Virus herpès et biologie moléculaire

Virus herpès et biologie moléculaire

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Virus herpès et biologie moléculaire Après une primo-infection par un virus de l’herpès humain ou Herpesviridae, celui-ci persiste à l’état latent. À la faveur d’un état d’immunosuppression, il peut être réactivé. Mais le génome du virus est détectable et quantifiable à tout moment du cycle viral, par des outils de biologie moléculaire. © BSIP/Phototake/Freeman

U

ne des principales caractéristiques communes à l’ensemble des virus de l’herpès humain (Herpesviridae), est de persister à l’état latent dans l’organisme pendant des années, après la primo-infection (Figure 1). Ainsi, en dehors du diagnostic d’une primoinfection, qui, en règle générale, est établi par la sérologie et notamment les IgM spécifiques, il convient, si l’on veut rattacher une symptomatologie clinique à un virus, de quantifier le génome viral (et non se contenter d’une détection qualitative car il sera presque toujours présent). La charge virale (quantitative), réalisée aujourd’hui le plus souvent par PCR (Polymerase Chain Reaction) en temps réel, est donc indispensable (tableau I).

Épidémiologie Hormis le virus herpès humain 8 (HHV-8) dont la séroprévalence est très faible (1 %), les virus de l’herpès humain sont ubiquitaires : la séroprévalence chez l’adulte jeune est supérieure à 95 % pour le virus varicelle-zona (VZV), le virus d’Epstein-Barr (EBV), le virus herpès humain 6 (HHV-6) et le virus herpès humain 7 (HHV-7)1 ; elle est comprise entre 50 et 70 % pour le cytomégalovirus (CMV) et l’herpès simplex de type 1 (HSV-1) ; elle est de 10 à 20 % pour HSV-2.

À propos du HSV HSV-1 est responsable de stomatites (herpès labial) ou d’herpès oculaire, chez l’enfant et l’adulte. Il est aussi de plus en plus souvent retrouvé dans l’herpès génital ou néonatal (où prédomine classiquement HSV-2) et est à l’origine d’encéphalite herpétique (primo-infection ou réactivation).

À propos du HHV-6 Tableau I. Diagnostics d’infection par les virus de l’herpès Diagnostic

Critères

De primo-infection

IgM (IgG) +++ Culture (parfois) PCR (rarement)

De réactivation

PCR +++ Titrage des IgG Culture (parfois)

Le diagnostic d’herpès labial (stomatite) est établi par culture, en 24 à 48 heures ; celui d’herpès génital atypique (ou d’herpès néonatal) par PCR. En cas d’encéphalite, une PCR du liquide céphalo-rachidien (LCR) est indispensable. La recherche d’une excrétion asymptomatique génitale avant l’accouchement est réalisée par PCR (avec culture). Enfin, pour déterminer le statut immunitaire, il convient de doser les IgG spécifiques d’HSV-1 ou HSV-2. Le traitement des formes graves est l’aciclovir.

À propos du VZV La primo-infection à VZV entraîne la varicelle. Dans environ 15 % des cas, se produit une réactivation sous forme de zona. Le diagnostic est en général clinique ; le diagnostic biologique est le plus souvent sérologique (IgM, IgG). En cas de zona, il existe une remontée importante des IgG, parfois associée à la présence d’IgM2. Le VZV est un virus très fragile qui se développe mal en culture. La PCR est utilisée pour le diagnostic des formes cutanées atypiques et en cas d’atteintes oculaire, neurologique ou materno-fœtale.

La primo-infection à HHV-6 se traduit par une roséole, également dénommée exanthème subit ou 6e maladie infantile. Le virus persiste principalement dans les lymphocytes sanguins ; sa réactivation chez l’immunodéprimé est à l’origine d’encéphalite, pneumonie, rétinite. La sérologie n’étant pas définitivement optimisée, elle a surtout un intérêt épidémiologique. La quantification de l’ADN viral, surtout par PCR dans le plasma, permet le diagnostic étiologique d’une fièvre soit isolée, soit associée à une éruption, soit à une hépatite et permet également le suivi d’une infection ou d’une réactivation virale chez les patients greffés. Dans le LCR, elle permet le diagnostic étiologique d’une méningite/encéphalite, en particulier après transplantation de moelle. Il est à noter que la charge virale pourrait être élevée dans le sang, sans signe clinique associé.

À propos d’HHV-8, le dernier des virus d’herpès HHV-8 ou KSHV (virus d’herpès associé au sarcome de Kaposi) est fréquemment transmis par voie sexuelle. Chez l’immunocompétent, la primoinfection est le plus souvent asymptomatique. Sa

Où rechercher les virus d’herpès (ou leur génome) ? Il convient de rechercher les virus (ou leur ADN) là où ils sont excrétés, le plus souvent dans les sécrétions orales ou génitales, ou les tissus atteints, c’est-à-dire par ordre décroissant pour les virus HSV-1, HSV-2, VZV, EBV, CMV, HHV-6, HHV-7 et HHV-8 : – les sécrétions orales ;

| Figure 1. Cycle des virus de l’herpès.

– les sécrétions génitales ; – l’urine ;

Primo-infection

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Latence

Réactivation/multiplication du virus (gémone viral/ADN ++++++)

Signe clinique + ou -

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– le lait.

