advanced

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tome xx > n8x > xx 2016 http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019 © 2016 Société Française du Cancer. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

BULCAN-193

Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

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G. Marret, C. Neuzillet, B. Rousseau, C. Tournigand

cholangiocarcinoma. Identification of predictive and prognostic markers to select patients who could benefit from second-line therapy is a major issue. A better understanding of the biological and molecular mechanisms underlying the carcinogenesis and the phenotypic heterogeneity of cholangiocarcinoma may path the way of new therapeutic strategies.

Introduction Le cholangiocarcinome (CK) est la forme la plus fréquente de cancer des voies biliaires et la deuxième tumeur primitive du foie en incidence après le carcinome hépatocellulaire [1]. La localisation anatomique permet d'en distinguer quatre soustypes :  intrahépatiques ou périphériques, développés au sein du parenchyme hépatique ;  péri-hilaires ou extrahépatiques proximaux, entre les canaux biliaires de second ordre et le canal cystique, comprenant les tumeurs de Klatskin ;  extrahépatiques distaux, siégeant au niveau de la voie biliaire principale en dessous de la bifurcation du canal cystique ;  les adénocarcinomes de la vésicule biliaire [2]. Le CK est une tumeur rare avec environ 2000 nouveaux cas/an en France, soit 3 % des cancers digestifs [3]. Cette incidence, variable dans le monde (plus fréquent chez les populations asiatiques), est en augmentation, notamment pour les CK intrahépatiques [1]. Son pronostic est sombre, avec une survie à 5 ans de 5 à 10 %, le plus souvent du fait d'un diagnostic tardif, à un stade inaccessible à un geste de résection chirurgicale, seule modalité curative [4]. La chimiothérapie est le traitement de référence dans les formes avancées. L'objectif de cet article est de proposer une revue actualisée des données relatives aux traitements médicaux (chimiothérapie et

Glossaire

2

5FU CK CT FOLFIRI GEMCIS GEMOX HR PS QdV RCT RO RT SG SSM SSP XELIRI XELOX

5 fluorouracile cholangiocarcinome chimiothérapie 5FU plus irinotécan gemcitabine plus cisplatine gemcitabine plus oxaliplatine hazard ratio performance status qualité de vie radiochimiothérapie réponse objective radiothérapie survie globale survie sans maladie survie sans progression capécitabine plus irinotécan capécitabine plus oxaliplatine

thérapies ciblées) dans la prise en charge des patients atteints de cholangiocarcinome.

Place des stratégies adjuvantes dans les formes résécables Seulement 35 % des CK sont résécables au moment du diagnostic, la non-résécabilité étant liée à la présence de localisations secondaires à distance, à une atteinte vasculaire, et/ou à l'importance de l'envahissement hépatique ne permettant pas de conserver un volume suffisant de parenchyme hépatique sain [5,6]. Le risque de récidive postopératoire est élevé. Les deux facteurs pronostiques péjoratifs reconnus sont la positivité des marges d'exérèse chirurgicale (caractère R1) et l'envahissement ganglionnaire [7]. Cependant, même chez les patients ne présentant pas ces caractéristiques, les récidives sont fréquentes, et la survie globale à 5 ans des patients opérés ne dépasse pas 30–40 % [8]. Ces résultats ont conduit à poser la question de l'intérêt des traitements périopératoires. Un traitement néoadjuvant, avant la chirurgie, est fréquemment impossible du fait de l'ictère et de l'altération de l'état général. Il n'existe pas de données issues d'essais randomisés de chimiothérapie (CT), radiothérapie (RT) ou radiochimiothérapie (RCT) néoadjuvante. En dehors des tumeurs péri-hilaires où un protocole de RCT avant transplantation hépatique est établi et peut être discuté dans certains centres experts, il n'est pas recommandé de réaliser de traitement néoadjuvant [9]. De fait, les CK sont des tumeurs peu chimiosensibles et les CT actuellement disponibles ne permettent d'obtenir des taux de réponse tumorale que de 25–40 % ; ainsi, la réalisation d'une CT néoadjuvante présente théoriquement plus de risque de voir apparaître une progression qu'un downstaging tumoral. Concernant les traitements adjuvants, un seul essai randomisé, à la méthodologie discutable (inclusion de cancers ampullaires et pancréatiques, nombreux patients exclus de l'analyse, critères d'éligibilité non respectés), a suggéré un bénéfice en termes de survie à 5 ans avec une CT adjuvante (5 fluorouracile [5FU] continu-mitomycine C puis 5FU oral) dans le seul sous-groupe des patients opérés d'un cancer de la vésicule biliaire (26 % vs 14 %, p = 0,04), mais ne montrait pas de bénéfice de survie chez les patients ayant un CK (27 % vs 24 %, non significatif) [10]. Il n'existe pas d'essai randomisé comparant RT ou RCT adjuvante vs surveillance [11]. Dans une revue systématique de la littérature et méta-analyse, Horgan et al. [12] ont étudié l'impact des thérapies adjuvantes (CT, RT ou RCT) sur la survie des patients opérés d'un cholangiocarcinome. Vingt études publiées

