Rein et diabète

Rein et diabète

Compte rendu de congrès / Annales d’Endocrinologie 69 (2008) 74–95 lors du 23e Congrès de la Société franc¸aise d’endocrinologie (SFE), Montpellier 2...

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Compte rendu de congrès / Annales d’Endocrinologie 69 (2008) 74–95

lors du 23e Congrès de la Société franc¸aise d’endocrinologie (SFE), Montpellier 2006. Les micro-carcinomes papillaires (V. Rohmer). – Le microcarcinome papillaire (MCP) de la thyroïde est défini selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), depuis 2004, comme une tumeur papillaire thyroïdienne inférieure ou égale à 10 mm de diamètre dans son plus grand axe. Sa fréquence varie suivant les séries autopsiques entre 6 et 28 %, et l’incidence de ces tumeurs est actuellement en augmentation, essentiellement du fait des MCP sans facteur de risque démontré. V. Rohmer a insisté sur les controverses qui demeurent dans la prise en charge, compte tenu de l’absence de consensus. Le pronostic de ces tumeurs est bon, avec moins de 1 % de décès, décès qui n’est constaté par ailleurs que pour les formes de découverte au stade métastatique. Les facteurs de pronostic étudiés sont les suivants : • la taille, qui est un facteur de risque indépendant ; • la bilatéralité des lésions, la multifocalité, l’existence d’adénopathies et l’effraction capsulaire, qui sont prédictifs de récidive et/ou de non guérison ; • le mode de découverte (diagnostic fortuit ou non) conditionne le pronostic. Si la fréquence des découvertes fortuites est variable selon les auteurs (de 13 à 80 %), tous s’accordent à dire qu’une découverte non fortuite sur des éléments cliniques est un facteur de mauvais pronostic, notamment en termes de récidives ; • le caractère multifocal des lésions, l’extension extrathyroïdienne, ainsi que la présence d’adénopathie(s) cervicale(s) au moment du diagnostic, sont également des facteurs de pronostic de non guérison et de mortalité. Le traitement de ces MCP n’est pas codifié. Il pose la question de la nécessité de la chirurgie. Trois questions se posent : • quelle chirurgie pratiquer ? • un curage ganglionnaire doit-il être systématiquement associé ? • quelle est la place de l’iode 131 et du traitement freinateur par lévothyroxine ? Il n’existe pas de consensus actuel sur la prise en charge des MCP. Mais, en pratique, la démarche suivante peut être proposée selon V. Rohmer, grâce aux résultats du Groupe de Recherche sur la Thyroïde (GRT) :

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Nouvelle classification TNM des cancers différenciés de la thyroïde : quelles implications dans la prise en charge ? (L. Leenhardt). – La nouvelle classification TNM des cancers différenciés de la thyroïde (CDT), mise en place depuis 2002, est utile pour le clinicien car elle permet un classement suivant le risque de récidives et le pronostic. L. Leenhardt a insisté sur trois changements essentiels : l’existence d’une nouvelle classification, un nouveau profil des cancers thyroïdiens avec notamment une augmentation de micro-carcinomes, de nouvelles modalités de prise en charge et de surveillance. La nouvelle classification. – TNM Elle comprend les suivants : • un changement de la définition des CTD stade pT1, dont la taille maximale passe de 10 à 20 mm ; • le stade pT3 inclut, en plus des tumeurs de diamètre supérieur à 40 mm qui correspondaient auparavant à ce stade, toutes les tumeurs avec une extension à la capsule thyroïdienne et/ou microscopique au tissu cellulaire, quelles que soient leurs tailles ; • de plus, le statut ganglionnaire N1 a été affiné suivant les régions anatomiques. Quel est l’impact de cette nouvelle classification sur la prise en charge ? Le nouveau stade pT1 a un potentiel plus agressif, car il englobe des tumeurs mesurant jusqu’à 2 cm (le pronostic et la survie sont moins bons pour les tumeurs entre 11 et 20 mm de diamètre, comparativement à celles inférieures à 10 mm), et ils justifient une surveillance accrue. Le nouveau stade pT3 forme un ensemble très hétérogène, qui pose la question d’un sous-groupe à faible risque constitué des micro-carcinomes pT3 (tumeurs avec extension extra-thyroïdienne, mais mesurant moins de 10 mm), puisqu’il semble que la valeur pronostique de la taille soit plus importante que celle de l’envahissement extra-thyroïdien. Quel traitement ? En ce qui concerne le traitement par iode 131, il n’existe pas de bénéfice pour les tumeurs de très faible risque (tumeurs pT1 inférieures ou égales à 1 cm, N0, M0) et le bénéfice est discutable pour les tumeurs de faible risque (tumeurs pT1 > 1 cm, ou tumeurs pT2, N0, M0). Il n’existe pas d’effet sur la mortalité, mais on constate une efficacité sur la récidive locale et les métastases. Pour les lésions de haut risque (pT3, pT4, toute tumeur N1 et M1), le bénéfice est certain. En pratique, les modalités de prise en charge de ces groupes spécifiques restent à définir. doi:10.1016/j.ando.2007.10.013

