Journal de Chirurgie Viscérale (2013) 150, 171—176
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Une plaie des voies biliaires de découverte peropératoire T. Coste , F. Borie ∗ Chirurgie digestive et hépatobiliaire, CHU de Nîmes, place du Professeur-R.-Debré, 30000 Nîmes, France Disponible sur Internet le 16 avril 2013
Dr Coste : Nous allons présenter un dossier clinique d’une plaie des voies biliaires de découverte peropératoire. Il s’agit d’un homme de 75 ans, en prédialyse pour une glomérulonéphrite chronique, hypertendu, dyslipidémique, bronchopathe chronique, vasculaire qui a comme antécédents chirurgicaux une appendicectomie et une cure de varices. Il est en bon état général, et présente un IMC à 29. Il consulte aux urgences en octobre 2009 pour des douleurs abdominales très évocatrices d’une colique hépatique : l’échographie retrouve des calculs de la vésicule biliaire, sans signe de complication. Il a un traitement symptomatique et le patient est revu à distance pour programmer une cholécystectomie par cœlioscopie. Celle-ci a lieu en octobre 2009 : le chirurgien qui fait cette intervention constate un problème peropératoire et vous appelle. Vous arrivez au bloc et voilà ce que vous constatez : en haut (proximal) on voit une voie biliaire ouverte qui coule (un canal biliaire en amont sectionné), et en bas (aval) on voit deux canaux en aval clippés (Vidéo 1). À ce moment-là de l’intervention : que faites-vous ? Dr X : Une cholangiographie dans le segment d’amont. Dr Regenet : Une conversion. Dr Perniceni : Donc on arrête la cœlioscopie et on ouvre le patient ? Dr X : Moi je suis d’accord. On convertit le patient en laparotomie, on enlève tous les clips puisqu’on voit sur le film de la cœlisocopie qu’il y a plusieurs canaux avec plein de clips dessus. Donc on enlève tous les clips, on fait une cholangiographie sur le versant d’amont, une cholangiographie sur le versant de l’aval pour essayer de comprendre ce qui s’est passé. Dr X : En plus s’il y a un chirurgien hépato-biliaire expérimenté dans le bloc, il peut éventuellement réparer cette plaie des voies biliaires tout de suite, avec un drainage au contact. Dr X : Un doppler peropératoire artériel n’est pas un luxe dans ces conditions, par voie ouverte bien sûr, après conversion. Dr Perniceni : Conversion, exploration biliaire, exploration artérielle car vous pensez qu’éventuellement il y a un clip sur l’artère hépatique droite en plus. Dr X : Moi avant de l’ouvrir, et avant de lui enlever les clips, je ferais d’abord la cholangiographie avant de lui enlever les clips pour deux raisons : je pense que les clips peuvent nous servir pour savoir où ils sont placés par rapport aux éventuelles opacifications, et la seconde chose est que enlever un clip sur une artère comme ¸ ca qui se met à saigner ce n’est pas forcément recommandé.
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Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (F. Borie).
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Figure 1. a : cholangiographie 1 par en haut ; b : cholangiographie 1 par en bas.
