L’Encéphale (2013) 39, 296—305
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MISE AU POINT
L’anhédonie dans la dépression Anhedonia in depression R. Gaillard a,∗, D. Gourion b, P.M. Llorca c a
Inserm UMR S894, service hospitalo-universitaire, laboratoire de physiopathologie des maladies psychiatriques, centre de psychiatrie et neurosciences, université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité, centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France b 17, rue des Marronniers, 75016 Paris, France c Service de psychiatrie, CHU de Clermont-Ferrand, université d’Auvergne, rue Montalembert, BP 69, 63003 Clermont-Ferrand cedex, France Disponible sur Internet le 12 aoˆ ut 2013
MOTS CLÉS Anhédonie ; Motivation ; Perte de plaisir ; Circuit de récompense ; Dépression majeure
KEYWORDS Anhedonia; Motivation; Loss of pleasure; Reward neural network; Major depressive disorder ∗
Résumé L’anhédonie, ou perte de la capacité à ressentir le plaisir, est un symptôme central de la dépression majeure, de la schizophrénie et d’autres troubles neuropsychiatriques. Le terme « anhédonie » a été introduit par Ribot, psychologue franc ¸ais, en 1896 pour décrire le pendant psychique de l’analgésie chez ses patients. Longtemps, la définition clinique de l’anhédonie est demeurée relativement inchangée. Mais les avancées des neurosciences ont bouleversé notre connaissance des processus liés aux circuits de la récompense et du plaisir. Actuellement, le construit clinico-biologique de l’anhédonie est étroitement lié aux concepts d’évaluation de la récompense, de prise de décision, d’anticipation et de motivation. Ces différents processus cognitifs sont sous-tendus par des circuits neuronaux essentiellement situés au niveau du striatum ventral et des régions corticales préfrontales. Nous proposons ici une revue des données cliniques, neurobiologiques et psychopharmacologiques actuelles liées aux déficits d’hédonie dans la dépression. Mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques de l’anhédonie est susceptible d’améliorer à la fois l’évaluation diagnostique et les stratégies thérapeutiques. © L’Encéphale, Paris, 2013. Summary Anhedonia, or markedly diminished interest or pleasure, is a hallmark symptom of major depression, schizophrenia, and other neuropsychiatric disorders. The term ‘‘anhedonia’’ was introduced by the French psychologist Ribot in 1896 to describe the counterpart to analgesia in his patients, for which ‘‘it was impossible to find the least pleasure’’. Over the last decades, the clinical definition of anhedonia has remained relatively unchanged, but recently, behavioral neurosciences have significantly changed our knowledge of reward-related processes. Now, the construct of anhedonia reflects deficits in hedonic capacity, and is closely linked to the processes of reward valuation, decision-making, anticipation, and motivation. The neural circuits underlying these reward-related mechanisms include essentially the ventral striatum and
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (R. Gaillard).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2013. http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2013.07.001
L’anhédonie dans la dépression
297 prefrontal cortical regions. Here, we review the clinical concepts, neural bases and psychopharmacological data related to the deficits of hedonia in depression. Understanding anhedonia will facilitate diagnosis and treatment management. © L’Encéphale, Paris, 2013.
Introduction C’est Théodule Ribot psychologue franc ¸ais qui a créé, en 1896, le néologisme « anhédonie » du grec : a-, « sans » + hêdonê, « plaisir ». Dans la Psychologie des Sentiments [1], il écrit : « Le plaisir dans certaines circonstances anormales peut totalement disparaître ; l’anhédonie, si l’on me permet ce néologisme, par rapport à l’analgésie, a été très peu étudiée mais elle existe. Je n’ai pas à rappeler que l’emploi des anesthésiques supprime en même temps la douleur et son contraire. . . Il existe des cas où l’insensibilité au plaisir existe seule. . .Cette insensibilité n’existe pas seulement pour le plaisir physique mais pour le plaisir moral (joie, gaité). Sans parler des cas de mélancolies profondes qui nous occuperont plus tard, où le moindre rayon de joie ne pénètre pas dans l’individu, il y a des cas d’anhédonie qui semblent plus simples et plus nets ». Cet auteur considéré comme un des fondateurs de la psychologie scientifique en France propose une approche évolutionniste [2]. Il s’agit pour lui d’étudier l’évolution des sentiments qui vont du simple au complexe ou du plus automatique au moins automatique. La création du terme et du concept d’anhédonie s’inscrit dans une volonté de « symétrie » théorique regroupant douleur/plaisir et analgésie/anhédonie. Pour Ribot, l’anhédonie peut être présente dans des troubles organiques mais aussi dans des pathologies psychiatriques (« ces cas de mélancolies profondes »). Dans le champ de la schizophrénie Kraepelin comme Bleuler décriront ce concept sans utiliser le néologisme, Kraepelin évoque « l’indifférence caractéristique des patients pour les interactions sociales, l’absence d’émotion, l’extinction de l’affection pour la famille et les amis, et la perte de satisfaction dans leurs activités diverses sont assez souvent les premiers symptômes à se manifester, marquant le début de la maladie » [3]. Il est à noter que l’ouvrage de Ribot sera traduit en Anglais dès 1897 [4]. La terminologie anhedonia et le concept seront davantage employés par les auteurs anglosaxons que franc ¸ais au cours du xxe siècle. Le terme « anhédonie » sera utilisé dans des travaux psychanalytiques tels ceux de Myerson, Glauber, Ash, Rado, mais peu dans la littérature psychiatrique jusqu’aux années 1970 [5]. Il faut attendre les années 1970, avec le concept de dépression endogènomorphe de Klein, pour que soit ravivé l’intérêt pour la notion d’anhédonie [6]. En psychopathologie, l’anhédonie peut se référer à la fois à un symptôme-état dans divers troubles psychiatriques et organiques (dépression, schizophrénie, toxicomanies et autres conduites à risque, maladie de Parkinson, etc.) et à un symptôme-trait caractérisant le patient et intégré dans certains modèles de vulnérabilité [7].