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Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

entre 1960 et 2010 (n = 6712) ont été retenues pour l'analyse : un essai randomisé, 2 registres de cancers (issus de la base de données du Surveillance, Epidemiology and End Results database [SEER]) et 17 séries institutionnelles. Il existait une amélioration non significative de la survie globale (SG) avec un traitement adjuvant toutes modalités confondues par rapport à la chirurgie à visée curative seule (hazard ratio [HR] : 0,74 ; p = 0,06). Il n'y avait aucune différence entre les tumeurs de la vésicule biliaire et celles des voies biliaires (p = 0,68). L'association entre traitement adjuvant et survie devenait significative lorsque les 2 registres de cancers étaient exclus de l'analyse, avec un bénéfice significativement supérieur de la CT ou de la RCT par rapport à la RT seule (HR : 0,39, 0,61 et 0,98, respectivement ; p = 0,02). Enfin, le bénéfice sur la survie des traitements adjuvants semblait plus important chez les patients de moins bon pronostic, notamment en cas d'envahissement ganglionnaire (HR : 0,49 ; p = 0,004) et de marge chirurgicale positive R1 (HR : 0,36 ; p = 0,002). Au total, le niveau de preuve est à ce jour trop faible pour recommander de façon systématique un traitement adjuvant chez les patients opérés d'un CK d'après le thésaurus national de cancérologie digestive (TNCD), mais elle est proposée dans la plupart des centres (en particulier en cas de résection R1/R2 ou d'envahissement ganglionnaire) et est considérée parmi les options possibles dans les recommandations américaines du National Comprehensive Cancer Network (NCCN). Les résultats de trois essais randomisés en situation adjuvante sont attendus (tableau I) :  la première étude, de phase III, est française (PRODIGE 12, NCT01313377). Elle a inclus 196 patients ayant un CK réséqué R0 ou R1, randomisés selon deux bras : CT adjuvante par 6 mois de gemcitabine-oxaliplatine (GEMOX 85 : gemcitabine 1000 mg/m2 à j1 et oxaliplatine 85 mg/m2 à j2, tous les 14 jours soit 12 cycles au total) vs surveillance. La randomisation est stratifiée selon le statut ganglionnaire, l'envahissement des marges (R0 vs R1), le centre et la localisation de la lésion sur l'arbre biliaire (intra- ou extrahépatique et vésiculaire). L'objectif principal est la survie sans maladie (SSM) et la qualité de vie (QdV) ;



une deuxième étude, anglaise (BILCAP, NCT00363584), a randomisé 425 patients entre CT adjuvante par 6 mois de capécitabine (1250 mg/m2 par voie orale deux fois par jour j1–j14, toutes les 3 semaines soit 8 cycles au total) vs surveillance. L'objectif principal est la survie globale (SG) à 2 ans ;  la dernière étude est allemande (ACCTICA-1, NCT02170090) et est en cours ; elle randomise les patients entre CT adjuvante par 6 mois de gemcitabine-cisplatine (GEMCIS : gemcitabine 1000 mg/m2 et cisplatine 25 mg/m2 à j1 et j8, toutes les 3 semaines soit 8 cycles au total) vs surveillance avec un objectif de recrutement de 450 patients. L'objectif principal est la SSM. Les résultats de ces études devraient apporter des réponses à la question de l'intérêt du traitement adjuvant chez les patients atteints de CK.

Synthèse

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Cholangiocarcinome avancé : quelle chimiothérapie en première ligne ? La SG médiane en cas de tumeur localement avancée ou métastatique est de l'ordre de 9–15 mois. L'objectif premier de la CT dans ce contexte est l'augmentation de la SG ; sont aussi recherchés le maintien ou l'amélioration de la QdV et le contrôle des symptômes (ictère, prurit, douleur). Deux essais randomisés de petite taille ont montré que la CT palliative améliorait significativement la QdV et la SG de ces patients, comparativement aux soins de support seuls. Le premier, scandinave, évaluait une CT par 5FU et acide folinique (plus étoposide si le patient était en bon état général), montrant une supériorité sur la QdV et la SG (6,0 vs 2,5 mois, p < 0,01), mais au prix d'une toxicité non négligeable (41 % de toxicités de grades 3–4) ; et le second, indien, a montré la supériorité d'une CT par GEMOX par rapport aux soins de support seuls, mais aussi par rapport à une CT par 5FU et acide folinique (respectivement 9,5, 4,5 et 4,6 mois, p = 0,039) [13,14]. Ces deux essais permettent de justifier l'indication d'une CT chez les patients ayant CK avancé et dont l'état général est conservé (performance status [PS]  2). Dans une revue systématique de 104 essais de CT de première ligne rapportés entre 1985 et 2006 (5 à 65 patients par étude,

TABLEAU I Essais de stratégies adjuvantes dans les cancers des voies biliaires résécables Essai

Phase

Nombre de patients

Bras expérimental

Résultat

Méta-analyse

6712

CT, RT, RCT

Pas de bénéfice

PRODIGE 12

III

196

GEMOX

En attente

NCT01313377

BILCAP

III

425

Capécitabine

En attente

NCT00363584

ACCTICA-1

III

450

GEMCIS

En attente

NCT02170090

Horgan et al. [12]

NCT

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3

CT : chimiothérapie ; RT : radiothérapie ; RCT : radiochimiothérapie ; NCT : numéro d'enregistrement dans le registre Clinical Trials ; GEMOX : gemcitabine + oxaliplatine ; GEMCIS : gemcitabine + cisplatine.

Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

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2810 patients analysés au total) et tous non randomisés sauf trois (deux de phase II et un de phase III sur 47 patients), Eckel et Schmid [15] suggéraient que les fluoropyrimidines, la gemcitabine et les platines étaient les trois types d'agents cytotoxiques à privilégier. Les taux de réponse objective (RO) et de contrôle tumoral les plus élevés étaient obtenus avec les schémas associant gemcitabine et platine (cisplatine ou oxaliplatine) [15]. Une actualisation des données portant sur 6337 patients inclus dans 161 essais, avec une extension aux thérapies ciblées, a été publiée en 2014 par les mêmes auteurs. L'analyse poolée montrait des taux de RO et de contrôle tumoral de respectivement de 25,9 % et 63,5 %, et des médianes de survie sans progression (SSP) et de SG de 5,3 mois et 9,5 mois chez les patients traités par un schéma gemcitabine-platine. Le doublet de chimiothérapie GEMCIS est devenu la combinaison de référence en première ligne dans cette indication sur la base d'une étude de phase III anglaise (ABC-02) (n = 410), qui a montré la supériorité de ce doublet (gemcitabine 1000 mg/ m2 et cisplatine 25 mg/m2 à j1 et j8, toutes les 3 semaines pour 8 cycles au total) sur la gemcitabine en monothérapie (1000 mg/m2 à j1, j8 et j15, toutes les 4 semaines pour 6 cycles) sur la SG (médiane : 11,7 mois vs 8,1 mois, HR 0,64 ; p < 0,001) et la SSP (médiane : 8,0 mois vs 5,0 mois, p < 0,001), sans toxicité additionnelle, chez les patients ayant un CK à un stade avancé, un PS  2 (dont 88 % de PS 0-1) et une bilirubinémie totale < 1,5 N [16]. Okusaka et al. [17] a montré des résultats comparables dans une étude de phase II (BT-22) dans une population japonaise de 84 patients (PS 0-1) avec une médiane de SG de 11,2 mois vs 7,7 mois (HR = 0,69 ; p = 0,139) et une médiane de SSP de 5,8 mois vs 3,7 mois (HR = 0,66 ; p = 0,077) respectivement dans les bras GEMCIS et gemcitabine monothérapie. Les résultats de ces deux études ont été regroupés dans une méta-analyse, confirmant l'amélioration significative de la SG (HR = 0,65, p < 0,001) et de la SSP (HR = 0,64, p < 0,001) avec l'association GEMCIS en comparaison avec la gemcitabine en monothérapie, quelle que soit la localisation tumorale (intra- ou extrahépatique ou vésicule biliaire). Le bénéfice était plus marqué chez les patients en bon état général

(PS 0-1) (HR pour la SG = 0,64, p < 0,001 ; HR pour la SSP = 0,61, p < 0,001) [18]. Le doublet GEMOX (gemcitabine 1000 mg/m2 à j1 et oxaliplatine 100 mg/m2 à j1 ou j2, tous les 14 jours) est une alternative au GEMCIS car, malgré l'absence d'essai contrôlé randomisé comparant directement ces deux schémas, son activité antitumorale est comparable (SG médiane de 9,5 vs 9,7 mois dans la revue systématique de Fiteni et al. [19], n = 1470 patients), et son profil de toxicité est plus favorable [20,21]. Les principaux essais de chimiothérapies de première ligne sont résumés dans le tableau II. Sur la base de l'ensemble de ces données, les doublets de chimiothérapie GEMCIS ou GEMOX sont le traitement de référence en première ligne chez les patients ayant un CK avancé [22–24]. La place de la maintenance par gemcitabine après arrêt du dérivé de platine reste à préciser mais est fréquemment proposée jusqu'à progression. Une étude de phase II/III randomisée intergroupe PRODIGE-GERCOR (PRODIGE 38 - AMEBICA, NCT02591030) a débuté fin 2015 ; elle compare la tolérance et l'efficacité du GEMCIS à l'association 5FU, oxaliplatine et irinotécan (FOLFIRINOX modifié) dans les tumeurs des voies biliaires localement évoluées, non résécables et/ou métastatique.

Quelle chimiothérapie en deuxième ligne ? Jusqu'à 50 % des patients en progression à l'issu d'une première ligne de CT par gemcitabine-platine gardent un état général conservé et sont en mesure de recevoir un traitement de deuxième ligne [25]. Aucun essai randomisé n'étant disponible dans la littérature, aucune donnée ne permet de définir des options thérapeutiques en deuxième ligne ou au-delà. Dans une revue systématique de la littérature, Lamarca et al. [26] ont colligé les données de SG et de SSP des traitements de deuxième ligne chez les patients atteints de CK métastatique. Vingt-cinq études sont analysées (n = 761 patients) : 14 essais de phase II, 9 études rétrospectives et 2 cas cliniques. Les médianes de SG et de SSP étaient respectivement de 7,2 mois et 3,2 mois.

