Une tumeur congénitale du cavum

Une tumeur congénitale du cavum

Ann Pathol 2007 ; 27 : 147-8 Une tumeur congénitale du cavum Cas pour diagnostic A congenital tumor of the rhinopharynx Wafa Koubaa (1), Amina Mekn...

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Ann Pathol 2007 ; 27 : 147-8

Une tumeur congénitale du cavum

Cas pour diagnostic

A congenital tumor of the rhinopharynx Wafa Koubaa (1), Amina Mekni (1), Ines Chelly (1), Khadija Bellil (1), Selma Bellil (1), Slim Haouet (1), Samia Sahtout (2), Nidhameddine Kchir (1), Moncef Zitouna (1) (1) Service d’Anatomie et de Cytologie Pathologiques, (2) Service d’Oto-Rhino-Laryngologie, Hôpital la Rabta, 1007 Bab Saadoun, Tunis, Tunisie.

Koubaa W, Mekni A, Chelly I, Bellil K, Bellil S, Haouet S et al. Une tumeur congénitale du cavum. Ann Pathol 2007 ; 27 : 147-8.

Observation Un nouveau-né de sexe masculin âgé de 30 jours était amené aux urgences pour une dyspnée laryngée. L’interrogatoire des parents trouvait la notion d’une obstruction nasale et d’une gêne respiratoire depuis trois semaines, prédominant au cours de l’allaitement. La mère avait accouché sans difficulté par voie basse d’un nouveau-né pesant 3 100 g à la naissance et dont le score d’APGAR était respectivement de 8 et 10 à 1 et à 5 minutes. Il ne présentait aucune malformation congénitale. L’examen physique à l’admission trouvait un bébé cyanosé, dyspnéique, avec des signes de lutte à type de battement des ailes du nez, de tirage sous-costal et de balancement thoraco-abdominal. La nasofibroscopie mettait en évidence une masse rhinopharyngée médiane pédiculée, d’aspect tissulaire qui semblait provenir du cavum et descendait dans l’oropharynx. L’imagerie par résonance magnétique montrait une tumeur rhinopharyngée évoquant un fibrome nasopharyngien ou un angiome. Une exérèse par voie endoscopique a été réalisée. À l’examen macroscopique, la tumeur était ferme, bosselée, à surface lisse, de coloration blanc-jaunâtre mesurant 2,5 cm de grand axe. L’examen histologique montrait une tumeur d’architecture nodulaire circonscrite, tapissée en surface par un épithélium malpighien non kératinisé (figure 1). Cette prolifération était constituée par des nodules cellulaires denses, en périphérie desquels se trouvaient des amas malpighiens et des structures canalaires. Les nodules denses se composaient de cellules fusiformes disposées en faisceaux courts et enchevêtrés séparés par de petites structures ductiformes (figure 2). Ces cellules stromales avaient un noyau arrondi à ovalaire et présentaient de nombreuses motoses par endroits. Le stroma était

FIG. 1. — Prolifération tumorale d’architecture nodulaire, tapissée en surface par un épithélium malpighien non kératinisé (HE × 100). FIG. 1. — Surface squamous epithelium with underlying epithelial and stromal elements (HE×100).

FIG. 2. — Nodules denses se composant de cellules stromales fusiformes disposées en faisceaux courts et enchevêtrés séparés par de petites structures canalaires (HE × 400). FIG. 2. — Densely cellular nodules with epithelial and spindle cells (HE×400).

fibreux, lâche et de densité variable. L’étude immunohistochimique montrait une expression diffuse des cytokératines par les structures épithéliales. Les cellules stromales exprimaient la vimentine, l’actine muscle lisse et focalement les cytokératines.

Quel est votre diagnostic ?

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Accepté pour publication le 21 mars 2006 Tirés à part : A. Mekni, voir adresse en début d’article. e-mail : [email protected]

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Wafa Koubaa et al.

