Bloc du nerf alvéolaire inférieur par ropivacaïne : effets sur les nausées et vomissements en postopératoires (NVPO) des ostéotomies mandibulaires

Bloc du nerf alvéolaire inférieur par ropivacaïne : effets sur les nausées et vomissements en postopératoires (NVPO) des ostéotomies mandibulaires

Rec¸u le : 20 fe´vrier 2012 Accepte´ le : 5 octobre 2012 Disponible en ligne 16 novembre 2012 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Arti...

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Rec¸u le : 20 fe´vrier 2012 Accepte´ le : 5 octobre 2012 Disponible en ligne 16 novembre 2012

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com



Article original

Bloc du nerf alve´olaire infe´rieur par ropivacaı¨ne : effets sur les nause´es et vomissements en postope´ratoires (NVPO) des oste´otomies mandibulaires Inferior alveolar nerve block with ropivacaine: Effect on nausea and vomiting after mandibular osteotomy A. Chatelliera,*, A.E. Dugue´b, C. Caufouriera, B. Maksudd, J.F. Compe`rea,c, H. Be´nateaua,c a Service de stomatologie et de chirurgie maxillofaciale, CHU de Caen, avenue Coˆte-de-Nacre, 14033 Caen cedex 9, France b Unite´ de biostatistiques et de recherche clinique, CHU de Caen, 14000 Caen, France c Faculte´ de me´decine, universite´ de Caen Basse-Normandie, CHU de Caen, 14000 Caen, France d Service d’anesthe´sie et de re´animation, CHU de Caen, 14000 Caen, France

Summary Introduction. Our objective was to evaluate the contribution of bilateral inferior alveolar nerve block (BIANB) in patients before mandibular sagittal osteotomy for postoperative pain management, consumption of opioids, treatment of nausea and vomiting. Materials and methods. We included 30 patients undergoing mandibular sagittal osteotomy in a prospective, randomized, double blind study. The first group of patients (n = 14) underwent a standard procedure (general anesthesia with postoperative morphine treatment). The second group of patients (n = 16) underwent BIANB before surgery, in addition to the standard procedure. The postsurgical management was evaluated every four hours for the first 24 hours, according to the following criteria: postoperative nausea and vomiting (PONV), visual analogue scale (VAS) assessment of pain, consumption of morphine (cumulative dose) and antiemetic drugs, and need for releasing inter-maxillary blockage. Results. PONV was significantly less frequent in the second group (6.3 % versus 42.9 %, P = 0.031). The frequency of releasing inter-maxillary blockage and the consumption of antiemetic drugs were not significantly different in the two groups. The mean VAS pain score was significantly lower in the second group (1.6 versus 0.9 avec P = 0.045). There was no significant difference in cumulative morphine requirements between the two groups at 24 hours.

Re´sume´ Introduction. Le but de notre travail a e´te´ d’e´valuer l’inte´reˆt d’un bloc bilate´ral du nerf alve´olaire infe´rieur (BBNAI) dans la prise en charge postope´ratoire de la douleur, de la consommation morphinique, des nause´es et vomissements apre`s oste´otomies mandibulaires. Patients et me´thode. Trente patients ope´re´s d’une oste´otomie sagittale des branches montantes mandibulaires ont e´te´ inclus dans cette e´tude prospective, randomise´e en « double insu ». Le premier groupe (n = 14) a be´ne´ficie´ d’un protocole standard (anesthe´sie ge´ne´rale et morphiniques postope´ratoires). Le second groupe (n = 16) a rec¸u un bloc bilate´ral du nerf alve´olaire infe´rieur en de´but d’intervention en comple´ment du protocole habituel. La prise en charge postope´ratoire a e´te´ e´value´e toutes les quatre heures pendant les 24 premie`res heures sur les crite`res suivants : nause´es et vomissements postope´ratoires (NVPO), E´chelle Visuelle Analogique de la douleur (EVA), consommation morphinique (dose cumule´e) et d’antie´me´tiques, ne´cessite´ de de´blocage. Re´sultats. Les NVPO ont e´te´ significativement plus faibles pour le groupe avec BBNAI (6,3 % versus 42,9 % avec p = 0,031). Le pourcentage de de´blocages et la consommation d’antie´me´tiques entre les deux groupes n’ont pas e´te´ significativement diffe´rents. La moyenne des EVA du groupe avec BBNAI a e´te´ significativement plus faible (1,6 versus 0,9 avec p = 0,045). Il n’y a pas eu de

* Auteur correspondant. e-mail : [email protected] (A. Chatellier). 0035-1768/$ - see front matter ß 2012 Publie´ par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.stomax.2012.10.003 Rev Stomatol Chir Maxillofac 2012;113:417-422

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A. Chatellier et al.