TABLEAU II Résultats des chimiothérapies en première ligne dans les cancers des voies biliaires avancés Essai

Phase

Nombre de patients

Bras expérimental

Bras standard

Médiane SG (mois)

UK ABC 02 [16]

III

410

GEMCIS

GEM

11,7 (p < 0,001)

BT-22 [17]

II

83

GEMCIS

GEM

11,7 (p = 0,139)

Sharma et al. [13]

II

88

GEMOX

5 FU/soins de support

9,5 (p = 0,039)

André et al. [20]

II

26

GEMOX

Phelip et al. [21]

II

34

RTE + 5FU/CDDP

15,4 (PS 0-2)/7,6 (PS > 2) GEMOX

13,5 (HR : 0,69)

4

GEMOX : gemcitabine + oxaliplatine ; GEMCIS : gemcitabine + cisplatine ; GEM : gemcitabine ; RTE : radiothérapie ; 5FU : 5 fluorouracile ; CDDP : cisplatine ; SG : survie globale.

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Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

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Quelle place pour les thérapies ciblées dans le traitement des cholangiocarcinomes avancés en 2015 ? Dans la revue actualisée de Eckel et Schmid [30], l'addition d'une thérapie ciblée (majoritairement un anti-EGFR) à une CT à base de gemcitabine augmentait significativement le taux de contrôle tumoral, la SSP et la SG. Les deux classes de thérapies ciblées qui ont été les plus explorées dans le traitement des CK à ce jour sont celles ciblant la voie de l'EGFR et les antiangiogéniques.

Thérapies ciblant la voie de l'EGFR La surexpression de l'EGFR et l'activation des voies de signalisation d'aval (MAP kinases et PI3K-AKT-mTOR) favorisent la prolifération, la survie et l'invasion des cellules tumorales ainsi que l'angiogenèse [31–35]. Des analyses immunohistochimiques ont montré que l'EGFR est exprimé dans 100 %, 52,6 % et 38,5 % des CK intrahépatiques, extrahépatiques et vésiculaires respectivement [36]. Le rationnel du ciblage de la voie de l'EGFR a abouti à plusieurs essais cliniques, pour la majorité d'entre eux de phase II, chez des patients ayant un CK avancé, ayant pour objectif d'évaluer des agents ciblant l'EGFR (anticorps : cetuximab, panitumumab ; inhibiteurs de tyrosine kinase : erlotinib) et/ou HER2 (lapatinib), ou les voies des MAP kinases (selumetinib, MEK162, trametinib) ou de mTOR (sirolimus, everolimus) situées en aval du récepteur ; ces agents étaient le plus souvent testés en association avec une CT à base de gemcitabine-platine. Les études pour lesquelles des résultats sont disponibles sont résumées dans le tableau III. Dans leur ensemble, ces études n'ont pas permis de montrer d'amélioration de la survie avec l'addition d'un traitement ciblant la voie de l'EGFR. De façon intéressante, une analyse exploratoire des mutations KRAS/BRAF (associées à la résistance aux traitements anti-EGFR dans les adénocarcinomes coliques) a été réalisée dans l'étude de phase II BINGO chez 75 patients, et chez 77 patients pour la surexpression d'EGFR. Quatorze des 75 échantillons analysés contenaient des mutations de KRAS, 4/75 des mutations de BRAF (mutuellement exclusives avec celles de KRAS), et 18/77 avaient une surexpression de l'EGFR (c.-à-d. score EGFR  200). La fréquence de ces anomalies moléculaires ne différait pas selon le site primitif de la maladie, et était équilibrée entre les deux bras de traitement. Les mutations de KRAS/BRAF et la surexpression de l'EGFR ne semblaient pas impacter la survie mais ces résultats doivent être interprétés avec précaution compte tenu du nombre limité d'échantillons analysés [37]. Des études sont en cours évaluant le panitumumab spécifiquement chez les patients ayant un CK sans mutation de KRAS (NCT01206049, NCT01320254, NCT01389414, NCT00779454).

Thérapies antiangiogéniques Les CK intrahépatiques ont la particularité d'être des tumeurs souvent hypervasculaires, se rehaussant en imagerie après injection de produit de contraste. Des études immuno-histochimiques