Approche clinique de l’anhédonie dans la dépression L’anhédonie dans les critères diagnostiques Dans une perspective historique, la prise en compte de l’anhédonie comme un des critères diagnostiques de dépression n’a débuté qu’à partir des années 1970 et de la publication des critères de Feighner (Tableau 1), en tant que perte d’intérêt ou de motivation pour les activités sexuelles (loss of interest or decreased sex drive), avant d’être intégré dans les critères RDC (Research Diagnosis Criteria), comme perte d’intérêt ou de plaisir, ce qui sera repris dans le DSM-III [8]. La perte d’intérêt ou de plaisir devient alors un des deux critères nécessaires, avec l’humeur dépressive, pour porter le diagnostic d’épisode dépressif majeur, mais le terme « anhédonie » n’est pas employé. Buckner et al. [9] ont étudié les typologies cliniques associées à ces critères diagnostiques. Ils ont recherché les caractéristiques cliniques spécifiques de patients déprimés présentant soit une prédominance de l’humeur dépressive, soit une prédominance de l’anhédonie. Les sujets anhédoniques montraient un niveau plus élevé de retrait social, d’altération des capacités sociales, de rumination à propos des événements passés et de variation de l’humeur sur le nycthémère (avec un état plus altéré le matin). Leur réactivité émotionnelle était altérée. Ils présentaient en revanche moins d’idées de mort. Les patients chez qui prédominait l’humeur dépressive, avaient une réactivité émotionnelle encore plus altérée, plus d’idées de mort, plus de plaintes somatiques, une insomnie de la seconde partie de la nuit et une aggravation de l’humeur sur le nycthémère, le soir. L’identification de ces deux dimensions « principales » semble pertinente pour définir des groupes de patients différents et favoriser l’exploration étiopathogénique. À côté de l’intégration dans les critères diagnostiques de la dépression, l’anhédonie a été également considérée par différents auteurs [4] comme permettant de définir des types spécifiques de dépression (en particulier la dépression endogénomorphe de Klein). Elle occupe également une place centrale dans la définition de la dépression mélancolique. Dans le DSM-III [10], l’anhédonie est un des critères, nécessaire pour porter le diagnostic de mélancolie. Lors des révisions ultérieures (DSM-IIIR, DSM-IV), elle fait toujours partie des éléments cliniques (dans une approche polythétique) permettant de qualifier le sous-type mélancolique de dépression (soit en tant que perte de capacité à éprouver du plaisir, soit en tant que perte de réactivité aux stimuli agréables). Cela laisse supposer que l’anhédonie permet de définir un type de dépression qualitativement différent, en association éventuellement avec la perte de réactivité. Les débats dans le domaine restent ouverts.
