Conversion des abords vasculaires d’urgence pour hémodialyse en fistules natives au Rwanda : à propos de 37 cas

Conversion des abords vasculaires d’urgence pour hémodialyse en fistules natives au Rwanda : à propos de 37 cas

Ne´phrologie & The´rapeutique 10 (2014) 457–462 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com Article original Conversion des abords...

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Ne´phrologie & The´rapeutique 10 (2014) 457–462

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

Article original

Conversion des abords vasculaires d’urgence pour he´modialyse en fistules natives au Rwanda : a` propos de 37 cas Emergency vascular access conversion to native arterio veinous fistula: A prospective study of 37 hemodialysis patients in Rwanda Isabelle Kolb a,*, The´oge`ne Twagirumugabe b, Innocent Uyisabye c, Je´roˆme Muhizi d, Laura Braun-Parvez e, Sarah Richter a, Joseph Ntarindwa f, Jean-de-Dieu Nzambaza g, Richard Rwandenzi g, Martine Kibuka f, Franc¸oise Mantz h a

Service de ne´phrologie-he´modialyse, clinique Sainte-Anne, 182, route de la Wantzenau, 67085 Strasbourg cedex, France Service d’anesthe´sie-re´animation, centre hospitalier universitaire de Butare, Province-du-Sud BP 254, Butare, Rwanda Service de chirurgie ge´ne´rale, centre hospitalier universitaire de Kigali, boulevard de la Paix, Kigali, Rwanda d Service d’anesthe´sie-re´animation, hoˆpital militaire de Kanombe, Kicukiro 23, Kigali, Rwanda e Service de ne´phrologie-he´modialyse, centre hospitalier universitaire de Strasbourg, 1, place de l’Hoˆpital, 67000 Strasbourg, France f Service d’he´modialyse, King Faisal hospital, PO box 2534, Kigali, Rwanda g Service d’he´modialyse, centre hospitalier universitaire de Butare, Province-du-Sud BP 254, Butare, Rwanda h Service de chirurgie vasculaire, clinique de l’Orangerie, 29, alle´e de la Robertsau, 67000 Strasbourg, France b c

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 12 janvier 2014 Accepte´ le 19 mai 2014

La prise en charge de patients en he´modialyse chronique au Rwanda est re´cente. L’acce`s vasculaire utilise´ est le plus souvent un cathe´ter. Patients et me´thodes. – Trente-sept patients he´modialyse´s chroniques sur cathe´ter ont e´te´ recrute´s sur une pe´riode de 3 ans afin de convertir leur abord vasculaire en fistule native. La se´lection des patients et le choix du type de fistule ont e´te´ faits lors d’une consultation pluridisciplinaire. Re´sultats. – Trente et un patients ont be´ne´ficie´ de la cre´ation de fistule arte´rio-veineuse (FAV). Le sex-ratio e´tait de 1,5 et la principale cause de l’insuffisance re´nale e´tait l’hypertension arte´rielle (HTA). Toutes les interventions ont e´te´ re´alise´es sous anesthe´sie locale ou locore´gionale. Par ailleurs, 60 % des FAV cre´e´es e´taient radio-ce´phaliques, 35,4 % hume´ro-ce´phaliques, avec une perme´abilite´ primaire de 77,4 %. Enfin, 64 % des interventions ont e´te´ re´alise´es en ambulatoire. Conclusion. – Ce travail prouve la faisabilite´ d’un programme de cre´ation de fistules au Rwanda, permettant ainsi d’e´viter les diverses complications qui surviennent avec l’utilisation prolonge´e d’un cathe´ter. Cette expe´rience a e´te´ rendue possible par la mise en commun des ressources de 4 hoˆpitaux de re´fe´rence au Rwanda. ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Mots cle´s : Afrique sub-saharienne Cathe´ter Fistule arte´rio-veineuse He´modialyse Insuffisance re´nale chronique Rwanda

A B S T R A C T

Keywords: Africa Arterioveinous fistula Catheter Chronic kidney disease Hemodialysis Rwanda

Chronic hemodialysis in Rwanda is relatively recent and most of patients are treated with catheters. Summary. – Thirty-seven patients who require chronic hemodialysis with catheters were evaluated during a 3-years period in order to facilitate the creation of a permanent vascular access for hemodialysis (AVF). Patient selection were made during a multi-disciplinary consultation. The sex-ratio was 1.5 and the main cause of the nephropathy was arterial hypertension. Results. – Thirty-one patients benefited from the creation of an arterioveinous fistula. All of the interventions were performed using local or loco-regional anesthesia. Sixty percent of these AVF were radio-cephalic, 35.4% were humero-cephalic. Sixty-four percent of the operations were performed on ambulatory patients, with a primary function for 90% of them.

