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Schizophrénie et addictions : les liaisons dangereuses Schizophrenia and addictions: dangerous links P. Thomas, A. Amad, T. Fovet Univ. Lille, CNRS, CHU Lille, UMR 9193 – SCALab, Pôle Psychiatrie-Médecine Légale-Médecine en Milieu Pénitentiaire, 59000 Lille, France
r é s u m é
Mots clés : Schizophrénie Addictions Comorbidité Double diagnostic
Les comorbidités addictives concernent la majorité des patients atteints de schizophrénie. Elles retentissent sur le pronostic et l’évolution des troubles et sont à l’origine de difficultés diagnostiques et thérapeutiques. Elles sont mises en cause dans la majorité des situations de non réponse aux prises en charge. Ce sont les causes de handicap les plus sévères chez les adolescents et jeunes adultes dans le monde avec un impact socio-économique représentant un défi croissant pour tous les systèmes de santé. La consommation de substances psychoactives est plus fréquente chez les patients en situation de précarité et constitue un facteur de risque majeur de geste suicidaire. Elle contribue à l’excès de mortalité des patients atteints de schizophrénie tant par des causes naturelles que non naturelles. De nombreux facteurs ont été identifiés pour expliquer les liens particuliers entre schizophrénie et addiction. Certains facteurs génétiques, sociaux et économiques sont communs entre schizophrénie et addiction. Les facteurs psychologiques et comportementaux ont surtout été étudiés au regard des relations entre la schizophrénie et la consommation de cannabis qui est la substance illicite la plus consommée par les patients atteints de schizophrénie. Ces liens particuliers sont argumentés par deux hypothèses complémentaires celle de « l’automédication » et celle des « dommages ». Toutes deux s’accordent sur le fait que la consommation de cannabis interagit avec les facteurs de vulnérabilité de la schizophrénie. Les progrès en imagerie cérébrale, ont permis de démontrer que la consommation chronique de cannabis provoque une altération morphologique des régions riches en récepteurs cannabinoïdes comme l’hippocampe et l’amygdale. La prise en charge des patients souffrant du double diagnostic, schizophrénie et addiction nécessite des soins intégrés ainsi qu’une coordination efficiente entre professionnels. Au regard de l’impact considérable des comorbidités addictives des psychoses sur les personnes qui en souffrent, sur leur entourage et leur retentissement médico-économique, il apparaît nécessaire de décloisonner les dispositifs d’organisation des soins et de promouvoir les recherches dans ce domaine. © L’Encéphale, Paris, 2016 a b s t r a c t
Keywords: Schizophrenia Addiction Comorbidity Double diagnosis
A majority of patients with schizophrenia are comorbid with addictions. Addictive comorbidities impact prognosis and outcome of the disease. They result in diagnostic and therapeutic challenges for caregivers since they are causing a considerable proportion of cases of non-response to treatment. These are the main causes of disability among adolescents and young adults patients in the world and their socio economic impact represents a growing challenge for all health systems. Double diagnosis are more frequent in homeless populations and represent a major risk factor of suicidal behavior. Consumption of psychoactive substances, Alcohol and illicit drugs contributes to excess mortality of schizophrenic patients to both natural and unnatural causes. Many factors have been identified to explain the reasons for this high comorbidity. Some genetic, social and economic factors are common between schizophrenia and addiction. Psychological and behavioral factors have mainly been studied in relation to the specific links between schizophrenia and cannabis. Two complementary hypotheses are argued, self-medication and damage hypothesis. Advances in brain imaging have shown that chronic cannabis use alters the morphology of the brain regions whith high concentration of cannabinoid receptors like hippocampus and amygdala. Though effects of cannabis may interact with other vulnerability factors of schizophrenia.