Dr Regimbeau : Il y a une gradation et une stratégie dans l’ablation des clips. Donc que faites-vous : conversion, opacification, ablation des clips, doppler ? Dr Coste : Beaucoup de propositions. Donc on fait appeler un médecin expérimenté. Pour comprendre ce qui se passe la première chose à faire c’est une cholangiographie par les segments biliaires sectionnés. On ne convertit pas tout de suite car pour l’instant le bloc est pris en charge par un chirurgien non stressé qui peut réaliser cette cholangiographie sans difficulté (Vidéo 2). Voilà la cholangiographie par le canal en haut (Fig. 1a, b cholangiographie 1). Dr Vons : On a l’impression qu’on a les voies intrahépatiques gauches mais à droite, on, ne voit que la branche du VIII. Dr Regimbeau : Il manque quoi comme voies biliaires Corinne finalement ? Dr Vons : Le secteur postérieur. Dr Regimbeau : C’est que disait également Alain Sauvanet, il manque le secteur postérieur droit. Dr Perniceni : Et antérieur droit ? Il y a un canal hépatique gauche avec 2-3-4 et le 8 en V qui arrive. Dr Sauvanet : Dans les images de la vidéo 1, il y a un canal dans le lit vésiculaire que vous n’avez pas encore opacifié et qui pourrait compléter le cholangiogramme. Dr Perniceni : Il y a combien de canaux en bas ? Dr Coste : Un seul. Dr Regimbeau : Pour les plus jeunes, juste une remarque, celui qui monte le plus dans l’axe de la pince de
T. Coste, F. Borie cœlioscopie, et qui se termine en « V » c’est toujours le canal du 8. L’endoscopiste vous dit toujours que si « on jette » une prothèse dans un cholédoque, elle va droit dans le 8. Dr Perniceni : Le canal du bas, par où est-il opacifié ? Parce qu’on a vu un seul canal biliaire. Dr Coste : En fait, le canal du bas c’est le canal cholédoque. Dr Sauvanet : Il y a une anomalie dans la convergence biliaire supérieure, et il y a une convergence biliaire inférieure et intrapancréatique ou un cystique long. Dr Coste : À ce moment-là, la vésicule a été en partie réséquée, la vésicule n’est pas complètement désinsérée, elle s’en sert pour tracter mais il y a vraiment une partie qui a été enlevée. À ce moment-là, on vous demande deux choses à faire. Dr Letoublon : Je pense que tout le monde est d’accord, on n’y comprend rien. Soit le patient n’est pas en face de l’appareil, soit je ne sais pas ce qui se passe mais il faut arriver à comprendre. Si on n’arrive pas à faire une meilleure cholangiographie, il faut convertir pour être mieux placé. On rappelle : — qu’il y a une fuite dans le lit vésiculaire peut-être ; — qu’il y a peut-être une variation des voies biliaires. Mais je pense qu’il y a un très gros segment IV, si c’est vraiment le segment IV qui est là et qui est au milieu. Dr Perniceni : Elle est où la vésicule à ce moment de l’opération ? Dr Coste : À ce moment-là elle est enlevée. Dr Perniceni : Elle est enlevée mais elle est où ? Dans le ventre ? Dans un sac ? En anatomopathologie ? Sur la table ? Dr Coste : Elle est sortie, posée sur la table. Dr Romain : Même en présence d’un chirurgien averti et expérimenté je pense qu’il faut aller à la laparotomie. Il faut arrêter de traumatiser la voie biliaire car avec les pinces on est en train de dévasculariser les extrémités des voies biliaires et effectivement faire une cholangiographie correcte. De plus, sur la seconde cholangiographie, on ne voit pas la pénétration du cathéter ce qui permettrait d’avoir la cholangiographie de la voie biliaire principale et d’essayer de comprendre ce qui se passe sur la voie biliaire principale dans un premier temps. Dr Perniceni : Je vous aide encore. La pièce est sur la table. Dr Vons : Je pense qu’il faut regarder la pièce, voir s’il n’y a pas un tuyau dessus. Dr Coste : Pour l’instant, on ne convertit pas tout de suite, on continue toujours à essayer de comprendre ce qui se passe. Premièrement, on va faire une cholangiographie de la voie biliaire qui nous manque vers le haut sur notre cholangiographie initiale (cholangiographie 1), en enlevant le clip. Voilà la cholangiographie du canal manquant. C’était le clip que l’on voyait dans le lit vésiculaire : on enlève le clip et on voit une fuite de bile (on ne le voit pas sur la vidéo mais après ablation du clip il y a un saignement, probablement qu’il y a eu une section de la branche droite de l’artère hépatique qu’on contrôle assez facilement), ensuite on enlève un autre clip et là, on a de la bile et on réalise une cholangiographie par ce nouvel orifice (Fig. 2 cholangiographie 2). Deuxièmement, il faut ouvrir notre pièce opératoire et voir s’il n’y a pas de voie biliaire en plus de la vésicule. Dr Perniceni : Cholangiographie complémentaire. Et sur l’artère qui saignait, vous aviez remis un clip ? Dr Coste : Oui. Dr Perniceni : Toujours sous cœlioscopie ?