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (I. Kolb). http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2014.05.005 1769-7255/ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

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Conclusion. – This work proves the feasibility of the creation of AVF in Rwanda, thus allowing to preclude the various complications that arise with the prolonged use of a catheter. This experience was made possible by the pooling of the resources of 4 of Rwanda’s leading hospitals. In an early future, the development of vascular surgery will assure the permanence of this care. ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. Introduction Le Rwanda est un pays d’Afrique e´quatoriale situe´ dans la re´gion des grands lacs. Depuis le ge´nocide de 1994 (et ses conse´quences migratoires), les caracte´ristiques de la population ont beaucoup change´ : les efforts de reconstruction et la stabilite´ politique depuis le de´but des anne´es 2000 ont marque´ un tournant dans le de´veloppement du pays. L’e´laboration d’un syste`me de sante´ (reconstruction d’une communaute´ me´dicale et parame´dicale, cre´ation d’un syste`me d’assurance me´dicale pour tous) et la mise au point, en partenariat avec des organismes e´trangers, de programmes cible´s pour la prise en charge de certaines maladies ende´miques (VIH/Sida, paludisme) ont conside´rablement modifie´ les conditions sanitaires du pays. Actuellement, le Rwanda compte 11 millions d’habitants et la croissance de´mographique y est forte, ce qui, associe´ a` une diminution de la mortalite´ infantile, aboutit au fait que 70 % de la population est aˆge´e de moins de 30 ans. L’espe´rance de vie ne fait que s’allonger : elle est actuellement de 63 ans contre 48 ans au de´but des anne´es 2000, et 27 ans au de´but des anne´es 1990 [1]. La prise en charge des malades insuffisants re´naux au Rwanda est relativement re´cente. Comme dans beaucoup de pays d’Afrique Noire en voie de de´veloppement, traiter des patients insuffisants re´naux chroniques en he´modialyse au long cours est difficilement envisageable et ce, pour des raisons e´conomiques. En effet, la politique de sante´ publique est axe´e sur d’autres priorite´s, notamment la prise en charge du paludisme, du Sida, la protection maternelle et infantile. La pre´valence du diabe`te et de l’hypertension arte´rielle (HTA) est e´galement en augmentation, ce qui pose le proble`me a` court terme de l’organisation du de´pistage (un projet de large e´tude e´pide´miologique de pre´valence est en cours d’e´laboration). En effet, la jeunesse de la population du pays fait craindre, dans une ou deux de´cennies, une explosion de l’incidence des cas d’insuffisance re´nale chronique (IRC) et pose la question des modalite´s futures de leur prise en charge. Le pays ne compte actuellement que deux ne´phrologues permanents exerc¸ant tous deux a` Kigali, l’un au King Faisal Hospital, le second e´tant en poste a` l’hoˆpital militaire de Kanombe, ou` un projet d’ouverture d’un nouveau centre de dialyse est a` l’e´tude. L’offre de soins en termes de dialyse se re´partit a` l’heure actuelle entre deux hoˆpitaux, l’un a` Kigali (au King Faisal Hospital), l’autre a` Butare (au sein du centre hospitalier universitaire de Butare, CHUB). C’est au King Faisal Hospital que se situe le service de dialyse le plus important du pays. En effet, cet hoˆpital comporte un service de dialyse de 9 postes, permettant le traitement de 45 a` 48 patients, auquel s’ajoutent 2 postes de dialyse aigue¨ situe´s dans l’unite´ de soins intensifs de l’hoˆpital. Le service de me´decine accueille les patients ne´phrologiques. Le deuxie`me centre de dialyse fonctionnel au Rwanda, est situe´ au centre hospitalier universitaire de Butare (CHUB), au sud du pays, a` la frontie`re avec le Burundi ; il dispose de 6 postes et permet actuellement le traitement d’une quinzaine de patients seulement, pour pre`s de la moitie´ d’origine burundaise, le Burundi ne disposant pas d’offre de soins de dialyse. Quant au centre hospitalier universitaire de Kigali (CHUK), il prend en charge en hospitalisation des patients insuffisants