298 Tableau 1
R. Gaillard et al. Adapté de Kendler et al. (en 2010).
Study authors or criteria set, year Stone and Burris (in 1950)
Cassidy et al. (in 1957)
Feighner et al. (in 1972)
Research Diagnostic Criteria (in 1975)
DSM-III criteria 1980
Feeling depressed Appetite loss
Depressed mood Anorexia
Dysphoric mood Poor appetite or weight loss
Dysphoric mood Poor appetite or weight loss; or increased appetite and weight gain
Dysphoric mood Poor appetite or weight loss; or increased appetite and weight gain
Weight loss Agitation
Weight loss Wringing hands, pacing
Agitation or retardation Self-reproach, guilt
Psychomotor agitation or retardation Self-reproach, guilt
Psychomotor agitation or retardation Worthlessness, self-reproach or guilt
Diminished ability to think or concentrate Thoughts of death, suicide
Diminished ability to think or concentrate Thoughts of death or suicide
Diminished ability to think or concentrate Thoughts of death or suicidal ideation
Constipation Fatigue
Loss of energy
Decreased sex interest
Loss of interest or decreased sex drive
Fatigue, loss of energy Loss of interest or pleasure
Fatigue, loss of energy Loss of interest or pleasure
Self-deprecation Psychomotor retardation
Suicidal thoughts
Slowed thinking Loss of concentration Suicidal ideation
Les termes utilisés dans ce tableau n’ont pas été traduits afin de préserver la spécificité de la terminologie employée et d’en montrer l’évolution dans le temps. En gras l’évolution de la notion de perte d’intérêt et de plaisir dans les différents critères diagnostiques.
Opérationnalisation du concept Dans les premiers outils d’évaluation et de mesure de la dépression, aussi diffusés comme la Hamilton Depression Scale (qui reste largement employée dans les travaux de recherche), on ne retrouve pas d’item permettant la mesure de l’anhédonie, l’outil ayant été développé au début des années 1960 [11]. Seul l’item 7 (« Travail et intérêt ») permet une approche indirecte de ce concept clinique. Dans la MADRS qui est largement employée également, un seul item (item 8 : « Incapacité à ressentir ») permet d’approcher cette notion [12]. À partir de 1970, des auteurs ont tenté d’opérationnaliser la notion d’anhédonie et de créer des outils de mesure spécifique de ce concept clinique [4,5]. Certains de ces instruments ont été développés pour évaluer l’anhédonie chez des patients déprimés. D’autres se concentrent particulièrement sur l’anhédonie-trait indépendamment d’une situation clinique. On peut citer les deux échelles développées par Chapman et al. [13] : Scales for Physical and Social Anhedonia. Dans l’article original les auteurs précisaient : « l’anhédonie que nous désirons mesurer est un déficit caractériologique à vie de la capacité à éprouver du plaisir. Nous ne nous intéressons pas à une perte passagère de l’expérience de plaisir. Le plaisir est caractérisé par un affect fortement positif, par une anticipation enthousiaste de l’expérience qui l’évoque, par le souvenir satisfaisant de cette expérience et par le fait de vouloir aboutir à cette expérience. Il a été tenté
d’éliminer les effets de la dépression. Les patients déprimés se plaignent souvent d’une perte de la capacité à éprouver du plaisir mais cette anhédonie dans la dépression est relativement passagère chez la majorité des patients » [5]. Cette présentation souligne à la fois les caractéristiques de l’outil, mais surtout la complexité de la définition de l’anhédonie et donc de la démarche d’opérationnalisation. La Fawcett Clark Depression Scale [14] a été, quant à elle, spécifiquement développée pour la mesure de l’anhédonie dans la dépression. Elle a été traduite en franc ¸ais [15], mais comporte 36 items ce qui la rend plus difficile à employer. L’échelle de plaisir de Snaith-Hamilton (Shaps) [16] est la plus couramment utilisée dans la mesure de l’anhédonie car il s’agit d’un auto-questionnaire de 14 items conc ¸u pour évaluer la capacité hédonique du patient dans différentes circonstances de la vie quotidienne. Elle a été traduite en Franc ¸ais par Loas et al. [17]. Ses propriétés psychométriques ont été évaluées dans des échantillons cliniques et chez des sujets sains et ont montré une bonne fiabilité en termes de cohérence interne et de stabilité testretest [16,18,19]. Comme il s’agit d’une échelle courte, elle s’avère être un instrument très utile pour mesurer l’anhédonie dans les domaines cliniques et de recherche (Annexe 1). Ces 14 items couvrent quatre domaines d’expérience hédonique : intérêts/passe-temps (items 1, 4 et 9), interaction sociale (items 2, 7, 8, 13, et 14), expérience sensorielle (items 5, 6, 11, et 12), et nourriture/boisson (items 3 et 10).
L’anhédonie dans la dépression Pour les réponses « Entièrement d’accord » ou « D’accord », l’item est affecté d’un score de 0, tandis que pour « pas d’accord » ou « tout à fait en désaccord » le score est de 1. Un score total peut être calculé en additionnant les réponses à chaque question, allant de 0 (absence d’anhédonie) à 14 (anhédonie complète). Un score de 3 ou plus indique une réduction significative de la capacité hédonique et semble présenter une certaine valeur discriminante entre témoins et patients cliniquement déprimés [16].
