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laboratoire d’immunologie de 2013 à 2015. Les AAN étaient dépistés par immunofluorescence indirecte sur cellules HEp2. Les AFA étaient détectés par EliATM Symphony, une technique immunofluorescente enzymatique automatisée. Les résultats étaient exprimés sous forme de ratio par rapport à un calibrateur avec un seuil de positivité fixé à 10. Nous présentons les caractéristiques cliniques des 14 patients et leur taux d’AFA. Résultats Il s’agit de 14 patients (11 F, 3 H) avec une moyenne d’âge de 52,8 ans [22–83] au moment du dosage. L’aspect de la fluorescence des ANA était nucléolaire. Le taux moyen d’AFA était de 162 U/mL (12–316). Le diagnostic de sclérodermie systémique (ScS) selon les critères ACR/EULAR 2013 était posé chez 64 % des patients (n = 9/14). Un autre diagnostic était posé chez 36 % des patients (n = 5/14) : lupus érythémateux systémique (n = 1), syndrome de Raynaud (n = 1), rhumatisme inflammatoire chronique asymétrique destructeur avec calcifications sous-cutanées (n = 1), rhumatisme inflammatoire non destructeur indifférencié (n = 1) et carcinome hépatocellulaire (n = 1). Les patients sclérodermiques avaient des taux plus élevés d’AFA (taux moyen de 239 [115–316]) que les non sclérodermiques (taux moyen de 54,8 [12–102]). Parmi les patients sclérodermiques, il y avait six femmes et trois hommes, deux patients originaires d’Afrique subsaharienne (n = 2/9) et deux du Maghreb (n = 2/9). L’âge moyen des premières manifestations de la ScS incluant le syndrome de Raynaud était de 50,4 ans [24–67]. La durée moyenne d’évolution de la maladie au moment du dosage des AFA était de 5 ans. Il y avait cinq formes cutanées diffuses et quatre limitées. Trois patients souffraient d’ulcères digitaux récurrents et trois présentaient une atteinte pulmonaire infiltrante diffuse (PID) compliquée d’HTAP. Une atteinte cardiaque était présente chez 5/9 patients, à type d’épanchement péricardique (n = 3/9) et de cardiomyopathie (n = 3/9). Une atteinte myositique était retrouvée chez 3/9 des patients. L’atteinte œsophagienne clinique était présente chez tous les patients et confirmée sur la manométrie oesophagienne réalisée chez 5 des patients (n = 5/9). Une atteinte digestive basse était retrouvée chez 5/9 patients à type d’incontinence anale et de diarrhée chronique sur pseudo-obstruction Intestinale chronique ou pullulation microbienne. Discussion Les critères ACR/EULAR 2013 incluent 3 autoanticorps spécifiques de la ScS : les anti-centromère, anti-Scl70 et anti-ARN Polymérase III, dont chacun définit un phénotype particulier de la maladie. La présence des AFA est exclusive de ces auto-anticorps et est retrouvée chez environ 4 à 8 % des patients avec une ScS [1]. La place des AFA dans le paysage sclérodermique est peu connue. Notre petite série, comme la littérature [1,2] montre un phénotype particulier des patients : forme cutanée diffuse prépondérante, complications viscérales sévères (HTAP post-PID, myosite, atteinte cardiaque et digestive) et origine africaine des patients. Leur association à d’autres pathologies auto-immunes reste exceptionnelle et inhabituelle avec un cancer. Conclusion La positivité des AFA est une aide au diagnostic de ScS, sous réserve de fixer un seuil de positivité élevé et de proposer leur recherche devant un aspect de fluorescence évocateur sur HEp-2, l’absence d’auto-anticorps spécifiques et/ou un phénotype clinique particulier. Le suivi des patients présentant un syndrome de Raynaud apparemment isolé ou un rhumatisme inflammatoire chronique non étiqueté est indispensable afin de vérifier l’absence de progression vers une ScS. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Tormey VJ, Bunn CC, Denton CP, Black CM. Anti-fibrillarin antibodies in systemic sclerosis. Rheumatology (Oxford) 2001;40(10):1157–62.