re´naux, mais n’a pour le moment pas la possibilite´ de dialyser ces patients qui sont transfe´re´s au King Faisal Hospital en cas de ne´cessite´. Jusqu’a` pre´sent, l’he´modialyse e´tait re´serve´e de fac¸on privile´gie´e aux situations de prise en charge aigue¨ (ne´crose tubulaire compliquant des chocs he´morragiques post-traumatiques ou les he´morragies de la de´livrance, choc toxi-infectieux, pre´-e´clampsies), avec une perspective de gue´rison a` court terme. Ne´anmoins, un certain nombre de ces patients en insuffisance re´nale aigue¨ ne re´cupe`rent finalement pas de l’e´pisode initial et basculent dans la chronicite´. Le de´veloppement de centres de dialyse pour ces patients devenus chroniques (une soixantaine de patients dialyse´s de´nombre´s pour 11 millions d’habitants) a e´galement conduit a` prendre en charge, plus re´cemment, un certain nombre de patients en insuffisance re´nale chronique, dont l’insuffisance re´nale a e´te´ le plus souvent diagnostique´e au stade terminal avec d’emble´e la pre´sence de complications ne´cessitant une prise en charge rapide (œde`me aigu du poumon, hyperkalie´mie majeure, HTA maligne essentiellement). Ainsi, le mode d’entre´e en dialyse implique, dans la totalite´ des cas, l’implantation d’un cathe´ter selon le degre´ d’urgence. C’est la raison pour laquelle les cathe´ters veineux sont des outils incontournables de la prise en charge initiale en he´modialyse de ces patients. Jusqu’en 2010, il n’y avait pas d’alternative aux cathe´ters en termes d’acce`s vasculaire. L’absence de possibilite´ de cre´ation de fistules et l’utilisation de cathe´ters au long cours (cathe´ters le plus souvent non tunne´lise´s) exposent les patients a` des complications se´ve`res connues : sepsis, insuffisance de de´bits et donc mauvaise qualite´ d’e´puration avec risques d’hyperkalie´mie interdialytique engageant le pronostic vital. L’utilisation de cathe´ters chez les patients he´modialyse´s est par conse´quent associe´e a` une morbi-mortalite´ supe´rieure par rapport aux patients he´modialyse´s avec des fistules (FAV) natives [2,3]. Par ailleurs, l’usage des cathe´ters centraux expose e´galement a` des thromboses et ste´noses veineuses centrales, compromettant les possibilite´s de cre´ation de futures FAV [4]. Conscients des risques lie´s a` l’utilisation des cathe´ters, des interventions pour cre´ation de fistule ont e´te´ tente´es par des e´quipes locales, mais la majorite´ des ope´rations, effectue´es par un chirurgien non aguerri a` la technique, s’est solde´e soit par une FAV non fonctionnelle, soit par une FAV perme´able mais non ponctionnable. Le but de notre intervention au Rwanda e´tait de proposer sur place un programme de cre´ation de FAV natives chez des patients dialyse´s pre´valents, porteurs d’un cathe´ter, par un chirurgien vasculaire spe´cialise´ dans les cre´ations de fistules. Trois ne´phrologues et un chirurgien vasculaire strasbourgeois, membres d’une association d’entraide me´dicale a` destination de pays d’Afrique Noire (AME-International), se sont rendus a` 3 reprises au Rwanda depuis de´cembre 2010 afin de cre´er des fistules arte´rio-veineuses a` des patients pre´valents traite´s par he´modialyse sur cathe´ters, ainsi que pour des actions de formations me´dicales et parame´dicales (cours infirmiers axe´s sur la ne´phro-dialyse, expose´s me´dicaux axe´s sur la ne´phrologie destine´s a` des me´decins internistes). La premie`re FAV mise en place par notre e´quipe au Rwanda, a` Butare, date de fin 2010. C’est en effet le CHUB qui a e´te´ le premier

