Pathologie Biologie 53 (2005) 356–363 http://france.elsevier.com/direct/PATBIO/
Revue générale
Les isoprostanes, biomarqueurs de peroxydation lipidique chez l’homme. Partie 2 : méthodes de quantification Isoprostanes, biomarkers of lipid peroxidation in humans. Part 2: Quantification methods O. Berdeaux a, O. Scruel a, T. Durand b, J.-L. Cracowski c,* a Unité de nutrition lipidique, Inra, 17, rue Sully, BP 86510, 21065 Dijon cedex, France UMR CNRS, 5074, faculté de pharmacie, université Montpellier I, 15, avenue Ch.-Flahault, BP 14491, 34093 Montpellier cedex 05, France c Laboratoire de pharmacologie, HP2, EA3745, faculté de médecine de Grenoble, Domaine-de-la-Merci, 38700 La-Tronche, Grenoble, France b
Reçu le 23 septembre 2004 ; accepté le 18 octobre 2004
Résumé Les isoprostanes sont une nouvelle classe de molécules naturelles formées in vivo par un mécanisme radicalaire non enzymatique de peroxydation lipidique des acides gras polyinsaturés. La quantification de ces composés comme marqueur de peroxydation lipidique in vivo apparaît comme une avancée importante dans l’exploration du rôle du stress oxydant en pathologie humaine. Un grand nombre de travaux a été réalisé dans le domaine de l’analyse des isoprostanes. Cependant, ces travaux diffèrent dans la préparation de l’échantillon comme pour le choix de la technique analytique et aucune méthode standard n’émerge. Les procédures d’extraction et de purification qui nécessitent une succession de techniques chromatographiques, sont longues, difficiles à mettre en œuvre et ne donnent que de faibles taux de récupération. Par ailleurs, deux méthodes sont couramment utilisées pour la quantification des isoprostanes : la spectrométrie de masse et les méthodes immunologiques. L’objectif de cette revue et de faire le point sur les différentes méthodes publiées à ce jour sur l’extraction, la purification et l’analyse des isoprostanes dans les différents échantillons biologiques. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract The isoprostanes are a new class of natural products produced in vivo by a non-enzymatic free-radical-induced peroxidation of polyunsaturated fatty acids. The quantification of these compounds represents a reliable and useful index of lipid peroxidation and oxidant stress in vivo. Then, a large amount of works has been done in the field of isoprostane analysis, but till now, no standardized method seems to emerge. Indeed, described methodologies differ either in the sample preparation steps or in the detection techniques or both. Extraction and purification procedures are often critical and time-consuming, requiring successive chromatographic steps and these procedures lead to a substantial loose of target compounds. Moreover, two main analytical approaches have been adopted for IsoP measurement: immunological methods or mass spectrometry. Some discussion about the methodology used for measurement of isoprostane is important. This review will aim to present and compare different methods developed nowadays for extraction, purification and analysis of F2-iPs in various biological samples. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Isoprostane ; Neuroprostane ; Peroxydation lipidique ; Analyse quantitative ; Spectrométrie de masse ; Méthodes immunologiques Keywords: Isoprostane; Neuroprostane; Lipid peroxidation; Quantitative analysis; Mass spectrometry; Immunoassay
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (J.-L. Cracowski). 0369-8114/$ - see front matter © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.patbio.2004.10.006
