Life 8ciencea Vol . 3, pp . 503-509, 1984. Pergamon Press, Inc. Printed in the United States.
VARIATIONS BIOCHIMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES PRESENTEES PAR DES ETUDIANTS INDIENS AU COURS DE LEUR SEJOUR EN EUROPE . NOTE PRELIMINAIRE ~ J. G. Henrotte ~~ et A. Justin Laboratoire de Pathologie et Thérapeutique Générales, Université de Liège et HBpital de la Cité Universitaire, Université de Paris (Received 25 March 1984) Le nombre croissant d'étudiants originaires de pays tropicaux qui viennent en Europe pour poursuivre des études ou participer à des programmes d'échanges culturels, pose le problème de leur adaptation au climat tempéré et des répercussions possibles de celui-ci sur leurs activités . A titre d'orientation préliminaire, nous avons étudié différents paramètres biochimiques et physiologiques chez 23 étudiants indiens de sexe masculin résidant à la Cité Univer sitaire de Paris . Les sujets sont jeunes (21 à 35 ans) et en bonne santé . Ils sont originaires du Deccan, à l'exception de 4 d'entre eux, natifs du Bengale ou de la région de Delhi . Tous les sujets sont venus directement de leurs pays en Europe occidentale où ils séjournent en permanence depuis 0.5 à 16$ mois . La durée moyenne de séjour est de 46 ± 42 mois . Méthodes Les examens ont été faits le matin à jeun, pendant les 15 premiers jours de décembre de façon à diminuer autant que possible l'influence éventuelle des facteurs météorologiques . Pour le test de tolérance au potassium (1), quatre échantillons de sang sont prélevés à la veine, l'un à jeun, les autres 20, 40 et 60 minutes après ingestion de KC1 à raison de 20 mg par kg de poids corporel . Le R et le Na plasmatiques
Ce travail a été réalisé avec des subsides du Centre National Belge de Radiobiologie et de Génétique . Chargé de Recherches au F . N .R.S ., Belgique . 503
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sont déterminés par photométrie de flamme . La différence entre la valeur atteinte par le K plasmatique pendant le test et la valeur initiale permet d " estimer la tolérance au K. Dans le premier échantillon de sang, les analyses chimiques ou hématologiques suivantes, adaptées en microtechniques par Sachet (2), ont été également réalisées : 1 " hématocrite, la vitesse de sédimentation en tube large (3), le cholestérol plasmatique (4), lturée (5) et le glucose sanguin (6) . Les dosages de protéines et ltélectrophorèse des protéines sériques qui ont fait l~objet dtun travail précédent (7) sont repris dans le tableau I . Le pouls, la pression artérielle et la fréquence respiratoire sont pris en position couchée . La force de pression de la main gauche et de la main droite est mesurée avec le dynamomètre ellipsoidal de Collin . Les 17-cétostéroides et la créatinine sont dosés dans les urines de 24 heures au moyen des réactions de Zimmermann et de Jaffé selon les recommandations des ~fStandards Methods in Clinical Chemistryft ($) . Les coefficients de corrélations simples (Bravais-Pearson) ont été systématiquement calculés entre toutes les variables au moyen d'un ordinateur Bull Y ET . Les coefficients de corrélations partielles sont obtenus par la formule :
x12 .3 = ( r12 - r13 x r23)~ (1-x13)(1-r23) . Les coefficients de corrélations qui ont moins de 5 chances pour cent d~étre dus au hasard (P<0 .05) sont considérés comme significatifs . Résultats i1 lfexception de la vitesse de sédimentation toutes les variables ont une distribution normale . Ltanalyse graphique des résultats montre que certains paramètres présentent une relation approximativement linéaire soit avec la durée de séjour exprimée en mois, soit avec le logarith me de cette durée selon les cas . Les coefficients de corrélation avec la durée de séjour (rYD) ou avec son logarithme de base 10(rylogD ) sont donnés dans le tableau I.