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service a` nous avoir accueillis dans le pays, pour des raisons historiques, a` savoir une collaboration ancienne entre le CHUB et l’Est de la France dans le domaine de la sante´ :  accueil de me´decins rwandais pour des formations au centre hospitalier de Metz-Thionville et a` Nancy, avec en particulier, en 2005, dans le domaine de la re´animation et de l’he´modialyse ;  aide a` l’installation et au de´but de la dialyse aigue¨ dans le service des soins intensifs de Butare (formation d’un me´decin anesthe´siste et d’un technicien de dialyse notamment). Depuis, de nouvelles interventions ont e´te´ pratique´es a` l’occasion de 2 nouveaux se´jours, dans un pays ou` la prise en charge en dialyse chronique a moins de 10 ans, et ou` le nombre de dialyse´s chroniques est faible (65 patients traite´s environ pour 11 millions d’habitants, dont une demi-douzaine venant de pays limitrophes ne disposant pas d’offre de dialyse). Notre action a change´ les modalite´s de prise en charge de ces patients, expe´rience que nous relatons dans cet article.

Une patiente pre´sentait une obe´site´ morbide (indice de masse corporelle [IMC] : 46,5 kg/m2), 3 patients des se´rologies positives a` la fois pour le VIH, le virus de l’he´patite C et B (un seul patient VIH traite´ par trithe´rapie). Deux patients e´taient porteurs isole´ment du virus de l’he´patite C. Aucun patient ne be´ne´ficiait de traitement de leur he´patite au moment de la se´lection. Huit patients e´taient he´modialyse´s sur cathe´ter fe´moral, 24 sur cathe´ter jugulaire simple, 4 sur cathe´ter jugulaire tunne´lise´ et 1 sur cathe´ter sous-clavier non tunne´lise´. Douze patients au moins avaient de´ja` pre´sente´ un ou plusieurs e´pisodes de septice´mie en rapport avec leur cathe´ter, souvent en place depuis plusieurs mois (3 a` 69 mois) (ante´ce´dents infectieux non renseigne´s dans les dossiers des autres patients). Sur ces 12 patients, 5 avaient eu 1 e´pisode infectieux attribue´ a` leur cathe´ter, 2 patients avaient chacun de´veloppe´ 2 septice´mies et 5 patients des infections re´currentes (> 3). Certains patients (n = 8) avaient de´ja` be´ne´ficie´ d’une tentative de cre´ation d’abord pe´renne :

2. Patients et me´thodes

 dialyse pe´ritone´ale : 2 patients ;  fistule arte´rio-veineuse : 4 patients ;  tentative de dialyse pe´ritone´ale puis e´chec de tentative de cre´ation de fistule et finalement he´modialyse sur cathe´ter : 2 patients.

2.1. Crite`res de se´lection des patients Trente-sept patients he´modialyse´s provenant des deux e´tablissements hospitaliers rwandais disposant d’un service d’he´modialyse (CHUB et King Faisal Hospital a` Kigali) ont e´te´ recrute´s entre de´cembre 2010 et octobre 2013. Il s’agissait de patients porteurs de cathe´ters e´ligibles a` la cre´ation d’une fistule arte´rioveineuse (FAV) native. Ont e´te´ exclus :  les patients infecte´s ;  les patients n’ayant pas de capital veineux exploitable apre`s examen clinique ;  les patients pour lesquels la prise en charge de l’he´modialyse par l’Assurance maladie n’e´tait pas acquise ;  les patients aigus avec possibilite´ de re´cupe´ration rapide ;  les patients dont l’espe´rance de vie e´tait compromise a` court terme. L’e´valuation des dossiers a e´te´ re´alise´e conjointement par l’e´quipe me´dico-infirmie`re locale et notre e´quipe. 2.2. Caracte´ristiques des patients Ce travail a inclus 23 hommes et 14 femmes, parmi lesquels 70 % e´taient aˆge´s de moins de 50 ans. La ne´phropathie initiale e´tait e´tiquete´e (Fig. 1) :  post-hypertensive dans 45 % des cas ;  diabe´tique dans 19 % des cas ;  de nature glome´rulaire aigue¨ ou chronique (sans documentation histologique) dans 17 % des cas.