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (P. Thomas). © L’Encéphale, Paris, 2016
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The management of patients with schizophrenia and addiction requires clear diagnosis identification and integrated care with an efficient coordination between professionals. In regard of the impact on those who suffer, their entourages and the medical and economic impact of these disorders, measures on organizational care setting and promotion of research and evaluation are needed. © L’Encéphale, Paris, 2016
Introduction Qu’il s’agisse d’usage nocif, d’abus ou de dépendance, l’association d’un trouble addictif à un trouble schizophrénique est la règle plutôt que l’exception. En effet, toutes les études épidémiologiques confirment que les comorbidités addictives de la schizophrénie concernent une majorité de patients. Une des premières études de grande ampleur, l’enquête ECA (Epidemiologic Catchment Anea) publiée en 1990 estimait que cette comorbidité touchait 47 % des personnes atteintes de schizophrénie, comparativement à 13,5 % dans la population générale et plus de la moitié des personnes qui souffrent de schizophrénie ont des antécédents de toxicomanie [1]. Les patients atteints de schizophrénie ont 4,6 fois plus de problèmes d’addiction que les personnes sans maladie psychiatrique. Ces chiffres ne tiennent évidemment pas compte de la dépendance au tabac qui concerne plus de 70 % des patients atteints de schizophrénie dans le monde. La proportion des patients concernés par le double diagnostic augmente avec la sévérité de la schizophrénie [1]. Un certain nombre de facteurs ont été identifiés pour expliquer les mécanismes de cette comorbidité élevée. L’hypothèse d’une vulnérabilité génétique commune aux deux troubles a été proposée. Elle est en effet argumentée par l’observation d’une hérédité partagée ; d’une part un taux élevé de problèmes d’addiction chez les apparentés non – psychotiques de patients schizophrènes et d’autre part un taux élevé de schizophrénie chez les apparentés de patients addicts [2]. De nombreux facteurs sociaux et économiques sont également partagés par les patients addicts et psychotiques (précarité, isolement, acculturation…) [3]. La vulnérabilité psychologique est l’objet de nombreux travaux portant sur les liens entre schizophrénie et cannabis. La précocité de la consommation de cannabis augmente considérablement le risque pour la schizophrénie. Le risque serait 4 fois plus élevé lorsque la consommation débute avant 15 ans [4] suggérant la nécessité de prendre en compte la dimension développementale en interaction avec les mécanismes génétiques et environnementaux impliqués dans la vulnérabilité à la schizophrénie. La consommation de cannabis à 16 ans augmente le risque d’émergence de la psychose à 19 ans et inversement, l’émergence de la psychose à l’âge 16 ans prédit la consommation de cannabis à 19 ans [5]. Certaines perturbations cognitives et affectives pourraient être prédictives de pathologies psychotiques et addictives ultérieures [6]. Les études de suivi démontrent malheureusement la stabilité des comportements addictifs acquis lors de l’adolescence chez les patients souffrant de schizophrénie, pouvant expliquer le passage à d’autres produits notamment l’alcool dont l’accès est plus facile que le cannabis. Résistance au traitement L’abus de substances psychoactives avant la première prise en charge psychiatrique est un facteur prédictif de sévérité des
symptômes [7]. Par conséquent parmi les patients ne répondant pas aux prises en charge habituelles, les patients souffrant de comorbidité sont surreprésentés. L’impact sociétal et économique de la résistance au traitement dans la schizophrénie a été évalué dans une revue portant sur 65 études menées entre 1996‑2012 [8]. Soixante pour cent des patients ne répondent pas aux traitements antipsychotiques après 23 semaines de prise en charge. La qualité de vie moyenne de ces patients était de 20 % inférieure à celle des patients en rémission et 44 % d’entre eux présentent des idées suicidaires. Les coûts annuels pour ces patients sont 3 à 11 fois plus élevés que pour les patients répondeurs. Or plus de la moitié des patients « non répondeurs » présentent les caractéristiques suivantes : tabagisme important, abus d’alcool, abus de substances illicites. Ainsi, la contribution de la comorbidité addictive à l’échec des prises en charge habituelles est considérable. Retentissement médico-économique En 2010, les troubles mentaux et les troubles liés à l’utilisation de substances ont représenté 183,9 millions de DALY (Nombre cumulé d’Années Perdues à cause de la maladie, du handicap ou de mort précoce) soit 7,4 % du