Évolution du concept. Distinction entre anhédonie de consommation et anhédonie de motivation Comme nous l’avons dit, dans sa définition originale Ribot décrit l’anhédonie comme « l’incapacité à éprouver du plaisir ». Cependant, il est apparu que le concept de plaisir est un construit complexe qui intègre, outre l’éprouvé subjectif de plaisir, des composantes distinctes : renforcement positif, désir et motivation, capacité cognitive à anticiper l’utilité d’un comportement, traitement de la récompense et mémoire de l’éprouvé de plaisir [20]. Ces données nouvelles ont récemment conduit à la spécification de deux catégories : l’anhédonie de consommation (apprécier ou liking), et l’anhédonie de motivation (vouloir ou wanting) [20]. Cette distinction semble pertinente cliniquement, puisque le psychiatre Klein a noté que de nombreux patients souffrant de dépression et d’anhédonie semblaient parvenir à profiter de récompenses qui étaient facilement disponibles, mais se plaignaient sincèrement de ne sentir aucune envie de les obtenir [6]. En 2006, dans le cadre du projet MIDAS pour l’amélioration de la qualité de l’évaluation diagnostique en psychiatrie, des résultats ont été publiés explorant les aspects psychométriques des critères du DSM dans un échantillon de 1523 sujets [21]. Des comparaisons « head-to-head » entre les critères actuels du DSM et des critères empiriques, tels que le sentiment d’impuissance et de désespoir, le manque de réactivité émotionnelle et la perte des envies (qui correspond à l’anhédonie motivationnelle) ont été effectuées. Or, ce dernier critère (la perte des envies) n’est pas présent de fac ¸on distincte dans le DSM, qui ne dissocie donc pas l’anhédonie de motivation de l’anhédonie de consommation (en accord avec les critères du DSM-IV, le SCID demande simplement aux patients s’ils « ont perdu l’intérêt ou le plaisir dans les choses qu’ils aiment en général » [22]). Étonnamment, le critère de perte des envies présentait une valeur prédictive très élevée pour le diagnostic de dépression (odd ratio = 50), se classant en seconde position juste après l’humeur triste (OR = 61) et nettement significativement plus élevé que l’anhédonie telle qu’évaluée par le SCID (OR = 29) [23]. Les questionnaires spécifiquement dévolus à l’évaluation de l’anhédonie [13,14,16] évaluent essentiellement l’expérience du plaisir en réponse à des stimuli positifs (anhédonie de consommation), mais n’évaluent pas ou peu l’anhédonie de motivation [20]. L’anhédonie, en dépit du fait qu’elle représente l’un des trois « noyaux durs » (Fig. 1) de la dépression, s’avère être une dimension relativement mal caractérisée dans la grande
299 majorité des études cliniques et thérapeutiques de l’épisode dépressif majeur.
Anhédonie et neurosciences Mesures expérimentales de l’hédonie Un grand nombre d’études ont exploré les réactions comportementales et électrophysiologiques des sujets déprimés face à des stimuli à valence affective positive (e.g., visages souriants) comme moyen d’étudier la nature des symptômes anhédoniques. Ces études ont globalement suggéré que les stimuli positifs entrainent moins de réactivité émotionnelle chez les personnes souffrant de dépression et s’avèrent moins susceptibles d’affecter positivement l’humeur par comparaison aux témoins [24—33]. Une autre explication est que les individus souffrant de dépression ont un émoussement qui englobe les émotions positives et négatives. Une méta-analyse portant sur 19 études ayant mesuré la réactivité émotionnelle positive et/ou négative chez 465 sujets déprimés venait à l’appui de cette hypothèse en montrant que la dépression était associée à une réactivité émotionnelle émoussée aux stimuli tant à valence positive qu’à valence négative [34]. Même si il est à noter que la taille de l’effet des stimuli positifs était à peu près le double de celui des stimuli négatifs, ces résultats suggèrent qu’au moins une partie de la baisse des réactions hédoniques peut être dûe à un émoussement affectif généralisé, plutôt qu’à un déficit spécifique dans la capacité à expérimenter le plaisir. D’autres études ont utilisé des paradigmes de renforcement positif pour explorer l’anhédonie dans la dépression. Il a été démontré que les patients déprimés n’orientent pas, à la différence des témoins, leurs réponses vers des stimuli récompensés [35—37]). Ces paradigmes utilisent des tâches de discrimination dans lesquelles les sujets doivent choisir entre deux stimuli A et B. Fait important, ces paradigmes utilisent une matrice de paiement (« pay-off ») qui fait en sorte que les sujets ont une meilleure récompense monétaire lorsqu’ils choisissent le stimulus A plutôt que le stimulus B. Les sujets sains développent un biais de réponse vers l’option qui augmente leurs gains, ce qui n’est pas le cas des patients déprimés. Ces derniers semblent se comporter comme si ils présentaient une insensibilité à l’information pertinente permettant d’obtenir une récompense. Ces études ne permettent pas de déterminer si ces déficits de renforcement sont secondaires à une baisse de la capacité hédonique, à une baisse de la motivation, ou aux deux, ou encore à une perturbation générale de l’apprentissage par renforcement.
