Traumatisme crânien grave de l’enfant : prise en charge en réanimation, principaux objectifs

Traumatisme crânien grave de l’enfant : prise en charge en réanimation, principaux objectifs

Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 28 (2009) 690–691 Congre`s de l’Adarpef Traumatisme craˆnien grave de l’enfant : prise en charg...

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Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 28 (2009) 690–691

Congre`s de l’Adarpef

Traumatisme craˆnien grave de l’enfant : prise en charge en re´animation, principaux objectifs§ Severe head trauma: Main targets of the intensive care phase G. Emeriaud Service de re´animation pe´diatrique, CHU de Grenoble, BP 217, 38043 Grenoble cedex 9, France Disponible sur Internet le 9 juillet 2009

Mots cle´s : Traumatisme craˆnien ; Enfant ; Re´animation Keywords: Severe head trauma; Intensive care; Children

1. Introduction Le traumatisme craˆnien (TC) grave est une des causes principales de mortalite´ et de morbidite´ chez l’enfant. Il survient sur un cerveau en cours de de´veloppement, ce qui explique certaines spe´cificite´s physiopathologiques que nous aborderons dans une premie`re partie. Le pronostic du TC grave a longtemps e´te´ suppose´ meilleur chez l’enfant du fait de la plasticite´ ce´re´brale, mais les e´tudes re´centes montrent que les se´quelles sont fre´quemment se´ve`res. La prise en charge doit donc eˆtre optimale de la pe´riode pre´hospitalie`re jusqu’a` la phase de re´e´ducation. 2. Spe´cificite´s physiopathologiques La compliance ce´re´brale est faible chez l’enfant malgre´ la liberte´ des sutures et des fontanelles car le volume intracraˆnien est petit et la distensibilite´ de la dure-me`re et du craˆne est faible lors d’une distension rapide. La pression intracraˆnienne (PIC) risque donc de s’e´lever plus rapidement que chez l’adulte. Les le´sions ce´re´brales primaires sont particulie`res, avec une moindre fre´quence d’he´matomes intracraˆniens (10–30 % des cas). L’œde`me ce´re´bral diffus avec le´sions axonales diffuses est, en revanche, tre`s fre´quent [1]. Le roˆle de l’hyperhe´mie dans la survenue de l’œde`me diffus est remis en cause [2]. Une distorsion ce´re´brale plus globale lors du choc peut eˆtre

implique´e, ainsi qu’une sensibilite´ particulie`re du cerveau en de´veloppement a` l’excito-toxicite´, a` la re´ponse inflammatoire, et a` l’entre´e en cascade apoptotique. Comme chez l’adulte, des le´sions secondaires risquent de se surajouter, surtout en pre´sence d’agression ce´re´brale secondaire d’origine syste´mique (ACSOS) dont la pre´vention et le traitement constituent la base de la prise en charge. Les principaux ACSOS sont l’hypotension, l’hypoxie, l’hypercapnie et l’hypocapnie, l’ane´mie, les de´sordres e´lectrolytiques (surtout natre´mie et glyce´mie), l’hyperthermie, les troubles de coagulation. L’autore´gulation vasculaire ce´re´brale permet le maintien du de´bit sanguin graˆce a` la vasore´activite´ ce´re´brale sur une certaine plage de pression arte´rielle (PA), qui est plus e´troite que chez l’adulte. Le maintien de l’e´quilibre he´modynamique est donc impe´ratif et complexe, d’autant plus que l’autore´gulation est fre´quemment alte´re´e. 3. Prise en charge ge´ne´rale La prise en charge ge´ne´rale repose sur la pre´vention des ACSOS. Le patient est installe´ au calme, la teˆte du lit releve´e a` 308 sauf contre-indication. La teˆte est maintenue en position me´diane, sans cathe´ter jugulaire interne ni collier cervical afin d’e´viter toute geˆne au retour veineux. Le monitorage de la PA, du CO2 expire´, de la SaO2 et de la tempe´rature doit eˆtre continu.

3.1. Objectifs ventilatoires §

e

30 Congre`s de l’association des anesthe´sistes-re´animateurs pe´diatriques d’expression franc¸aise, Marrakech 26–28 mars 2009. Adresse e-mail : [email protected].

Sur le plan ventilatoire, l’effet de´le´te`re de l’hyperventilation prophylactique est tre`s clair et il est recommande´ de maintenir

0750-7658/$ – see front matter # 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. doi:10.1016/j.annfar.2009.06.005

