Les infections transmissibles de la mère à l’enfant pendant la grossesse

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Les infections transmissibles de la mère à l’enfant pendant la grossesse Les principaux agents infectieux responsables d’infections maternofœtales sont le virus de la rubéole, le toxoplasme, le virus de la varicelle, le cytomégalovirus et le parvovirus B19. Le diagnostic de l’infection maternelle et celui de l’infection fœtale ont été améliorés. Leur prise en charge relève de centres spécialisés de médecine fœtale.

La rubéole Selon la législation en vigueur, un dépistage de la rubéole doit être proposé systématiquement aux femmes enceintes. Le premier objectif est de dépister les femmes qui ne sont pas immunisées et donc, candidates à la vaccination. Celle-ci doit être proposée lors de la consultation préconceptionnelle sous couvert d’une contraception efficace, 1 à 3 mois avant la conception, et en post-partum immédiat (recommandation de la HAS : si possible avant la sortie de la maternité ; il n’y a pas de contre-indication pendant l’allaitement). En France, 95 % des femmes sont immunisées ; en dépit d’une vaccination efficace, le virus continue de circuler, même si le nombre de rubéoles congénitales en France reste faible : environ 10 cas par an. Les infections survenant chez la mère jusqu’à la 18e semaine d’aménorrhée (SA) peuvent être responsables de malformations fœtales sévères, neurologiques, ophtalmologiques, auditives et cardiaques ; entre la 18e et la 20e SA, persiste un risque (faible) d’atteinte auditive. Au-delà, le risque d’atteinte du fœtus est quasi-nul. La HAS, dans son rapport d’évaluation de décembre 2009, recommande que soit proposée, chez les femmes enceintes séronégatives, une nouvelle sérologie rubéolique à 20 SA, à la recherche d’une éventuelle séroconversion. Le diagnostic prénatal d’une infection s’effectue par la recherche des IgM spécifiques dans le sang fœtal, prélevé à partir de la 22e SA, sous contrôle échographique et/ou la recherche du génome viral dans le liquide amniotique prélevé par amniocentèse après la 18e SA, au minimum 6 semaines après la séroconversion. Les nouveau-nés infectés excrètent du virus dans les sécrétions pharyngées, les urines et les selles durant des mois. Le diagnostic d’une infection post-natale est réalisé par la recherche des IgM spécifiques dans le sang du nouveau-né, par une technique d’immunocapture. Le virus ou son génome peut également être recherché dans les urines, les sécrétions pharyngées ou le liquide céphalorachidien, par culture virale ou PCR. L’entourage de ces enfants doit être vacciné.

La toxoplasmose Comme pour la rubéole, le dépistage de la toxoplasmose doit être proposé systématiquement aux femmes enceintes ; celles qui ne sont pas immunisées bénéficient d’une sérologie toxoplasmose mensuelle. En France, plus de 50 % des femmes ne sont pas immunisées et environ 1 000 cas de toxoplas-

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mose surviennent chez les femmes enceintes chaque année. Ils sont à l’origine de moins de 300 cas d’infections congénitales par an dont la majorité est asymptomatique. Lorsqu’elles sont symptomatiques, les infections fœtales se manifestent par une choriorétinite, une hydrocéphalie, des calcifications intracrâniennes. Lorsqu’une infection est diagnostiquée chez une femme enceinte, celle-ci reçoit de la spiramycine jusqu’à l’accouchement si l’amniocentèse est négative (amniocentèse à partir de 18 SA avec recherche du toxoplasme par PCR) et une surveillance échographique est mise en place. Lorsque l’infection fœtale est avérée, la spiramycine est remplacée par l’association pyriméthamine-sulfamide jusqu’à l’accouchement. En cas d’anomalies échographiques, une interruption de grossesse est discutée.

Conseils C onseils d’hygièn ne pour les femmes enceintes séronégatives po our la toxoplasmose (AFSSA, 2005)

Le cytomégalovirus (CMV) Sur 750 000 grossesses évolutives chaque année en France, environ 413 000 femmes enceintes (45 %) sont séronégatives pour le CMV. Le pourcentage de séroconversion pendant la grossesse est de 1,2 % soit 5 000 séroconversions annuelles. La transmission maternofœtale étant d’environ 40 %, environ 2 000 infections congénitales sont dénombrées. Dans environ 10 % des cas, les enfants sont symptomatiques et dans 90 % des cas, asymptomatiques. Parmi ces derniers, environ 10 % auront toutefois des séquelles auditives, en général unilatérales et modérées. Chez les enfants symptomatiques, les atteintes sont essentiellement cérébrales avec microcéphalie,

