Utilisation de protéine C activée recombinante (rPCa) humaine (Xigris®) pour sepsis sévère en présence d'un épanchement péricardique après chirurgie cardiaque récente

Utilisation de protéine C activée recombinante (rPCa) humaine (Xigris®) pour sepsis sévère en présence d'un épanchement péricardique après chirurgie cardiaque récente

Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation 24 (2005) 435–438 http://france.elsevier.com/direct/ANNFAR/ Lettres à la rédaction Utilisation de p...

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Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation 24 (2005) 435–438 http://france.elsevier.com/direct/ANNFAR/

Lettres à la rédaction Utilisation de protéine C activée recombinante (rPCa) humaine (Xigris®) pour sepsis sévère en présence d’un épanchement péricardique après chirurgie cardiaque récente

Use of recombinant human activated protein C in severe sepsis in a patient with a pericardial hemorrhagic collection after a recent cardiac surgery

La protéine C activée recombinante (rPCa) humaine (Xigris®) est proposée pour la prise en charge du sepsis sévère [1] et fait toujours l’objet du rapport de toutes les prescriptions en France dans cette indication. Le relevé des cas est toujours nécessaire autant pour confirmer l’efficacité du médicament que pour évaluer sa sécurité en particulier en ce qui concerne le risque hémorragique. En effet l’efficacité du traitement est démontrée dans le sepsis sévère mais avec un risque hémorragique faiblement, mais significativement augmenté [2]. Ce risque est particulièrement important au décours d’une chirurgie. Pour cette raison, nous rapportons le cas d’un patient opéré de chirurgie cardiaque qui n’a pas aggravé un épanchement médiastinal hémorragique malgré l’administration de la rPCa et de circonstances très favorisantes du saignement. Il s’agissait d’un homme de 52 ans, opéré d’une plastie de valve tricuspidienne huit ans après une transplantation cardiaque orthotopique. Ce patient, avait une insuffisance rénale préopératoire modérée (créatininémie à 160 µmol/l). Les suites immédiates permettaient l’extubation à la quatrième heure postopératoire, mais dans les 12 heures suivantes, l’état du patient se dégradait en rapport avec un encombrement bronchique et la défaillance cardiaque droite déjà existante en période préopératoire, qui était de nouveau confirmée par échographie. Le malade était réintubé. Les quatre jours suivants l’insuffisance rénale s’aggravait mais une échographie transœsophagienne mettait alors en évidence un caillotage rétroauriculaire n’apparaissant pas compressif et une amélioration de la fonction ventriculaire droite. La plastie tricuspidienne était fonctionnelle, la PAP systolique mesurée à 40 mmHg et la fonction ventriculaire gauche était normale. L’insuffisance rénale devenue progressivement anurique requérait la dialyse intermittente. Après une période de stabilité de 48 heures survenait un état septique. En présence d’aspirations bronchiques sales, d’une hypoxémie majeure (PaO2 = 7,4 kPa avec FIO2 = 1 et NO à 6 bars), du fait du sepsis sévère présumé, du traitement immunosuppresseur chronique pour la transplantation cardiaque, il était mis en

route une antibiothérapie à large spectre (ceftazidime, vancocine, métronidazole, fluconazole, tobramycine) après des prélèvements fibroscopiques bronchiques qui finalement ne pousseront pas en cultures. En quelques heures, l’état hémodynamique s’aggravait requérant de fortes doses de noradrénaline (1,5 µg/kg par minute), dobutamine (15 µg/kg par minute), et une hémodiafiltration continue. Compte tenu de la présence de trois défaillances viscérales majeures, de l’absence de thrombopénie (plaquettes supérieures à 150 000/mm3) et du pronostic à long terme jugé correct, il était décidé d’initier un traitement par rPCa. Le protocole était effectué selon les recommandations pendant 96 heures [1], associé à une anticoagulation par héparine standard pour la réalisation de l’hémodiafiltration. En raison du risque d’aggravation de l’épanchement cardiaque rétroauriculaire, des échographies quotidiennes étaient effectuées. Après 48 heures de traitement, l’état hémodynamique du patient s’améliorait et 12 heures après l’arrêt du traitement par rPCa, une intervention de principe était effectuée. L’intervention confirmait l’épanchement hémorragique qui apparaissait surinfecté. En 24 heures le patient devra être réopéré à deux reprises d’un épanchement péricardique compressif conduisant à la réalisation d’une fenêtre pleuropéricardique pour éviter la récidive. Un staphylocoque warneri méti-S sera identifié en culture des prélèvements. L’évolution a été marquée par l’amélioration clinique progressive mais le sevrage de la ventilation n’a pu être possible qu’après trachéotomie. Le patient a gardé une insuffisance rénale chronique hémodialysée trois fois par semaine. La survie est de bonne qualité près de deux ans après cette intervention. L’intervention redux constitue un facteur de risque important de complication hémorragique postopératoire en chirurgie cardiaque. Quand l’épanchement péricardique n’a pas justifié rapidement le drainage chirurgical, sa présence quelques jours après l’intervention est toujours un problème difficile à gérer lorsque la tamponnade n’apparaît pas évidente. L’aggravation d’une insuffisance rénale est parfois le critère de réintervention. Sinon, ce sont souvent des variations de la coagulation avec un traitement antithrombotique qui, favorisant une augmentation du caillot à l’occasion d’une hypocoagulabilité, poussent à la réintervention. Les propriétés antithrombotiques et profibrinolytiques de la rPCa favorisent théoriquement le risque hémorragique. Cependant l’étude récente ENHANCE confirme l’absence de différences significatives en ce qui concerne le risque hémorragique en comparaison avec l’étude PROWESS, en particulier pour les hémorragies spontanées qui ont la même fréquence dans les deux études (1,8 vs 2,3 %) [3]. Pour les patients récemment opérés, l’ana-