Discussion. BIANB during mandibular osteotomy increases the patient comfort by decreasing PONV and improving postsurgical analgesia. ß 2012 Published by Elsevier Masson SAS. Keywords: Nerve block, Osteotomy, Sagittal split ramus, Postoperative nausea and vomiting

Rev Stomatol Chir Maxillofac 2012;113:417-422

diffe´rence significative concernant les besoins morphiniques cumule´s a` 24 heures. Discussion. Le BBNAI lors des oste´otomies mandibulaires a ame´liore´ le confort du patient en termes de NVPO et d’analge´sie postope´ratoire. ß 2012 Publie´ par Elsevier Masson SAS. Mots cle´s : Bloc nerveux, Oste´otomie sagittale des branches montantes de la mandibule, Nause´es vomissements postope´ratoires

Introduction Les nause´es et vomissements postope´ratoires (NVPO) sont une des complications les plus courantes et de´sagre´ables en chirurgie orthognathique. Malgre´ les progre`s pharmacologiques re´cents [1], leur incidence dans les 24 premie`res heures postope´ratoires en chirurgie orthognathique est de 40,8 %, contre 20 a` 30 % toutes chirurgies confondues [2]. Dans certaines interventions, l’anesthe´sie locore´gionale est associe´e a` l’anesthe´sie ge´ne´rale pour re´duire la consommation d’opioı¨des et ame´liorer les suites postope´ratoires en termes d’analge´sie et de nause´es et vomissements. Depuis 1996, la ropivacaı¨ne est utilise´e comme anesthe´sique local en raison de ses proprie´te´s pharmacocine´tiques et pharmacodynamiques (latence et dure´e d’action) pour l’analge´sie postope´ratoire [3]. Par son action vasoconstrictive, elle diminue significativement le saignement perope´ratoire, facilitant le repe´rage du nerf alve´olaire infe´rieur lors des oste´otomies mandibulaires [4]. Malgre´ un re´el inte´reˆt clinique (intervention fre´quente et bloc nerveux facile a` re´aliser), elle est peu e´value´e dans les suites de la chirurgie orthognathique. Nous avons e´tudie´ l’inte´reˆt d’un BBNAI par ropivacaı¨ne re´alise´ en de´but d’intervention, chez les patients be´ne´ficiant d’une oste´otomie sagittale des branches montantes mandibulaires.

Patients et me´thode Entre juillet 2009 et septembre 2011, 30 patients, score ASA I (American Society of Anesthesiologists), pris en charge pour oste´otomies sagittales des branches montantes mandibulaires ont e´te´ inclus dans cette e´tude prospective, randomise´e, apre`s accord du Comite´ de protection des personnes, information e´claire´e et accord des patients. Le sex-ratio (H/F) e´tait 0,76 et l’aˆge des patients e´tait compris entre 16 et 41 ans, avec une moyenne d’aˆge a` 25 ans. Les patients ont e´te´ repartis en deux groupes, de fac¸on ale´atoire par un tirage au sort, la veille de l’intervention. Le premier groupe (n = 14) sans BBNAI a e´te´ pris en charge classiquement (anesthe´sie ge´ne´rale et morphiniques en postope´ratoire). Le second groupe (n = 16) a eu un BBNAI en de´but d’intervention, en plus du protocole habituel. L’e´tude a e´te´ conc¸ue comme « double insu », bien

