Materials Science and Engineering, A l21 (1989) 661-667
Appareillage pour i'Erosion
661
Haute Temperature sous Gaz Corrosifs
G. SILVESTRE DMG/SEM/LECM, Centre d'Etudes Nuclbaires, 38041 Grenoble (France)
(Requ le 28 f+vrier, 1989)
R~sum~ Le dispositif prbsentO permet de tester la rOsistance gt l'Orosion de matOriaux mOtalliques en prosence de gaz inertes ou corrosifs (Oe, CO, C02, SOe, SHe, etc.). L'Ochantillon peut ~tre porto gt une tempOrature supOrieure ~ I000 °C et la vitesse des particules peut atteindre des vitesses de l'ordre de 200 m s - t. Nous donnons un exemple du comportement 3 l'Orosion d'un acier inoxydable en atmosphOre neutre, ainsi qu'en atmosphOre oxydante.
Abstract We have constructed a specific design to test the erosion o f metallic materials by solid particles in a gas stream. The gases are either inert gases or corrosive gases such as CO, COe, SOe, SHe. By induction heating, the sample temperature can reach 1000 °C and the velocity o f the particles can be varied from 2 0 m s - t up to 2 0 0 m s - x . First results are given on the erosion behaviour o f 316L stainless steel at 900 °C, in air and in argon.
1. Introduction Les mat6riaux de nombreuses installations industrielles sont d6grad6s sous l'action des ph6nom6nes d'6rosion-corrosion: (a) il y a corrosion, parce que les alliages port6s ~i haute temp6rature sont au contact de gaz ~ventuellement corrosifs tels que: 02, CO, CO2, SH2, H2, CI, etc.; (b) il y a 6rosion parce que ces m6mes gaz v6hiculent, fi grande vitesse, des particules abrasives dont les impacts ont pour effet d'abord de d&ruire d'~ventuelles couches protectrices et ensuite, par une action 6rosive classique, d'attaquer le m6tal ainsi mis /t nu, ce qui r6active l'action corrosive des gaz. Ces ph6nom6nes se produisent notamment dans les unit6s de gaz6ification du charbon. 0921-5093/89/$3.50
D'autres exemples peuvent 6tre cit6s: ailettes de turbines de moteurs d'avion, installations de traitement d'ordures m6nag6res, etc. I1 est relativement ais6 de r6aliser en laboratoire des exp6riences d'6rosion-corrosion, en pr6sence d'oxyg6ne. I1 est plus difficile d'6tudier l'6rosion d'alliages m&alliques dans un milieu carburant ou sulfurant. Si on connait bien le comportement fi l'6rosion des couches d'oxyde [1, 2], on ne sait rien, en revanche, de la tenue au choc par des particules, de couches de corrosion constitu6es in situ de sulfures, d'oxy-sulfures, de carbures, etc. Les caract6ristiques d6terminant leur comportement, adherence au substrat, fragilit6, vitesses relatives de croissance et d'6rosion, sont diff6rentes de celles des couches d'oxydes. C'est pourquoi, il nous a sembl6 utile de r6aliser un dispositif permettant des exp6riences d'6rosioncorrosion en pr6sence de gaz vari6s.
2. Description de I'appareil La Fig. 1 montre le schema de l'installation. C'est une boucle 6tanche, dans laquelle on peut faire un vide primaire et introduire ensuite le gaz
o¢,
entr6e gaz "t--.
Vs:
~hantlion et four H.F.
_
L i,o,n
~eon,rn~ vldo
Fig. 1. Schemadu dispositifd'6rosion-corrosion ~ haute temperature et sous gaz. © ElsevierSequoia/Printed in The Netherlands
662 TABLEAU 1 Variation du debit du sable en fonction du diam6tre de la buse Diam~tre de la buse (mm)
0,6
0,7
0,9
1,0
1,2
1,3
1,4
1,7
2,3
Dbbit du sable (g min l)
0,09
0,45
0,83
1,75
3,6
4,5
5,9
10,1
27,9
corrosif ou inerte. Une pompe ~i membrane comprime le fluide dans l'enceinte A. Le gaz se drtend dans l'enceinte B au travers d'un tube de 3 mm de diamrtre et de 1 m de long. La vitesse du gaz, fi la sortie du tube, drpend de la diffrrence de pression entre l'enceinte A et l'enceinte B e t de la longueur du tube (voir Annexe, Sect. 1). Cette pression amount est contr616e par la vanne VI. La vitesse des particules drpend de la vitesse du gaz mais aussi de leur forme, de leur taille, ainsi que de leur densitr. Nous drcrivons plus loin le dispositif du double disque qui permet une drtermination satisfaisante de la vitesse des particules. L'abrasif employ6 est du sable de Fontainebleau, tamis6 entre 250 et 200/~m. Le tube qui conduit l'abrasif sur la cible est en alumine. Les particules sont introduites dans la veine gazeuse par gravitr. Un distributeur mrcanique permet de faire varier le drbit depuis 0,1 g min-~ jusqu'a 28 g m i n - i , en changeant le diamrtre de la buse qui limite le passage des particules. Le Tableau l donne les drbits obtenus en fonction du diamrtre de la buse. Les 6chantillons m&alliques se prrsentent sous la forme de disques de diamrtre 20 mm et d'rpaisseur 2-2,5 mm. Le chauffage se fait par induction. La puissance de grnrrateur est suffisante pour maintenir la rrgion 6rodre ~i une temprrature suprrieure fi 1000 °C. Le gaz qui entraine les particules reste froid: ses propri&rs physiques ne
Fig. 3. Vue de l'ensemble du dispositif. A gauche l'enceinte B; droite l'enceinte A. La mesure de temlMrature se fait par viske pyromrtrique.