[2] Ho KT, Reveille JD. The clinical relevance of autoantibodies in scleroderma. Arthritis Res Ther 2003;5(2):80–93. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.10.277 CO048
Les morts fœtales in utero vues par l’interniste : enjeux et difficultés illustrés au travers d’une série de 53 cas N. Belhomme Médecine interne, CHU de Rennes, Rennes, France Adresse e-mail :
[email protected] Introduction Une mort fœtale in utero (MFIU) est définie par une perte de grossesse secondaire à l’interruption spontanée de l’activité cardiaque fœtale, survenant avant ou pendant le travail, au-delà d’un terme fixé à 14 SA. Elle concerne 3 grossesses pour 1000 dans les pays occidentaux. Il existe de multiples causes reconnues, néanmoins, 15 à 50 % d’entre elles restent inexpliquées malgré un bilan étiologique exhaustif. Les patientes sont alors fréquemment adressées au médecin interniste, dans le but d’obtenir un diagnostic, d’identifier une pathologie maternelle sous-jacente, et de proposer une prise en charge pour les grossesses ultérieures. L’objet de cette étude préliminaire était d’effectuer un bilan de l’activité des consultations pour MFIU en médecine interne, dans le but de proposer secondairement un travail plus vaste dont l’objectif sera d’évaluer afin d’optimiser « l’apport diagnostic et thérapeutique » de l’interniste dans la prise en charge des morts fœtales in utero. Patientes et méthodes Nous avons conduit une étude rétrospective descriptive du 01/01/2007 au 31/12/2014, dans laquelle ont été inclues toutes les patientes ayant consulté dans le service de médecine interne au décours d’une MFIU. Résultats Sur la période étudiée, 53 patientes ont consulté en médecine interne au décours d’une MFIU, dont 28 (53 %) pour compléter le bilan étiologique, 22 (42 %) pour préparer une nouvelle grossesse. Dix-sept patientes (32 %) avaient un antécédent de grossesse pathologique, 22 (42 %) étaient primigeste. L’âge moyen des patientes au moment de la MFIU était de 30 ± 4,5 ans (extrêmes : 19–42), le terme moyen était de 29,2 SA ± 7,9 (extrêmes 15–40). Chez 6 patientes (11 %), la MFIU est survenue sous traitement antiagrégant et/ou anticoagulant. Parmi toutes les explorations paracliniques, les plus informatives étaient la recherche d’anticorps antiphospholipides, positive chez 9 patientes, permettant de les classer comme porteuses d’un syndrome des anticorps antiphospholipides à expression obstétricale, et l’examen anatomopathologique du placenta. Celui-ci avait été réalisé chez 49 (92 %) patientes, et était pathologique chez 41 (84 %) d’entre elles. À l’issue du bilan étiologique, 25 MFIU (47 %) étaient classées comme d’origine principalement placentaire selon le système de classification CODAC ; 12 soit 23 % étaient classées comme d’origine inconnue. Quinze patientes ont présenté une nouvelle grossesse, dont 12 (80 %) ont abouti à une naissance vivante, sous traitement antiagrégant et/ou anticoagulant dans 11 cas. Parmi les 9 patientes porteuses de SAPL obstétrical, 4 ont présenté une nouvelle grossesse, dont 1 seule a permis une naissance vivante. Discussion Le bilan de perte fœtale est un motif non rare de consultation : dans notre étude, 53 patientes ont été adressées pour ce seul motif, à l’issu d’un premier bilan étiologique négatif, en consultation de médecine interne. Sur la même période, 395 MFIU ont été enregistrées par le réseau périnatal départemental, soit près de 1 patiente sur 7 à avoir été adressée à l’interniste. L’examen paraclinique le plus contributif était indiscutablement l’examen anatomopathologique du placenta : 84 % des placentas examinés comportaient des anomalies, permettant d’établir la MFIU comme étant de cause placentaire dans près de 50 % des cas. De plus, le placenta était constamment pathologique chez les