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que le premier groupe n’ait pas rec¸u de bloc placebo. Le bloc e´tait fait apre`s l’induction anesthe´sique, donc a` l’insu du patient. Les donne´es d’e´valuation ont e´te´ recueillies par une infirmie`re diploˆme´e d’E´tat (IDE) qui n’e´tait pas informe´e du groupe auquel e´tait assigne´ le patient. Le protocole d’anesthe´sie e´tait standardise´. Le risque de survenue de NVPO e´tait e´value´ selon le score d’Apfel, allant de 0 a` 4 avec une probabilite´ de NVPO croissante et reposant sur les items suivants : sexe fe´minin, statut non fumeur, ante´ce´dents de NVPO ou de mal des transports, morphiniques postope´ratoires [5]. La pre´me´dication e´tait donne´e une heure avant l’induction par hydroxyzine (AtaraxW) a` la dose de 1 mg/kg. L’anesthe´sie ne´cessitait un monitorage usuel, une pre´oxyge´nation et l’utilisation de tubulures courtes avec deux valves antiretour. Apre`s un bolus de xylocaı¨ne IV de 1 mg/kg, l’induction e´tait re´alise´e par du propofol (DiprivanW) en mode Anesthesie Intra-Veineuse a` Objectif de Concentration (AIVOC) ajuste´e au poids, taille, sexe et aˆge du patient) pour une concentration cible entre 4 et 6 mg/mL. L’administration de re´mifentanil (UltivaW) e´tait synchronise´e pour obtenir le pic d’action au moment de la laryngoscopie (concentration cible : 4 a` 6 mg/mL). L’intubation nasotrache´ale e´tait faite sans curare (ou avec curare de´polarisant d’action rapide : succinylcholine (AnectineW) 1 mg/kg), a` l’aide d’une sonde pre´forme´e. Une sonde nasogastrique e´tait pose´e et un tamponnement pharynge´ poste´rieur e´tait mis en place. La protection oculaire e´tait syste´matique par pommade vitamine A. Le patient e´tait installe´ en de´cubitus dorsal avec un discret proclive. La teˆte e´tait dans l’axe, en le´ge`re hyperextension. Le BBNAI e´tait re´alise´ par l’ope´rateur en tout de´but d’intervention au niveau de l’e´pine de Spix par voie endobuccale, selon le proce´de´ utilise´ pour les extractions au fauteuil dentaire. L’aiguille de 50 mm, 27–30 G, e´tait introduite 10 mm audessus du plan d’occlusion puis lentement au contact de la face me´diale de la branche montante mandibulaire sur environ 20 mm, jusqu’a` se trouver au niveau estime´ de l’e´pine de Spix. Apre`s un test d’aspiration ne´gatif, 3 mL de ropivacaı¨ne (Narope´ineW) e´taient injecte´s de chaque coˆte´. Une antibioprophylaxie intraveineuse e´tait administre´e de`s l’induction par amoxicilline et Acide clavulanique (AugmentinW) a` la dose de 2 g.

Bloc du nerf alve´olaire infe´rieur par ropivacaı¨ne

Tableau I E´valuation du confort du patient sur les 24 premie`res heures postope´ratoires. H0

H+4

H+8

H + 12

H + 16

H + 20

H + 24

Nause´es (O/N) Vomissements (O/N) De´blocage (O/N) EVA (E´chelle sur 10) Bolus PCA (Dose cumule´e)

L’entretien de l’anesthe´sie e´tait base´ sur une concentration cible comprise ge´ne´ralement entre 3 et 6 mg/mL de propofol (DiprivanW). La ventilation e´tait assure´e par un me´lange air/ oxyge`ne sans utilisation de protoxyde d’azote. Tous les patients ont e´te´ ope´re´s par le meˆme ope´rateur, apre`s infiltration des sites ope´ratoires au se´rum adre´naline´ (1 mg pour 1 L de se´rum physiologique). La technique chirurgicale d’oste´otomie sagittale des branches montantes e´tait classique selon Epker. En fin d’intervention, l’analge´sie intraveineuse comprenait parace´tamol (PerfalganW) 1 gr, ne´fopam (AcupanW) 20 mg, et morphine 10 mg. Un antiœde´mateux (me´thylprednisolone [Solume´drolW 1 mg/kg]) et un antie´me´tique (drope´ridol [DroleptanW] 1,25 mg IVD) e´taient administre´s une heure avant la fin de l’intervention. Le blocage maxillo-mandibulaire e´tait e´lastique souple. En salle de re´veil, la sonde nasogastrique e´tait retire´e lors de la sortie de la salle de re´veil (apre`s aspirations gastriques syste´matiques avant et apre`s le re´veil) et la morphine a e´te´ titre´e. La patient control analgesia (PCA) morphine e´tait mise sur une tubulure antireflux (50 mg + 10 mg de drope´ridol [DroleptanW] dans 50 mL soit 1 mg/mL). Un bolus de morphine correspondait a` 1 mg et la pe´riode d’interdiction entre deux bolus e´tait fixe´e a` six minutes. En cas de nause´es ou vomissements, un antie´me´tique (ondanse´tron [ZophrenW] 4 mg IV) e´tait administre´. Celui-ci pouvait eˆtre renouvele´ si ne´cessaire (maximum quatre injections/j avec un intervalle minimal de 30 minutes entre deux injections). En postope´ratoire, l’analge´sie e´tait assure´e par parace´tamol (PerfalganW) 1 g 4 fois/j, ne´fopam (AcupanW) 80 mg/24 h IVSE (intraveineuse en seringue e´lectrique) et PCA de morphine. Le me´thylprednisolone Solume´drolW (1 mg/kg par jour) a e´te´ poursuivi 48 heures IV. Le confort du patient a e´te´ e´value´ toutes les quatre heures pendant les 24 premie`res heures par l’IDE sur les crite`res postope´ratoires suivants : NVPO, ne´cessite´ de de´blocage, EVA, et consommation morphinique (dose cumule´e) (tableau I).