3. Me´thodes 3.1. Examen pre´ope´ratoire des patients Tous les patients ont e´te´ e´value´s en consultation pre´ope´ratoire par :     

un examen clinique du re´seau veineux sous garrot ; la manœuvre d’Allen ; la prise de pression arte´rielle aux deux membres supe´rieurs ; la mesure de l’IMC ; un examen physique standard pre´ope´ratoire.

Une seule patiente disposait d’une imagerie vasculaire du membre supe´rieur (phle´bographie). Tous les patients ont donne´ leur consentement (consentement des parents pour une patiente mineure) oral et/ou e´crit pour l’intervention propose´e. Aucune asyme´trie tensionnelle n’e´tait observe´e, et tous les patients avaient un pouls radial au niveau du membre choisi pour la FAV. Aucune manœuvre d’Allen n’e´tait franchement positive, mais l’examen e´tait rendu difficile par la pigmentation cutane´e. Deux patients ont e´te´ re´cuse´s lors de cette consultation pre´ope´ratoire initiale :  un patient, en raison d’un trop mauvais e´tat ge´ne´ral, a be´ne´ficie´ de la mise en place d’un cathe´ter jugulaire interne tunne´lise´, ce qui a permis l’ablation de son cathe´ter fe´moral ;  le second, porteur d’un cathe´ter tunne´lise´ jugulaire, ne pre´sentait aucune veine accessible pour une FAV. 3.2. Anesthe´sie

Fig. 1. E´tiologies de l’insuffisance re´nale.

Une anesthe´sie locale (AL) par chlorhydrate de me´pivacaı¨ne a` 200 mg/20 mL a e´te´ re´alise´e dans 3 cas, et un bloc locore´gional dans les autres cas. Une patiente ayant be´ne´ficie´ d’une FAV hume´roce´phalique haute a ne´cessite´ la re´alisation d’une anesthe´sie par bloc inter-scale´nique. Enfin, une patiente a be´ne´ficie´ d’une injection comple´mentaire de Fentanyl1. Une antibiothe´rapie perope´ratoire a e´te´ re´alise´e chez 4 patients ayant une histoire re´cente de sepsis (Vancomycine1 500 mg).

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3.3. Techniques chirurgicales Sur les 31 FAV cre´e´es, 20 e´taient radio-ce´phaliques a` l’avantbras et 11 hume´ro-ce´phaliques au pli du coude.

Les FAV cre´e´es ont e´te´ radio-ce´phaliques ou hume´roce´phaliques droites ou gauches par une anastomose late´roterminale au prole`ne 6 ou 7/0 [5]. L’he´parinisation de la veine et de l’arte`re a e´te´ re´alise´e localement par injection de 30 a` 40 cc de se´rum physiologique he´parine´ a` 0,8 mL/100 mL. La perme´abilite´ de la veine effe´rente a e´te´ controˆle´e a` l’aide d’une aiguille boutonne´e, et dans certains cas par une sonde de Fogarty sans inflation. Aucun garrot n’a e´te´ pose´ au membre supe´rieur durant l’intervention. Tous les cas ont e´te´ ope´re´s dans un bloc ope´ratoire (a` Butare pour les cas les plus anciens, a` l’hoˆpital militaire de Kanombe pour les interventions pratique´es en 2013). L’intervention a e´te´ pratique´e en ambulatoire dans 20 cas.