Liage de nos sujets varie avec le logarithme de leur
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TABLEAU I Variables
N
M
o
rYD
Age, années Poids, kg Taille, cm Température buccale, 'C Pouls/min Pression systol ., mm
23 23 23 19 23 23 23 23 21
29 " 30 57" 33 164 .63 36 .67 70 .04 109 .09 69 .$7 19 .96 31 .24 36 .26
4 .15 7" 4$ 6 .17 0 .29
0.353 0.333 0 .375 -0.069 -0 .210 0.366 0 .491+ -0 .249 0 .70$ae 0 .554e 0 .071 -0 .003 -0 .502+ 0.030 0 .796ea -0 .346 -0 .0$4 -0 .291 -0 .316
Pression diastol ., mm Fréquence respir/min Force, main g ., kg Force, main dr ., kg Hematocrite, ~ Sédimentation, mm Glucose, g/L Cholesterol, g/L Urée, g/L Protéines, g/L Albumines, g/L Globulines, g/L Globulines Y, g/L Hodium, mEq/L Potassium, mEq/L Augmentation de K,mEq/L(1) Volume uriné, L/24 h 17-cétostéroides, mg/24 h Créatinine, g/24 h
23 23 23 20 23 23 23 23 23 23 21 19 1$ 19 1$ 19
46 .53 4 " 33 0 .$7 2 .0$ 0 .26 $0 .97 42 .62 3$.34 17 .02
145 " 73 4.19 0 .49 1 .34 13 .71 1 .31
7 .52 13 .30 $ " 50 4 .23 7 .67 $ .3$ 3 .07 2 .61 0.09 0 .44 0 .05 5 " 15 3 .73 5 .03 3 .$5 6.67 0.2$ 0" 59 0 .37 3 .61 0.25
-0 .159 -0 .417 -0" 431 -0 .209 0 .235 0 .379
rYlogD 0.504e 0.3$5 + 0 .446 0 .059 -0 .250 0 .375 0.263 -0.13$ 0.572 0 .47$+ 0 .164 0.012 -0 .390 -0.176 0 .493 + -0 .416+ -0 .002
-0 .425+ -0 .45$+ 0. 055 -0 .091 -0 .550+ -0.103 0.5$2+ 0 .443
N = nombre de sujets ; M s moyenne ; v ~ écart type ; r~ - coefficient de corrélation entre chaque variable, Y, et la durée de séjour en Europe, D, exprimée en mois ; rylogD s coefficient de corrélation calculé à partir du logarithme de la durée de séjour . Seuil de signification des coefficients : P < 0.05 (+)~ P < 0.01 (e) et P<0.001 (er)
(1) Augmentation maximum de la potassémie pendant le test de tolérance su K .
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durée de séjour (tableau I) . Crest une conséquence de notre méthode dtéchantillonnage : parmi les sujets pris au hasard, seuls ceux dtâge inférieur ou égal à 35 ans ont été sélectionnés. Dans ces conditions, Page des étudiants croit dtabord proportionnellement avec la durée de leur séjour en Europe puis atteint progressivement un plateau correspondant à la limite de 35 ans. Il existe également une corrélation significative entre la taille et le logarithme de la durée de séjour (tableau I) ; faute de pouvoir l'interpréter, nous considérerons provisoirement cette corrélation comme due au hasard. Les paramètres biochimiques et physiologiques qui dépendent de l~âge et de la taille des sujets, pourraient donc présenter indirectement une corrélation avec la durée de séjour. De façon à déterminer les paramètres dont les variations sont réellement associées à la durée de séjour indépendamment de l'âge, de la taille ou m8me du poids corporel, les corrélations partielles à taille, âge ou poids constants ont été calculées . Elles ont des valeurs très proches de celles des corrélations simples du tableau I . Seule exception, la corrélation partielle entre les 17-cétostéroides (C) et le logarithme de la durée, ä taille (T) constante, est beaucoup plus faible (rC1ogD .T s 0'471, P < 0 .06) que ]a. corrélation simple (tableau I) et ntatteint pas le seuil de signification de 5~"
Discussion La potassémie à jeun des étudiants indiens résidant à Paris est significativement plus basse (P ~ 0 .001) que la potassémie des étudiants indiens de Madras, qui est égale à 4.5$ ± 0 .39 ~q/L en moyenne (9) . Cette différence est probablement due à lfaction de facteurs météorologiques puisqufau début de la mousson à Madras, Henrotte et Krishnaraj (1Q) trouvent chez 29 sujets indiens un taux de K plasmatique égal à 4.14 ± 0 .37 ~q/L, valeur qui est presque identique à celle des étudiants de Paris . Les variations sont rapides et non progressives comme l'indique ltabsence de corrélation entre la potassémie et la durée de séjour en Europe .