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9 patientes chez lesquelles une biologie APL positive était découverte. Conclusion Cette étude confirme l’importance d’explorer systématiquement et méthodiquement toute MFIU, dans le but d’instaurer un traitement permettant d’augmenter les chances de réussite des grossesses ultérieures, mais aussi de rechercher des pathologies maternelles dont l’accident gravidique pourrait constituer le mode de révélation, et enfin d’apporter des réponses à des parents très affectés et parfois désemparés. Les étiologies de MFIU sont très variées ; ainsi, le médecin interniste, de par sa polyvalence, devrait tenir un rôle important dans cet exercice, en particulier dans les cas ou les explorations initiales n’apportent pas d’orientation étiologique précise. Bien que la signification et le rôle de certains types de lésions histologiques dans la survenue d’accidents gravidiques ne soit pas entièrement établi, l’examen anatomopathologique placentaire constitue sans aucun doute l’examen le plus contributif dans le bilan étiologique d’une MFIU. Déclaration de liens d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. Pour en savoir plus Quibel T, Bultez T, Nizard J, Subtil D, Huchon C, Rozenberg P. Morts fœtales in utero. J Gynecol Obst Bio R;43:883–907. Ptacek I, Sebire NJ, Man JA, Brownbill P, Heazell AEP. Systematic review of placental pathology reported in association with stillbirth. Placenta 2014;35:552–62. Frøen JF, Pinar H, Flenady V, Bahrin S, Charles A, Chauke L, et al. Causes of death and associated conditions (Codac): a utilitarian approach to the classification of perinatal deaths. BMC Pregnancy Childbirth 2009;9:22. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.10.278 CO049
Causes de mortalité liée au lupus systémique pédiatrique en France : résultats de l’étude MORTALUPED S. Malaekah 1 , B. Bader-Meunier 2 , G. Rey 3 , N. Jourde-Chiche 4 , M. Eb 3 , A. Belot 5 , L. Chiche 1,∗ 1 Service de médecine interne, hôpital européen Marseille, Marseille, France 2 Cerhumip, hôpital Necker, Paris, France 3 CépiDC, Kremlin-Bicêtre habitat, Le Kremlin-Bicêtre, France 4 Service de néphrologie, CHU de la Conception, Marseille, France 5 Pédiatrie, Chuitel-Hervé, Lyon, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (L. Chiche) Introduction Le Lupus systémique (LS) est une maladie autoimmune qui peut débuter à l’âge pédiatrique, les formes à début précoce étant plus sévères que les formes de l’adulte. Contrairement aux LS adultes [1], les causes de mortalité sont peu étudiées dans cette population pédiatrique dont la prévalence était récemment estimée à environ 500 individus en France [2]. En France, une enquête rétrospective menée sur une période de dix ans (1996–2006) auprès des centres référents avait identifié 12 décès [3]. Une meilleure connaissance des causes de décès et des comorbidités associées est essentielle pour améliorer les stratégies préventives et thérapeutiques. Le but de l’étude MORTALUPED était d’analyser les causes de décès liés aux LS pédiatrique en France en utilisant une analyse en causes multiples. Patients et méthodes Les données recueillies dans la base de données du centre épidémiologique franc¸ais pour les causes médicales de décès (CépiDc, Inserm) correspondant à des certificats de décès de tout patient âgé de moins de 18 ans pour la période 2000–2011, sur lesquels le LS a été répertorié (CIM-10 du code L93 ou M32) comme une cause initiale ou associée de décès (analyse en causes multiples), ont été analysées. Résultats Trente-cinq décès ont été identifiés, dont 5 ont été exclus des analyses ultérieures (âge < 1 an ; décès principalement
