Une « conjonctivite » traînante chez un garçon de 2 ans

Une « conjonctivite » traînante chez un garçon de 2 ans

Pour citer cet article : El Khatib N, et al. Une « conjonctivite » traînante chez un garçon de 2 ans. Presse Med. (2017), http://dx.doi. org/10.1016/j...

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Pour citer cet article : El Khatib N, et al. Une « conjonctivite » traînante chez un garçon de 2 ans. Presse Med. (2017), http://dx.doi. org/10.1016/j.lpm.2017.01.023 Presse Med. 2017; //: ///

En pratique

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Une « conjonctivite » traînante chez un garçon de 2 ans Névine El Khatib 1,3, Dominique Bremond-Gignac 2,3, Sarah Michel 2, Gérard Chéron 1,3, Thierry Molina 3,4, François Angoulvant 1,3, Daniel Orbach 5

Disponible sur internet le :

1. Hôpital Necker–Enfants-Malades, AP–HP, service des urgences pédiatriques, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France 2. Hôpital Necker–Enfants-Malades, AP–HP, service d'ophtalmologie, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France 3. Faculté de médecine, université Paris V René Descartes, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France 4. Hôpital Necker–Enfants-Malades, AP–HP, service d'anatomopathologie, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France 5. Institut Curie, département de pédiatrie adolescent jeune adulte, 26, rue d'Ulm, 75005 Paris, France

Correspondance : Névine El Khatib, hôpital Necker–Enfants-Malades, AP–HP, service des urgences pédiatriques, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France. [email protected]

A persistent "conjunctivitis'' in a 2-year-old boy

Introduction Les motifs de consultation pour « œdème palpébral » aux urgences pédiatriques sont peu fréquents, mais peuvent s'associer à de nombreuses pathologies orbitaires ou générales (syndrome néphrotique par exemple). Ce signe ne doit pas faire méconnaître une exophtalmie sous-jacente. Cette observation souligne l'importance de l'examen clinique ophtalmologique par le praticien pour éviter les délais diagnostiques.

pédiatriques. À l'examen, il existait une exophtalmie majeure gauche isolée (figure 1), sans retentissement sur l'état général sans adénopathie prétragienne, ni cervicale. Il s'y associait une

Observation Un garçon, âgé de 4 ans, sans antécédent spécifique a consulté pour un œdème périorbitaire gauche isolé. Le diagnostic de « conjonctivite » a été proposé et un traitement par collyre antibiotique avec amoxicilline acide–clavulanique oral a été prescrit par son médecin habituel. Ces mêmes traitements ont été reconduits pour 1 mois par son ophtalmologue consulté en raison de la persistance de l'œdème palpébral. Devant la majoration de l'œdème périorbitaire gauche, il a consulté aux urgences

Figure 1 Aspect clinique du patient à l'arrivée aux urgences pédiatriques avec présence d'une exophtalmie proptosis et d'un œdème d'allure inflammatoire périorbitaire gauche (avec l'autorisation de la famille)

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tome xx > n8x > xx 2017 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2017.01.023 © 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

LPM-3301

Pour citer cet article : El Khatib N, et al. Une « conjonctivite » traînante chez un garçon de 2 ans. Presse Med. (2017), http://dx.doi. org/10.1016/j.lpm.2017.01.023

En pratique

N. El Khatib, D. Bremond-Gignac, S. Michel, G. Chéron, T. Molina, F. Angoulvant, et al.

Figure 2 a : imagerie en tomodensitométrie cérébrale montrant la présence d'une masse rétro-orbitaire gauche d'allure tissulaire (!) avec un prolongement palpébral supérieur responsable de l'exophtalmie de grade 3 ; b : imagerie par résonance magnétique cérébrale montrant la présence d'une masse rétro-orbitaire gauche d'allure tissulaire (!) avec un prolongement palpébral supérieur responsable de l'exophtalmie de grade 3