postope´ratoires (< 24 heures) : nombre de nause´es, nombre de vomissements, de´blocage, moyenne des EVA, moyenne de PCA cumule´e a` 24 heures, prise d’antie´me´tiques. Les tests utilise´s pour les variables qualitatives e´taient le Chi2 ou le test exact de Fisher si besoin. Le test utilise´ pour les variables quantitatives e´tait le test non parame´trique de Mann-Whitney, au vu des petits e´chantillons des deux groupes. Le risque alpha de premie`re espe`ce a e´te´ fixe´ a priori a` 5 %, si bien qu’un test e´tait dit significatif si sa p-value e´tait infe´rieure a` 0,05.

Re´sultats Trente patients ont e´te´ inclus. Les deux groupes e´taient statistiquement comparables en termes d’aˆge, de sexe, d’ante´ce´dent de NVPO ou de mal des transports, et de statut par rapport au tabac (tableau II). Le pourcentage de patients ayant eu au moins un NVPO dans les 24 premie`res heures suivant l’ope´ration a e´te´ significativement plus faible dans le groupe avec bloc anesthe´sique (6,3 % versus 42,9 % avec p = 0,031). Un patient a e´te´ victime de vomissements, a` deux reprises dans le groupe sans bloc. Il n’a pas eu de diffe´rence entre les deux groupes, sur le pourcentage de de´blocage (deux de´blocages dans le groupe sans bloc soit 14 % versus 0 % avec p = 0,21) et la consommation d’antie´me´tiques (43 % dans le groupe sans bloc versus 14 % avec p = 0,10) (fig. 1). Le nombre d’e´pisodes douloureux (EVA > 0) dans les 24 heures postope´ratoires n’a pas e´te´ diffe´rent entre les deux groupes. L’EVA moyen du groupe avec bloc anesthe´sique e´tait significativement plus faible (1,6 versus 0,9 avec p = 0,045) (fig. 2). Les besoins en morphiniques n’ont pas e´te´ diffe´rents entre les deux groupes a` H0 (apre`s extubation, en salle de re´veil) (p = 0,53) de meˆme que les PCA cumule´es a` 24 heures (p = 0,073) (fig. 3). Il n’y a pas eu de complications lie´es au BBNAI. Tableau II Donne´es de´mographiques et facteurs de risque de NVPO.

Me´thodologie statistique La comparabilite´ des groupes a e´te´ teste´e pour plusieurs caracte´ristiques et facteurs de risque d’NVPO : aˆge, sexe, ante´ce´dents, statut par rapport au tabac. La comparaison des groupes a e´te´ effectue´e sur diffe´rents crite`res

ˆ ge A Sex-ratio (H/F) ATCD NVPO ou mal des transports Statut non-fumeur

Sans bloc

Avec bloc

25,8  8,4 0,6 n = 2 (14 %)

24,2  5,4 1 n = 2 (13 %)

71 %

63 %

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Figure 2. Distribution de la douleur e´valuer par EVA dans les premie`res 24 heures en fonction du groupe (avec ou sans bloc anesthe´sique).