5

Dans une étude rétrospective multicentrique française menée par l'Association des gastro-entérologues oncologues (AGEO), 196 patients atteints de cancers des voies biliaires avancés en progression après une première ligne de référence par gemcitabine-platine ont été analysés [27]. La très grande majorité (93,4 %) des patients avait été traitée par une CT par GEMOX en première ligne, mettant en évidence l'utilisation préférentielle de ce schéma en France par rapport au GEMCIS, et 67,6 % des patients avaient un PS 0-1. Les CT reçues par les patients en deuxième ligne étaient variées : 5FU ou capécitabine et irinotécan (FOLFIRI ou XELIRI) (n = 64) ; 5FU ou capécitabine en monothérapie (n = 40) ; 5FU et cisplatine (n = 38) ; 5FU ou capécitabine et oxaliplatine (FOLFOX ou XELOX) (n = 21) ; ou sunitinib (n = 10). Après un suivi médian de 26,4 mois, les médianes de SSP et de SG à partir du début de la deuxième ligne étaient respectivement de 3,2 mois et 6,7 mois, et sans différence significative entre les groupes de traitement. Il n'y avait en particulier pas de différence de survie entre une monothérapie par 5FU et un doublet à base de 5FU. Ces durées de survie restent faibles et posent la question de la meilleure sélection des patients, afin d'identifier parmi les patients en progression après gemcitabine-platine ceux qui sont les plus susceptibles de bénéficier d'un traitement de deuxième ligne. Dans l'étude de Brieau et al. [27], trois facteurs pronostiques étaient identifiés en analyse multivariée, significativement associés à une meilleure SG : le PS 0-1 (HR = 0,32, p < 0,0001), le taux sanguin de CA19-9 < 400 UI/mL (HR = 2,59, p < 0,0001), et l'obtention d'un contrôle tumoral (stabilité ou réponse) sous la CT de première ligne (HR = 0,56, p = 0,0237). Dans une analyse rétrospective monocentrique chez 168 patients ayant un CK avancé dont 50 avaient reçu un traitement de deuxième ligne, Kang et al. [28] ont observé qu'un PS  2, une albuminémie > 3,5 g/dL et une atteinte métastatique limitée à un organe étaient des facteurs indépendants de bon pronostic. Les patients qui réunissaient ces 3 critères à l'initiation de la deuxième ligne avaient une SG significativement plus prolongée (9,5 mois vs 4,3 mois, p < 0,05). Fornaro et al. [29] ont rapporté les résultats d'une analyse rétrospective multicentrique chez 811 patients atteints de CK avancé dont 357 traités en deuxième ligne ; 300 patients (37 %) étaient inclus dans l'analyse. Les facteurs pronostiques indépendants associés à une meilleure SG étaient le score PS 0 (HR = 0,348 ; p < 0,001), un taux sérique de CA19-9  152 UI/mL (HR = 0,574 ; p = 0,013), une SSP sous traitement de première ligne supérieure à 6 mois (HR = 0,633 ; p = 0,027) et un antécédent de résection chirurgicale de la tumeur primitive (HR = 0,609 ; p = 0,027). Les 249 patients pour lesquels les auteurs disposaient des données pour ces 4 variables étaient répartis en 3 groupes de pronostic bon (n = 98), intermédiaire (n = 73) et mauvais (n = 78). Les médianes de SG étaient respectivement de 13,1 mois, 6,6 mois et 3,7 mois (p < 0,01).

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TABLEAU III Essais évaluant des agents ciblant la voie de l'EGFR dans les cancers des voies biliaires avancés Phase Chen et al. [49] Rubovszky et al. [50] Hezel et al. [51] Sohal et al. [52] Philip et al. [53] Gruenberger et al. [54] Malka et al. [37] Lee et al. [55] Jensen et al. [56] Ramanathan et al. [57] Chiorean et al. [58] Borbath et al. [59] Bekaii-Saab et al. [60] Rizell et al. [61]

II

n

L

122

II

34

II

31

II

35

II

42

II

150

III

268

II

46

II

17

II

11

II

44

II

SSPm (mois)

SGm (mois)

RO (%)

1

GEMOX/cetux vs GEMOX

RO

6,7 vs 4,1

10,6 vs 9,8

27 vs 15

1

re

Gem/cape/cetux

RO

7,9

14,4

17,6

1

re

GEMOX/pani

RO

10,6

20,3

45

1

re

Gem/iri/pani

SSP

9,7

12,9

69

e

Erlo

SSP

2,6

7,5

8

1

re

GEMOX/cetux

RO

8,8

15,2

63

1

re

GEMOX/cetux vs GEMOX

SSP

6,1 vs 5,5

11 vs 12,4

24 vs 23

1

re

GEMOX/erlo vs GEMOX

SSP

5,8 vs 4,2

9,5 vs 9,5

30 vs 16

1

re

GEMOX/cape/pani

SSP

8,3

10

33

2

e

Lapatinib

RO

1,8

5,2

0

2

e

Docetaxel/erlo

SSP

4,7

5,7

0

Gem/cetux

SSP

5,8

13,5

59,1

Selumetinib

RO

3,7

9,8

12

Sirolimus

RO

1

re

re

28

II

Critère de jugement

2

30

II

Agent

re

1 et 2

9

1

re

e

7

0

n : nombre de patients ; L : ligne de traitement ; SGm : survie globale médiane ; SSPm : survie sans progression médiane ; RO : réponse objective ; GEMOX : gemcitabine plus oxaliplatine ; Gem : gemcitabine ; cape : capécitabine ; cetux : cetuximab ; erlo : erlotinib ; iri : irinotécan ; pani : panitumumab.

comparatives ont permis de mettre en évidence une surexpression de VEGF-A dans les CK intrahépatiques, non retrouvée dans les CK extrahépatiques [38,39]. Cette surexpression du VEGF-A était corrélée à une augmentation de la densité

microvasculaire tumorale. Sur la base de ces données, des études cliniques ont été proposées pour évaluer l'efficacité des antiangiogéniques dans les CK avancés [39]. Elles sont résumées dans le tableau IV.