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PCR quantitative et EBV Il n’existe pas encore de standardisation des techniques et pas de gamme de référence unique. Ce sont principalement des techniques “maison” et des kits commerciaux qui sont utilisés. De fait, il apparaît nécessaire d’adhérer à un contrôle de qualité (France, Europe, États-Unis), de suivre un même patient avec une même technique dans un même laboratoire, et de ne considérer comme significatives que des différences à partir de 0,5 log, voire 1 log.

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expriment de rares protéines du cycle de latence. Dans les lymphocytes B, l’EBV reste bloqué à un certain stade, sans cycle lytique complet. Chez l’immunocompétent, il existe périodiquement une réactivation de la production de virions dans les cellules de l’oropharynx avec une petite excrétion virale, sans signe clinique, et une réactivation de la lymphoprolifération B avec réplication du génome viral latent. Ainsi, des charges virales importantes sont détectées par PCR. Chez l’immunodéprimé transplanté, la réactivation d’un EBV latent conduit à un lymphome post-transplantation (PTLD), une lymphoprolifération B non enrayée par les lymphocytes T, avec une augmentation souvent très importante de la quantité de virions dans l’oropharynx.

réactivation chez l’immunodéprimé (sida, transplanté) est à l’origine du sarcome de Kaposi. En transplantation, un dépistage des séropositifs est réalisé par immunofluorescence ou Elisa, chez le donneur d’organe (s’il est positif, il pourra infecter un receveur séronégatif) et chez le receveur (s’il est positif, il présente un risque de réactivation du virus et de développer un sarcome de Kaposi). Une PCR quantitative est généralement réalisée pour confirmer le diagnostic sérologique et, chez le patient HIV+, dans le cas d’un sarcome de Kaposi, d’un lymphome des séreuses ou d’une maladie de Castleman.

Détection d’EBV En pratique, le génome viral EBV est présent chez tous les séropositifs EBV et est souvent détectable dans les lymphocytes B périphériques et les tissus lymphoïdes. La première conséquence est qu’il est nécessaire de quantifier le génome (et pas seulement de le détecter qualitativement) ; la seconde est que, pour toute analyse de tissu (biopsie), il faut également quantifier le génome dans le sang circulant pour pouvoir comparer.

Le virus d’Epstein-Barr (EBV)

Indications fréquentes et importantes

Comme les autres virus d’herpès, l’EBV suit dans l’organisme le schéma “primo-infection, persistance, réactivation”. Mais il a une propriété unique qui le différencie des autres : l’immortalisation ou la prolifération indéfinie des lymphocytes B qu’il infecte.

La mesure de la charge virale est notamment indiquée lors du suivi (dans le sang total) en

Phase de primo-infection La primo-infection se traduit par une mononucléose infectieuse (MNI). Le virus a un tropisme particulier pour les lymphocytes B et les cellules épithéliales oropharyngées. Il s’y produit un cycle lytique avec réplication dans l’oropharynx et production de très nombreux virions dans la salive. Parallèlement, un cycle latent apparaît rapidement : à partir de l’oropharynx, le virus va infecter les lymphocytes B des amygdales.

Indications de la mesure de la charge virale EBV

transplantation. Après greffe, l’augmentation de la charge virale est un facteur de risque d’évolution vers une lymphoprolifération ; la conduite thérapeutique doit être adaptée. Après un lymphome, la charge virale permet de suivre l’efficacité thérapeutique. Indications rares et accessoires

La mesure de la charge virale peut aider au diagnostic d’une mononucléose infectieuse ou MNI (mesure dans le sérum et la salive), au diagnostic étiologique d’une primo-infection symptomatique hors MNI (dans les tissus), peut servir de preuve d’une infection chronique persistante (tissus, sang total), et de marqueur d’association cancer/ EBV, tel que dans le lymphome de Burkitt (cellules lymphoïdes malignes), le carcinome du nasopharynx (cellules épithéliales malignes, sérum), ou d’autres cancers (tissus malins). | CAROLE ÉMILE Biologiste, CH de Montfermeil (93) [email protected]

Source Communication de Jean-Marie Seigneurin, lors du 36e Colloque national des biologistes des hôpitaux, Dijon, octobre 2007. Notes 1. Il n’y a pas actuellement de responsabilité démontrée d’HHV-7 en pathologie humaine et il n’existe pas d’outils diagnostiques standardisés. 2. Les IgM ne signifient donc pas toujours primo-infection.

Interprétation d’une charge virale EBV dans le sang total Le seuil de quantification est de 500 copies/mL. < 10 copies/mL

Charge virale très faible ou négative

10 à 500 copies

Charge détectable non quantifiable

1 000 à 10 000 copies/mL

Charge virale moyenne

20 000 à 100 000 copies/mL

Charge virale élevée

> 100 000 copies/mL

Charge virale très élevée

À titre indicatif : – chez un porteur sain, la charge virale est habituellement inférieure à 1 000 copies/mL ; – dans une MNI “classique”, elle est comprise entre 500 et 10 000 copies/mL ;

Phase de persistance/latence Lors de la phase de persistance/latence, quelques lymphocytes B des tissus lymphoïdes et du sang périphérique gardent le génome EBV et

– dans une MNI sévère ou une réactivation, elle est de 1 000 à 100 000 copies/mL ; – en cas de lymphome associé à l’EBV, la charge virale est comprise entre 10 000 et plus de 100 000 copies/mL.

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