Une plaie des voies biliaires de découverte peropératoire
Figure 2.
Cholangiographie 2 du canal manquant.
Dr Coste : Oui toujours sous cœlioscopie. Voilà la cholangiographie. On vous met en parallèle (Vidéo 3) la première cholangiographie puis la seconde. Dr Vons : On ne voit pas les secteurs inférieurs droits mais en tout cas, vers le haut, on a ce qui faut. Dr Regimbeau : Il faut regarder également l’ombre du foie : on ne peut pas avoir de cholangiogramme à l’extérieur du foie. Dr Coste : Voici l’examen macroscopique de la pièce opératoire sur table qui retrouve un canal cystique qui se jette dans un segment d’une voie biliaire droite. Par extrapolation, on peut considérer que les sections ont été faites en amont sur un canal hépatique droit glissé et directement sur le canal hépatique commun sous la convergence et en aval sur le canal cholédoque (Fig. 3). Dr Perniceni : Juste pour ne pas vous tromper, les chiffres 3 et 4 sur la Fig. 3 ne correspondent pas aux segments du foie. Dr Regimbeau : Donc vous analysez la pièce de cholécystectomie ce qui est une information importante. Vous ne convertissez toujours pas ? Dr Coste : Non pour l’instant pas de conversion. On a d’abord essayé de comprendre exactement quelles étaient les voies biliaires qui ont été sectionnées pour après décider d’une prise en charge optimale. Dr Regimbeau : Fréderic Borie veux-tu faire un commentaire ? Nous sommes tous en train de te demander la conversion. Je crois qu’il faut la discuter : est-ce un dogme ? Quand faut-il la faire ? Et à quoi elle sert ?
Figure 3. L’examen macroscopique de la pièce opératoire retrouve un canal cystique se jetant dans un segment de voie biliaire. 3 : secteur paramédian droit et gauche. 4 : secteur latéral droit et gauche.
173 Dr Borie : Je crois que dans cette situation il est très important d’avoir la cartographie biliaire et la cœlioscopie magnifie les voies biliaires. Lorsqu’on est en laparotomie, on a des voies biliaires qui sont très fines, alors que là, la cœlioscopie permet de visualiser les deux canaux qui avaient été sectionnés. Donc déjà, la cœlioscopie permet d’avoir une vision des lésions de meilleure qualité, et je pense donc qu’il est important de rester sous cœlioscopie. Même lorsqu’il y a un saignement après ablation d’un clip vous en remettez un derrière donc ce n’est pas la voie d’abord qui est un frein au bilan des lésions. Dr Perniceni : Quand vous faites une cholécystectomie à froid, standard, vous faites une cholangiographie de principe ou pas ? Dr Coste : Théoriquement oui, on fait systématiquement une cholangiographie, que ce soit à Montpellier ou à Nîmes. Là en fait, on s’est rendu compte que l’opérateur n’avait pas réalisé cet examen avant de clipper et de couper des canaux. Dr Perniceni : À ceux qui l’utilisent, est-ce que grâce au vert d’indocyanine on aurait pu voir ces anomalies ? Dr Regimbeau : L’intérêt de l’opacification des voies biliaires par le vert d’indocyanine c’est d’avoir une imagerie dynamique des voies biliaires avant et après dissection. Pas de réponse de la salle. Dr Vons : Si on suit les principes de la dissection du triangle de Calot, a priori on ne doit pas se retrouver dans cette situation là. Dr Coste : Maintenant est-ce que vous jugez que l’hépatogramme est complet ? On n’a pas converti, que faites-vous ? Dr X : C’est bien de ne pas avoir converti justement. Une option qui va se discuter, c’est de lier les canaux qui sont ouverts, et de reprendre trois jours plus tard une fois que les canaux seront dilatés pour monter une anse digestive. Dr Regimbeau : Donc ligature sous cœlioscopie et attendre. Autres propositions ? Dr Letoublon : Effectivement les canaux sont bien magnifiés par la cœlioscopie, vous avez complètement raison, je suis bien d’accord. Ce qui veut dire que ce sont des canaux qui sont très fins. Donc la question est maintenant de savoir si on pense à réparer ou à drainer pour transformer cette situation opératoire en une situation opérable secondairement. Nous on proposerait un drainage externe du site opératoire, drainage externe qui va permettre par ailleurs de ne pas faire de conversion aujourd’hui. Tout à l’heure j’avais dit « on convertit si on n’arrive pas à faire la cholangiographie » mais là vous avez réussi à faire votre cholangiographie donc c’est parfait. On