Travailler dans un hôpital est riche de sens et source de mal-être : analyse qualitative auprès de 9 médecins hospitaliers

Travailler dans un hôpital est riche de sens et source de mal-être : analyse qualitative auprès de 9 médecins hospitaliers

Presse Med. 2016; 45: e233–e241 Travailler dans un hôpital est riche de sens et source de mal-être : analyse qualitative auprès de 9 médecins hospita...

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Presse Med. 2016; 45: e233–e241

Travailler dans un hôpital est riche de sens et source de mal-être : analyse qualitative auprès de 9 médecins hospitaliers

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en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.com

Richard Pougnet 1,2,3, Laurence Pougnet 4, Brice Loddé 1,2, Jean-Dominique Dewitte 1,2

Reçu le 7 mai 2015 Accepté le 20 octobre 2015 Disponible sur internet le : 21 mai 2016

1. Université de Bretagne occidentale, éthique, professionnalisme et santé, EA 4686, 29200 Brest, France 2. CHRU de Brest, centre de pathologies professionnelles, médecine du travail du personnel hospitalier, 29200 Brest, France 3. École doctorale sciences humaines et sociales, ED 507SHS, 35000 Rennes, France 4. HIA Clermont-Tonnerre, CC41 BCRM, 29240 Brest cedex 09, France

Correspondance : Richard Pougnet, CHRU Morvan, centre de pathologies professionnelles, 2, avenue Foch, 29200 Brest, France. [email protected]

Résumé Introduction > Les médecins sont amenés à voir la souffrance des malades et de leurs familles. Leurs conditions de travail sont souvent difficiles. Des études ont montré la prévalence importante de troubles réactionnels. Les facteurs de risque du syndrome d'épuisement professionnel sont différents à l'hôpital. Cette étude avait pour objectif de mettre en exergue ce qui est ressenti comme positif ou négatif au travail du point de vue de médecins hospitaliers. Méthodes > Il s'agissait d'une étude qualitative par entretiens. L'analyse se faisait selon une thématisation progressive en suivant la Grounded Theory. Les entretiens se faisaient de manière modale. Résultats > La variation et la saturation ont été atteintes avec 9 sujets. Ceux-ci ont exprimé des difficultés au travail, mais aussi des facteurs de ressenti positifs. Quatre grands thèmes ont été montrés en codage sélectif : l'organisation de travail, plutôt vécue comme subie ; le travail en équipe ; le travail à l'hôpital en tant que foyer de sens ; et le travail universitaire (au sens large d'enseignement et de recherche). Pour ces trois derniers thèmes, les relations avec le ressenti du travail était complexes. Le travail était à la fois source de bien-être et de mal-être selon les situations précisés dans les résultats. Conclusion > Le fait de travailler dans un hôpital est riche de sens pour les médecins interrogés. Mais c'est également une source de mal-être voire d'angoisse, compte tenu des facteurs organisationnels ou d'autres facteurs plus subjectifs.

Summary

tome 45 > n87–8 > juillet 2016 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.10.026 © 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Positive and negative perceptions at work: Qualitative study with physicians in a teaching hospital

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R. Pougnet, L. Pougnet, B. Loddé, J-D Dewitte

Introduction > Doctors see the suffering of patients and their families; their working conditions are often difficult. High prevalence of occupational diseases are shown in medical literature, especially burnout. Some risk factors are shown depending upon medical specialties and workplace, especially in hospital. The purpose of this article was to qualify these factors by qualitative research, according to hospital doctors' point of view. Methods > It was a study with interviews. The analysis was done according to the Grounded Theory. Results > Nine doctors were interviewed. They expressed difficulties and positive factors at work. Four major themes were demonstrated in selective coding: the organization of work, experienced as positive rather negative, teamwork, work at the hospital and academic work. The three last themes were both a source of well-being and ill-being according to the situations specified in the results. Conclusion > The fact of working in a hospital is meaningful for physicians surveyed. But it could also be source of ill-being and anxiety.