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une normoventilation sauf exception, et une SaO2 supe´rieure a` 95 % [3]. Les pressions de ventilation excessives sont associe´es a` la survenue de le´sions pulmonaires. 3.2. Objectifs he´modynamiques La stabilite´ he´modynamique est un objectif prioritaire. Les guidelines internationaux recommandent de maintenir la PA systolique supe´rieure a` 70 + 2  aˆge en anne´es (5e percentile de la norme) [3]. Cependant, le maintien d’une pression arte´rielle (PA) plus e´leve´e semble associe´ a` une meilleure e´volution dans plusieurs e´tudes. Certains auteurs recommandent donc un objectif plus e´leve´ [2], par exemple 90 + 2  aˆge en anne´es (me´diane de la norme). Quel que soit l’objectif initial, il doit eˆtre re´e´value´ en fonction du type de le´sion ce´re´brale, de la pression de perfusion ce´re´brale (PPC) souhaite´e et du profil de vascularisation ce´re´brale. La PA est controˆle´e par l’optimisation du remplissage, ge´ne´ralement associe´ a` la noradre´naline. Un inotrope (dobutamine) est parfois indique´ en cas de dysfonction ventriculaire (se´dation par thiopental ou contusion myocardique). 3.3. Les apports hydroe´lectrolytiques Les apports hydroe´lectrolytiques correspondent aux besoins normaux de l’enfant, sous forme de NaCl 0,9 % initialement afin de limiter l’hyperglyce´mie de´le´te`re, mais sous surveillance rapproche´e de la glyce´mie capillaire. La nutrition est introduite a` partir de j2 par voie ente´rale ou parente´rale, en visant l’apport de 150 % des besoins caloriques normaux a` j6. 3.4. Se´dation Une « se´dation » continue par morphinique et midazolam est le plus souvent utilise´e. La ke´tamine pourrait avoir un inte´reˆt du fait de sa bonne tole´rance he´modynamique et de potentiels effets neuroprotecteurs. La prophylaxie antie´pileptique par phe´nytoı¨ne semble diminuer l’incidence des crises a` la phase aigue¨. 3.5. Objectifs he´matologiques et endocriniens Sur le plan he´matologique, le seuil transfusionnel de 10 g/dl est le plus souvent utilise´ en France. De fac¸on e´galement empirique, il est maintenu un TP supe´rieur a` 60 %, des plaquettes supe´rieures a` 100 G/l, et le fibrinoge`ne supe´rieur a` 1 g/l. Sur le plan endocrinien, le syndrome de se´cre´tion inapproprie´e d’ADH, le syndrome de perte de sel ce´re´bral, et le diabe`te insipide doivent eˆtre de´piste´s et traite´s rapidement afin d’e´viter les variations de natre´mie. Les de´ficits ante´hypophysaires doivent eˆtre de´piste´s au moins a` la phase chronique et il est possible qu’un de´pistage a` la phase aigue¨ soit inte´ressant. 4. Monitorage ce´re´bral Le monitorage ce´re´bral repose en premier lieu sur la mesure continue de la PIC et de la PPC, syste´matique lorsque

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le Glasgow est infe´rieur ou e´gal a` huit ou lorsque le scanner est anormal et que le patient ne peut eˆtre surveille´ cliniquement [3]. Les objectifs habituellement retenus sont des PIC infe´rieurs a` 15 (nourrissons), 18 (2–8 ans) et 20 (plus de huit ans) et des PPC supe´rieurs a` 40 mmHg (moins d’un an), 50 mmHg (entre 2–6 ans), 60 mmHg (7–10 ans) et 60– 70 (plus de dix ans) [4]. Ces seuils doivent eˆtre individualise´s en fonction de l’he´modynamique ce´re´brale du patient. Le Doppler transcraˆnien (DTC) permet d’e´valuer de fac¸on non invasive la circulation ce´re´brale et aide a` orienter les the´rapeutiques. Une ve´locite´ diastolique infe´rieure a` 25 cm par seconde ou un index de pulsatilite´ (IP) supe´rieur a` 1,3 sont associe´s a` un mauvais pronostic [5]. En cas de situation clinique instable, les situations d’ische´mie peuvent eˆtre de´piste´es par le monitorage de l’oxyge´nation ce´re´brale, base´ sur la saturation veineuse jugulaire en O2, la pression tissulaire en O2 [6] ou la spectroscopie proche de l’infrarouge. 5. Traitement de l’hypertension intracraˆnienne Le traitement de l’hypertension intracraˆnienne repose en premie`re intention sur la ve´rification des mesures ge´ne´rales, le drainage de LCR et l’osmothe´rapie (mannitol 20 % ou NaCl hypertonique). En deuxie`me intention, apre`s ve´rification au scanner de l’absence d’he´matomes accessibles a` la neurochirurgie, l’hyperventilation mode´re´e, la se´dation profonde par thiopental, ou la craniectomie de de´compression peuvent eˆtre utilise´es mais ces techniques peuvent eˆtre de´le´te`res lorsqu’utilise´es a` mauvais escient. Leur indication doit donc se faire sous le couvert d’un monitorage ce´re´bral multimodal permettant de de´pister les e´pisodes d’ische´mie [1]. L’hypothermie ne peut pas eˆtre recommande´e chez l’enfant sauf cas tre`s particulier [7]. Re´fe´rences [1] Orliaguet GA, Meyer PG, Baugnon T. Management of critically ill children with traumatic brain injury. Paediatr Anaesth 2008;18:455–61. [2] Kochanek PM. Pediatric traumatic brain injury: quo vadis? Dev Neurosci 2006;28:244–55. [3] Guidelines for the acute medical management of severe traumatic brain injury in infants, children, and adolescents. J Trauma 2003; 54 (6 Suppl.): S235–310. [4] Chambers IR, Stobbart L, Jones PA, Kirkham FJ, Marsh M, Mendelow AD, et al. Age-related differences in intracranial pressure and cerebral perfusion pressure in the first 6 hours of monitoring after children’s head injury: association with outcome. Childs Nerv Syst 2005;21:195–9. [5] Trabold F, Meyer PG, Blanot S, Carli PA, Orliaguet GA. The prognostic value of transcranial Doppler studies in children with moderate and severe head injury. Intensive Care Med 2004;30:108–12. [6] Figaji AA, Fieggen AG, Argent AC, Leroux PD, Peter JC. Does adherence to treatment targets in children with severe traumatic brain injury avoid brain hypoxia? A brain tissue oxygenation study. Neurosurgery 2008;63:83–91. discussion 91–2. [7] Hutchison JS, Ward RE, Lacroix J, Hebert PC, Barnes MA, Bohn DJ, et al. Hypothermia therapy after traumatic brain injury in children. N Engl J Med 2008;358:2447–56.