4.2. Perme´abilite´ primaire et suivi Avec un recul de 6 mois pour les FAV les plus re´centes, 4 e´checs primaires par thrombose pre´coce et 3 de´veloppements insuffisants pour permettre une ponction (FAV immatures) ont e´te´ identifie´s (Fig. 2). Parmi les 4 thromboses pre´coces, une e´tait probablement conse´cutive au choix de la patiente concerne´e de ne pas accepter la FAV au bras propose´. En effet, malgre´ nos explications avec traducteur, il n’a pas e´te´ possible de convaincre la patiente d’accepter la cre´ation de FAV au bras se´lectionne´ par le chirurgien ; ainsi, une FAV radio-ce´phalique a e´te´ tente´e sur le membre controlate´ral, de´ja` l’objet de 2 tentatives de FAV, qui se thrombosa a` la 12e heure. Un autre patient ayant pre´sente´ une thrombose pre´coce de sa FAV est secondairement de´ce´de´, suite a` l’arreˆt des se´ances d’he´modialyse (poursuivies sur cathe´ter jusqu’a` leur arreˆt, faute de financement pe´renne). Une patiente a ne´anmoins pu eˆtre greffe´e. Concernant le suivi des 24 patients avec FAV fonctionnelles, 10 ont un recul de 21 a` 27 mois. Dans ce groupe, 3 de´ce`s ont e´te´ de´nombre´s : 2 par arreˆt cardiaque, 1 par arreˆt de la dialyse en raison de l’absence de financement. La dialyse a pu eˆtre stoppe´e chez l’un des patients en raison d’une ame´lioration de sa fonction re´nale. Deux patients ont e´te´ perdus de vue (FAV perme´able au dernier controˆle). Sur les 18 patients restants (succe`s ope´ratoire), 4 patients ont e´te´ secondairement greffe´s (1 succe`s de greffe, 1 de´ce`s quelques semaines apre`s l’intervention, 1 e´chec ope´ratoire et 1 patient en cours de rejet). Au total, si les cas des patients re´cuse´s a` la consultation pre´ope´ratoire sont exclus, ainsi que ceux dont l’exploration

4. Re´sultats 4.1. Traitement chirurgical Parmi les 35 patients retenus pour la chirurgie, 4 ont e´te´ re´cuse´s en perope´ratoire car l’exploration chirurgicale n’a pas permis de retrouver de veine utilisable :  un patient a be´ne´ficie´ de la pose d’un cathe´ter tunne´lise´ jugulaire en remplacement de son cathe´ter fe´moral simple ;  deux patients avaient de´ja` un cathe´ter tunne´lise´ jugulaire en place, qui a e´te´ maintenu ;  un patient e´tait porteur d’un cathe´ter sous-clavier simple qui n’a pas e´te´ remplace´ au profit d’un cathe´ter tunne´lise´ par notre e´quipe, en raison des difficulte´s rencontre´es par l’e´quipe locale pour le mettre en place (seul abord encore possible chez ce patient).

37 patients sélectionnés pour une FAV (14 femmes, 23 hommes) 2 récusés 1 : Absence de veine ; 2 : Altération de l'état général

n = 35 opérés 4 : explorés mais absence de veine

31

4 : échecs primaires (dont 1 refus de côté par le malade)

24

3 : décès FAV fonctionnelle

2 : Perdus de vue FAV fonctionnelle au dernier contrôle

3 : retards de maturation

21

1 : arrêt dialyse (I.R. résolutive) FAV fonctionnelle

24 FAV fonctionnelles

4 : greffés FAV fonctionnelle Fig. 2. Re´sultats.

18

14 FAV fonctionnelles

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5. Discussion

fin de se´ance de dialyse de ces patients ne permettant pas de visualiser le re´seau veineux de fac¸on optimale pour de´cider du site ope´ratoire) : ces patients ont par conse´quent e´te´ reconvoque´s avant la se´ance suivante afin de permettre une meilleure e´valuation clinique de leur re´seau veineux des membres supe´rieurs.