Figure 3. Distribution de bolus cumule´s de morphine demande´s par les patients dans les premie`res 24 heures en fonction du groupe (avec ou sans bloc anesthe´sique).

Figure 1. Nombre de nause´es, nombre de vomissements, consommation d’antie´me´tiques et de´blocage en fonction du groupe (avec ou sans bloc anesthe´sique).

Discussion L’inte´reˆt d’un bloc alve´olaire infe´rieur dans l’oste´otomie sagittale des branches montantes a e´te´ de´montre´ chez les patients

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dans la pre´vention des NVPO et de la douleur postope´ratoire. Les NVPO ont e´te´ significativement diminue´es sur les 24 premie`res heures, meˆme si la consommation d’antie´me´tiques n’a pas e´te´ significativement modifie´e entre les deux groupes. Dans tous types de chirurgie et malgre´ les progre`s pharmacologiques re´cents [1], les NVPO sont une des complications les plus courantes apre`s une anesthe´sie ge´ne´rale. Leur incidence augmente conside´rablement en cas de chirurgie bimaxillaire (56,4 %) [2]. Les principaux facteurs pre´dictifs sont le sexe fe´minin, l’aˆge jeune, le statut non-fumeur et les ante´ce´dents de mal de transport, de vertiges ou de migraines (score d’Apfel). Au de´cours de cette chirurgie, la prise en charge des douleurs postope´ratoires par morphiniques, l’alimentation liquide lie´e au blocage maxillo-mandibulaire,

Bloc du nerf alve´olaire infe´rieur par ropivacaı¨ne

l’hypoesthe´sie labiale, l’œde`me facial et la de´glutition de sang s’ajoutent aux facteurs pre´dictifs habituels et rendent compte de l’incidence particulie`rement e´leve´e des NVPO dans ce type de chirurgie. Deux de´blocages (14 %) ont e´te´ observe´s dans le groupe n’ayant pas eu de bloc anesthe´sique (n = 14). Meˆme si la diffe´rence entre les deux groupes n’e´tait pas significative, ce pourcentage est important. Pour e´viter les de´blocages intempestifs, certains centres chirurgicaux pre´fe`rent diffe´rer le retrait de la sonde nasogastrique au soir de l’intervention voire au lendemain. Notre e´quipe a choisi de la retirer lors de la sortie de la salle de re´veil, essentiellement pour des raisons de confort apre`s des aspirations syste´matiques avant et apre`s le re´veil. Le bloc anesthe´sique a contribue´ a` ame´liorer la prise en charge des douleurs postope´ratoires puisque la moyenne des EVA dans les premie`res 24 heures a e´te´ significativement plus faible. Les besoins morphiniques tendaient a` eˆtre moindres dans le groupe avec bloc, meˆme si la diffe´rence n’e´tait pas significative sur les besoins morphiniques cumule´s a` 24 heures. Les re´sultats e´taient a` la limite du seuil de significativite´ en raison de l’effectif (fig. 3). Le BBNAI est une proce´dure habituelle utilise´e pour controˆler l’analge´sie en chirurgie maxillofaciale et stomatologie. Couramment utilise´ lors de l’avulsion des dents de sagesse mandibulaires, son inte´reˆt a e´galement e´te´ de´montre´ re´cemment chez les patents ope´re´s d’une tumeur oropharynge´e [6]. Pourtant, le bloc du nerf alve´olaire est un bloc limite´ ne permettant pas l’analge´sie des territoires des nerfs lingual et buccal. Lors d’une oste´otomie sagittale des branches montantes mandibulaires, l’incision muqueuse implique les territoires du nerf buccal et du nerf alve´olaire infe´rieur. Le nerf lingual est e´galement concerne´ lors de la recherche de l’e´pine de Spix, avant la corticotomie interne. D’autres sources de douleurs, notamment celles lie´es a` l’intubation orotrache´ale ne sont pas anatomiquement couvertes par cette anesthe´sie locore´gionale. Pour toutes ces raisons, l’utilisation de morphiniques postope´ratoires reste indispensable pour les deux groupes, mais le bloc en comple´ment d’une anesthe´sie ge´ne´rale a` l’aide d’un anesthe´sique d’action longue, optimise l’analge´sie postope´ratoire [3,7]. Les complications et en particulier les le´sions nerveuses cause´es par injection d’anesthe´sique local sont rares. Ce sont essentiellement les paresthe´sies du nerf lingual, plus fre´quentes que celles du nerf alve´olaire infe´rieur, qu’elles soient transitoires ou permanentes [8]. Quand elles existent, les le´sions nerveuses peuvent eˆtre d’origine traumatique (piqu ˆ re directe par aiguille responsable d’un he´matome intrafasciculaire) ou d’origine toxique (neurotoxicite´ des anesthe´siques locaux (articaı¨ne [Alphacaı¨neW]) [9]. Nous n’avons pas constate´ de complications nerveuses lie´es au bloc anesthe´sique, ni sur le nerf lingual, ni sur le nerf alve´olaire infe´rieur. Le bloc mandibulaire, efficace sur le nerf lingual et sur le nerf buccal, est une alternative inte´ressante au bloc du nerf alve´olaire infe´rieur. Malgre´ l’absence de difficulte´ technique