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lyse en sous groupe de l’étude PROWESS montre l’absence de différence pour le risque hémorragique, notamment d’hémorragie sévère, entre les patients opérés et ceux non opérés [4]. Le cas rapporté, d’une médiastinite par surinfection d’une collection hématique péricardique responsable d’un sepsis sévère, illustre l’absence d’aggravation de l’épanchement hémorragique pendant l’administration du rPCa alors que de l’héparine était utilisée pour l’hémodiafiltration. En conclusion, sous couvert d’une surveillance, en particulier échocardiographique, il semble que le traitement par rPCa puisse être utilisé chez un patient avec une collection péricardique postopératoire si un sepsis sévère avec plus de deux défaillances viscérales, indication qui apparaît actuellement indiscutable, met en jeu le pronostic vital. Malgré des facteurs de risque hémorragique postopératoire le bénéfice– risque semble favorable à condition d’une vigilance extrême vis-à-vis du risque de tamponnade. Chez les patients en sepsis sévère justifiant du rPCa, le recours à l’hémodiafiltration est fréquent, et ainsi de celui de l’héparine. Il serait intéressant de connaître dans les grandes séries le devenir des patients ayant nécessité une hémodiafiltration par rapport aux autres, en particulier vis-à-vis du risque hémorragique.

Références [1]

[2]

[3]

[4]

Bernard G, Ely W, Wright TJ, Fraiz J, Stasek JE, Russell JA, et al. Safety and dose relationship of recombinant human activated protein C for coagulopathy in severe sepsis. Crit Care Med 2001;29:2051–9. Bernard G, Vincent JL, Laterre PF, La Rosa SP, Dhainaut JF, LopezRodriguez A, et al. for the PROWESS study group. Efficacy and safety of recombinant human activated protein C for severe sepsis. N Engl J Med 2001;344:699–709. Bernard G, Margolis BD, Shanies HM, Ely W, Wheeler AP, Levy H, et al. Extended evaluation of recombinant human activated protein United States trial (ENHANCE US). A single-arm, phase 3B, multicenter study of detrecogin alfa (activated) in severe sepsis. Chest 2004;125:2206–16. Barie PS, Williams MD, McCollam JS, Bates BM, Qualy RL, Lowry SF, et al. Benefit/risk profile of drotecogin alfa (activated) in surgical patients with severe sepsis. Am J Surg 2004;212:212–20.

Tamponnade cardiaque consécutive à un cathéter jugulaire interne ectopique Cardiac tamponade after internal jugular catheter malposition Mots clés : Complication ; Tamponnade ; Cathétérisme central Keywords: Complication; Tamponade; Central venous catheter

Nous rapportons un cas d’état de choc par tamponnade cardiaque survenu après la pose d’un cathéter jugulaire interne (CJI), et conduisant au décès du patient. Cette complication mortelle est l’occasion de rappeler quelques règles simples concernant la pose correcte de cathéters veineux centraux (CVC). Une femme de 35 ans aux antécédents multiples de tentative de suicide, était admise aux urgences pour coma et hypotension à la suite d’une intoxication médicamenteuse. Elle était rapidement intubée et ventilée mécaniquement. Un CJI droit devait ensuite être mis en place pour débuter une expansion volémique, en raison de l’impossibilité de cathétériser une veine périphérique de calibre suffisant. Elle était ensuite transférée en réanimation pour état de choc persistant. Son état clinique devait s’aggraver rapidement quelques minutes après son admission : apparition d’une hypotension artérielle (70/30 mmHg), d’une tachycardie (134 b/min), d’une hyperlactatémie artérielle (4 mmol/l) et d’une cyanose faciale. La radiographie du thorax réalisée après la pose du CJI montrait une position inhabituelle de l’extrémité du CVC (Fig. 1). Une échographie transthoracique réalisée immédiatement mettait en évidence un épanchement péricardique abondant avec tamponnade. La patiente devait rapidement développer une inefficacité circulatoire puis une asystolie. Une ponction-drainage péricardique sous contrôle échographique était alors pratiquée pendant les manœuvres de réanimation cardiopulmonaire. Ce drainage péricardique ramenait 250 ml d’un liquide clair ressemblant à une solution cristalloïde similaire à celle utilisée pour l’expansion volémique (analyse biochimique :

X. Fournet P. Dubernet-Gaudiot M. Treilhaud Y. Blanloeil * Service d’anesthésie et de réanimation chirurgicale, CHU, hôpital G.-et-R.-Laënnec, 44093 Nantes cedex 01, France Adresse e-mail : [email protected] (Y. Blanloeil). Disponible sur internet le 13 mars 2005 * Auteur correspondant. 0750-7658/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.annfar.2005.02.005

Fig. 1. Premier cliché thoracique où l’on voit le cathéter jugulaire interne droit croisant la ligne médiane de droite à gauche avec son extrémité au sein de la silhouette cardiaque, bien en dessous de la carène.