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1. Introduction Quantifier précisément et spécifiquement les F2Isoprostanes (F2-IsoP) est devenu durant ces dernières années un enjeu important visant à déterminer l’importance d’une attaque oxydante et, ainsi à définir un index de peroxydation lipidique dans un but diagnostique et pronostique. En effet, il est important de pouvoir différencier de façon non ambiguë un niveau d’oxydation basal (physiologique) d’un état pathologique. Théoriquement, 64 isomères différents peuvent se former au cours de l’oxydation radicalaire de l’acide arachidonique [1]. Cependant tous ne se forment pas de la même façon au cours de la peroxydation lipidique. Parmi les F2-IsoP observées dans les fluides biologiques, la 15-F2t-isoP, anciennement appelée 8-isoprostaglandine F2a, est une des formes les plus abondantes et est souvent utilisée comme index de mesure des F2-IsoP. C’est sans nul doute la F2-IsoP la plus étudiée dans la littérature. La raison de ce succès par rapport à d’autres isomères est due au fait qu’elle est la première à avoir été commercialisé comme standard, permettant ainsi de développer les techniques analytiques pour son dosage. Les isoprostanes de la série 15 sont produites en même quantité que les autres isoformes [2], mais ne sont pas les plus abondantes en concentrations, les F2-IsoP de la série 5 étant détectées à des concentrations plus élevées [3,4]. En chromatographie, les isoprostanes possèdent des propriétés distinctes des prostaglandines, qui sont des analogues formés exclusivement par voie enzymatique [5]. Toutefois, en raison de propriétés similaires de certains, leurs séparations et donc leurs quantifications par HPLC ou GC, est difficile voir impossible [6]. Aussi, afin de pouvoir mesurer spécifiquement une IsoP, telle que la 15-F2t-IsoP par exemple, il est nécessaire d’avoir recours à un certain nombre d’étapes chromatographiques successives ou de faire appel à des extractions et/ou purification spécifiques par immunoaffinité [7,8]. Cependant, il est plus approprié de faire un dosage de la totalité des F2-IsoP plutôt que d’essayer de mesurer spécifiquement le taux de la 15-F2t-isoP [9], compte tenu de l’absence de différence dans les mécanismes de formation des différentes isoformes.
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Deux méthodes principales permettent de quantifier les isoprostanes dans les fluides biologiques : la spectrométrie de masse et les méthodes immunologiques.
2. La Spectrométrie de masse 2.1. La chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse La plupart des protocoles utilisés pour la détection et la quantification des F2-IsoP dans des fluides biologiques sont fondés sur la méthode décrite par Morrow et al. [10] laquelle utilise la chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse en mode « ionisation chimique négative » (GC-NICI-MS) [8] [11]. La GC-NICI-MS est une technique spectrométrique très sensible et spécifique, bien adaptée à la quantification des icosanoides en général dans des matrices biologiques [12]. La dérivation de l’acide carboxylique en ester pentafluorobenzyle (ester PFB) est la clé de cette sensibilité. En effet, l’ionisation chimique négative des dérivés PFB-TMS des icosanoides produit des spectres de masse pauvres en fragments et dominés par un ion intense (Fig. 1). Cet ion intense correspond à l’anion carboxylate [M-PFB]- obtenu par la rupture du radical PFB hautement stabilisé après la capture d’un électron par le groupement PFB très fortement électronégatif. Dans les spectres de masse des F2-IsoP, le pic m/z 569 est caractéristique de la formation de cet anion carboxylate [M-PFB]–. La quantification des F2-IsoP se fait en sélectionnant et en mesurant l’aire de l’ion [M-PFB]– à m/z 569 (mode SIM) par comparaison à la mesure de l’aire de l’ion m/z 573 issus du spectre de masse de la 15-F2t-IsoP deutériée (d4), ajoutée comme standard interne. Cette technique a permis de doser les F2-IsoP dans différents fluides biologiques (plasma, urine, fraction de LDL) [5,13–15] ainsi que dans des tissus (foie, rétine) [16,17]. Dans la grande majorité des travaux utilisant la GC-NICI-MS, les auteurs ont préféré la dérivation des trois fonctions hydroxy en éther triméthylsilyle (TMS) à d’autres types de dérivés. Cependant on rencontre quelques travaux dans lesquels les auteurs ont choisi
Fig. 1. Spectre de masse en mode NICI de la 15-F2t-IsoP dérivée en esters pentafluorobenzyles et éthers triméthylsilyles.