L

e médecin est amené à voir des personnes en état de souffrance. Ceci a un impact sur le patient et sur le médecin [1]. Ce métier engage le médecin, humainement et émotionnellement [2]. Des études ont montré les effets sur la santé des médecins. Le syndrome d'épuisement professionnel atteint de nombreux médecins [3]. La prévalence peut varier de 30 à 70 % chez les médecins généralistes [4–6]. La prévalence varie selon la spécialité exercée, ou les pays [7]. Des troubles anxieux ou des troubles de l'humeur réactionnels ont été observés [8–10]. La prévention de ces syndromes est possible : organisation, psychothérapie etc. [11]. Cette prévention est difficile tant les facteurs de risque sont nombreux : la tension psychique permanente, le travail en équipe (voire en partenariat avec d'autres équipes médicales) et la charge de travail, notamment, favorisent ce syndrome [4,12].

Ce qui était connu 

Le travail de médecin hospitaliers implique de nombreuses tâches : soins, recherche, enseignement.



Les troubles anxieux ou les syndromes d'épuisement professionnel sont fréquents.



Selon les études quantitatives, certaines organisations de travail sont des facteurs de risques.

Ce qu'apporte cet article 

Le sentiment de responsabilité par rapport au patient ou aux confrères de ville donne du sens au travail.



Les relations entre confrères et avec les paramédicaux sont à construire dans le temps.



La forte pression économique et les impératifs économiques sont

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perçus comme des sources de mal-être au travail.

La spécialité, le lieu et les conditions d'exercice influenceraient la santé et le ressenti du médecin dans son travail. Ce ressenti n'est que rarement exploré de manière qualitative. Nous avons analysé ce ressenti de manière thématique, selon la Grounded Theory.

Méthodes Cette étude qualitative par entretiens a exploré les représentations que les médecins d'un hôpital se faisaient des facteurs de bien-être et de mal-être au travail dans un centre hospitalier universitaire (CHU). Afin d'atteindre une variation maximale, un enquêteur (RP) a choisi des médecins selon différents critères : âge (moins de 30 ans, entre 30 et 40 ans, entre 40 et 50 ans et plus de 50 ans), sexe, spécialité en fonction des grandes catégories issues de l'examen classant national (médecine générale, chirurgie, spécialité médicale, gynécologie, pédiatrie, psychiatrie, urgence-réanimation, laboratoire), type d'activité (hospitalisation, consultation, plateau technique), de l'hôpital d'exercice (le CHRU de Brest étant répartis sur 3 sites principaux : Morvan, Cavale Blanche, autre), du type de contrat (praticien hospitalier, patricien contractuel, praticien attaché), de l'activité universitaire ou non (non universitaire, universitaire titulaire et non titulaire) et enfin, de la place dans l'institution (être chef de service ou non). Cette classification reposait sur l'hypothèse que les facteurs étudiés pouvaient varier en fonction de ces paramètres. L'enquêteur a choisi arbitrairement 12 personnes à partir du listing des médecins (il connaissait à peu près l'âge et la fonction de chacun), pour avoir un corpus diversifié [13,14]. Le contact se faisait par mode d'accès direct par téléphone ou par courriel [13]. Après une information sur l'étude et la garantie de l'anonymat, l'enquêteur recueillait le consentement. Les entretiens ont été réalisés entre décembre 2014 et mars 2015. Les entretiens étaient effectués dans un bureau, en privé [15]. Les entretiens ont été menés par un médecin ayant réalisé des

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Figure 1 Flow chart

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analysé en lui-même au fur et à mesure de l'étude (figure 1). Le codage axial était le regroupement en catégories des codes ouverts. Lors de la phase de codage sélectif, les codes axiaux étaient regroupés en thèmes au sein desquels les relations étaient établies [14].

Résultats Sur les 12 médecins du CHRU de Brest sélectionnés, il y a eu un refus. Deux médecins n'ont finalement pas été interrogés faute de disponibilité d'une part, et d'autre part parce que la saturation avait été obtenue. Neuf médecins ont participé à l'étude (figure 1). Les durées des entretiens ont été de 28 minutes à 1 heure et 52 minutes. Le codage ouvert a été réalisé par entretien. Le codage axial a débuté dès le deuxième entretien. La saturation des données sur le codage axial a été obtenue dès le sixième entretien. Les 3 autres entretiens ont confirmé ce codage. La variation maximale a été atteinte dès le septième entretien. Il y avait au moins un sujet dans chaque catégorie (tableau I) et dans chaque tranche d'âge. Il y avait 396 codes ouverts. Quatre thèmes ont été définis : le travail à l'hôpital, le travail en équipe, l'organisation du travail et le travail hospitalouniversitaire.