total des DALY dans le monde entier [9]. Ces troubles ont représenté un total de 8,6 millions d’Années de Vie Perdues (YLL). Ce sont les principales causes d’Années Vécues avec un Handicap (YLD) dans le monde entier. La plus forte proportion du total des DALY est observée chez les jeunes de 10‑29 ans. L’impact socio- économique a augmenté de 37,6 % entre 1990 et 2010, Il s’agit d’un défi croissant que ces troubles posent pour les systèmes de santé dans les régions développées et en développement. La maladie mentale et la toxicomanie sont surreprésentées au sein des populations sans abri en milieu urbain. L’abus de drogues au début de la maladie constitue un facteur de risque majeur de geste suicidaire [10]. Retentissement sur l’espérance de vie Bien que l’espérance de vie dans la population générale ait augmenté au cours des dernières décennies dans les pays développés, les personnes atteintes de schizophrénie meurent plus tôt que leurs homologues. Si les estimations récentes suggèrent un écart en espérance de vie de l’ordre de 15 à 20 ans il reste difficile de savoir si l’écart entre les populations générale et clinique s’est élargi ou rétréci ces dernières années [11]. Un certain nombre de facteurs a été avancé pour expliquer l’écart de mortalité. La plupart sont des facteurs de risque connu, comme l’obésité et la consommation de substances psychoactives (le tabac, l’alcool et les drogues illicites) qui interfèrent avec d’autre facteurs de santé comme l’accès limité aux soins, la moins bonne qualité des soins reçus et les effets secondaires des antipsychotiques. L’utilisation de
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drogues illicites contribue à l’excès de mortalité tant pour les causes naturelles que non naturelles. C’est ce que montre l’étude AESOP, un suivi de cohorte sur 10 ans à partir du premier épisode de psychose, avec 4 fois plus de mortalité qu’en population générale : 2 fois plus pour les causes de mortalité naturelle et 13 fois plus pour la mortalité non naturelle [12]. Dans cette étude, le suicide est la principale cause de décès. Un cinquième des décès était lié à l’alcool et l’utilisation de drogues illicites est associée à 2 à 3 fois plus de risque de mortalité non naturelle. Les auteurs ont identifié un lien entre la durée de la période symptomatique du premier épisode et le risque de mortalité. Ils avancent que le manque de participation de la famille au premier contact avec les services de soin est corrélé non seulement à la consommation de drogues illicites mais aussi à la mortalité. A contrario, l’implication de la famille dès le premier contact réduit le risque de mortalité. La majorité des patients décédés dans les 10 ans de suivi avaient signalé une consommation de cannabis lors des premiers contacts. Certains avaient continué à utiliser des drogues illicites, ce qui soulève la question du lien entre addiction et fragmentation familiale. Les personnes atteintes de psychose ne semblent toujours pas bénéficier des progrès en santé et de l’amélioration de l’offre de soins, d’autant plus qu’ils consomment des substances psychoactives. Cette étude met l’accent sur la nécessité de prendre en charge précocement les premiers épisodes afin d’obtenir une rémission rapide en prenant en considération les comorbidités addictives et la qualité des interactions familiales. Une autre étude menée sur les registres danois montre que la comorbidité schizophrénie-addiction double la mortalité chez les patients précaires par rapport à ceux souffrant de schizophrénie mais sans addiction. [11]. Cannabis et schizophrénie : les liaisons particulières Au-delà de la consommation considérable de café et de tabac, les drogues les plus souvent consommées sont l’alcool, le cannabis, les amphétamines et la cocaïne [13]. L’alcool a suscité beaucoup moins de travaux que le cannabis et les autres drogues illicites concernant ses liens avec la schizophrénie. Pourtant l’abus et la dépendance à l’alcool sont fréquents chez les patients souffrant de schizophrénie [14]. L’alcool est responsable d’un important retard à l’identification du trouble psychotique, augmentant ainsi la consommation d’alcool et la durée de psychose non traitée dont on connaît l’impact pronostique. Le cannabis est la substance illicite la plus consommée par les patients atteints de schizophrénie. Les liens particuliers entre la schizophrénie et la consommation de cannabis sont argumentés par de nombreux travaux. Plusieurs hypothèses ont été proposées. L’hypothèse de « l’automédication » est la plus ancienne et la plus répandue. Selon elle, les patients atteints de schizophrénie consomment du cannabis afin d’améliorer leur humeur, leur anxiété, leur sommeil, de pallier à l’ennui et d’atténuer les symptômes de la psychose [15]. Cette hypothèse s’est longtemps heurtée aux conclusions d’études et d’enquêtes qui suggéraient que les patients atteints de schizophrénie consomment du cannabis pour des raisons similaires à celles de la population générale, à savoir, se sentir bien, se détendre et avoir du plaisir [16]. Cependant, l’hypo-