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dystopie canthale avec déplacement du globe vers le bas accompagnant l'exophtalmie non réductible non pulsatile et non axile. L'oculomotricité mettait en évidence une limitation de l'élévation du regard. L'acuité visuelle n'était pas évaluable du fait de l'œdème palpébral majeur mais il existait des signes d'amblyopie gauche avec hypertropie de l'œil droit non alternante et réaction de défense à l'occlusion de l'œil sain. Les réflexes photomoteurs directs et consensuels étaient conservés avec absence de déficit pupillaire afférent relatif. L'examen du fond d'œil des 2 yeux était

normal. Le scanner cérébral (figure 2a) complété par l'imagerie par résonance magnétique orbitaire et cérébrale montrait une masse de consistance tissulaire intraorbitaire, intra- et extraconique, isolée, de moins de 5 cm, responsable de l'exophtalmie de grade 3 (figure 2b).

Quel est votre principal diagnostic ?

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Pour citer cet article : El Khatib N, et al. Une « conjonctivite » traînante chez un garçon de 2 ans. Presse Med. (2017), http://dx.doi. org/10.1016/j.lpm.2017.01.023

Dans cette observation, la biopsie chirurgicale transpalpébrale a confirmé le diagnostic proposé de rhabdomyosarcome (RMS) embryonnaire. La recherche de transcrit spécifique par RT-PCR des RMS alvéolaires était négative. La présence de contact étroit avec le nerf optique a fait classer cette tumeur comme de localisation « paraméningée ». Le bilan d'extension était négatif (TDM thoracique, PET scanner, bilan médullaire et analyse du LCR). L'enfant est inclus dans le protocole européen EpSSG RMS 05 (EuropeanPediatric Soft Tissue Sarcoma Group), groupe D (RMS orbitaire paraméningé, embryonnaire, < 5 cm, < 10 ans, biopsié au diagnostic). Après 3 cures de chimiothérapie de type IVA (ifosfamide-vincristine-actinomycine-D), une réponse partielle modérée de 30 % était notée. L'enfant est en surveillance après un traitement ayant comporté 9 cures de chimiothérapie de type IVA et de la radiothérapie orbitaire à 50,4 Grays.

Discussion Les étiologies des exophtalmies rapidement progressives unilatérales chez l'enfant ou l'adolescent sont multiples. Pour mémoire, une exophtalmie est définie par une protrusion du globe oculaire en avant du cadre osseux orbitaire. Les exophtalmies peuvent êtres d'origine bénigne ou maligne. Parmi les causes malignes, le diagnostic principal à évoquer par ordre de fréquence est le RMS intra-orbitaire qui est la tumeur pédiatrique des tissus mous la plus fréquente [1]. Viennent ensuite les métastases orbitaires de neuroblastome (la présentation est plus fréquemment bilatérale ressemblant à des hématomes orbitaires), puis le chlorome de leucémie aiguë myéloïde. Les exophtalmies unilatérales bénignes sont de multiples étiologies :  elles peuvent être tumorales comme l'angiome capillaire (présent le plus souvent à la naissance) ;  le lymphangiome kystique en poussée (se manifestant généralement à l'adolescence) ;  les myosites orbitaires inflammatoires et l'orbitopathie dysthyroïdienne [2]. Des causes vasculaires se manifestent par une enophtalmie unilatérale pulsatile avec un thrill et un souffle comme les malformations artérioveineuses et les hémangiomes. Les éthmoïdites, les abcès rétro-oculaires, les cellulites, et les dacryocystiteorigine se manifestent aussi par des exophtalmies d'étiologie infectieuse. Enfin les exophtalmies d'origine post-traumatique (fracture de la paroi de l'orbite, hématome orbitaire) révèlent parfois des fistules carotidocaverneuses nécessitant une prise en charge urgente neurochirurgicale [3]. Les diagnostics différentiels sont divers tels que les augmentations de taille du globe oculaire, comme la myopie (augmentation de la longueur axiale du globe oculaire), ou