sont pas modifires. En particulier, il n'est pas nrcessaire de corriger la vitesse des particules. Une puissance de 4 kW suffit pour maintenir ~i 1000 °C un disque mrtallique soumis gt un flux de gaz froid de 2 1 s-~. L'inertie du chauffage est trrs faible et permet d'atteindre la temprrature d'essai ou le retour ~i la temprrature de 20 °C en moins d'une minute. La Fig. 2 montre un 6chantillon ~i la temprrature de 1000 °C. La Fig. 3 est un photographie de l'ensemble.
3. La mesure des vitesses des particules
Le taux d'rrosion d'un matrriau, c'est-~i-dire sa perte de poids par gramme d'abrasif, drpend principalement de la vitesse des particules. Cette drpendance s'exprime par la loi =
Fig. 2. Vue de l'enceinte B, montrant un 6chantillon port6 ~, 1100 *C.
KV
n
K est un coefficient qui drpend de la nature du matrriau et des unit~s choisies et n, un exposant compris entre 2 et 3. Les vitesses que nous utilisons sont comprises entre 50 m s -j et 100 m s -1 et pour les mesurer, nous avons employ6 la technique du double disque [3]. La Fig. 4 montre le schrma du dispositif.
°2v _3
663 L'incertitude totale s'6crit donc: V
0,03 +
e
Pour V = 167 m s - ~ l'incertitude est de ~ 33 m s ~ et pour V = 50 m s - ~ l'incertitude est de ~ 5 m s - ' .
4. Le tube d'ejection des particules Fig. 4. Sch6ma du double disque pour la mesure de vitesse des particules.
Les particules sortent du tube /t la vitesse V. Lorsque le sens de rotation est f ~ , elles impriment une tache en fi; p o u r le sens de rotation f~z, elles impriment une tache en t2. L'angle entre ces deux taches, d6pend de V, du diam~tre D du cercle sur lequel se trouvent t~ et t2, de la vitesse de rotation (o et de la distance d entre les deux disques. A titre d'exemple, la distance entre les deux taches de la Fig. 5 correspond fi une vitesse de l'ordre de 1 1 4 m s ~. Si e est la distance en m m entre ces deux taches, V s'exprime de la faqon suivante: V--
ndD~o 1 3 x 104e
-
Ce tube, de diam~tre int~rieur 3 mm, par lequel arrivent les particules, subit, avant l'6chantillon lui-m6me, une usure par 6rosion. N o t r e premi&e id6e a &6 d'installer un tube d'alumine (une ckramique s'6rode peu sous incidence rasante). N6anmoins, nous avons constat6 une d6gradation assez rapide de la surface int6rieure. La Fig. 6 montre son 6tat p o u r un tube neuf; la Fig. 7 montre sa d6gradation apr6s le passage de 1.500 g de sable, ~ une vitesse m o y e n n e de 50 m s -~. L ' e x a m e n de la rugosit6 par un microscope m6canique montre que le tube neuf a des irr6gularit6s de surface inf6rieures ~ 5 p m , alors que le tube 6rod6 pr6sente un relief dont l'amplitude peut atteindre 3 0 p m . Cette augmentation de la rugosit6 est a p p a r e m m e n t sans influence sur la vitesse de gaz, puisque les courbes reliant le d6bit d'air en fonction de la pression dans A restent
(V en m s i, D, d e n m m et o~ en t o u r m i n 1). L'erreur commise sur la mesure de " e " est de ~ 0 , 2 5 mm; on peut admettre une erreur de 1% sur les valeurs D, d, o~.
~i!!~! . . . . . . .
Fig. 5. Photo montrant les deux taches des impacts de particules pour les deux sens de rotation. Vitesse mesur6e = ll4ms -t.
Fig. 6. Photographie prise au MEB de la surface int6rieure d'un tube neuf.