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études qualitatives, que ce soit pour mener des interviews ou pour analyser le verbatim. Les entretiens étaient enregistrés sur un dictaphone Olympus® appartenant à l'enquêteur, puis retranscrits sur son ordinateur. L'anonymat était assuré : les noms des sujets ne figuraient ni sur l'enregistrement ni sur les fichiers ; les situations trop évocatrices ont été remplacées dans le verbatim par des expressions générales indiquées entre crochets : « [. . .] ». Les entretiens étaient planifiés pour durer le temps nécessaire pour que la personne interviewée s'exprime. Les entretiens étaient structurés de manière modale avec une consigne initiale large : « quels sont pour vous les facteurs positifs et négatifs sur votre ressenti au travail ? ». L'entretien était alors semi-dirigé, selon une approche dite « peu structurée », afin de laisser à la personne interrogée toute latitude pour exprimer et développer tant son ressenti que les représentations de son travail en CHU [13]. L'enquêteur utilisait des techniques de reflets et de relances [13,16]. L'analyse qualitative consistait en une thématisation continue de l'ensemble du verbatim de l'ensemble du corpus [17]. La catégorisation se faisait en trois étapes selon une méthodologie systématique issue de la grounded theory : codage ouvert, codage axial et codage sélectif [18,19]. Lors du codage ouvert, l'enquêteur repérait chaque idée et lui attribuait un code et une brève qualification thétique. Chaque entretien a ainsi été

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TABLEAU I Répartition des sujets selon le sexe et le statut professionnel Sujets

Sexe H

Statut F

Hospitalo-universitaire Titulaire

A

X

B

X

C

X

D

X

E

X

F G

PH temps plein

PH temps partiel

PH contractuel

PA

X X X X X

X

X

X

H I

Non titulaire

Hospitalier

X X

X

X

X

PH : praticien hospitalier ; PA : praticien attaché. Répartition par hôpital : Morvan = 2 ; Cavale Blanche = 4 ; Morvan et Cavale Blanche = 2 ; autres = 1. Répartition selon le type de spécialité : médecine générale = 1 ; chirurgie = 1 ; spécialité médicale = 3 ; gynécologie = 1 ; psychiatrie = 1 ; urgence-réanimation = 1 ; médecin en laboratoire = 1. Répartition selon le type d'activité (redondance possible) : hospitalisation = 4 ; consultation = 5 ; plateau technique = 3.

Le travail à l'hôpital

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Les sujets ont exprimé le fait qu'il y avait un sens à travailler à l'hôpital. Le travail à l'hôpital était associé à l'idée de pratiquer des activités particulières, touchant des pathologies et des techniques très variées (« ce n'est qu'au CHU que je peux faire cette activité » ou encore « point positif, la variété de la technique »). L'hôpital a une valeur symbolique de la qualité des soins, du « bon soin ». Un soin à la pointe de la médecine, qui est une ressource pour les médecins de ville, et qui permet toujours de pousser la limite des capacités médicales. Pour un médecin, la difficulté des pathologies était un « défi intellectuel » qui appelait à être relevé au point d'en devenir « passionnant ». Le travail à l'hôpital est porteur d'un altruisme à la fois projeté dans la technique et la recherche : « c'est plus pour le côté recherche et développement. Ça j'aurais jamais en libéral. Donc notre activité, pour moi, c'est ça ». Mais aussi projeté dans le côté relationnel et l'intérêt général de la population : « c'est ça l'intérêt de l'hôpital : on s'ouvre sur beaucoup de choses (. . .) les missions d'intérêt général » (exemple ici évoqué : l'humanitaire). Les sujets ont exprimé un sens accru de la finalité de leur travail et de leur responsabilité vis-à-vis des patients. Il existait un stress dû à la gravité des situations : « j'arrivais pas à déconnecter du boulot. Je rentrais chez moi, je me disais : "oh, j'ai oublié ça''. . . Je rappelai le service ». Un autre sujet explicitait bien cette inquiétude : « j'ai bien en tête que cela fait parti du boulot. . . mais ça peut être un peu usant ». Par opposition, certains sujets exprimaient cette responsabilité comme étant objet de plaisir : « je ne suis pas certain que cela fasse partie de la pénibilité. . . Certains sont venus dans ce métier un peu pour ça aussi ». Mais les médecins percevaient une menace sur le sens du travail à l'hôpital. Pour eux, trois grandes dimensions de l'institution