Diagnostic : Adénome pléomorphe congénital du cavum ou tumeur de l’ébauche des glandes salivaires La tumeur de l’ébauche des glandes salivaires est une tumeur rhinopharyngée rarissime, apparaissant en période néonatale, décrite en 1980 sous le terme de lésion proliférative malpighienne du nasopharynx. L’appellation d’adénome pléomorphe congénital a été utilisée pour la première fois en 1985. Le terme de « tumeur de l’ébauche des glandes salivaires » faisant référence au caractère hamartomateux de cette lésion a été introduit par Dehner en 1994 [1-3]. Depuis 1980, uniquement quinze cas de tumeur de l’ébauche des glandes salivaires ont été rapportés. La présentation de cette tumeur, parfaitement illustrée par notre observation, est relativement stéréotypée. Elle survient chez le nouveau-né âgé de quelques jours à 3,5 mois et touche préférentiellement le sexe masculin [1, 3]. Elle se manifeste habituellement par une obstruction nasale et des difficultés respiratoires survenant pendant le sommeil et l’alimentation, plus rarement par une épistaxis [3, 4]. L’endoscopie montre une masse polypoïde rhinopharyngée médiane rattachée à la muqueuse par un fin pédicule [3]. À l’examen macroscopique, il s’agit d’une néoformation ferme, à surface lisse et de couleur blanc jaunâtre ou jaune brun [1]. L’aspect morphologique suggère une nature hamartomateuse plutôt qu’un véritable néoplasme. En effet, la tumeur de l’ébauche salivaire présente des similarités histologiques avec les glandes salivaires accessoires normalement présentes dans le nasopharynx. Elle réalise des nodules mésenchymateux denses entourés par des amas malpighiens renfermant parfois des globes cornés et des structures canalaires rappelant l’architecture nodulaire des acini [3, 5]. Les cellules épithéliales expriment les cytokératines globales et l’EMA. La composante stromale fusiforme, densément cellulaire, peut présenter de nombreuses mitoses mais sans nécrose ni pléomorphisme

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significatif. Elle exprime la vimentine et l’actine muscle lisse et focalement par la protéine S100, suggérant sa nature myoépithéliale [1, 5]. Celle-ci est confirmée par l’étude ultrastructurale qui montre des desmosomes, une lame basale et des trousseaux de tonofilaments dans le cytoplasme [5]. Le diagnostic différentiel se pose cliniquement avec de nombreuses lésions fréquentes en période néonatale, notamment une atrésie choanale, un hémangiome, un tératome, un hamartome ou un crâniopharyngiome [5]. La localisation et l’examen histopathologique permettent de poser le diagnostic sans difficulté. Le traitement consiste en une exérèse simple, en évitant de rompre le pédicule ce qui pourrait enclaver la tumeur dans les voies aériennes supérieures. L’évolution est favorable, sans récidive [4, 5]. ■ Key words: pleiomorphic congenital adenoma, cavum, pediatric pathology. Mots-clés : adénome pléomorphe congénital, cavum, pédiatrie.

Références [1]

Cohen EG, Yoder M, Thomas RM, Salerno D, Isaacson G. Congenital salivary gland anlage tumor of the nasopharynx. Pediatrics 2003 ; 12 : 66-9.

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Seifert G, Donath K. Juvenile pleomorphic parotid adenoma of embryonal structure. Pathologe 1998 ; 19 : 286-91. Boccon-Gibod LA, Grangeponte MC, Boucheron S, Josset PP, Roger G, Berthier-Falissard ML. Salivary gland anlage tumor of the nasopharynx: a clinicopathologic and immunohistochemical study of three cases. Pediatr Pathol Lab Med 1996 ; 16 : 973-83. Michal M, Sokol L, Mukensnabl P. Salivary gland anlage tumor. A case with widespread necrosis and large cyst formation. Pathology 1996 ; 28 : 128-30. Dehner LP, Valbuena L, Perez-Atayde A, Reddick RL, Askin FB, Rosai J. Salivary gland anlage tumor (“congenital pleomorphic adenoma”). A clinicopathologic, immunohistochemical and ultrastructural study of nine cases. Am J Surg Pathol 1994 ; 18 : 25-36.

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