5.1. Patients et comorbidite´s

5.3. Modalite´s de prise en charge

L’aˆge moyen des patients (39,5 ans) est tre`s infe´rieur a` la moyenne europe´enne et ame´ricaine [6]. Cela est vraisemblablement le reflet des caracte´ristiques de´mographiques du pays, ou` 70 % de la population est aˆge´e de moins de 30 ans. L’e´tiologie de l’IRC la plus fre´quemment rencontre´e dans cette cohorte est l’HTA (45 % des cas), ce qui est probablement un reflet assez juste de l’incidence de cette pathologie sur le continent africain. Dans d’autres pays d’Afrique, l’HTA est la seconde ou la troisie`me e´tiologie de l’IRC [6]. De plus, 13 % des patients e´taient se´ropositifs pour un a` trois virus. L’incidence du Sida en he´modialyse est comparable a` son incidence ge´ne´rale dans les pays de la re´gion [7]. La ne´phropathie initiale e´tait diabe´tique dans 19 % des cas, ce qui est un chiffre un peu infe´rieur a` celui pre´sente´ par la grande se´rie camerounaise (20,1 %), mais cela est peut-eˆtre a` mettre en relation avec une moyenne d’aˆge plus basse dans notre e´tude (39,5 ans contre 45,3 ans pour la se´rie camerounaise) [6]. Par ailleurs, au Rwanda, les patients he´modialyse´s be´ne´ficient d’une prise en charge plus globale que dans d’autres pays africains, ou` l’acce`s a` l’he´modialyse est souvent re´serve´ aux malades les plus aise´s, population dans laquelle l’incidence du diabe`te est plus e´leve´e. Le diagnostic de ne´phropathie glome´rulaire aigue¨ ou chronique (sans documentation histologique) a` l’origine de l’insuffisance re´nale chronique est observe´ dans 17 % des cas contre 25,9 % dans la se´rie camerounaise [6] : cela peut eˆtre lie´ au manque de moyens pour aller tre`s avant dans le diagnostic e´tiologique au moment ou` les patients arrivent a` l’hoˆpital pour de´buter la dialyse, car ils sont pris en charge le plus souvent dans un contexte d’urgence, au stade terminal d’emble´e. Enfin, 100 % des patients de notre cohorte e´taient dialyse´s sur cathe´ter, dont 20 % sur cathe´ter fe´moral, particulie`rement pourvoyeur de complications infectieuses ou thrombotiques [8]. Dans une grande se´rie camerounaise concernant 518 cre´ations de fistules chez des patients en insuffisance re´nale terminale traite´s par he´modialyse ou en attente de mise en dialyse, pre´sente´e pour la premie`re fois en 2010 au 7e congre`s de la Socie´te´ camerounaise de chirurgie cardiovasculaire et publie´e en 2012, la pre´valence des cathe´ters au moment de l’intervention chirurgicale e´tait de 79,34 % [6]. Nous avons choisi de ne pas effectuer de FAV en pre´emptif, pre´fe´rant concentrer notre action au profit de patients de´ja` he´modialyse´s et porteurs de cathe´ters, et par conse´quent expose´s a` une morbi-mortalite´ e´leve´e lie´e a` ce dispositif, souvent en place depuis de nombreux mois en l’absence de solution alternative. En effet, dans notre se´rie, la dure´e moyenne d’utilisation des cathe´ters de´passait largement les dure´es recommande´es par les Kidney Disease Outcomes Quality Initiative (KDOQI ; 3 a` 69 mois) [9].

La forte proportion de chirurgie ambulatoire (20/31 = 64 %) est plus une ne´cessite´ d’ordre e´conomique et logistique qu’un choix. Notre chirurgien a choisi de ne pas proposer de fistule arte´rioveineuse hume´ro-basilique ou de prothe`se en goretex hume´roaxillaire, n’e´tant sur place que quelques jours sur la pe´riode e´tudie´e, et ne pouvant envisager la confection d’abords vasculaires en 2 temps ou ne´cessitant un suivi spe´cialise´. Les modalite´s chirurgicales utilise´es e´taient standardise´es [5]. La technique du bloc plexique a fait la preuve de son efficacite´ dans cette chirurgie. Elle est adapte´e a` une prise en charge ambulatoire. Quelques interventions simples a` l’avant-bras ont meˆme pu eˆtre re´alise´es sous anesthe´sie locale pure.

chirurgicale n’a pas permis de retrouver de veine utilisable pour la cre´ation d’un abord, 24 des 31 fistules cre´e´es (77,4 %) sont fonctionnelles lors de la prise des dernie`res nouvelles des patients.

5.2. Examen pre´ope´ratoire Malgre´ l’absence d’imagerie pre´ope´ratoire, la perme´abilite´ primaire des FAV chez ces patients est satisfaisante (24/ 31 = 77,4 %). Ceci s’explique par le jeune aˆge des patients, le soin avec lequel l’e´quipe de dialyse e´vite les prises de sang sur les veines utilisables pour une FAV, mais aussi par le faible nombre de perfusions prolonge´es. Enfin, l’examen clinique sous garrot du re´seau veineux superficiel a e´te´ tre`s soigneux. Cinq patients sortaient de leur se´ance de dialyse lors d’une premie`re consultation (la de´ple´tion hydrique de