Bases neurobiologiques de l’anhédonie Les études neurobiologiques de l’anhédonie ont principalement ciblé les substrats neuronaux dopaminergiques impliqués à la fois dans la capacité hédonique mais également dans la motivation et le renforcement [38]. Ces études ont suggéré l’implication de structures sous-corticales essentiellement situées dans le striatum ventral et le noyau caudé ainsi que des régions corticales (cortex orbitofrontal et ventromédial et cortex cingulaire antérieur). Parmi
300
R. Gaillard et al.
Modèle tridimensionnel de dépression
Affect négaf
Dépression Majeure
• Item 3 : J’ai eu l’impression que je ne pouvais pas sorr du cafard, même avec l’aide de ma famille et de mes amis • Item 6 : Je me suis sen(e) déprimé(e) • Item 14 : Je me suis sen(e) seul(e) • Item 18 : Je me suis sen(e) triste
Anhédonie
Dimension somaque
• Item 4 : J’ai eu le senment d’être aussi bien que les autres • Item 8 : J’ai été confiant(e) en l’avenir • Item 12 : J’ai été heureux(se) • Item 16 : J’ai profité de la vie
• Item 1 : J’ai été contrarié(e) par des choses qui d’habitude ne me dérangent pas • Item 2 : Je n’ai pas eu envie de manger, j’ai manqué d’appét • Item 5 : J’ai eu du mal à ma concentrer sur ce que je faisais • Item 7 : J’ai eu l’impression que toute acon me demandait un effort • Item 11 : Mon sommeil n’a pas été bon • Item 20 : J’ai manqué d’entrain
Figure 1 Modèle tridimensionnel de dépression. Adapté de Carleton et al. PLoS ONE 2013;8(3):e58067.
les voies dopaminergiques, c’est la voie mésolimbique qui a été la plus étroitement associée à la récompense, à la motivation et au renforcement du comportement permettant l’obtention de la récompense [20]. Ainsi, dans une tâche dans laquelle les participants doivent rapidement répondre à un indice lui-même précédé d’un indice déterminant si la réponse sera suivie d’un gain ou d’une perte d’argent, ou sans conséquence financière (tâche appelée « Monetary Incentive Delay Task »), Pizzagalli et al. [39] ont mis en évidence chez les patients déprimés une réduction de l’activité du striatum ventral et du noyau caudé lors d’un gain, interprétées respectivement comme une diminution de la réponse hédonique (striatum ventral) et une diminution du renforcement du comportement (noyau caudé). Ces modifications pourraient rendre compte d’un effet comportemental dans cette tâche : les patients déprimés n’accéléraient pas autant que les témoins leurs temps de réaction après un indice annonc ¸ant un gain. Dans la même tâche [40], il avait déjà été montré que les patients déprimés activaient leur cortex cingulaire antérieur pendant l’anticipation d’un gain, alors que c’est pendant l’anticipation d’une perte que les témoins l’activaient, cette différence suggérant un conflit dans l’anticipation d’une récompense pendant la dépression.
Dans une autre tâche de jeu d’argent [41], un déficit similaire d’activation du striatum ventral a été mis en évidence, avec des variations des temps de réaction négativement corrélées à l’anhédonie mesurée par la SHAPS. De même le déficit d’activation du striatum, du noyau caudé et de l’aire tegmentale ventrale dans une autre tâche corrèle avec l’anhédonie, mesurée sur le sous-score de la Beck Depression Inventory [42]. Ces résultats soulignent le rôle des structures souscorticales dopaminergiques dans l’anhédonie. De récentes études permettent de penser que ce déficit d’activation des structures sous-corticales dopaminergiques serait un marqueur trait plutôt qu’un marqueur état. Ainsi dans la tâche « Monetary Incentive Delay Task », des patients en rémission ont une hypoactivité des structures neurales impliquées dans la récompense lors du gain d’argent (cortex orbitofrontal) et une hyperactivité pendant son anticipation (cortex cingulaire antérieur) [43]. Toujours avec la même tâche, des jeunes filles âgées de dix à 14 ans à risque de dépression (mères ayant un trouble dépressif récurrent) ont des modifications du réseau activé par l’anticipation d’un gain, notamment dans le putamen [44]. De même des patients en rémission d’une dépression et ne recevant plus d’antidépresseur ont une réponse atténuée du striatum
L’anhédonie dans la dépression ventral, du noyau caudé et du cortex cingulaire à une récompense (du chocolat) même si leur évaluation du caractère hédonique de cette récompense ne diffère pas de celle des témoins [45]. Des jeunes âgés de 16 à 21 ans ayant un parent ayant eu un épisode dépressif majeur ont une moindre activation du cortex orbitofrontal par la récompense dans la même tâche [46]. Notons que chez l’adolescent déprimé on observe un déficit d’activation striatale pendant l’anticipation et l’obtention d’un gain et que ce déficit prédit le déficit d’émotions positives dans la vraie vie, mesurées par l’échelle PANAS-C impliquant notamment l’appel des patients sur leur téléphone portable à plusieurs moments de leur vie quotidienne pour sonder leurs émotions positives dans différents cadres [47]. Ces modifications sont prédictives de la réponse au traitement [48]. Chez l’adolescent non déprimé, on peut mettre en évidence des