mettaient en cause le sens du travail à l'hôpital : le primat donné à l'économie ; l'invasion administrative, c'est-à-dire le poids de plus en plus important des démarches et obligations réglementaires à remplir ; et le manque de considération pour les agents de terrain, y compris médicaux. Le primat de l'économie est perçu comme véhiculé par l'institution hospitalière : « c'est dur ; la direction ne voit que le côté économique ». Une phrase exprime bien ce sentiment des médecins quant au décalage des points de vue : « dans les réunions, de quoi on parle ? Ben on parle pas de malades. . . On parle finance. Moi, je ne peux pas. Moi, je peux pas. ». Ce médecin poursuivit son analyse : « on perd un peu de notre âme à l'hôpital. Je ne suis pas d'accord avec ces idées de faire [tel travail] à toute vitesse. (. . .) Le service public est pour les choses qui sont lourdes ». Quant à l'invasion de l'administration, elle se manifeste par l'inflation des démarches réglementaires telles que la certification, la validation, le codage etc. « Je trouve ça lourd. C'est quelque chose que j'ai pas le temps de faire sur mon temps de travail. Le soir, je donne à manger aux enfants et puis souvent, je reprends vers 21 h 30 [ou autrement, c'est] le samedi et le dimanche quand je ne suis pas de garde ». Les médecins trouvaient ces démarches pesantes car elles se faisaient en dehors des heures de travail ou au détriment des soins. Les réactions étaient parfois violentes : « parler de codage pour rapporter des sous, moi, ça me débecte. . . Ca me débecte (. . .) Moi, j'aurais su que la direction serait aussi difficile, à ne voir que l'aspect économique, je serais allé dans le privé. C'est vraiment insupportable ». Les sujets ont montré une forte implication dans leur travail à l'hôpital, selon les représentations des soins qui peuvent ou

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Figure 2 Carte conceptuelle du ressenti des médecins hospitaliers par rapport à leur travail. Le ressenti du médecin est au centre de la figure. Les 4 principaux thèmes sont en gris. Les sous-thèmes ressentis comme délétères sont en jaunes ; ceux ressentis comme des aspects positifs sont en vert clair. Les liens négatifs sont illustrés par des flèches angulaires rouges, tandis que les liens positifs le sont avec des flèches arrondies vertes

Le travail en équipe Le travail en équipe se concevait en fonction de la confraternité entre médecins, du rapport particulier avec le chef de service et

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enfin, en fonction des rapports avec les paramédicaux (figure 2). La confraternité entre médecins peut être perçue de manière rassurante, voire anxiolytique. Un médecin me confia en parlant des difficultés qu'elle avait eu avec certaines situations cliniques : « comment, moi, me protéger et tout ça ? Je pense que c'est en discutant avec mes collègues médecins. Ça, c'est un avantage de pas être seule ». La relation confraternelle était parfois le lieu d'une catharsis : « c'est impossible d'encaisser ça (les décisions face aux situations grave), si t'évacues pas. . . Ou alors à un moment tu deviens rigide ». A contrario, une autre se sentait seule parce qu'elle n'avait plus la possibilité de discuter avec ses collègues, faute de temps pour organiser

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devraient y être faits. Si l'activité particulière était un attrait au CHRU, les difficultés liées à l'institution elle-même étaient considérées comme « lourdes ». Il existait finalement une balance permanente entre ce que les médecins pouvaient faire et la charge de l'administration et de la question économique. En résumé me dit un médecin : « ce qui me fait tenir le coup, c'est de ne pas avoir d'autre alternative », puisque son activité ne pouvait pas se pratiquer hors de l'hôpital.