draine donc très bien la bile à l’extérieur pour créer une fistule biliaire externe. Nous, quand on peut, on intube les voies biliaires si c’est trop compliqué. Dr Regimbeau : Donc drainage biliaire externe en intubant les voies biliaires. Autres propositions ? Dr Vons : Je trouve que les voies biliaires sont trop fines pour se lancer dans une réparation immédiate des voies biliaires et qu’il faut en effet drainer, lier ou intuber les voies biliaires mais surtout attendre que les voies biliaires se dilatent pour pouvoir faire une réparation secondaire de qualité. Mais attention, si on dit ligature, il n’y a pas beaucoup de longueur sur le canal biliaire et il ne faut surtout pas faire de ligature en perdant plusieurs millimètre de ce canal. Donc en fait, il faut faire un petit surjet à son extrémité et ne pas perdre de la longueur. Ce n’est pas facile. Mais surtout ne pas réparer immédiatement et ne pas convertir.
174 Dr Regimbeau : Donc drainage biliaire externe en intubant ou ligaturant les voies biliaires. Mais surtout pas de réparation des voies biliaires à chaud (immédiate). Autres propositions ? Dr Perniceni : Lier ou intuber les voie biliaires ? Dr X : Moi je les ligature plutôt. Dr X : Moi j’ai l’impression que ce n’est pas très inflammatoire, le canal principal est de bonne qualité, moi je ferais plutôt une réparation biliaire immédiate sur anse en Y. Dr Coste : Effectivement il s’agissait de coliques hépatiques, les voies biliaires ne sont pas du tout inflammatoires. Dr X : Sur le canal hépatique commun sous la convergence qui est de bon calibre (Fig. 3) je ferais une anastomose biliodigestive sur anse en Y et je pense qu’on peut lier le canal du secteur postérieur glissé qui est tout petit : le patient a 75 ans, il va atrophier son secteur postérieur. Donc anastomose bilio-digestive par cœlioscopie plus ou moins ligature du canal supérieur postérieur. Dr Regimbeau : Donc anastomose bilio-digestive par cœlioscopie plus ou moins ligature du canal supérieur postérieur. Autres propositions ? Dr Regimbeau : Donc finalement s’opposent un traitement très conservateur sans réparation biliaire immédiate avec ou sans conversion, avec ou sans ligature mais qui est un drainage externe, et une réparation des voies biliaires immédiate sur anse en Y. Dr Perniceni : Et est-ce que le fait qu’il y ait une lésion d’une branche artérielle hépatique droite modifie la stratégie ? Dr Coste : Après analyse de la littérature, on se rend compte qu’en fait il y a souvent des lésions artérielles associées qui passent inaperc¸ues, même sur des contrôles doppler ou contrôle d’imagerie postopératoire, et cela sans retentissement sur le foie. Pourquoi ? Parce qu’en fait il y a beaucoup de réseaux de suppléance : le foie droit peut être vascularisé par d’autres artères que la branche droite de l’artère hépatique, comme une artère hépatique droite venant de l’artère mésentérique supérieure, ou des branches artérielles issues des artères phréniques, des artères mammaires. De plus, il y a des réseaux anastomotiques entre le foie droit et le foie gauche par la plaque hilaire. Dr Perniceni : Au total Dr Coste, quelle stratégie avezvous choisie ? Dr Coste : Tout d’abord une réparation directe anatomique avec anastomose bilio-biliaire n’est pas possible car il y a une perte de substance importante, on l’a vu sur la pièce opératoire. Ce que nous avons fait, c’est une dérivation bilio-digestive immédiate selon la technique d’une anse en Y. Dr Regimbeau : Là vous avez converti ? Dr Coste : On a converti parce que les parois biliaires étaient fines et on a pris le parti de tout réparer en réalisant une anastomose bilio-digestive sur le canal hépatique commun sur le canal du secteur postérieur glissé. Dr Perniceni : Là, vous étiez plusieurs chirurgiens, il était dix heures du matin d’accord. Mais imaginons que ce soit un vendredi en fin de journée, qu’on est le seul chirurgien. On n’est pas forcément le roi de l’anastomose bilio-digestive sur des voies biliaires millimétriques. Est-ce qu’il n’y a pas un autre message dans ces circonstances à faire passer car les circonstances et l’environnement quand même peuvent vous faire choisir une autre option thérapeutique ? Dr Regimbeur : Oui cela a été discuté. L’autre c’est le drainage externe, il est important de le souligner.