TABLEAU IV Essais évaluant des antiangiogéniques dans les cancers des voies biliaires avancés Auteurs Zhu et al. [40] Lubner et al. [62] Valle et al. [63]

Phase

n

L

Bras à l'étude

Critère de jugement

SSPm (mois)

SGm (mois)

RO (%)

II

35

1re

GEMOX bévacizumab

SG

7

12,7

40

53

re

Bevacizumab-erlotinib

RO

4,4

9,9

12

re

GEMCIS/cediranib vs GEMCIS/placebo

SSP

7,7 vs 7,4

14,1 vs 11,9

43 vs 19

e

Sunitinib

SG

3,6

9,6

13,7

II II

124

1 1

Neuzillet et al. GERCOR (SUN-CK) [41]

II

53

2

Yi et al. [42]

II

56

2e

Sunitinib

SSP

1,7

4,8

8,9

Krege et al. [64]

II

89

1re

GEMCIS/sorafenib vs GEMCIS/placebo

SSP

6,3 vs 6,1

11,3 vs 10,6

52,5 vs 47

El-Khoueiry et al. [65]

II

31

1re

Sorafenib

SSP

3

9

6

Bengala et al. [66]

II

46

Ne

Sorafenib

RO

2,3

4,4

2

Moehler et al. [67]

II

102

1re

Gem/sorafenib vs Gem/placebo

SSP

3 vs 4,9

8,4 vs 11,2

14 vs 10

FOLFIRI/bevacizumab

RO

8

20

38,4

Guion-Dusserre et al. [43]

II

13

e

2

6

n : nombre de patients ; L : ligne de traitement ; SGm : survie globale médiane ; SSPm : survie sans progression médiane ; RO : réponse objective ; GEMOX : gemcitabine plus oxaliplatine ; GEMCIS : gemcitabine plus cisplatine ; Gem : gemcitabine.

tome xx > n8x > xx 2016

Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

tome xx > n8x > xx 2016

Quelle place pour la chimiothérapie intraartérielle hépatique ? La CT intra-artérielle hépatique a été étudiée pour le traitement des CK intrahépatiques localement avancés. Elle permet d'administrer sélectivement la CT au niveau des lésions hépatiques, dont la vascularisation est à prédominance artérielle (rationnel identique à celui des carcinomes hépatocellulaires ou des métastases hépatiques de tumeurs neuro-endocrines), avec théoriquement moins de toxicités systémiques. Ghiringhelli et al. [44] ont proposé, chez 12 patients atteints de CK intrahépatique non résécable limité au foie, en progression après une première ligne par GEMOX, l'administration intraartérielle hépatique de gemcitabine 1000 mg/m2 et d'oxaliplatine 100 mg/m2 tous les 14 jours. L'analyse, rétrospective, montrait des médianes de SSP et de SG de respectivement 9,1 mois et 20,3 mois. Huit patients ont présenté une réponse partielle, 2 d'entre eux ont pu être opérés (résection R0) et 3 ont été traités par radiothérapie stéréotaxique. Dans la méta-analyse de Boehm et al. [45] la CT intra-artérielle hépatique présentait les meilleurs résultats de SG devant les autres techniques intra-artérielles hépatiques (radio-embolisation à l'Yttrium 90, chimio-embolisation intra-artérielle hépatique conventionnelle, et embolisation sélective par microbilles chargées de chimiothérapie), avec une SG médiane de 22,8 mois (vs respectivement 13,9, 12,4 et 12,3 mois pour les autres techniques). L'efficacité relative de la CT intra-artérielle hépatique doit être pondérée par ses effets secondaires de grade III/IV (0,35 événement par patient), plus fréquents qu'avec la chimio-embolisation intra-artérielle hépatique conventionnelle (0,26 événement par patient) et l'embolisation sélective par microbilles chargées de CT (0,32 événement par patient).

Perspectives Vers une classification moléculaire des cholangiocarcinomes Les essais de thérapies ciblées, en monothérapie ou en combinaison avec les cytotoxiques, n'ont à ce jour apporté que des bénéfices marginaux dans le traitement des CK. Ceci peut être expliqué en partie par le manque de biomarqueurs prédictifs de réponse permettant d'affiner la sélection des patients. L'exemple du traitement par antiangiogénique spécifiquement dédié aux patients ayant un CK intrahépatique, sur le rationnel d'une surexpression de VEGF-A restreinte à ce sous-type, en est une illustration. De même, l'échec des thérapies combinées avec des anti-EGFR pourrait être lié à un défaut de sélection des patients sur la base de critères moléculaires prédictifs d'une réponse aux anti-EGFR. L'effort porte actuellement sur une meilleure compréhension des voies moléculaires et des facteurs de risque de transformation, enrichissant la classification des CK par l'individualisation