modifications de l’activité des structures neurales impliquées dans le codage de la récompense, modifications qui sont corrélées à la présence de symptômes dépressifs, ce résultat soulignant le rôle clé que ces structures pourraient jouer, au gré de leur évolution physiologique pendant la puberté, pour la survenue d’épisodes dépressifs caractérisés [49]. Concernant la physiologie de ce réseau cérébral de la récompense, il a été également montré que l’agrypnie ou privation de sommeil, dont on connaît les effets bénéfiques transitoires sur l’humeur, augmente chez le sujet sain la réactivité du striatum et de l’aire tegmentale ventrale à des images émotionnellement positives parallèlement à une propension accrue à évaluer ces dernières comme positives [50]. Enfin, pour ce qui est de la réponse au traitement antidépresseur, les résultats ne sont pas univoques. En effet, chez des patients déprimés le déficit d’activation striatale (région impliquée dans la récompense) dans l’anticipation d’un gain (exemple : « Monetary Incentive Delay Task ») est corrélé à l’anhédonie. Ce déficit se normalise sous traitement antidépresseur efficace par escitalopram [51]. À l’inverse, chez le sujet sain, sept jours de traitement par citalopram versus placebo réduisent l’activation striatale lors de la prise de chocolat [52]. Cet effet n’est pas identique avec tous les antidépresseurs : la reboxétine augmente l’activation du cortex orbitofrontal lors d’une récompense ; la duloxétine, toujours chez des sujets sains, administrée pendant 14 jours, augmente l’activation striatale par l’anticipation d’un gain [53]. Ces différences entre antidépresseurs pourraient être liées aux effets indirectement dopaminergiques de ces deux dernières molécules (reboxétine et duloxétine) via l’inhibition du transporteur de la noradrénaline (le transporteur de la noradrénaline faisant également office de transporteur de la dopamine dans le cortex préfrontal). Il faut toutefois souligner que le lien entre hédonie et transmission dopaminergique n’est pas univoque. Ainsi, des lésions synaptiques à la 6-OHDA qui détruisent les neurones dopaminergiques n’interfèrent pas avec les comportements hédoniques chez le rat [54]. Des résultats similaires ont été mis en évidence par l’administration de molécules antagonistes dopaminergiques : l’administration de neuroleptiques ne modifie pas non plus les comportements hédoniques [55,56]. Une autre confirmation expérimentale majeure provient d’études utilisant des souris génétiquement modifiées pour être incapable de synthétiser la dopamine [57] et qui continuent de préférer l’eau sucrée à l’eau pure. En résumé, ces résultats montrent que la transmission
301 dopaminergique n’est ni nécessaire ni suffisante pour que les réponses hédoniques, sur le mode de l’appréciation d’un stimulus agréable, c’est-à-dire de l’hédonie de consommation (liking), puissent se produire. Il a été également montré que la dopamine n’était pas systématiquement requise pour le renforcement d’un comportement conduisant à une récompense, de sorte que c’est finalement la motivation à réaliser un comportement (wanting) plutôt que l’appréciation d’une récompense (liking) ou les effets de cette récompense sur l’apprentissage par renforcement qui serait sous-tendue par la transmission dopaminergique [58]. Dans la continuité de ce constat, la neuroéconomie apporte de nouveaux paradigmes de recherche et de nouvelles perspectives de compréhension des mécanismes de l’anhédonie dépressive en s’intéressant à l’effort fourni pour obtenir une récompense, qui traduirait la motivation. Cléry-Melin et al. [59] ont utilisé un paradigme comportemental conc ¸u pour mesurer l’effort physique en réponse à la modulation émotionnelle (images émotionnellement positives ou négatives) et à la motivation incitative (récompense monétaire). Les patients déprimés font plus d’efforts lorsqu’on leur présente des images émotionnellement stimulantes (que la valence soit positive ou négative), mais, contrairement aux témoins sains, ne font pas plus d’effort face aux récompenses monétaires attendues. Pourtant, ces patients ont l’impression subjective qu’ils font plus d’effort face à une récompense plus importante. Ces résultats montrent que les substrats de la motivation à l’effort sont dissociés dans la dépression : seule la motivation par le gain attendu est déficitaire chez les patients déprimés, alors qu’une modulation émotionnelle continue d’affecter l’effort fourni. Dans une autre étude [60] des patients déprimés et des sujets sains doivent évaluer leur plaisir (liking) devant des bandes dessinées humoristiques ou non puis doivent fournir un effort (wanting) pour pouvoir voir ces bandes dessinées. Chez les sujets sains, le niveau de plaisir prédit l’effort fourni, alors que chez les patients déprimés les deux sont dissociés et c’est plutôt l’anticipation de plaisir d’une fac ¸on générale que la réalité du plaisir dans la tâche qui corrèle avec l’effort fourni. Il existerait donc dans la dépression une dissociation possible entre plaisir et motivation à obtenir ce plaisir.
