Valse des abcès chez un transplanté rénal

Valse des abcès chez un transplanté rénal

Rev Mid Interne 1998 ; 19 Suppl 2 : 255-7 C Elsevier. Paris Valse des abces chez un transplante renal L Frimat, E Renoult, J Champigneulles, B Hoon, ...

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Rev Mid Interne 1998 ; 19 Suppl 2 : 255-7 C Elsevier. Paris

Valse des abces chez un transplante renal L Frimat, E Renoult, J Champigneulles, B Hoon, M Kessler Service de niphrologie. CHU Nancy, 54500 Vandtruvre cedex

Expert-consultant: M Hazzan service de nephroJogie A. h6pitsl Cslmeffe. 59037 UI/e cedex

LES FAITS CLINIQUES Un menuisier de 21 ans a eu une baisse transitoire et reversible de l'acuite visuelle lors de son service mili• taire. En 1990, il presente une insuffisance renale chronique severe. lIn'a pas sejourne hors de France et n'a pas de contact avec des animaux. La biopsie montre une nephropathie tubulo-interstitielle avec un infiltrat inflammatoire. Le patient est hemodialyse chronique. En mars 1991, il beneficie d' une transplantation renale. Le traitement comporte serum antilymphocy• taire et corticoldes, puis ciclosporine 200 mglj, pred• nisone: 7 mglj, nicardipine. Aucun rejet aigu ne sur• vient. Le suivi montre un sujet en bon etat general sans doleance avec fonction renale et sediment uri• naire normaux. Sur quelques controles systematiques, il existe une hyperleucocytose it polynucleaires neu• trophiles (PN), une CRP ~ 100 mglL, une anemie spontanement reversibles. En septembre 1995, une echographie systematique puis un scanner (figure J) montrent des images hypo• echogenes de la rate, compatibles avec des abces. Le patient est asymptomatique. Les fonctions renale et hc!patique, la calcemie, la radiographie pulmonaire Sont normales; il existe une hyperleucocytose it PN (> 20 OOO/mm 3 ), une CRP it 150 mgIL, une anemie ferriprive. L'enquete bacterienne et virale est nega• tive. Une etude des prelevements disponibles en serotheque montre que les serologies it Candida (Candtec Cll ) se sont fortement positivees depuis la greffe. Un traitement par fluconazole est debute. En I'absence d'amelioration, une splenectomie est prati• quee Ie 19 octobre. L'histologie montre une destruction du parenchyme par des granulomes it centre necrotique et un infiltrat

Fig 1. Scanner abdominal: hypodensires spl6niques.

riche en PN. Les cultures restent negatives. Dne biop• sie hepatique (PBH) est normale. Apres la splenectomie, Ie syndrome inflammatoire persiste. Le fluconazole est maintenu 4 mois. A. son arret, Ie syndrome inflammatoire et l'hyperleucocy• tose it PN s'accentuent. II apparait une cholestase. La fonction renale reste normale. L'enquete infectieuse (tuberculose...) reste negative. En mai 1996, une proteinurie apparait; I'etat gene• ral et la fonction renale se degradent rapidement. Les phosphatases alcalines depassent 800 DIlL. La recherche d' anticorps anticytoplasme des PN est negative. L'enzyme de conversion de l'angiotensine (ECA) est it 13 nmoVmUmin (N = 12-28). La para• thormone est it 12 pg/mL (N = 15-65). Le rapport CD4/CD8 est normal. 11 existe une hypergamma• globulinemie. La biopsie montre une nephropathie

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Les Printemps de la medecine interne

Fla 2. Biopsie hepatique : granulome gigantocellulaire non necrose.

Fla 4. Scanner abdominal: multiples hypodensites hepatiques.

Fla 3. Granulomes epitheliogigantocellulaires II centre necrotique sur la pi~e de transplantectomie.

tose, l' anemie et la cholestase. Le 12 septembre, un scanner abdominal conduit a la decouverte de lesions hypoechogenes du foie (figure 4). Une antibiotherapie (amoxicilline et pefloxacine) est sans effet. Debut octobre, une corticotherapie en bolus entraine une amelioration clinique neUe; mais elle se com• plique d'une hemorragie digestive basse d'origine grele necessitant une resection chirurgicale partielle. L'histologie montre des erosions arterielles du grele qui est par ailleurs normal. Apres une interruption, la corticotherapie est reprise par voie orale. L'amelioration globale se confirme. Les scanners hepatiques semestriels montrent des cal• cifications diffuses. Avec I an de recul, Ie patient est hemodialyse. II a repris son emploi. Le contrOie des anomalies biolo• giques est dependant de la prednisone (20 mg/j).

tubulo-interstitielle avec infiltrat inflammatoire riche en PN, la PBH un granulome (figure 2). Un traitement par amphotericine B liposomale est tente pendant I mois, sans succes. En juin, une echographie du greffon montre deux images hypoechogenes parenchymateuses. Une colo• scopie avec biopsie, un transit du grele et un cathete• risme des voies biliaires sont normaux. L'etude du chimiotactisme des PN est normale. Le 10 juillet, Ie patient est remis definitivement en hemodialyse. Pour stopper toute immunosuppression, I'ablation du transplant a lieu Ie 20 aout. L'histologie montre plusieurs granulomes (figure 3). Pourtant, I' alteration de I' etat general s' accentue, ainsi que Ie syndrome inflammatoire. l'hyperleucocy-

Avis del'expert-consultant L'observation presentee pose Ie probleme diagnostique d'un syn• drome inflammatoire chez un transplante renal, associe des images tumorales decouvertes au cours du bUan morphologique. Compte tenu du contexte d'immunosuppression les etiolo• gies infectieuses, opportunistes notamment, doivent 6tre evo• quees. Cependant, Ie delai de survenue par rapport a la greffe (4,5 ans), a une periode ou Ie traitement immunosuppresseur est minimal, est peu en faveur d'un tel diagnostic. Par ailleurs, la negativite de l'enqu6te microbiologique exhaustive, I'absence de reponse clinique aux traitements antifongique ou antibio• tique, et surtout I'evolution favorable sous corticotherapie sont autant d'arguments contre une pathologie infectieuse, en parti• culier tuberculeuse.