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d’utiliser des éthers tert-butyldiméthylsilyle (TBDMS) [18,19]. Mais ceux-ci ne semblent présenter aucun avantage par rapport aux éthers TMS, et de plus, leur préparation nécessite un temps de réaction beaucoup plus long à température ambiante ou l’utilisation de températures plus élevées risquant de dégrader le produit [9]. En chromatographie en phase gazeuse (GC), il est possible de séparer les principaux épimères de la PGF2a des différentes F2-IsoP [9], excepté la 9b-PGF2a qui coélue avec un certain nombre d’IsoP dont la 15-F2t-isoP. Toutefois, cette technique ne permet pas de distinguer sans ambiguïté la 15-F2t-isoP des autres F2-IsoP. Il faut également souligner que seule une faible partie des isomères de la F2-IsoP sont disponibles pour servir de référents. Cette technique semble donc être plus adaptée à un dosage de la totalité des F2-IsoP plutôt qu’à un dosage spécifique de la 15-F2t-isoP. Afin d’augmenter la sélectivité et la sensibilité de la GCNICI-MS pour la détection des F2-IsoP, d’autres méthodes ont été développées en utilisant la GC-NICI-MS/MS à l’aide d’un spectromètre de masse triple quadripôle [20–22] ou d’un spectromètre de masse à trappe d’ions [23]. Le spectre de masse MS/MS de la 15-F2t-isoP obtenu après « dissociation induite par collision » du fragment [M-PFB]- est présenté dans la Fig. 2. Ce spectre montre que l’ion à m/z 569 génère un fragment fils à m/z 299 correspondant à la perte de trois groupements triméthylsilanol ((CH3)3SiOH) de l’anion carboxylate. Cette transition 569 à 299 est utilisée pour la quantification des IsoP dans des échantillons biologiques complexes. Dans ce cas, la 15-F2t-isoP-d4, utilisée comme standard interne, est mesurée en sélectionnant la transition 573 à 303. Cette technique permet d’augmenter significativement la limite de détection et de quantification des F2-IsoP dans le plasma [23]. En revanche, la GC-NICIMS/MS ne permet pas de faire la distinction entre les F2-IsoP issus des 4 différentes familles. En effet, le spectre de masse MS/MS est dominé par les ions issus de la perte de un, deux
ou trois groupes (CH3)3SiOH de l’anion carboxylate, communs à tous les isomères de F2-IsoP mais aussi aux prostaglandines, ce qui ne permet donc aucune conclusion quant aux formes structurales (Lawson et al., 1999). À l’inverse, l’utilisation de la GC-EI-MS sur ces même dérivés PFBTMS d’IsoP peut être un bon outil pour la différentiation des quatre familles de F2-IsoP [2] mais n’est pas adaptée à la quantification par manque de sensibilité. Bessard et al. ont développé une méthode pour la quantification des F2-IsoP dans les urines utilisant la GC-MS en mode « impact électronique » (GC-EI-MS) [24]. Cette méthode a pour avantage de simplifier l’étape de dérivation. En effet, la fonction acide des F2-IsoP est dérivée en ester TMS et les fonctions alcools en éther TMS au cours d’une seule étape de silylation et sans purification ultérieure (Fig. 3). Le spectre obtenu est beaucoup plus complexe qu’en GCNICI-MS mais possède des ions spécifiques aux F2-IsoP issus de la famille 15. Ainsi, l’ion à m/z 481 ([M-C5H11TMSOH]+) a été sélectionné et son aire mesurée pour la quantification de la 15-F2t-isoP dans les urines. Du fait de cette fragmentation importante, cette méthode en GC-EIMS, bien que beaucoup moins sensible que la GC-NICI-MS, se trouve être beaucoup plus spécifique pour le dosage des F2-IsoP de la famille 15. Selon les auteurs, cette méthode pourrait également se révéler intéressante pour le dosage spécifique des F2-IsoP issues de chacune des trois autres familles, et en particulier pour la famille 5. Enfin, Obata et al. proposent une autre méthode GCEI-MS pour le dosage des F2-IsoP dans l’urine [25,26] ou dans le plasma [27]. Dans cette méthode, la fonction acide des F2-IsoP est dérivée en ester méthylique et les fonctions alcools en éthers diméthylisopropylsilyl (DmiPSi) selon une méthode déjà utilisée pour le dosages d’autres icosanoides [25,26]. Ces dérivés produisent un spectre complexe dans lequel le fragment [M-43]+ à m/z 625,4 est sélectionné et mesuré pour la quantification de la 15-F2t-isoP par comparai-
Fig. 2. Spectre de masse MS/MS de la 15-F2t-isoP obtenu après « dissociation induite par collision » du fragment [M-PFB]-.