particulie`re, les variations anatomiques de la position du nerf et de l’arte`re maxillaire expliquent un taux d’e´checs importants [10,11] et un risque fre´quent de ponction de l’arte`re maxillaire [2]. Des paralysies faciales re´gressives, des limitations d’ouverture buccale par ankylose de l’articulation temporomandibulaire apre`s injection intramusculaire dans les muscles pte´rygoı¨diens ont e´te´ rapporte´es [12]. La technique de repe´rage sous neurostimulation semblerait ame´liorer le taux de re´ussite et diminuer les incidents. Cependant, elle ne´cessite de disposer d’un anesthe´siste expe´rimente´ et d’un neurostimulateur [13]. Pour toutes ces raisons (contraintes pratiques, taux d’e´chec non ne´gligeable et complications se´rieuses), le bloc du bloc alve´olaire infe´rieur a e´te´ pre´fe´re´ au bloc mandibulaire par notre e´quipe. La ropivacaı¨ne (Narope´ineW) a e´te´ utilise´e pour sa dure´e d’action prolonge´e. Celle-ci est de´pendante du point d’injection, de la voie d’administration, de la concentration et du volume de l’anesthe´sique, avec une grande variabilite´ interindividuelle [3]. Les anesthe´siques locaux d’action bre`ve (lidocaı¨ne), lors des oste´otomies mandibulaires, ont de´montre´ leur inte´reˆt en perope´ratoire sur la consommation morphinique mais ils n’assurent pas une analge´sie postope´ratoire [7]. La toxicite´ neurologique centrale et cardiaque de la ropivacaı¨ne est moins importante que celle de la bupivacaı¨ne (Marcaı¨neW), avec une efficacite´ et une tole´rance comparable a` doses e´quianalge´siques [3]. Le couˆt de la ropivacaı¨ne est mode´re´ (2,86 euros TTC par ampoule). La ropivacaı¨ne (Narope´ineW) est un anesthe´sique local et un agent vasoconstricteur. Son utilisation lors des blocs nerveux pe´riphe´riques est associe´e a` une diminution significative du saignement perope´ratoire [14]. Au cours du clivage mandibulaire, la visibilite´ est meilleure, facilitant le repe´rage du nerf alve´olaire infe´rieur et re´duisant la dure´e ope´ratoire moyenne (16 %) [4]. Il s’agit d’un avantage certain lorsque l’on sait que la principale complication des oste´otomies sagittales des branches montantes est la le´sion du nerf alve´olaire infe´rieur, responsable d’une hypoesthe´sie postope´ratoire [15]. Le bloc analge´sique minimise le stress perope´ratoire chez le patient et donc la re´ponse du syste`me autonome endocrinien et immun [16,17]. Lors d’une intervention chirurgicale, on observe chez le patient une hyperactivite´ du syste`me nerveux sympathique, une se´cre´tion de cate´cholamines et de vasopressine, et un relargage de cytokines. Le bloc jouerait donc un roˆle pre´ventif sur l’hyperactivite´ du syste`me nerveux sympathique et du syste`me endocrinien en chirurgie orale et assurerait une meilleure stabilite´ he´modynamique perope´ratoire, en particulier chez les patients fragiles sur le plan cardiovasculaire.

De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

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