Psychopharmacologie de l’anhédonie Si comme nous l’avons vu la dopamine ne rend pas compte de l’ensemble des dimensions de l’anhédonie et plus généralement de la dépression, elle semble néanmoins jouer un rôle clé. Tout récemment une étude menée chez l’animal et publiée dans Nature a permis de démontrer, notamment grâce à des techniques d’optogénétique son implication causale dans des comportements dépressifs induits par un stress chronique [61]. D’un point de vue pharmacologique, les psychostimulants (amphétamines, cocaïne) augmentent la concentration de dopamine intra-synaptique en inhibant le transporteur de la dopamine. Il n’existe aucune donnée clinique démontrant un effet spécifique des psychostimulants sur l’anhédonie chez les patients déprimés. Dans une revue de la littérature, Candy et al. [62] retrouvent un effet antidépresseur supérieur au placebo pour les thérapeutiques amphétaminiques,
302 mais la plupart ont des méthodologies anciennes ne permettant pas d’identifier un effet spécifique sur l’anhédonie. Seule l’étude de Robin et Wiseberg [63] met en évidence une « augmentation des champs d’intérêt » (range of interests) chez des déprimés traités par méthylphénidate comparativement au placebo. Le pramipexole agoniste dopaminergique à prédominance D3 utilisé dans le traitement de la maladie de Parkinson idiopathique, possède une activité antidépressive spécifique chez des patients parkinsoniens déprimés — non directement liée à son efficacité motrice — mais sans effet significatif sur l’anhédonie mesurée avec la SHAPS, dans une étude contre placebo [64]. Son utilisation en association soit à des tricycliques soit à des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS) chez des patients présentant une dépression résistante unipolaire ou bipolaire semble montrer un certain intérêt [65—68]. Ces différentes études utilisent soit l’HAM-D, soit la MADRS, ne permettant pas d’avoir une évaluation spécifique de l’effet sur l’anhédonie. Dans un petit échantillon (n = 39) de patients présentant une dépression unipolaire, cette molécule employée seule pendant six semaines ne montre aucune différence par rapport à l’escitalopram [69]. Les auteurs ont utilisé comme mesure de dépression la MADRS et l’HAM-D (17 items), ce qui ne permet pas d’évaluer un effet spécifique sur l’anhédonie. Les résultats de cette approche spécifiquement dopaminergique ont donc à ce jour une portée limitée. En ce qui concerne les antidépresseurs, à l’heure actuelle il n’existe pas d’approche pharmacologique bien définie pour le traitement de l’anhédonie dans la dépression. Les différentes classes de traitements n’agissent pas sur l’anhédonie de la même fac ¸on. Les IRS semblent susceptibles d’induire une réactivité réduite aux stimuli positifs et d’induire une baisse de l’hédonie [45,52,70] tandis que l’agomélatine, le bupropion, la reboxétine et la tianeptine n’entrainent pas cet effet indésirable [71—75]. Dans une étude portant sur 140 patients traités par la sertraline, Boyer et al. [76] ont mis en évidence un effet différé (entre j21 et j56 après le début du traitement) de cette molécule sur l’anhédonie qui suit l’action observée sur l’humeur dépressive (qui survient elle entre j7 et j21). Les auteurs rapportent ce résultat clinique à l’action dopaminergique spécifique de cette molécule, par inhibition de la recapture, ce qui pour eux la différencie des autres IRS. Le bupropion possède un effet d’inhibition de la recapture noradrénergique et dopaminergique. Des travaux précliniques montrent une action spécifique sur la dimension hédonique [20,77,78]. Dans une étude portant sur 19 patients, cette molécule a montré une efficacité spécifique sur l’anhédonie comparativement au placebo [79]. Ces résultats n’ont pas été répliqués dans une plus grande population. L’agomélatine possède une action agoniste MT1 et MT2 associée à une action d’antagoniste 5HT2c. C’est cette action spécifique qui provoquerait une augmentation de la libération dopaminergique chez l’animal au niveau préfrontal (mais pas au niveau du nucleus accumbens, structure impliquée dans les phénomènes d’addiction) [80]. Ce profil pharmacologique justifie une évaluation de l’efficacité spécifique de ce composé sur la dimension anhédonique de la dépression. Deux études (l’une sans comparateur,
R. Gaillard et al. l’autre contre venlafaxine) ont ainsi montré l’efficacité de l’agomélatine (significativement supérieure à la venlafaxine) sur la dimension d’anhédonie mesurée à l’aide de la SHAPS [81,82]. L’agomélatine semble donc avoir un effet spécifique sur l’anhédonie.