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Fig. 3. Spectre de masse en mode impact électronique de la 15-F2t-IsoP dérivées en éthers et ester triméthylsilyles.
son à la mesure de l’ion m/z 629,4 issus du spectre de masse de la d4-15-F2t-IsoP. Cette méthode n’est pas plus spécifique à une famille d’IsoP que la GC-NICI-MS. 2.2. La chromatographie liquide haute performance couplée à la spectrométrie de masse Des techniques de chromatographie liquide haute performance couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS) ont aussi été appliquées à l’analyse des F2-IsoP. En particulier, les progrès réalisés dans l’ionisation électrospray (ESI) ont rendu la LC-ESI-MS et LC-ESI-MS/MS comme des méthodes alternatives à la GC-MS [28]. Ohashi et al. [29] ont utilisé
la LC-ESI-MS dans le dosage de la 15-F2t-isoP dans le plasma et l’urine de fumeurs [29] et l’ont comparé à une méthode GC-MS en mode NCI. La LC-ESI-MS/MS ajoute un niveau supplémentaire de sélectivité, permettant une séparation virtuelle des quatre classes d’IsoP dans les urines [3,30]. Ces travaux ont permis de montrer que les F2-IsoP de la série 5 et plus particulièrement les 8,12-iso-5-F2t-IsoP et 5-epi-8,12-iso-5-F2t-IsoP étaient les F2-isoP les plus abondantes dans les urines humaines, par comparaison à la 15-F2tIsoP. En revanche, cette technique est légèrement moins sensible que la GC-MS et ne permet pas de séparer tous les isomères d’une même famille. Elle présente cependant
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l’avantage de simplifier la préparation de l’échantillon et ne nécessite pas de dérivation [4] ce qui se traduit par un bien meilleur rendement d’extraction des F2-IsoP compensant en partie la perte de sensibilité par rapport à la GC-NICI-MS. La spectrométrie de masse couplée à la GC a prouvé qu’elle était à ce jour, la technique la plus efficace pour le dosage des F2-IsoP dans des échantillons biologiques. Cependant avec le développement de la LC-MS/MS (méthode de plus en plus sensible, accessible et moins coûteux), celle-ci devrait devenir une méthode important pour l’analyse des F2-IsoP, en particulier pour les séries de dosage en routine. Cette technique sera probablement aussi très importante pour le développement de méthodes analytiques pour le dosage des neuroprostanes (NP). 3. Méthodes immunologiques Parallèlement à la spectrométrie de masse, des méthodes immunologiques ont été développées pour doser les F2-IsoP. Ces dosages immunoenzymatiques (Elisa : enzyme-linked immunosorbent assay) [19] ou radio-immunologiques (RIA) [31] présentent l’avantage d’être simples à mettre en œuvre et rapides. La commercialisation de kits Elisa spécifiques aux F2-IsoP a donc rendu leur dosage aisément accessible et un grand nombre d’études ont été menées en utilisant cette technique. Cependant la précision et l’efficacité des dosages immunologiques sont souvent compromises par des interférences avec des substances présentes dans les fluides biologiques étudiés [32]. Les simples purifications par extraction, couramment utilisées dans la plupart des protocoles, ont pour effet de concentrer ces substances interférentes et ne solutionnent donc en rien ce problème. Il semble donc nécessaire de purifier les échantillons par d’autres techniques telles que la CCM ou l’HPLC avant les dosages immunologiques. Certains protocoles prévoient une prépurification de l’échantillon avant le dosage en utilisant des cartouches d’extraction par chromatographie d’immunoaffinité. Si ce type de préparation d’échantillons permet de supprimer une partie des interférences, on est en droit de se poser la question de la réactivité croisée avec les différents isomères de F2-IsoP, les prostaglandines, mais aussi avec les métabolites de ces différents composés, dont la structure sera proche de celle des composés parents. Un travail de Proudfoot et al. a comparé les résultats obtenus par la GC-MS et l’EIA lors de mesures de F2-IsoP dans l’urine. Ces auteurs ont conclu que les deux techniques n’étaient pas équivalentes et que la comparaison des résultats n’était pas appropriée. En effet, les mesures par GC-MS estiment une surface de pic regroupant probablement plusieurs isomères alors que la mesure par EIA concerne, en principe, une isoprostane spécifique. 4. Préparation d’échantillons La spécificité et la sensibilité de la technique analytique est un point très important dans la quantification des F2-IsoP.