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retard mental, surdité sévère, choriorétinite, ou maladie des inclusions cytomégaliques (thrombopénie sévère, hépatite, troubles neurologiques), pouvant entraîner des séquelles graves ou le décès. Au total, environ 300 enfants sont atteints chaque année en France après infection maternelle. En France, le dépistage de la séroconversion CMV au cours de la grossesse n’est pas systématique, mais les pouvoirs publics insistent sur la nécessité d’une information à délivrer aux femmes enceintes séronégatives. Les populations les plus exposées sont les mamans d’enfants gardés en collectivité, les personnels de crèche ou de services de pédiatrie et les instituteurs. Le CMV persiste 48 h sur les jouets en plastique et se transmet facilement par la toux, les crachats et lors des changements de couches. Les mesures d’hygiène à conseiller sont de se laver les mains régulièrement, de ne pas embrasser de jeune enfant sur la bouche, et de ne pas boire ou manger avec les ustensiles de l’enfant. Une séroconversion observée chez la femme enceinte doit conduire à une prise en charge spécialisée par un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal (DPN). Il faut tenter de dater la séroconversion par la mesure de l’indice d’avidité. Une amniocentèse peut être proposée à partir de 20 SA et une PCR réalisée sur liquide amniotique. En cas de primo-infection péri ou post-conceptionnelle avérée, un suivi échographique mensuel dans un centre de DPN, éventuellement associé à une IRM cérébrale fœtale, est mis en place.

La varicelle Plus de 90 %  des femmes en France sont immunisées contre la varicelle. Actuellement sont dénombrés 100 à 300 cas annuels d’infection par le virus de la varicelle pendant la grossesse. Si la varicelle est contractée par la mère avant 24 SA, elle peut être à l’origine de syndrome malformatif chez le fœtus (1 à 2 % des cas) avec anomalies cutanées, neurologiques, musculo-squelettiques, gastro-intestinales, génito-urinaires… Un traitement par valaciclovir est mis en route et un suivi échographique très soutenu est proposé ; un diagnostic anténatal peut être réalisé (mise en évidence du génome viral par PCR dans le liquide amniotique). En cas d’infection survenant chez la mère de 5 jours avant à 2 jours après l’accouchement, les

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enfants peuvent développer une varicelle congénitale néo-natale grave. Un traitement par valaciclovir est débuté chez la mère, éventuellement associé à des gammaglobulines. Le bébé sera systématiquement traité à la naissance.

Le parvovirus B19 Environ 1 femme sur 2 en âge de procréer n’est pas immunisée contre le parvovirus B19. L’incidence de la primo-infection chez la femme enceinte est de 1 % et la transmission de l’infection au fœtus, de l’ordre de 30 %. L’infection maternelle par le parvovirus B19 est souvent asymptomatique. Le diagnostic de la primo-infection maternelle est sérologique ; il repose sur la mise en évidence des IgG et des IgM spécifiques chez la mère. Les IgM apparaissent environ 15 jours après la contamination et persistent en moyenne 3 à 4 mois. Les IgG deviennent détectables environ 1 semaine après les IgM et durent très longtemps. Attention toutefois, il existe un délai de 6  à 8 semaines entre la primo-infection chez la mère et le moment où le fœtus se met en anasarque. De fait, les IgM spécifiques peuvent avoir disparu au moment de l’observation des anomalies échographiques. Le diagnostic de l’infection fœtale utilise une technique PCR dans le sang fœtal ou le liquide amniotique. Lorsqu’elle est avérée, un suivi échographique tous les 8 à 15 jours pendant 8 à 12 semaines est recommandé. L’infection est plus grave pour le fœtus lorsqu’elle a été contractée avant 24 SA (2 à 10 % des cas), l’exposant à un risque d’anasarque ou d’anémie aiguë pouvant entraîner le décès in utero. Le recours à l’exsanguino-transfusion in utero peut être nécessaire dans les cas sévères. Pour toutes les infections citées, les femmes doivent être adressées dans des centres de médecine fœtale pour des échographies ciblées et une prise en charge globale. Il existe en France une vingtaine de laboratoires pouvant réaliser des diagnostics biologiques anténataux. Aujourd’hui, il apparaît nécessaire d’insister sur la prévention, notamment de généraliser la vaccination de la rubéole (certainement) et de la varicelle (recommandée chez les femmes en âge de procréer séronégatives). Le rôle d’information des biologistes, en collaboration avec les médecins, est essentiel. | Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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Pour en savoir plus : • Surveillance sérologique et prévention de la toxoplasmose et de la rubéole au cours de la grossesse et dépistage prénatal de l’hépatite B – pertinence des modalités de réalisation. HAS, recommandations Santé publique, 2009. • Villard O, Jung-Etienne J, Cimon B, et al, et le réseau du Centre national de référence de la toxoplasmose. Sérodiagnostic de la toxoplasmose en 2010 : conduite à tenir et interprétation en fonction des profils sérologiques obtenues par les méthodes de dépistage. Feuill Biol 2011;298:43-9. • RÉVIR 2e édition 2007, Vivactis Plus Editions.

CAROLE EMILE

| Varicelle zona virus.

Source D’après une communication de Christelle Vauloup-Fellous, Hôpital Antoine Béclère, Clamart, lors d’une conférence de presse organisée par Roche Diagnostics, Paris, novembre 2011 (cycle de conférences 2011-2012).

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