T. Coste, F. Borie Dr Pernicieux : Oui car si le message est « il faut faire une anastomose bilio-digestive tout seul le vendredi soir » ce n’est pas très sûr. Dr Coste : Dans les suites opératoires, apparaît rapidement une fistule biliaire avec un choc septique à j10 qui nécessite une reprise chirurgicale. On fait des prélèvements bactériologiques, on draine et ¸ca se passe bien, le patient reste en réanimation mais plus pour son problème rénal car il avait déjà une insuffisance rénale préterminale. Finalement le patient sort de réanimation. Six mois plus tard, en août 2010, on revoit le patient en consultation car il a présenté plusieurs épisodes d’angiocholite. Que va-t-on faire pour ce patient qui présente des angiocholites à répétition ? Dr Vons : On fait une tomodensitométrie pour voir quel canal biliaire est sténosé et où se situe la dilatation des voies biliaires intrahépatiques. Dr Letoublon : Il faudrait lui faire une bili-IRM surtout. Dr Coste : Donc nous avons fait une bili-IRM (Fig. 4). Le compte rendu signale une dilatation modérée des voies biliaires intrahépatiques sur une sténose débutante, à droite et gauche. Quelle est votre prise en charge ? Dr X : Chercher un radiologue interventionnel pour drainer par voie transcutanée et poser des prothèses. Dr Vons : Je pense que là, il ne faut rien faire, il faut attendre qu’un canal se dilate. Dr Coste : Je rappelle que le patient fait des angiocholites à répétition. Dr Vons : Oui, mais combien ? Quelle gravité ? Dr Coste : Toutes non graves qui passent médicalement mais qui nécessitent une antibiothérapie à chaque fois. Dr Vons : La tomodensitométrie recherche, en plus de la dilatation, une atrophie d’une partie du foie qui peut rentrer dans la discussion. Mais là, je ne vois pas ce que l’on peut faire d’autre qu’attendre. Je dirais aussi ne pas essayer de drainer car sa seule chance c’est que les voies biliaires se dilatent. Donc il faut essayer de gagner du temps. Dr X : Éric Vibert qui vient de publier un papier sur le fonctionnement des anastomoses bilio-digestives après réparation première, et là, malheureusement nous sommes dans la situation la plus défavorable, c’est-à-dire qu’on a un patient qui présente des épisodes d’angiocholite, sans dilatation des voies biliaires. Dr X : Dans la suite, on voit donc une cholangiographie des angiocholites, une voie biliaire qui n’est pas dilatée, et on ne voit pas bien cette voie biliaire. La question que je me pose est : est-ce qu’on a fait un bilan artériel ? Dr Coste : À ce moment-là, il n’y a pas eu de bilan artériel. Dr Letoublon : L’histoire artérielle on peut tout de suite se coucher dessus, d’autant que l’équipe de Beaujon avait très bien montré en comparant deux séries de patients avec lésion artérielle et sans lésion artérielle, que les résultats étaient exactement les mêmes et d’ailleurs pas mauvais en chirurgie différée. Dr Coste : Donc au total ce que l’on a retenu, c’est un drainage et une calibration par un radiologue expérimenté des anastomoses. Voilà quelques images des cholangiographies, et l’aspect définitif avec les deux drains calibrés (Fig. 5a, b, c). Le traitement va durer sept mois chez ce patient, il y aura quatre procédures, le dernier drain est retiré le 29 mars 2011, et le patient reste asymptomatique pendant huit mois, soit jusqu’en 2012.