• MCP de découverte fortuite < 5 mm, isolé : lobectomie et surveillance sur 10 ans ; • MCP de découverte fortuite > 5 mm, isolé : thyroïdectomie et surveillance sur 10 ans ; • autres cas : curage ganglionnaire si adénopathies palpables ; irradiation thérapeutique par I131 si lésions multiples, invasives, avec histologie agressive ou adénopathies évidentes en pré-, per- ou postopératoire.

Rein et diabète K. Descloquement Service d’endocrinologie et maladies métaboliques, clinique Linquette, CHRU de Lille, Lille, France D’après les conférences des professeurs Ph. Zaoui (CHU, Grenoble), P-F. Plouin (Hôpital européen Georges Pompidou,

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AP–HP, Paris) et B. Canaud (CHU, Montpellier), lors du symposium satellite Amgen : « Rein et diabète », organisé dans le cadre du 23e Congrès de la Société franc¸aise d’endocrinologie (SFE), Montpellier 2006. Nouvelles approches thérapeutiques de la néphropathie diabétique (Professeur Ph. Zaoui). – Trente pour cent des diabétiques évoluent vers l’insuffisance rénale modérée, puis sévère nécessitant la dialyse, mais la susceptibilité est différente en fonction de leur phénotype, de leur génotype, et du mécanisme [1,2]. Les échelles de l’ANCRED (Association nationale de coordination des réseaux de soins aux diabétiques) séparent trois populations en fonction de deux risques quantitatifs : l’excrétion urinaire d’albumine, marqueur d’hyperpression dans le système rénal et cardiovasculaire, et la filtration glomérulaire calculée selon la formule de Cockroft, marqueur d’épuration de ce même système. Le niveau de protéinurie est un marqueur plus sensible d’évolutivité que la fonction rénale [2]. À l’avenir, il faudra utiliser le rapport albumine/créatinine urinaires, plus simple. La maladie glomérulovasculaire provient d’une dysfonction endothéliale, et de phénomènes de glycation. Elle débute après quelques mois de diabète, puis se poursuit jusqu’à 15–20 ans, selon cet ordre : un afflux de cellules macrophagiques, une prolifération mésangiale, un épaississement de la membrane basale, une expansion mésangiale, des lésions podocytaires, puis glomérulaires. Un nouveau marqueur : la prorénine ouvre la voie à de nouvelles thérapeutiques : • l’aliskiren est un inhibiteur du récepteur de la prorénine [3] ; • le sulodexide est un héparinoide de bas poids moléculaire, inhibiteur compétitif de l’héparinase qui détruit les membranes basales des diabétiques [4] ; • les antifibrosants ; o les anti-TGF-␤ (transforming growth factor-beta) ont un effet additif et de rattrapage, en association aux IEC (inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine), o le tranilast induit une diminution de l’expression du collagène de type IV au niveau de la matrice extracellulaire, en inhibant la synthèse du TGF-␤ [5] ; • le raloxiféne, un SERM (selective estrogen receptor modulator), est également utilisé comme réparateur des cellules endothéliales [6]. Le double blocage synergique du système rénineangiotensine par IEC et ARA II (antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II, ou « sartans ») n’est employé que chez 25 % des patients en raison du risque rénal, même s’il n’existe pas de sténose de l’artère rénale. Le but est de maîtriser le niveau tensionnel, l’excrétion urinaire d’albumine et de réduire l’évolution vers la néphropathie terminale. Le traitement repose avant tout sur les règles hygiénodiététiques : régime hyposodé, ainsi que sur les statines, les diurétiques et les IEC en acceptant moins de 20 % de variation de la créatinine.