7

Zhu et al. [40] ont rapporté dans une étude de phase II une SG et une SSP médianes de respectivement 12,7 mois et 7 mois avec l'association GEMOX plus bévacizumab chez 35 patients ayant un CK intrahépatique (n = 22), extrahépatique (n = 3) ou un adénocarcinome vésiculaire (n = 10), en première ligne. Les médianes de SG et de SSP atteignaient respectivement 14,2 mois et 7,6 mois dans le sous-groupe des CK intrahépatiques. Une étude française multicentrique de phase II (GERCOR-SUNCK) a évalué l'efficacité et la tolérance d'un traitement par sunitinib 37,5 mg/j per os en continu en deuxième ligne après CT à base de gemcitabine  platine spécifiquement chez des patients ayant un CK intrahépatique avancé [41]. Les patients (n = 53) devaient être en bon état général (PS 0-1) et avoir une fonction hépatique conservée (bilirubine normale, PAL et transaminases < 5 N). Après un suivi médian de 29,9 mois, la médiane de SG atteint 9,6 mois et la médiane de SSP 3,6 mois. Parmi les 51 patients évaluables à l'imagerie, 7 (13,7 %) avaient une réponse partielle tumorale et 36 (70,6 %) une maladie stable (soit un taux de contrôle tumoral de 84,3 %). La toxicité était essentiellement hématologique (neutropénie et thrombopénie de grades 3–4 : respectivement 26,4 % et 24,1 %), et l'hypertension artérielle (20,7 %) et l'asthénie (18,9 %) étaient les toxicités cliniques de grades 3–4 les plus fréquentes ; une réduction de dose à 25 mg/j et/ou un traitement symptomatique étaient suffisants pour les contrôler. À noter que l'activité antitumorale des antiangiogéniques apparaît restreinte au sous-type intrahépatique des CK. En effet, dans l'étude de Yi et al. [42] ayant évalué le sunitinib chez des patients ayant un CK avancé en deuxième ligne sans distinction de localisation tumorale, la SSP était limitée (1,7 mois) et le taux de réponse n'était que de 8,9 %. Dans la même logique, l'équipe de Ghiringhelli [43] a publié récemment les résultats prometteurs d'une étude évaluant en deuxième ligne chez 13 patients ayant un CK de sous-type intrahépatique l'association FOLFIRI plus bévacizumab. La SSP était de 8 mois et la SG de 20 mois. D'autres inhibiteurs de tyrosine kinases multicibles à activité antiangiogénique font actuellement l'objet d'essais cliniques (cediranib, cabozantinib, sorafenib, vandetanib, pazopanib, regorafenib). Les études translationnelles visant à l'identification de biomarqueurs pronostiques et prédictifs (biologiques et d'imagerie) de réponse aux antiangiogéniques sont en cours et devraient permettre de mieux sélectionner les patients. Dans l'étude SUN-CK, des niveaux circulants élevés à la baseline VEGF-C (p = 0,024) et de VEGF-A (p = 0,052) étaient associés à une SG plus prolongée. L'aspect en imagerie (rehaussement après injection de produit de contraste traduisant le caractère hypervasculaire) pourrait aussi aider à identifier les patients qui sont les meilleurs candidats à ce type de traitement. Le tableau V récapitule les principaux essais thérapeutiques de phase II/III en cours dans les CK avancés ainsi que les essais ciblés sur des anomalies moléculaires spécifiques.

Synthèse

Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015

Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

Synthèse

G. Marret, C. Neuzillet, B. Rousseau, C. Tournigand

TABLEAU V Principaux essais thérapeutiques en cours dans le cholangiocarcinome avancé (d'après http://www.clinicaltrial.org/) Indication

Schéma thérapeutique

Critère principal

Phase III : S1 + photothérapie dynamique vs photothérapie dynamique NCT00869635

SG

Phase I/II : radio-embolisation à l'Yttrium-90 + GEMCIS NCT02512692

Toxicité dose limitante

Phase II : GEMOX + capécitabine  panitumumab NCT00779454

SSP

Phase II : GEMOX + capécitabine + bévacizumab ou panitumumab NCT01206049

Taux de patients en vie et sans progression à 6 mois

Phase II : gemcitabine + nab-paclitaxel NCT02181634

SSP

Phase III : contrôle actif des symptômes  mFOLFOX NCT01926236

SG

Phase II : cabozantinib NCT01954745

SSP

Phase II : FOLFIRINOX NCT02456714

Taux de RO

Phase II : regorafenib NCT02053376 Phase II : regorafenib vs placebo NCT02162914

SSP

Phase II : S-1 + nab-paclitaxel NCT01963325

Taux de RO

Intrahépatique

Phase II : sunitinib NCT01718327

SG

Extrahépatique ou vésiculaire

Phase II : sorafenib NCT00238212

Taux de RO

Phase II : dasatinib NCT02428855 Phase I (IDH1) : AG120 NCT02073994 Phase I/II (IDH2) : AG221 NCT02273739 5 études au total

Taux de RO Dose maximale tolérée Dose maximale tolérée

Translocation de FGFR2 ou anomalie génétique de FGFR

Phase II : BGJ398 NCT02150967 Phase I/II : ARQ087 NCT01752920

Taux de RO Dose maximale tolérée

Réarrangement de ROS1 ou ALK

Phase II : LDK378 NCT02374489 Phase II : RXDX101 NCT02568267

Taux de RO

Phase Ib : pembrolizumab NCT02054806

Taux de RO et tolérance

re

1 ligne Non résécable

Non résécable (intrahépatique) Avancé Avancé (KRAS sauvage) Avancé 2e ligne et au-delà Après GEMCIS

IDH1 ou IDH2 muté intrahépatique

PD-L1 positif

8

GEMCIS : gemcitabine-cisplatine ; GEMOX : gemcitabine-oxaliplatine ; RO : réponse objective ; SG : survie globale ; SSP : survie sans progression.

tome xx > n8x > xx 2016

Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

Synthèse

Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015

TABLEAU VI Synthèse des anomalies moléculaires, prévalence selon le sous-type anatomique de CK Anomalie moléculaire [68–71]

Taux d'anomalie en fonction de la localisation (%)