Cependant, la détermination du taux de F2-IsoP dans un grand nombre d’études cliniques a souvent été limitée par les étapes d’extraction et de purification nécessaires avant l’étape analytique proprement dite. Dans les urines, les isoprostanes se trouvent uniquement sous la forme libre et peuvent donc être extraites directement de l’échantillon. En revanche dans les autres fluides biologiques et dans les extraits de tissus, les isoprostanes sont essentiellement estérifiées aux phopholipides. On ne peut les extraire de l’échantillon qu’après une étape d’hydrolyse en catalyse alcaline ou enzymatique avec la phospholipase A2 [33]. Il est alors possible de différentier dans ces échantillons le taux d’isoprostanes qui se trouvent sous forme libre et qui peuvent être extraites directement, de celles qui sont estérifiées et qui nécessitent donc une étape d’hydrolyse avant l’étape d’extraction. Dans ce dernier cas, le dosage est un dosage total des F2-IsoP libres et estérifiées, le taux des F2-IsoP estérifiées sera déterminé en faisant la différence entre F2-IsoP totales et F2-IsoP libres. Certains échantillons comme les LDL, les tissus ou certains fluides biologiques nécessitent une étape d’extraction de la fraction lipidique par solvant avant l’isolation des F2-IsoP (Morrow et al., 1999) [16]. Le choix des solvants d’extraction est important afin d’obtenir le meilleur rendement d’extraction mais l’ajustement du pH de la phase aqueuse jouera également un rôle prépondérant pour l’extraction de F2-IsoP sous forme libre. La plupart des protocoles utilisés pour la purification des F2-IsoP dans des fluides biologiques avant une analyse en GC-MS sont fondés sur la méthode décrite par Morrow et al. [10], qui utilise la combinaison de deux étapes d’extraction sur phase solide (SPE), sur cartouche phase inverse C18 et cartouche de silice, et de la chromatographie sur couche mince (CCM). Les rendements de récupération des F2-IsoP urinaires avec cette méthode sont faibles, de l’ordre de 20– 30 %. Nourooz-Zadeh et al. ont modifié la méthode en remplaçant la cartouche de silice et la CCM par une cartouche NH2 ce qui a permis d’accroître considérablement le rendement de récupération des F2-IsoP dans les urines et plasma à 75 % [13,34]. Les pertes de produit qui ont essentiellement lieu au cours de l’étape CCM sont alors largement réduites. Récemment, Zhao et al. ont décrit une méthode de purification rapide et simple faisant appel à une seule étape SPE utilisant des cartouches de type Oasis HLB, phase inverse [35] et qui permet d’obtenir un rendement de 89 % de récupération des F2-IsoP dans le plasma. Certaines méthodes utilisent l’HPLC pour la purification les F2-IsoP dans les urines et/ou plasmas avant leurs analyses en GC-MS, en la combinant soit avec deux extractions sur cartouches C18 et silice [9], soit sur une seule cartouche C18 [22,36]. Walter a développé une méthode par l’HPLC sur colonne NH2 pour remplacer toutes les étapes de purification par SPE et CCM [11]. On remarque par cette description que le choix des méthodes de préparation d’échantillons est vaste mais qu’elles sont également peu aisées à réaliser. Tenant compte d’un rapport efficacité-temps de manipulation de plus en plus important
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dans les laboratoires, la tentation est grande d’aller aux techniques les plus simples mais les biais peuvent être alors important. Les nouvelles phases de SPE semblent prometteuses mais ne solutionnent probablement pas tout ; la purification des F2-IsoP après leur dérivation pourrait être une piste à (ré)-explorer attentivement.