Sténose de l’artère rénale (SAR) : la conduite diagnostique et ses pièges (Professeur P-F. Plouin). – Il faut rechercher une hypertension artérielle (HTA) secondaire à une SAR, chez les patients présentant : • une HTA sévère >180/110 mmHg, résistante à une trithérapie ; • une diminution de la clairance de la créatinine sous IEC, une insuffisance rénale progressive, des œdèmes aigus du poumon répétés, une artérite oblitérante des membres inférieurs, un antécédent d’infarctus du myocarde ; • une HTA chez un enfant ou un adolescent non obèse ; • si le bilan de débrouillage suggère une HTA secondaire. Afin de rechercher la SAR, quand l’aortographie est indiquée, on peut opacifier l’artère rénale. Sinon, on peut utiliser des méthodes non invasives de détection : l’angioTDM, examen de référence, l’angioIRM au gadolinium, tous deux spécifiques, mais peu sensibles pour l’athérosclérose (30 % de faux négatifs), et encore moins dans la dysplasie fibromusculaire [7]. Le Doppler et la scintigraphie au captopril sont également employés. Le test au captopril est abandonné. Le suivi est réalisé par l’échodoppler, en mesurant les vitesses dans l’artère rénale et la taille du rein, ainsi que par la clairance de la créatinine : • si l’on découvre une SAR > 60 % ou bilatérale, on réalise une angioplastie associée ou non avec la pose d’un stent, qui diminue le risque de resténose sans modifier le résultat fonctionnel ; • mais la dilatation n’a pas toujours d’intérêt, car il n’existe pas de corrélation directe entre le degré de sténose et la sévérité de l’HTA, qui dépend du parenchyme sous-jacent. De plus, on expose le patient à un risque d’embolisation dans le lit rénal. Le traitement médicamenteux a aussi sa place, notamment les statines, qui préviennent la maladie cérébrovasculaire, coronaire et rénale. Leur effet pleiotrope permet une dégradation moins rapide de la fonction rénale. Les IEC, très utilisés dans la néphropathie diabétique, peuvent également prédire la présence d’une SAR bilatérale sévère en cas d’altération de la clairance rénale. Anémie et néphropathie et autres complications du diabète : place et conduite de la correction thérapeutique (Professeur B. Canaud). – L’anémie est un facteur d’hypoxie tissulaire, aggravant les lésions dégénératives de fibrose et de progression de l’insuffisance rénale, trop souvent négligée ou méconnue, alors que facilement corrigeable. Elle est plus précoce dans les néphropathies diabétiques que dans les autres néphropathies. En effet, elle s’installe dés que la clairance de la créatinine est inférieure à 60 ml/min. Or, son traitement est simple : de l’érythropoïétine (EPO), avec une bonne réponse dès les faibles doses, et du fer [8]. La correction du taux d’hémoglobine, jusqu’à 11–13 g/dl, de manière lente et progressive avec un maximum de 2 g/dl/mois, permet une augmentation des apports tissulaires en oxygène.

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L’apport d’EPO protége ainsi contre le stress oxydatif, il a un effet antiapoptotique, et diminue les lésions tissulaires et la fibrose interstitielle. Les récepteurs de l’EPO sont retrouvés de manière ubiquitaires au niveau de la moelle osseuse, de l’œil, du rein et du cœur. L’EPO protége également les cellules photosensibles rétiniennes. La correction de l’anémie améliore la fonction cardiaque, la filtration glomérulaire, les performances visuelles, ainsi que la qualité de vie du patient. Références [1] Rossing K, Christensen PK, Andersen S, Hovind P, Hansen HP, Parving HH. Irbesartan in Patients with Type 2 Diabetes and Microalbuminuria Study. Comparative effects of Irbesartan on ambulatory and office blood pressure: a substudy of ambulatory blood pressure from the Irbesartan in Patients with Type 2 Diabetes and Microalbuminuria study. Diabetes Care 2003;26:569–74. [2] Shahinfar S, Lyle PA, Zhang Z, Keane WF, Brenner BM. Losartan: lessons learned from the RENAAL study. Expert Opin Pharmacother 2006;7:623–30. [3] O’Brien E. Aliskiren: a renin inhibitor offering a new approach for the treatment of hypertension. Expert Opin Investig Drugs 2006;15:1269–77. [4] Abaterusso C, Gambaro G. The role of glycosaminoglycans and sulodexide in the treatment of diabetic nephropathy. Treat Endocrinol 2006;5:211–22. [5] Soma J, Sato K, Saito H, Tsuchiya Y. Effect of tranilast in early-stage diabetic nephropathy. Nephrol Dial Transplant 2006;21:2795–9. [6] Chin M, Isono M, Isshiki K, et al. Estrogen and raloxifene, a selective estrogen receptor modulator, ameliorate renal damage in db/db mice. Am J Pathol 2005;166:1629–36. [7] Vasbinder GB, Nelemans PJ, Kessels AG, et al. Renal Artery Diagnostic Imaging Study in Hypertension (RADISH) Study Group. Accuracy of computed tomographic angiography and magnetic resonance angiography for diagnosing renal artery stenosis. Ann Intern Med 2004;2:141, 674–682; discussion 682. [8] Silverberg DS, Wexler D, Blum M, et al. The effect of correction of anaemia in diabetics and non-diabetics with severe resistant congestive heart failure and chronic renal failure by subcutaneous erythropoietin and intravenous iron. Nephrol Dial Transplant 2003;18:141–6.