Traitement spécifique potentiel

Localisation non précisée

Intrahépatique

Extrahépatique

Vésiculaire

TP53

35 % (6 %–50 %)

6 %–29 %

45 %

38 %

Thérapie génique p53 ciblant spécifiquement la tumeur

KRAS

22 % (3–45 %)

3–24 %

40 %

17 %

Pas d'inhibiteur spécifique de RAS Anti-EGFR si RAS non muté Inhibiteur MEK1/2 : selumetinib

BRAF

5% (1–22 %)

7,5 %

1–12 %

4%

Vemurafenib/dabrafenib  trametinib

EGFR

(0–15 %)

1,4 %

ND

2%

Erlotinib, gefitinib ou afatinib

FGFR2

2%

0–13 %

1%

Dovitinib, ponatinib

IDH1

10 %

15 %

AG120

IDH2

3%

7%

AG220

IDH1 ou IDH2

13 %

19–23 %

0%

0%

AG120 ou AG220, dasatinib

PIK3CA

7%

0–6 %

0–7 %

7 %–9 %

Alpelisib

FGFR2 translocations

(8 %)

13 %

1%

ND

Dovitinib, ponatinib

ROS translocations

(1 %)

1%

0%

ND

Crizotinib ou LDK378

Dans la colonne localisation non précisée et vésiculaire, le premier chiffre correspond aux prévalences issues de COSMIC Database. Les chiffres entre parenthèses indiquent les valeurs retrouvées dans la littérature sur différentes séries. ND : non disponible.

Vers une meilleure compréhension du rôle du micro-environnement tumoral Par analogie avec l'adénocarcinome du pancréas, dont le stroma représente le contingent tumoral prédominant, les CK sont caractérisés par un stroma abondant. Ce stroma, entourant les cellules tumorales, est une structure complexe, constituée de protéines de la matrice extracellulaire et de divers types cellulaires : cellules fibroblastiques, cellules endothéliales et leur péricytes, cellules immunitaires. Ce micro-environnement tumoral joue un rôle clé dans l'initiation et la progression tumorale du CK. Son ciblage pourrait constituer une nouvelle stratégie thérapeutique [46]. La place de l'immunothérapie dans le traitement des CK reste également à définir. Les anticorps monoclonaux ciblant le checkpoint immunitaire impliquant l'interaction de program death (PD)-1 (récepteur) et PD-L1 (ligand) ont montré une activité

tome xx > n8x > xx 2016

clinique dans divers types de cancer, y compris le mélanome, le cancer du poumon non à petites cellules, les cancers urothéliaux, le cancer du côlon avec instabilité des microsatellites (MSI), le carcinome hépatocellulaire, les cancers de la tête et du cou et le cancer du sein triple négatif. Le pembrolizumab est un anticorps IgG4 humanisé dirigé contre PD-1. Des données récentes ont montré des résultats encourageants avec le pembrolizumab en monothérapie chez des malades ayant un CK avancé PD-L1 positif prétraité (n = 24) : 4 (17 %) patients ont présenté une réponse partielle et 4 (17 %) une stabilisation tumorale, avec un contrôle tumoral prolongé (> 40 semaines) chez 5 patients [47]. Les essais de thérapie cellulaire adaptative fondée sur les lymphocytes du stroma tumoral sont également en cours, avec des résultats préliminaires encourageants [48].

Conclusion Les CK sont une entité hétérogène de tumeurs rares, de pronostic sombre. La chirurgie est la seule modalité curative pour les formes localisées. La chimiothérapie adjuvante est en cours de validation dans trois essais randomisés de phase III chez les patients opérés d'un CK. Le doublet de chimiothérapie gemcitabine-platine (GEMCIS ou GEMOX) est la référence en première ligne et aucune thérapie ciblée n'est à ce jour validée dans cette indication. Il n'existe pas de standard thérapeutique de deuxième ligne ; l'identification de facteurs pronostiques et

9

de sous-types très différents du point de vue épidémiologique, moléculaire, biologique, et thérapeutique. Au cours des dernières années, les publications portant sur le séquençage à grande échelle d'exomes et de trancriptomes de CK se sont multipliées. Elles pourraient déboucher sur de nouvelles pistes thérapeutiques. Le tableau VI fait la synthèse des anomalies moléculaires ainsi identifiées et pour lesquelles les données sont les plus avancées ; parmi elles, les voies de FGFR, ROS/c-MET et IDH.

Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

Synthèse

G. Marret, C. Neuzillet, B. Rousseau, C. Tournigand

prédictifs pour la sélection des patients dans cette situation est un enjeu important. De nouvelles pistes thérapeutiques pourraient émerger de la meilleure compréhension des mécanismes biologiques et moléculaires impliqués dans la carcinogenèse et l'hétérogénéité phénotypique des CK. Les voies moléculaires pour lesquelles les données sont les plus avancées sont celles de

FGFR, ROS/c-MET et IDH. Le ciblage du micro-environnement tumoral (fibroblastes, cellules immunitaires) pourrait également constituer une nouvelle stratégie thérapeutique. Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.

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tome xx > n8x > xx 2016

Pour citer cet article : Marret G, et al. Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015. Bull Cancer (2016), http://dx.doi. org/10.1016/j.bulcan.2016.01.019

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Synthèse

Traitements médicaux des cholangiocarcinomes en 2015