5. Précautions associées avec la mesure des isoprostanes Les F2-IsoP peuvent être formées au cours de l’autoxydation de l’acide arachidonique dans le plasma [10,37], il est donc impératif de prendre un maximum de précaution au cours du prélèvement, du stockage et de la préparation de l’échantillon pour éviter toute formation artéfactuelle d’IsoP. Le stockage des échantillons doit être fait à –70 °C [33]. En ce qui concerne les échantillons d’urine, le problème d’autoxydation ne se pose pas, les urines contiennent de très faibles quantités de lipides [33]. Ces échantillons ne nécessitent donc pas autant de précautions que d’autres liquides biologiques ou organes, beaucoup plus riches en lipides. En plus des précautions à prendre lors du stockage, il est nécessaire de faire attention au cours des étapes de préparation de l’échantillon telles que l’étape d’extraction, l’étape d’hydrolyse lorsqu’il y a analyse des F2-IsoP estérifiées et enfin pendant les étapes de purification des F2-IsoP. L’ajout d’un antioxydant tel que le BHT et/ou la triphénylphosphine dans l’échantillon plasmatique et l’utilisation de l’azote pour les évaporations de solvants ne sont pas indispensables, mais peuvent être utiles en cas de délai entre le prélèvement et le stockage des échantillons [33,38].
6. Mesure des métabolites des isoprostanes Les F2-IsoP, et en particulier la 15-F2t-isoP, sont largement utilisées comme indice de la peroxydation lipidique in vivo. L’ajout de la quantification de leurs métabolites permet d’avoir un indice intégré de la production d’isoprostane sur une période de temps prolongée. Il est donc important de développer des méthodes analytiques permettant, par exemple, le dosage de la 15-F2t-isoP et de ses principaux métabolites dans l’urine. À ce jour, les seuls métabolites de F2-IsoP identifiés sont ceux issus de la 15-F2t-isoP. Le 2,3-Dinor-5,6-dihydro-15F2t-isoP a été décrit comme étant le seul métabolite de la 15-F2t-isoP chez l’homme [39]. Cependant, plus récemment, Chiabrando et al. ont identifié la présence de la 2,3-Dinor-15F2t-isoP ainsi que de la 2,3-dinor-5,6-dihydro-15-F2t-isoP dans l’urine humaine ou de rat [40]. Dans cette même étude, les auteurs ont détecté dans des hépatocytes de rat, en plus de ces deux métabolites, la présence du 2,3,4,5-tetranor-15-F2tisoP. Enfin, la 13,14-dihydro-15-keto-2,3,4,5-tetranor-15F2t-isoP a été identifiée comme étant le métabolite urinaire le plus important de la 15-F2t-isoP chez le lapin [31]. Quelques
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travaux proposent des méthodes pour le dosage par GCNICI-MS de la 2,3-dinor-5,6-dihydro-15-F2t-isoP dans l’urine chez l’homme [41–43]. Schwedhelm et al. proposent deux méthodes chromatoghraphiques qui permettent une quantification des dinor-dihydro F2-IsoP dans l’urine par GC-NICI-MS ou GC-NICI-MS/MS [36]. La première est une combinaison de la CCM avec la GC-NICI-MS/MS qui permet une quantification rapide et simultanée de la 15-F2tisoP et de son principal métabolite, la 2,3-dinor-5,6-dihydro15-F2t-isoP dans l’urine chez l’homme. L’autre méthode combine l’HPLC et la GC-NICI-MS/MS permettant la détermination de plusieurs dinor-dihydro F2-IsoP métabolites en plus de la 2,3-dinor-5,6-dihydro-15-F2t-isoP. Chacune de ces techniques chromatographiques en combinaison avec la GC-MS ou la GC-MS/MS devraient être utiles pour une meilleure compréhension de la formation et du métabolisme de la 15-F2t-isoP et des autres F2-IsoP in vivo.