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des réunions de dossiers : « c'est un stress de dire : mince y a que moi ». Ce soutien confraternel se manifestait particulièrement autour de l'acquisition de son statut de médecin, au fur et à mesure de la carrière. Ainsi, un assistant me dit : « je peux compter sur les PH quand j'ai besoin » ; tandis qu'un PH expérimenté commentait ainsi son attitude à propos d'un autre chef de clinique : « il est chef de clinique, c'est normal que je sois là un peu pour l'épauler ». Mais ce travail au contact quotidien de confrères pouvait comporter des aspects délétères pour le médecin. Par exemple dans la perception de son propre dévouement : « [en parlant d'un confrère d'un autre service avec lequel la personne travaille chaque jour pour partager des avis] il me fait : "c'est bien planqué ton travail''. (. . .) Y a des remarques des fois (. . .) Moi, ça m'agace ». Ou encore, les difficultés entre confrères pouvaient être dues à des facteurs sociologiques : « il y a toujours des petites tensions générationnelles (. . .) sur la hiérarchie ». Enfin, l'incompréhension des différents statuts des médecins, en particulier sur les prérogatives des hospitaliers (H) et des hospitalo-universitaires (HU) pouvait entraîner de vives rancœurs : « j'ai quand même du mal à faire comprendre aux collègues [PH] qu'il y a le travail hospitalier et puis, dans AHU, y a le travail HU à côté aussi. Certains pensent que je devrais faire le même travail hospitalier. . . Un 200 % quoi ! ». Enfin, il existait une certaine forme de discrimination à l'égard des femmes enceintes : « au retour ça été dur ; il m'a donné plus de travail. . . J'ai trouvé que c'était une punition ». Les relations confraternelles semblaient donc comporter tant des aspects conflictuels que des aspects nécessaires au bienêtre au travail. Les sujets avaient des hypothèses de facteurs permettant de favoriser une bonne entente confraternelle (figure 2) : « une des difficultés de mon travail a été l'articulation de deux médecins. On s'entend bien mais on est différentes. Et prendre en charge les mêmes patients, c'est un exercice redoutablement difficile (. . .) Ça nous a obligé à instaurer une transmission narrative ». Mais ce dialogue est à construire. Il faut résister à la tentation de détenir seul le pouvoir médical pour poser une confiance capable de surmonter les questionnements : « en théorie on se fait confiance ; mais quand le traitement est modifié on se dit : mais pourquoi elle a fait ça ? ». Ces relations confraternelles étaient fragilisées par le travail en équipe, c'est-à-dire avec des paramédicaux. « Surtout que les équipes soignantes peuvent très bien s'infiltrer dans cette faillelà et, même inconsciemment, prendre partie [entre les différents médecins lorsqu'il y a des différences d'avis entre deux médecins] ». Les relations avec les paramédicaux engageaient les médecins du point de vue affectif. Par exemple, certains médecins ressentaient l'angoisse des paramédicaux : « c'est plus tendu depuis qu'on sait qu'il y aura des suppressions [de postes] ». Beaucoup concevaient leurs relations

professionnelles comme un travail en binôme fondé sur la complémentarité des compétences. Mais ceci nécessitait un travail d'élaboration de cette collaboration. Le chef de service quant à lui était perçu comme une protection et une écoute : « je ne peux pas dire que j'ai une souffrance dans le travail parce que j'ai un chef de service qui est vraiment à notre écoute ». Le chef de service reconnaissait les besoins de ses confrères : « c'est le chef de service et le chef de pôle. Ça leur demande du travail. Ils ont défendu le projet ».

L'organisation du travail à l'hôpital La perception de l'organisation de travail était marquée par un désaccord entre les conceptions des institutions et celles des médecins ; ainsi que par un déchirement entre l'évaluation des besoins sanitaires croissants et celle des moyens, en pleine diminution. Pour certains, le travail réel devenait de type sacrificiel entre leurs différentes missions (figure 2). Les médecins avaient une connaissance pratique de leur service qui ne coïncidait pas toujours avec les approches des institutions. « Y a eu erreur à la construction. On n'a pas ajouté au volume de patient [c'est-à-dire au flux] le taux de charge lié aux soins qu'on doit lui faire. Et du coup, comme on a regardé le volume [tant de patients par heure et par médecin] (. . .), ben, ça ne marche pas ! On peut très bien être en situation d'échec avec 2 malades dans l'heure [en fonction du soin à faire] ». Il existait une certaine anxiété par rapports aux carrières. L'obtention des postes manquait de prévisibilité : « j'ai été embauché sur [tel poste]. Le problème, c'est que ça été supprimé. . . On l'a appris quoi. . . un mois avant ». Ces incertitudes constituaient une inquiétude pour les non-titulaires : « c'est quand même un stress de savoir que même à bac +10 ou 12, on . . . voilà, on nous déroule pas le tapis rouge non plus ». La recherche d'un poste devient un rapport de forces qui est en défaveur du jeune médecin : « je suis pas en position de force, ça c'est évident ». Ces derniers étaient parfois obligés de faire des compromis importants : « y avait pas de poste. Donc, soit c'était la médaille d'or, soit c'était l'année recherche ». Les médecins décrivaient leur travail comme exposition à différents types de « pressions », temporelles ou de volume. Globalement, l'impression était que la charge de travail s'accompagnait d'une diminution des moyens mis à disposition : « par rapport à il y a 20 ans, le nombre de patients augmente, l'âge n'est plus du tout le même, les soins aussi ». Cette inadéquation entre missions et moyens se focalisait principalement sur le nombre de soignants mis à disposition pour les missions réelles de soins, d'enseignement et de recherche. Le travail prescrit semblait ainsi devenir impossible aux sujets. Certains décrivaient une stratégie sacrificielle dans leur travail réel. Ainsi, certaines missions étaient délaissées au profit d'autres. « C'est impossible de tout gérer. Que tout soit nickel (soins, courriers etc.) avec les internes à gérer. C'est