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la buphtalmie (augmentation du globe oculaire) observée principalement dans le glaucome congénital ou le rétinoblastome avancé. La rétraction isolée palpébrale unilatérale ou l'énophtalmie controlatérale donnent toutes deux un faux aspect d'exophtalmie [3]. Le RMS est le cancer pédiatrique des tissus mous le plus fréquent et représente 4,7 % des tumeurs pédiatriques solides [1]. L'âge moyen lors du diagnostic est de 6 ans. Il s'agit d'une tumeur ubiquitaire à différenciation musculaire striée, mais la localisation préférentielle est celle de la région de la tête et du cou (35 %) avec une atteinte intraorbitaire présente dans 10 % des cas [4]. Les manifestations cliniques des RMS orbitaires sont dans 61 % des cas une exophtalmie, associée dans 76 % à une masse visible, 18 % un chémosis et dans 10,5 % une douleur ou une paralysie oculomotrice. Le diagnostic est confirmé lors de l'analyse histologique et les analyses en biologie moléculaire, rappelant la nécessité de congeler toute biopsie en pédiatrie quel que soit le diagnostic initialement suspecté pour permettre des analyses moléculaires spécifiques. Le traitement associe chimiothérapie et radiothérapie orbitaire. Dans cette localisation, l'exérèse n'est pas souhaitable en raison de l'impossibilité d'obtenir des marges suffisantes sans faire une exentération (exérèse de la cavité orbitaire). Le geste opératoire initial doit se limiter uniquement à la biopsie diagnostique sur cette tumeur très chimiosensible. Le RMS de localisation orbitaire est une tumeur pédiatrique de bon pronostic dont le taux de survie à 5 ans dépasse 85 % en l'absence d'atteinte paraméningée (absence de lyse orbitaire ou d'extension postérieure) [4]. Même s'il n'existe pas de données dans la littérature attestant que le retard diagnostique ait un impact significatif sur le pronostic vital, les risques fonctionnels d'une tumeur volumineuse doivent aussi être pris en compte [4]. Malgré ce fort taux de survie, après le traitement d'un RMS orbitaire, de nombreux patients ont des séquelles orbitaires, qu'elles soient liées aux traitements ou à la maladie initiale, à type de cataracte (42 %), des kératoconjonctivite ou d'anomalie des paupières (40 %), ainsi que des rétinopathies postradiques (8 %) [5]. L'examen ophtalmologique d'une exophtalmie doit être accompagné d'un examen général, puis complété par un scanner cérébral et une imagerie par résonance magnétique cérébrale. Ces deux derniers examens d'imagerie apportent des informations complémentaires pour orienter le diagnostic puis la prise en charge [3].

Conclusion Cette observation illustre un cas de retard de prise en charge d'un RMS ophtalmique. En effet, les signes cliniques tels que la tuméfaction périorbitaire, l'exophtalmie unilatérale et la déviation du globe oculaire d'aggravation progressive doivent systématiquement faire évoquer un syndrome de masse

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Diagnostic

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Pour citer cet article : El Khatib N, et al. Une « conjonctivite » traînante chez un garçon de 2 ans. Presse Med. (2017), http://dx.doi. org/10.1016/j.lpm.2017.01.023

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orbitaire. Une exploration par imagerie en urgence est nécessaire afin d'éliminer chez le jeune enfant une pathologie tumorale.

Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.

Références [1]

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[2]

Siegel D, King J, Tai E, Buchanan N, Ajani U, Li J. Cancer incidence rates and trends among children and adolescents in the United States, 2001-2009. Pediatrics 2014;134(4):945–55. Shields JA, Shields CL. Rhabdomyosarcoma: review for the ophthalmologist. Surv Ophthalmol 2003;48(1):39–57.

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Ducasse A. Practical management of proptosis. J Fr Ophtalmol 2009;32(8):581–8. Boutroux H, Cellier C, Mosseri V, Helfre S, Levy C, Desjardin L, et al. Orbital rhabdomyosarcoma in children: a favorable primary suitable for a less-invasive treatment. J Pediatr Hematol Oncol 2014;36(8):605–12.

[5]

Boutroux H, Levy C, Mosseri V, Desjardins L, Plancher C, Helfre S, et al. Long-term evaluation of orbital rhabdomyosarcoma in children. Clin Exp Ophthalmol 2015;43(1):12–9.

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