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Les moyennes des autres paramètres ne présentent aucune différence significative avec les valeurs trouvées pour un groupe d'étudiants indiens examinés par les mémes méthodes à Madras (9, 11) à l'exception de la force musculaire qui est plus élevée (11) et du taux de globulines Y qui est plus bas en Europe qu'en Inde . La pression artérielle diastolique, la glycémie et surtout la force de pression de la main et l'urée sanguine varient linéairement avec la durée . L'influence du régime alimentaire sur ce phénomène est douteuse ; les étudiants sont bien nourris tant en Inde qu'en France et gardent dans une certaine mesure les mémos habitudes alimentaires . L'urémie est la mime chez les sujets végétariens et chez les sujets non végétariens . Les protéines et les globulines sériques, la tolérance au potassium et les l~-cétostéroides urinaires varient en fonction du logarithme de la durée de séjour . En ce qui concerne les cétostéroides, la corrélation se révèle peu significative lorsqu'elle est calculée à taille constante . L'existence d'une réelle augmentation des stéroides urinaires sous l'influence du climat tempéré apparaît cependant vraisemblable si l'on rapproche nos résultats des variations saisonnières observées par Robinson, Howard et Mac Farlane (12) . De marne, la tolérance
au potassium s'améliore pendant le séjour en Europe puisque l'augmentation de potassémie après ingestion de KC1 est d'autant plus faible que la durée de séjour en Europe est plus longue . Ce phénomène qui est discuté plus en détail ailleurs (13), indique également l'existence d'une activité corticosurrénale plus grande en climat tempéré . Enfin, la corrélation négative des protéines sériques totales avec le logarithme de la durée est vraisemblablement due à celle des globulines et surtout à celle des globulines Y . Les autres fractions globuliniques ne présentent aucune corrélation avec la durée de séjour ou son logarithme (7) . Ces données confirment l'influence du séjour en Europe sur la baisse des globulines Y déjà observée par 3chofield (14) chez des noirs africains installés en Grande Bretagne . L'ensemble des observations présentées ici, y compris l'accroissement de la force musculaire et peut-étre l'élévation de l'urémie, suggère l'existence d'une augmentation de la fonc-
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-tion corticosurrénale dans sa totalité au cours du séjour en Europe . Résumé Nous avons étudié divers caractères physiologiques et biochimiques de vingt-trois étudiants indiens qui résident en Europe depuis des périodes variables . La pression artérielle diastolique, la glycémie, la force de pression de la main et lturémie présentent une corrélation significative avec la durée de séjour tandis que le taux sérique des globulines Y, la tolérance au K et les 17-cétostéroides urinaires ont une corrélation significative avec le logarithme de la durée de séjour . L'ensemble des résultats suggère une augmentation de 1 " activité corticosurrénale au cours du séjour en Europe . Remerciements . Nous remercions vivement le Professeur Z .M. acq a oratoire de Pathologie et Thérapeutique Générales, Université de Liège) du soutien qu~il nous a apporté au cours de ces recherches et les Docteurs R. Lacourbe et D. Profichet (HBpital de la Cité Universitaire, Paris) qui nous ont permis la réalisation de ce travail . Bibliographie I . R.L.ZWEMER et R. TRUSKOWSKI, Proc . Soc . Exp . Biochem. and Med. ~, 424 (1936) . 2 . A. SUCHET, Rev . Méd . Liège 16, $2 (1961) . 3 . A . 3UCHET, Ann . Biol . Clin . 1, 472 (1949) " 4. P .V . FERRO et A .B . HAM, Am . J . Clin. Path . ~, 545 (1960) " 5 " W.R . FEARON, Biochem . J . 33, 902 (1939) " 6 . A .S.G. HUGGETT et D .A . NI%ON, Biochem. J. E56, 12 P (1957) " 7 . J .G. HENROTTE, M.L . COQUELET, P .M. de TRAVERSE, G .A . REUSE et G .E . JAEGER, Hull . Soc . Path . Exot . sous presse (1964) . $ . D . SELIC~SON, edit ., Standard Methods of Clinical Chemist Acad . Press Inc ., NeW or
2,
9 . J.G . HENROTTE G . RANGANATHAN et G. KRISHNAMURTHI, Exaerientia 26, 350 (l960 . 10. J .G . HENROTTE et P.S. KRISNARAJ, Nature 1~, 1$4 (1962) . 11 . J .G. HENROTTE et S. SUBRAHMANYAM, Nature à paraitre . d 12 . K .W. ROBINSON, B. HOWARD et W.V. MAC FARLANE, .Me . J. Australia 2, 756 (1955) " 13 . J .G. HENROTTE et A. Justin, Arch. Internat . Physiol. Biochem.
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14 . F . D . SCHOFIELD, Trans . R . Soc . Trop . Med . Hvg . ~, 332 (1957) .
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