thèse de l’automédication est revenue au premier plan grâce aux travaux de G. Awad. Il considère que la dysphorie induite par les antipsychotiques constitue un modèle établissant les liens entre addiction et schizophrénie. La consommation de cannabis vise non seulement à modifier l’expérience de la maladie mais aussi les effets secondaires notamment dysphoriques des antipsychotiques [17]. La dysphorie induite par les antipsychotiques que l’on retrouve sous différents termes comme « toxicité comportementale », « dépression akinétique » ou encore « Anhédonie induite par les neuroleptiques » rend compte de la vulnérabilité addictive chez certains patients atteints de schizophrénie. Si l’association entre la dysphorie aux antipsychotiques et la toxicomanie est forte, elle ne peut cependant pas être considérée comme causale, car l’abus de substances peut souvent précéder les premiers symptômes psychotiques et les premiers traitements [18]. L’essor des techniques de neuro-imagerie a permis de montrer que la déplétion cérébrale en dopamine constituerait la base neurobiologique commune à la dysphorie aux antipsychotiques et à la vulnérabilité aux addictions. Ces résultats peuvent se révéler utiles en clinique, car les réactions dysphoriques et les réponses subjectives négatives qui apparaissent tôt après l’instauration d’un antipsychotique constituent des marqueurs cliniques précoces permettant de repérer parmi les patients ceux susceptibles de développer une vulnérabilité à la toxicomanie. Ce syndrome a également des conséquences négatives sur l’adhésion au traitement. Plus récemment, l’hypothèse causale du « dommage » a vu le jour. Le cannabis exacerberait non seulement les symptômes psychotiques mais aussi la vulnérabilité à la schizophrénie [19]. En effet, la consommation de cannabis provoque une stimulation excessive des récepteurs endocannabinoïdes (CB1) par un de ses composants, le D-9-tétrahydrocannabinol (D9-THC-). De nombreux travaux précliniques ont démontré que celui-ci provoque une dysrégulation de l’activité dopaminergique via ses effets sur la balance GABAergique et glutamatergique [20] pouvant expliquer chez l’homme l’apparition de symptômes psychotiques. Pour la majorité des consommateurs adultes, les effets du D9-THC sur le système endo-cannabinoide sont transitoires. En revanche chez les enfants et les adolescents, le D9-T HC détériore les mêmes systèmes de régulation impliqués dans la maturation des circuits neuronaux, créant des anomalies durables et aggravant les éventuels facteurs de vulnérabilité génétiques ou acquis. Plus récemment, des travaux menés chez l’homme ont en effet démontré l’impact spécifique de la consommation de cannabis sur la vulnérabilité à la schizophrénie. La consommation chronique de cannabis modifie la morphologie des régions cérébrales riches en récepteurs cannabinoïdes. Dans une étude en imagerie cérébrale comparant des sujet consommateurs chroniques de cannabis à des sujets non consommateurs, Yucel et al [21] ont montré que la diminution de volume concernait spécifiquement le pole temporal interne, comprenant l’amygdale et l’hippocampe. Ces régions sont respectivement impliquées dans la régulation des informations émotionnelles et dans le traitement des informations mnésiques. La diminution de volume de l’hippocampe gauche était corrélée à la production de symptômes positifs de psychose. L’hippocampe serait la structure cérébrale où les effets de la consommation de cannabis interagissent avec les
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autres facteurs de vulnérabilité à la schizophrénie. En effet plusieurs études suggèrent que l’atrophie hippocampique observée dans la schizophrénie pourrait être liée à la diminution des interneurones GABAergiques des circuits hippocampiques. [22]. L’atrophie hippocampique serait précédée par un hyper-métabolisme glutamatergique contemporain de la phase prodromale de la maladie témoignant d’un dysfonctionnement de la balance GABA-Glutamate que la consommation de cannabis est susceptible d’induire [23]. L’ensemble de ces résultats suggère qu’il s’agit bien d’une association bidirectionnelle entre consommation de cannabis et psychose, en faveur à la fois de l’hypothèse des « dommages » et celle de « l’automédication », l’un majorant la vulnérabilité de l’autre et vice versa [5].