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par lupus néonatal avec bloc cardiaque congénital). Parmi les 30 autres décès, le LS a été notifiée comme une cause initiale pour 24 (80 %) ou associée pour 6 (20 %). Les patients avaient un âge médian au décès de 15 ans [2 ; 17] et un sex-ratio de 3 (23 femmes et 7 hommes). Le nombre médian de mortalité annuel était de 3 [0 ; 5], relativement stable au cours de la période d’étude. Les décès ont été distribués à travers 20 départements franc¸ais, à l’exception des départements d’outremer (n = 6). Le nombre moyen de causes de décès par certificat était de 3,7 [2 ; 6]. Pour la moitié des patients (n = 15), on notait au moins une manifestation sévère du LS : neurologiques (n = 4), cardiaque (n = 4), rénale (n = 3), hématologique (n = 3), pancréatique (n = 2) et pulmonaire (n = 1). Les infections graves étaient signalées dans 9/30, dont 2 dans un contexte d’aplasie. Les pathogènes identifiés étaient : Streptococcus pneumoniae (n = 2), Staphylococcus aureus METI-R (n = 1), BG- (n = 1), histoplasmose (n = 1), crytpococcose (n = 1). Les autres causes de décès notables étaient : embolie pulmonaire (n = 1) et maladie auto-immune grave associée (cirrhose auto-immune). Pour la période 1996–2006, tandis qu’une enquête franc¸aise avait identifié 12 patients [3], 28 décès liés au LS ont été identifiés dans la base de données CépiDc. Conclusion À notre connaissance, il s’agit de la première étude par analyse en causes multiples de mortalité dans le lupus pédiatrique. Elle confirme l’intérêt d’une telle approche pour recueillir un nombre plus important de cas de décès dans le contexte d’une maladie rare comme LS pédiatrique. Chez les patients avec LS pédiatrique, les causes conduisant à la mort semblent être principalement des manifestations graves de la maladie ainsi que des infections graves et/ou opportunistes. Le sex-ratio au décès inférieur à la population pédiatrique vivante suggère une sévérité plus élevée chez les jeunes patients de sexe masculin. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Thomas G, Mancini J, Jourde-Chiche N, Sarlon G, Amoura Z, Harlé JR, et al. Mortality associated with systemic lupus erythematosus in France assessed by multiple-cause-of-death analysis. Arthritis Rheumatol 2014;66:2503–11. [2] Arnaud L, Fagot JP, Mathian A, Paita M, Fagot-Campagna A, Amoura Z. Prevalence and incidence of systemic lupus erythematosus in France: a 2010 nation-wide population-based study. Autoimmun Rev 2014;13:1082–9. [3] Klein A, Cimaz R, Quartier P, Decramer S, Niaudet P, Baudouin V, et al. Causes of death in pediatric systemic lupus erythematosus. Clin Exp Rheumatol 2009;27:538–9. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.10.279 CO050
Mononeuropathie multiple au cours du lupus systémique : à propos de 10 cas E. Rivière 1,∗ , T. Maisonobe 2 , F. Maurier 3 , C. Richez 4 , B. Gombert 5 , M. Gousseff 6 , A. Chaib 1 , A. Mathian 1 , M. Hie 1 , J. Haroche 1 , Z. Amoura 1 , F. Cohen Aubart 1 1 Médecine interne, hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris, France 2 Département de neurophysiologie, La Pitié-Salpêtrière, Paris, France 3 Service de médecins interne, hôpital Belle-Isle, Metz, France 4 Rhumatologie, hôpital Pellegrin, Bordeaux, France 5 Médecine interne, centre hospitalier la Rochelle, La Rochelle, France 6 Médecine interne, centre hospitalier Bretagne Atlantique, Vannes, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (E. Rivière) Introduction La survenue d’une mononeuropathie multiple (MM) au cours du lupus systémique (LS) est rare et peu de cas ont été rapportés dans la littérature [1–3]. L’objectif de cette étude était