Conclusions L’anhédonie s’avère être une dimension relativement mal caractérisée dans la grande majorité des études cliniques et thérapeutiques de l’épisode dépressif majeur. Pourtant, il a été démontré que l’anhédonie peut précéder l’apparition d’un épisode dépressif majeur [83], influer sur sa gravité et prédire un mauvais pronostic et un risque suicidaire plus élevé [84], et constitue un symptôme résiduel courant après traitement [85]. Globalement, l’anhédonie demeure un symptôme difficile à traiter, et les pharmacothérapies de première ligne ne suffisent pas toujours à la corriger [45,69,86,87], ce qui devrait stimuler l’innovation thérapeutique et un meilleur profilage des molécules existantes vis-à-vis de cette dimension. Une meilleure caractérisation de l’anhédonie pourrait permettre de mieux identifier les patients déprimés en sousgroupes plus homogènes, ce qui pourrait conduire à une approche psychopharmacologique mieux définie et plus efficiente.
Déclaration d’intérêts Raphaël Gaillard déclare avoir participé à des interventions ponctuelles (essais cliniques, travaux scientifiques, activités de conseil, conférences, colloques) pour les entreprises AB Sciences, Euthérapie, Lilly, Lundbeck, Pierre Fabre, Servier ; David Gourion pour les entreprises Euthérapie, Lilly, Lundbeck, Pierre Fabre et les éditions Vidal ; Pierre-Michel Llorca pour les entreprises Euthérapie, Lilly, Lundbeck, Servier.
Annexe 1. Échelle d’anhédonie (Shaps, [16]) : les participants qui remplissent la Shaps sont invités à répondre en fonction de leur capacité à éprouver du plaisir « dans les derniers jours » - SHAPS - Échelle de plaisir de Snaith-Hamilton Ce questionnaire est destiné à mesurer votre capacités éprouver du plaisir, an cours de ces derniers jours. IL est important de lire très attentivement chaque énonce. Cochez une des cases pour précisez votre degré d’accord ou de désaccord pour chacun des énoncé. 1 - Mon émission de télévision ou de radio me procure beaucoup de plaisir Fortement en désaccord En désaccord D’accord Fortement d’accord
8 - J’apprécie beaucoup de paraître élégant(e) quand j’ai fait un effort pour soigner mon apparence Fortement en désaccord En désaccord D’accord Fortement d’accord
L’anhédonie dans la dépression
303
Annexe 1 (Suite ) 2 - J’apprécie beaucoup d’être avec ma famille ou avec des amis intimes Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
9 - J’aime beaucoup lire un livre, un magazine ou un journal Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
3 - Je trouve du plaisir dans mes hobbies ou passe-temps
10 - J’apprécie beaucoup une tasse de thé ou de café ou un verre de ma boisson favorite Fortement en désaccord En désaccord D’accord Fortement d’accord
Fortement en désaccord En désaccord D’accord Fortement d’accord
4 - Je suis capable d’apprécier mon plat favori
Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
11 - Je trouve du plaisir, dans de petits riens tels que par exemple, une journée fortement ensoleillée ou un coup de téléphone d’un ami Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
5 - J’aime beaucoup prendre un bain chaud ou une douche rafraîchissante Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
12 - Je suis capable d’apprécier un très beau paysage ou une très belle vue Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
6 - Je trouve du plaisir dans le parfum des fleurs ou dans l’odeur d’une fraîche brise de mer ou du pain fraîchement cuit Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
13 - Je prends plaisir à aider les autres
7 - J’aime beaucoup voir des visais souriants autour de moi Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
14 - Je ressens du plaisir à recevoir des éloges d’autres personnes Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
Tout à fait d’accord D’accord En désaccord Fortement en désaccord
Instructions de cotations : chaque question « d’accord » est cotée 0 et chaque question « en désaccord » est cotée 1, le score total varie entre 0 et 14.
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