664
Fig. 9. M6mescaract6ristiques,mais tube us6 par le passage de 1.500 g de sable.
Fig. 7. Photographie de la surface int6rieure d'un tube us6 apr6s la passage de 1.500g de sable. inchang6es. En revanche, le jet des particules devient fortement divergent. Ceci a ~t6 v6rifi6 sur du cuivre, sous incidence normale, avec une distance tube-~chantillon de 13 mm et une vitesse de particules de 50 m s -~. La Fig, 8 repr6sente le faci6s d'6rosion avec un tube neuf et la Fig. 9 le faci6s d'~rosion avec un tube us~ apr6s le passage de 1.500 g de sable. Cette d6gradation de la surface int6rieure n'est pas sans cons6quence sur le taux d'6rosion
puisqu'il passe de 1,44 x 10-Sg g - i pour un tube neuf ~ 0,7 x 10 -5 g g - ~ pour un tube us6. L'augmentation de la rugosit6 entra~ne un accro~ssement du nombre des rebonds des particules sur les parois du tube, ce qui diminue leur vitesse et donc leurs propri&6s 6rosives. Cette diminution de vitesse a &6 confirm~e exp6rimentalement. Pour 6viter ces inconv6nients, il faudrait changer souvent le tube d'alumine, mais c'est une solution on6reuse. C'est pourquoi nous avons abandonn6 le tube d'alumine pour un tube de verre (Pyrex), plus court (50cm), que nous changeons apr6s chaque 6rosion. La surface int6rieure des tubes de verre 6tant tr6s lisse, la divergence du jet de particules est diminu6e tr6s fortement, ainsi que l'effet de halo sur l'6chantilIon; la vitesse des particules est certainement plus homog6ne. 5. M i s e en oeuvre de rinstallation
L'utilisation de deux courbes exp6rimentales: taux d'6rosion en fonction de la pression (Fig. 10) et vitesse des particules en fonction de la pression (Fig. 11), nous a permis de d6terminer la loi d'6rosion du cuivre pour une incidence de 30 ° et ~i la temp6rature de 20 °C. Elle s'exprime de la fa~on suivante: = 2,4 x 1 0 - 9 V 2,65
Fig. 8. Disque de cuivre 6rod6 sous incidence normale, tube neuf. 50g de sable; 50ms-~; distance tube-6chantillon 13 mm.
2,55 < n < 2,75
(z en g de cuivre perdu par gramme d'abrasif et V en m s - l ) . L'appareillage n'est pas encore totalement 6tanche, ce qui empc3che pour rinstant l'emploi de gaz corrosifs dangereux. Cependant, nous avons
665
16.10_ 4
,
/ I
I
I
I
0.1
I
1
0.2
Diffl~rence de presslon Ap (on MPa)
Fig. 10. Variation du taux d'6rosion du cuivre en fonction de la difference de pression entre A e t B. Angle d'incidence 30°: particules de sable comprises entre 250 et 200/~m.
Fig. 12. Acier 316L 6rod6 h 900 °C sous air. Chaque 6chantilIon a subi quatre fois une 6rosion de 50 g de sable, fi 50 m s ], pendant environ 100 min.
3OO
Vitesse du gaz
/
02OO
IcuMe
r-
q)
~1oo Vitesse des particules
o I
0.1
I
0.2
Diff6rence de pression ~P (o. MP,)
Fig. l l. Variation de la vitesse de particules en fonction de la diff6rence de pression entre Aet B. M6thode du double-disque.
p u c o m p a r e r le c o m p o r t e m e n t , fi 900 °C, d ' u n acier i n o x y d a b l e 316L ~t l'6rosion sous air et sous a r g o n , mais avec c e p e n d a n t une pression partielle d ' o x y g 6 n e r6siduel. C h a q u e 6chantillon a 6t6 soumis fi une 6rosion de 50 g de particules, h la vitesse de 50 m s -~, sous une incidence de 30 °, p e n d a n t une heure environ. Ceci a 6t6 r6p&6
Fig. 13. Acier 316L 6rod6 fi 900 °C sous argon. Chaque 6¢hantillon a subi quatre fois une 6rosion de 50 g de sable, 50 m s ~, pendant environ 100 rain.
q u a t r e fois p o u r chacun. Le t e m p s t o t a l de t r a i t e m e n t est d o n c de 4 h. L a Fig. 12 m o n t r e l'6chantillon 6rod6 sous air et la Fig. 13 m o n t r e celui 6rod6 sous argon. Les t a u x d ' 6 r o s i o n s o n t de 3,50 x 10 4 g g - ~ p o u r le p r e m i e r et de 2,18 x 10 - 4 g g - ] p o u r le second. O n c o n s t a t e d a n s le cas de ce mat6riau, que la c o r r o s i o n p a r l'oxyg6ne acc616re sa destruction.