5.4. Analyse des premiers re´sultats et perspectives Avec le recul de notre cohorte, les patients disposant d’une FAV fonctionnelle n’ont pas pre´sente´ d’infection de leur abord. Il n’a cependant pas e´te´ possible de comparer l’incidence des infections chez les patients dialysant sur cathe´ter a` celle des patients dialysant sur fistule : il n’existe en effet pas de donne´es concernant les nombres d’infections/1000-jour cathe´ters dans le pays. Cependant, il est important que le chirurgien s’implique dans le bilan pre´ope´ratoire a` la recherche du meilleur site pour la cre´ation de la fistule, en collaboration avec l’e´quipe de ne´phrologues et l’anesthe´siste. Il est ne´cessaire de re´aliser l’intervention avec des loupes chirurgicales et une instrumentation de microchirurgie adapte´e. Mais surtout, comme cela a de´ja` e´te´ souligne´ [6], la confection d’un abord pe´renne pour he´modialyse doit eˆtre confie´e a` un chirurgien vasculaire entraıˆne´ a` cette technique. Nous pouvons donc affirmer, malgre´ les difficulte´s logistiques et graˆce a` l’excellente coope´ration de 4 centres hospitaliers de re´fe´rence (CHU de Butare, CHU de Kigali, King Faisal Hospital et hoˆpital de Kanombe), qui ont mis en commun leurs moyens mate´riels et humains pour mener a` bien ces interventions, que l’objectif de ce travail a e´te´ pleinement atteint : 24 FAV sur 31 re´alise´es e´taient fonctionnelles lors du dernier controˆle. Au moment de la cre´ation de leur fistule, tous les patients be´ne´ficiaient d’une prise en charge financie`re de leur dialyse. Cette situation n’a malheureusement pas e´te´ pe´renne pour 3 patients, aboutissant au de´ce`s. Ce proble`me est re´current dans les pays d’Afrique [10–12]. En raison de la forte incidence de l’hypertension arte´rielle dans la population, pourtant jeune, des pays d’Afrique, de l’allongement de l’espe´rance de vie et de l’augmentation « e´pide´mique » mondiale de l’incidence du diabe`te, le Rwanda risque d’eˆtre confronte´ dans les prochaines de´cennies a` un proble`me majeur de sante´ publique. Par ailleurs, un programme de greffe a` donneur vivant apparente´ est d’ores et de´ja` en place au Rwanda (conventions de coope´ration avec l’Inde, intervention d’e´quipes chirurgicales e´trange`res sur place), le passage en he´modialyse devant eˆtre, autant que faire ce peut, le plus court possible pour ces patients. La ˆ t des dialyses et cre´ation de FAV participe a` la re´duction du cou permet d’attendre la greffe dans de meilleures conditions. Notre but a` court terme est de pouvoir former un chirurgien local a` la cre´ation de FAV et a` la gestion des proble`mes courants lie´s aux abords vasculaires (de´pistage et traitement des ste´noses, apprentissage de la technique de thrombectomie chirurgicale en l’absence

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d’accessibilite´ a` la radiologie interventionnelle au Rwanda notamment : projet en cours d’e´laboration). A` plus long terme, notre projet est de participer a` la formation comple`te d’un chirurgien vasculaire, le Rwanda n’en disposant pas a` ce jour. 6. Conclusion La cre´ation de fistules natives chez les patients he´modialyse´s chroniques au Rwanda a d’ores et de´ja` modifie´ les modalite´s de ˆ ts du prise en charge des patients. Les fistules minimisent les cou traitement, et sont en passe de devenir le gold standard dans les services d’he´modialyse rwandais, qui ne pouvaient pas, jusqu’a` fin 2010, proposer syste´matiquement ce type d’intervention a` leurs patients. Ce travail de´montre l’importance d’une prise en charge pluridisciplinaire avec mise en commun des compe´tences et des moyens pour aboutir a` un succe`s. Des travaux ulte´rieurs seront consacre´s au suivi sur le plus long terme des patients (perme´abilite´ secondaire). Dans un pays ou` la moyenne d’aˆge des he´modialyse´s n’atteint pas 50 ans et dans lequel est privile´gie´ le donneur vivant pour la greffe re´nale, le de´veloppement de la chirurgie vasculaire assurera une prise en charge adapte´e et performante. De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

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