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Le lien entre l'hôpital et l'université Pour les activités universitaires, les médecins étaient partagés. Il y avait d'un côté, la richesse de l'expérience et l'excellence de la mission, et de l'autre, la charge d'une mission « énorme » pour laquelle ils pensaient manquer de soutien. L'expérience des relations humaines multiples avait un côté stimulant. « Y a des IDE, des sages-femmes, des PCEM1, des (. . .) publics très différents. Être universitaire, c'est une belle fonction ». La stimulation intellectuelle s'articule autour d'un renouvellement permanent des connaissances et des savoirfaire, et autour de l'audace de l'innovation. Le fait d'enseigner et de former les gens est un engagement qui mobilise toute la personne au point d'être comparé à la paternité. « On a des relations familiales père–fille et père–fils (. . .). Plus le temps passe et plus je trouve que cette relation est très agréable et me pousse à transmettre ». En outre, la participation à la vie de l'université était considérée comme un élan vers l'excellence. Un perfectionnement pour soi : « les cours, je me suis dit que c'était une bonne expérience ; c'est toujours ça de pris ». Ou encore un perfectionnement des autres, une sorte de propulsion vers soi : « vous vous rendez compte : vous recevez un interne dans le service, 8 ans après, vous en faites un chirurgien. C'est-à-dire que pendant 8 ans, vous l'avez côtoyé, vous l'avez aidé, il est venu avec vous, vous lui avez donné un sujet de thèse, un de DU, un mémoire de ceci et de cela. . . Il a été chef ; il a appelé quand il était dans la "merde'', vous êtes venu. Bref, on les élève en fait ; c'est nos enfants ». Les sujets ont manifesté, pour une partie, de la lassitude, voire une désillusion par rapport au travail universitaire : « j'ai été un peu échaudée par la masse de travail (. . .) J'ai l'impression d'avoir été usée. . . d'avoir un contre coup de fatigue ». C'est que l'investissement demandé est « énorme » : « j'ai trop fait. Non, non, les nuits blanches, je referai plus ». Plusieurs facteurs participaient à cette lassitude. Par exemple, le nombre d'enseignants était jugé insuffisant : « ça devient de l'industrie. Le nombre d'externes, ça [augmente] (. . .) et le nombre d'enseignants est pareil qu'avant ». Ou bien, les médecins pensaient faire le travail de secrétaires. Ensuite, et de manière plus vive dans les propos, les sujets considéraient qu'il y avait à la fois un conflit entre les rôles hospitaliers et les rôles universitaires, et que l'institution même de l'hôpital exerçait son emprise pour réduire les HU à leur

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valence hospitalière pure. Les universitaires se sentaient ainsi incités à travailler à l'hôpital autant que les hospitaliers : « ah ben je vais vous dire. Pour l'hôpital, que l'on soit PH temps plein ou que l'on soit universitaire, c'est-à-dire mi-temps, ce qu'on veut de nous c'est qu'on [fasse des soins] toute la journée ». Le manque de reconnaissance de l'investissement dans la recherche et l'enseignement était parfois perçu comme une violence institutionnelle. Il existait une sensation de manque de reconnaissance : « notre reconnaissance par la direction, qui ne voit en nous que des opérateurs, est un peu faussée. Elle est même bien faussée parce qu'ils ne voient que le côté hospitalier » ; « tout ce que l'on a pu fournir, notre reconnaissance à l'extérieur, c'est du travail personnel. Et ça, c'est lamentable parce que l'hôpital n'en a que faire, ne considère pas ça ». L'une des craintes était de ne pas parvenir à des résultats dans les temps impartis, et une autre crainte était de voir leur vie privée envahie par ces activités. D'une part, ils travaillaient sur des temps de « loisir » : « tout ce qu'on peut faire, pour les préparations de cours, pour la fac, pour les articles. . . C'est énorme ! Je bosse surtout le soir ». Et d'autre part, il y avait réellement des conséquences sur leur vie familiale.