7. Les neuroprostanes Le DHA contenu dans le cerveau est très sensible au phénomène de peroxydation lipidique. Les dommages oxydatifs dans les structures membranaires des neurones sont impliqués dans un certain nombre de maladies neurodégénératives. [44]. Lors de la peroxydation lipidique par voie radicalaire du DHA, des composés du type isoprostane sont formés : ce sont les neuroprostanes (NeuroPs), nom donné du fait de leur forte concentration dans les neurones. Comme les F2-IsoP, il en existe plusieurs séries répertoriées suivant la position de l’alcool allylique ou suivant la structure du cycle à cinq carbones. Les NeuroPs ont été découvertes pour la première fois en 1998 par Nourooz-Zadeh sous le terme d’F4-Isoprostanes [45], le terme « Neuroprostanes » (NeuroPs) ayant été donné par Roberts et al. [46]. La quantification des NeuroPs va devenir un enjeu important pour caractériser la sévérité des attaques oxydantes observées dans différents états de dégénérescence ou de pathologies cérébrales. Contrairement aux F2-IsoP, peu de méthodes de quantification des NeuroPs ont été proposées à ce jour [45,47]. Une des principales causes est certainement l’absence d’étalon spécifique nécessaire à la détection des NeuroPs par GC-MS ou LC-MS. L’essentiel du dosage des NeuroPs par GC-NICI-MS est calqué sur le principe de quantification des F2-IsoP. Le composé à analyser est converti en ester PFB et en éther TMS pour être ensuite chromatographié et analysé par spectrométrie de masse en sélectionnant, cette fois, les ions carboxylates à m/z 593. La préparation de l’échantillon peut différer de celle décrite pour les F2-IsoP et peut comprendre, par exemple, une extraction liquide-liquide suivie d’une étape de SPE (NH2) comme décrit par Nourooz-Zadeh et al. pour le dosage des NeuroPs dans le cerveau [48]. Les remarques avancées précédemment concernant la préparation des échantillons et les précautions nécessaires à leur conservation sont toujours valables. De même, il faudra probablement s’attendre aux
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même limitations dans le dosage des NeuroPs que celles observées pour les F2-IsoP. En effet, le nombre plus limités de travaux sur le sujet n’a peut-être pas encore attiré l’attention sur ces limites mais il est peu probable que le dosage des NeuroPs soit plus aisé que celui des F2-IsoP. En effet, on sera confronté non plus à quatre familles d’IsoP mais à huit familles de NeuroPs, les isomères variant dans la même proportion. Seules les interférences avec les prostaglandines pourraient, en l’état des connaissances actuelles, être simplifiées.
8. Conclusion Le travail à fournir pour faire progresser l’analyse des isoprostanes et des neuroprostanes est donc encore conséquent mais la « généralisation » de techniques analytiques de pointe et le développement de nouveaux procédés de préparations d’échantillons fourniront sans nul doute une aide considérable dans les années à venir.
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