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Figure 4. IRM biliaire : dilatation modérée des voies biliaires intrahépatiques sur sténose débutante des anastomoses (vide de signal à hauteur des anastomoses).
Il a représenté depuis de nouvelles récidives de ces angiocholites. Donc on réalise toujours dans la même démarche une IRM biliaire (Fig. 6a, b, c), et sur cette image, on voit nos trois principaux canaux biliaires avec une dilatation modérée des voies biliaires intrahépatiques sur une sténose des anastomoses.
On en est maintenant à quasiment l’heure actuelle, et on vous demande ce que l’on peut proposer à ce patient. Pour plus d’information, on a réalisé un bilan artériel qui est négatif. Dr Letoublon : Ce que je voulais dire, c’est qu’effectivement pour ce type de patient très difficile, il faut faire durer avec des antibiotiques et certaines
Figure 5. a, b : drainage radiologique percutané interne-externe des canaux à droite et à gauche ; c : drainage radiologique percutané interne-externe des canaux à droite et à gauche.
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Figure 6. a, b, c : bili-IRM de 2012 montrant une sténose des anastomoses biliaires : dilatation modéré des voies biliaires intrahépatiques sur une sténose des anastomoses (vide de signal à hauteur des anastomoses).
équipes proposent de leur donner des antibiotiques à la demande. Dr Adam : Je voulais faire un commentaire général, c’est que finalement on va se retrouver dans la même situation qu’au préalable. J’ai entendu le débat. Effectivement il y a beaucoup de chirurgiens qui aujourd’hui sont en faveur d’une réparation biliaire immédiate ou en tout cas précoce. Au risque d’apparaître peut-être un petit peu « Old School », les données du dernier rapport de l’AFC vont tout à fait dans ce sens-là : initialement il faut mettre un drain au contact, attendre qu’un calque fibreux se forme au niveau de la voie biliaire lésée, attendre qu’elle se dilate, pour faire une très bonne réparation avec des voies biliaires non inflammatoires bien dilatées. C’est quand même un gage de sécurité pour un patient qui est déjà rentré dans la iatrogénie, et pour lequel notre objectif ce n’est pas de dire on est les plus forts et on est capable de faire des anastomoses biliodigestives sur des voies biliaires de 3 mm, notre objectif, c’est de faire une intervention qui va guérir définitivement le patient. Moi je m’inscris en faux contre mes chirurgiens qui pensent toujours qu’ils sont meilleurs et en particulier les transplanteurs dont je fais partie. C’est vrai que lors des transplantations on est confronté à des anastomoses biliaires
sur des voies biliaires qui font 3—5 mm et on se dit donc puisqu’on le fait dans la transplantation, pourquoi on ne le ferait pas quand on a une plaie biliaire ? Parce que la situation n’est pas la même, parce que l’objectif n’est pas le même et je pense qu’on a une exigence de qualité vis-à-vis de ces patients qui rentrent dans la iatrogénie, qu’on n’a pas forcément dans la transplantation. L’analyse des résultats montre bien que de faire une réparation différée donne toujours, quel que soit le chirurgien, de meilleurs résultats qu’une réparation précoce et ¸ ca, il faut qu’on l’intègre dans notre pratique car on sait que la mode est à faire des réparations précoces. Il y a beaucoup de jeunes chirurgiens dans cette salle, et il faut que ces nombreux jeunes chirurgiens intègrent aussi le message que la réparation précoce, ce n’est pas parce que c’est à la mode que c’est mieux.
Annexe. Matériel complémentaire Le matériel complémentaire (vidéos) accompagnant la version en ligne de cet article est disponible sur http://www.sciencedirect.com et http://dx.doi.org/ 10.1016/j.jchirv.2013.03.003.