doi:10.1016/j.ando.2007.10.014 Le syndrome des ovaires polykystiques A. Estrade Service d’endocrinologie, CHU Rangueil, Toulouse, France D’après les conférences des professeurs Didier Dewailly (CHRU, Lille), Sophie Christin-Maître (Hôpital Saint-Antoine, AP-HP, Paris) et Michel Pugeat (Hôpital Neuro-cardiologique, Lyon-Bron), lors du symposium « Les ovaires polykystiques : une maladie métabolique ? », au congrès conjoint : Association de langue franc¸aise pour l’étude du diabète et des maladies métaboliques – Société franc¸aise d’endocrinologie (ALFEDIAM-SFE), Marseille 2007. Le consensus de Rotterdam : une définition trop large du SOPK ? D. Dewailly a rappelé les critères diagnostiques du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) et leur validité selon la conférence de consensus de Rotterdam de 2003 [1] qui remplace désormais l’ancienne définition du National Institutes for Health (NIH) de 1990. Cette dernière, retenait comme critères,

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l’association d’une dysovulation chronique et d’une hyperandrogénie clinique et/ou biologique à l’exclusion de toute autre étiologie. Le consensus de Rotterdam a rajouté comme 3e critère la présence à l’échographie d’ovaires polykystiques. Le diagnostic de SOPK est actuellement retenu sur la présence d’au moins deux de ces trois critères (après exclusion des diagnostics différentiels). Du SOPK « monochrome », la définition évolue donc vers un SOPK « quadrichrome », avec quatre phénotypes : la forme complète avec oligo-anovulation (OA), hyperandrogénie (HA) et ovaires polykystiques (PCO), et trois formes incomplètes avec OA et HA, ou OA et PCO, ou HA et PCO. La fréquence respective de ces phénotypes est évaluée à 60, 7, 16 et 17 % [2]. Avant cette définition, Legro et al., ont étudié la possibilité d’une HA seule sans dysovulation chez 115 sœurs de 80 patientes SOPK comparées à 70 femmes contrôles, 22 % présentent un SOPK selon la définition du NIH, et 24 % une HA seule avec des cycles réguliers. Dans ces deux groupes, les taux de testostérone et de LH (luteinizing hormone) sont significativement plus élevés que chez les sœurs indemnes et que chez les contrôles. Les auteurs concluent à une agrégation familiale de l’HA avec pénétrance variable [3]. Inversement, le phénotype OA + PCO (SOPK sans HA), possible selon le consensus de Rotterdam, existe-t-il vraiment ? L’étude de Dewailly et al. [2], compare 66 patientes présentant ce phénotype à 118 femmes non SOPK et à des patientes présentant les autres phénotypes du SOPK. Les patientes sans HA ont des valeurs plus élevées de tour de taille, d’androgènes et de LH que les contrôles, mais moindres que les autres phénotypes du SOPK. Les patientes OA + PCO sans HA, constitueraient une forme intermédiaire avec des anomalies endocriniennes et métaboliques modérées. Enfin, les critères échographiques de SOPK doivent être précisés. Selon Jonard et al. [4], un seuil à 12 follicules par ovaire entre 2 et 9 mm semble être le meilleur compromis avec une sensibilité à 75 % et une spécificité à 99 %. Par ailleurs, un volume ovarien > 10 cm3 a été fixé par le consensus [1], mais des travaux récents [1,4] suggèrent que le seuil devrait être abaissé à 7 cm3 . La surface ovarienne (> 5 cm2 ) est également un bon critère. L’échographie est donc un moyen spécifique et reproductible, et bientôt l’échographie tridimensionnelle (3D), comptant automatiquement les follicules et leur taille, permettra de s’affranchir du caractère opérateur dépendant. On remarquera que les critères hormonaux (ex : la LH) n’ont pas été retenus dans les critères diagnostiques du consenus, leur efficacité diagnostique est moindre par rapport à l’échographie avec des courbes ROC non discriminantes. Cependant le dosage de l’AMH (anti-Mullerian hormone) semble être un marqueur intéressant du nombre de follicules ovariens. Ainsi, l’étude de Pigny et al., retrouve des valeurs d’AMH trois fois supérieures chez des patientes SOPK, vs contrôles. Un seuil fixé à 60 pmol/l offre une sensibilité de 67 % et une spécificité de 92 % [5]. SOPK : une maladie qui débute dans l’enfance ? S. ChristinMaître s’est attachée à préciser l’origine du SOPK : est-ce une maladie qui débute dans l’enfance ? Le SOPK concerne 5 à 10 % de la population féminine adulte. Il s’agit d’une affection polygénique de transmission domi-