666
P dP dF 2PdP - 2G 2 P ~ - + 2p 2 ~pp dP = 0
6. Conclusion Le dispositif que nous pr~sentons permettra, dans sa version drfinitive, d'entreprendre des exprriences d'rrosion-corrosion diverses. Les paramrtres exprrimentaux (temprrature, gaz, vitesse et drbit des particules, temps de traitement) pourront ~tre choisis et ajustrs pour simuler, au mieux, les conditions r~elles de fonctionnement d'uns installation industrielle.
Remerciement L'auteur remercie Monsieur R. Chamot pour sa participation /l la rralisation et au drpouillement des essais d'rrosion.
(2)
En intrgrant directement l'rqn. (2), on obtient: p2 _ 2G 2 P In P + P G 2 2 L = constante P P
(3)
En particulier, nous pouvons en drduire:
-Pl
~ + In
(4)
En drrivant l'expression (4) par rapport fi P2 (pression aval), on montre que le drbit G est maximum (riG~alP2) = 0 pour une pression/'2* et une pression PI imposre:
In
+2~+1
\~2,]
=0
R~f~rences A. Levy et Yong-Fa-Ma, Wear, 111 (1986) 135-159. A. Levy, Wear, 127(1988) 31-52. A. W. Ruffet L. K. Ives, Wear, 35(1975) 195-199. A. J. Ninham and I. M. Hutching, Proc. 6th Int. Conf. on Erosion by Liquid and Solid Impact, Cambridge, 1983. 5 Note technique No. 119, CETIM.
La vitesse de sortie II2" du gaz (V2*= G/p2*) prend la valeur:
Annexe A: Vitesse des particules sofides v~hicul&zs par un ~coulement gazeux dans un tube dont les extr~mit~ sont soumis~s/t un gradient de pression PI-P2 141
On peut montrer, de la m~me fa~on, que G croit rrguli~rement avec P~ pour une valeur de P2 fix~e. En imposant les valeurs de P~ et de P2 et connaissant la longueur du tube et son diam~tre, on peut drduire de l'rqn. (4) le drbit massique du fluide G s'rcoulant h travers le tube et donc, par consrquent, la vitesse de sortie du gaz (V2 = G/P2)
I 2 3 4
1. Vitesse d'dcoulement de gaz d l'intdrieur de tube (sans particules) On raisonne sur une masse unit6 de fluide ~i la pression P. Le travail fourni par le gaz permet: de l'accrlrrer et de vaincre les frottements sur les parois de tube. On peut 6tablir: - P d v + VdV + d F = O
(1)
o~ p = masse volumique, dv = variation du volume massique: d v = d ( l / p ) , d V = v a r i a t i o n de vitesse, dF = perte d'rnergie par friction: d F = 2/DPFdL, PF = pression dynamique = p(V2/2), 2 = nombre de Darcy, D = d i a m r t r e du tube, dl = variation de distance. On prend en compte les hypothrses suivantes: (a) le drbit massique du gaz est constant: G=V, (b) le gaz est parfait: Pip = constante et (c) l'rcoulement est isotherme. A partir de l'rqn. (1), nous pouvons en drduire:
V2* = (RT) 1/2
G~((PI2-P22)I[2PI(~~'kLPI 2D -I- In P-22 ,/_L]P'~I~'/2 La Fig. 11 compare les valeurs exprrimentales et calculres. De mrme a partir de l'rqn. (2), on peut en drduire, par un calcul d'itrration, la distribution des pressions et donc des vitesses VG ~ rintrrieur de tube. 2 drpend du nombre de Reynolds (Re) pour l'rcoulement considrr6 ( R e = GD/# ofa # est la viscosit6 du gaz). Les valeurs de # sont drduites du diagramme de Nikuradse [5].
2. Vitesse d'entrafnement des particules Ces particules ont une masse m et un diamrtre moyen d. Elles sont entrainres h l'intrrieur du tube par le fluide de vitesse V~. La force d'entrainement peut s'exprimer de la fa~on suivante: 2 ~d2
r = C~ p( V~ ~ - V~ )
667
C d est le coefficient d'entrainement qui d6pend du hombre de Reynolds (Rp) de la particule:
Rp
= d p(VC
-
Vp)
Lorsque la particule avance d'une longueur AI son 6nergie augmente de F A I , si bien que, par it6ration successive, nous pouvons calculer sa vitesse en sortie de tube:
P avec Ca
-- 42(Rp J + 0,018 Rp -°,37 + 0,00035 Rp °,4) [4],
et Vp--la vitesse de la particule.
1
r2
m ( I~ i -
Vi _
12) =
FAI
La Fig. 11 compare les vitesses mesur6es et calcul6es.