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maladie, de complications évolutives plus importantes et d’une diminution de la qualité de la vie ainsi que de l’espérance de vie. L’offre de soin et les recours thérapeutiques restent limités et rarement évalués. Au regard du retentissement sur les personnes qui en souffrent, sur leurs entourages et de l’impact médico- économique que ces troubles représentent, des mesures d’une part, organisationnelles sur les dispositifs de soin et d’autre part, incitatives sur la recherche et l’évaluation seraient nécessaires. Liens d’intérêts P. Thomas, A. Amad : activités de conseil et intervenant pour AstraZeneca, Janssen, Lundbeck, Otsuka, Servier. T. Fovet : l’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.
Perspectives thérapeutiques Plusieurs modalités de soins intégrés associant des prises en charge psychiatriques et addictologiques se sont développées : les thérapies cognitives et comportementales (TCC), l’entretien motivationnel avec ou sans TCC et le « case management ». Les indicateurs d’efficacité de ces différentes approches thérapeutiques ont fait l’objet d’une Analyse Cochrane [24] portant sur 32 essais réalisés sur un total de 3 165 participants. L’évaluation des soins intégrés à long terme n’a montré aucune différence significative sur des indicateurs tels que les sorties prématurées du protocole, la poursuite de la consommation de substances, l’évaluation globale du fonctionnement et de la satisfaction, la poursuite de la consommation d’alcool à 3 ans de même que la mortalité à 3 ans. Pour les auteurs, ce sont les biais méthodologiques des études qui expliquent les difficultés à confirmer la supériorité des traitements intégrés sur les prises en charge classiques. Concernant les traitements pharmacologiques, l’addiction représente habituellement un critère d’exclusion pour les études sur la schizophrénie alors que, comme les études le montrent, plus de la moitié des patients est concernée par les comorbidités addictives. Il n’y a donc que peu ou pas de données sur les recours pharmacologiques susceptibles d’être indiqués chez ces patients particulièrement difficiles à traiter. Les connaissances actuelles sur les fondements neurobiologiques restent peu étayées. La nicotine, la caféine, l’alcool, le cannabis la cocaïne, toutes ces drogues interagissent avec la transmission dopaminergique, glutamatergique et GABAergique, également impliquées dans la physiopathologie de la schizophrénie [25]. Les effets néfastes sur les structures et les fonctions du cerveau ont été mis en évidence surtout chez les patients pour qui l’alcool est la substance principale. La littérature actuelle suggère que les fonctions cognitives des patients répondant au double diagnostic seraient moins déficitaires que pour les patients non abuseurs souffrant de schizophrénie. Il n’y a à notre connaissance pas de travaux évaluant les traitements des addictions et de la psychose menés chez les patients comorbides. Conclusion Les comorbidités addictives concernent plus de la moitié des patients atteints de schizophrénie. Elles sont à l’origine d’un retard au diagnostic, d’une sévérité plus importante de la
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