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Communications

L'eventualite d'un syndrome Iymphoproliferatif est egalement exclue devant "evolution clinique et les donnees anatomopatho• logiques. En fait, I'efficacite clinique de la corticotherapie et la cortico• dependance apras Ie retour en hemodialyse evoquent forte• ment une pathologie inflammatoire dont I'etiologie la plus pro• bable est ici une sarcoidose en raison de la nature granulomateuse des lesions. En I'absence d'atteinte vasculaire histologiquement demontree, on ne peut retenir Ie diagnostic de forme systemique de granulomatose necrosante sarcoidosique telle qu'elle fut individualisee par Liebow [1] et ou, de surcroit, I'atteinte exclusivement extrapulmonaire ne semble pas avoir ete signalee. En revanche, la forme nodulaire hepatosplenique de sarcoidose realisant un aspect scanographique de nodules multiples hypodenses est bien decrite dans la Iitterature [2}. Dans ces observations, la radiographie de thorax est normale dans 25 % des cas [2} et n'infirme donc pas Ie diagnostic, de mAme que I'absence d'elevatlon du taux de I'enzyme de Conversion de I'angiotensine. Par ailleurs, I'hypergammaglobuli• nemie et "augmentation des phosphatases alcalines, bien que aspecifiques, sont frequemment retrouvees au cours de la sar• coidose. Dans cette observation, II est mAme probable que la sarcoidose ait ete a I'origine de la nephropathie interstitielle ini• tiale et que I'episode de baisse transitoire de I'aculte visuelle Corresponde a une uveite non diagnostiquee. La recidive apras transplantation renare a deja ete decrite, survenant distance de la graffe [3].

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1 lIebow AA. The BURNS Amberson Lecture. PUlmonary angiitis and granulomatosis. Am Rev Resp Dis 1973 ; 108 : 1-18 2 Warshauer OM, Molina PL, Hamman SM, Koehler RE, Paulson EK, Betchfold RE et al. Nodular sarcoidosis of the liver and the spleen: anlysis of 32 cases. Radiology 1995 ; 195 : 757-62 3 Shen SY, Hall-Craggs M, Posner IN, Shabazz B. Recurrent sarcoid granUlomatous nephritis and negative tuberculin skin test in a renal transplant recipient. Am J Med 1986 ; 80 : 699-702

DEMARCHE DIAGNOSTIQUE Les inununosuppresseurs entrainent une augmentation de l'incidence des Iocalisations spleniques des syn• dromes Iymphoproliferatifs ou des candidoses. Nous

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avons d'abord privilegie cette demiere hypothese. En I'absence de reponse therapeutique, devant cette gra• nulomatose multiviscerale, les etiologies toxiques, une granulomatose septique chronique, une cholangite sclerosante, une maladie de Wegener ou de Crohn sont successivement eliminees. Meme si I'ECA n'est pas augmentee, Ie diagnostic de sarcoldose parait seul convenir pour expliquer ce syndrome depuis la baisse de l'acuite visuelle initiale jusqu'a la cortico• dependance. DISCUSSION La difficulte de cette observation reside dans Ie dilemme: infection ou pas? Apres qu'une etiologie infectieuse a ete ecartee, l' absence d' autres hypo• theses claires nous fait encore retarder Ie recours aux corticoldes. Le diagnostic de sarcoi'dose n'appa• rait acceptable qu'avec Ie recul evolutif. En effet, la sarcoldose avec atteinte renale sans hypercalcemie ni atteinte pulmonaire est rare [1]. Elle peut se com• pliquer d'une nephropathie interstitielle fibrosante avec insuffisance renale chronique grave comme chez notre patient avant la transplantation [I]. Des abces spleniques et hepatiques concomitants ont ete decrits [1,2]. Seulement deux cas de recidive de la sarcoi'dose sur Ie greffon renal ont ete rapportes [3,4].

REFERENCES Hannedouche T, Grateau G, Noel LH et al. Renal granuloma• tous sarcoidosis: report of six cases. Nephrol Dial Transplant 1990;.5 : 18-24 2 Warshauer OM, Molina PL, Hamman SM et al. Nodular sarcoi• dosis of the liver and the spleen: analysis of 32 cases. Radiology 1995; 195: 757-62 3 Shen SY, Hall-Craggs M. Posner IN. Shabazz B. Recurrent sar• coid granulomatous nephritis and reactive tuberculin skin test in a renal transplant recipient. Am J Med 1986 ; 80 : 699-702 4 Brown IH, Jos V. Ncwstead CG. Lawler W. Sarcoid-like granu• lomata in a renal transplant. Nephrol Dial Transplant 1992 . 7:173 '