Discussion Cette étude qualitative a décrit le ressenti des médecins face à leur travail dans un CHRU. L'analyse thématique a montré que plusieurs facteurs influençaient la perception des médecins, négativement ou positivement. Le travail à l'hôpital était investi d'une forte valeur symbolique, ainsi que d'un fort sentiment de responsabilité par rapport aux patients et aux collègues de ville. La participation à l'activité universitaire était conçue comme un foyer d'excellence et de perfectionnement. Ces deux pôles de valeurs étaient soumis à la pression sociétale de pensée calculante et de considérations économiques [20]. L'impression générale était l'inadéquation croissante des moyens, perçus comme allant piano, contre les besoins sanitaires, considérés comme allant crescendo. Le corollaire était la mauvaise considération des organisations de travail, vécues souvent, mais non nécessairement, comme inadaptées pour l'exercice médical. Un dernier centre de valorisation du travail et de bien-être au travail était le fait de travailler en équipe, principalement explicité sous l'angle de la confraternité médicale, et, dans une moindre mesure, sous celui des relations avec les non-médicaux. Les représentations de ces relations étaient structurées autour de la question de l'enrichissement mutuel et du soutien. Les sujets semblaient considérer ces-dites relations comme étant à construire dans le temps, au risque de devenir plutôt facteur de malêtre au travail, notamment en ce qui concerne le rapport dans l'exercice du pouvoir médical. Les catégories utilisées pour sélectionner la population étaient fondées sur un a priori clinique des auteurs. L'expérience clinique leur montrait que les médecins avaient des ressentis variables selon ces paramètres. Ceci aurait pu constituer une

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complètement utopique ». La stratégie sacrificielle ne concernait pas que les missions des médecins. Ils se sacrifiaient euxmêmes, du moins, symboliquement, en renonçant à certains droits et à certains besoins. C'était en particulier le cas des vacances. La conséquence était de « n'avoir plus le temps pour soi », ni pour sa famille. Ce dernier point était une grande crainte des sujets, à savoir ne plus voir sa famille et déserter cette dimension de leur existence.

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R. Pougnet, L. Pougnet, B. Loddé, J-D Dewitte

limite pour la description des facteurs influençant le ressenti au travail. Cependant, le principe de la Grounded Theory est d'être une méthodologie d'analyse qualitative partant d'une donnée réelle. L'analyse de la littérature montre que ces paramètres sont connus pour influencer le bien-être au travail, voire pour augmenter le risque de souffrance au travail. Ces paramètres ont été pris en compte dans cette étude : les conditions de travail, telles que le fait d'avoir plusieurs employeurs ou des injonctions paradoxales, ce qui était le cas des universitaires étudiés ; ou bien celui d'avoir un contact avec le public, ce qui dépendait dans cette étude du type d'activité, ou encore, celui de travailler dans plusieurs collectifs de travail, ce qui était le cas pour les médecins travaillant sur différents sites. La sélection de la population paraissait ici appropriée aux objectifs de l'étude, tant a priori, selon la méthodologie utilisée, qu'a posteriori en comparant les données de la littérature. Le fait que l'enquêteur ait été un médecin pourrait sembler une limite dans la mesure où son recul était différent de celui d'une personne extérieure à la population étudiée [21]. Cela a permis de mieux comprendre le langage oral des personnes interrogées et d'accéder aisément au terrain et la population étudiée [21]. Les études qualitatives portant sur les médecins des hôpitaux sont peu fréquentes. Elles sont pourtant faites pour étudier les perceptions et les points de vue des personnes [22]. Larsson et al. ont étudié les facteurs de stress au travail des anesthésistes par cette méthode [23,24]. Ils ont montré que le stress était conditionné par 5 thèmes dans leur population de 19 anesthésistes suédois analysée par entretiens individuels : la haute technicité, les questions éthiques, les conditions de travail pénibles, les relations confraternelles et les facteurs extra-professionnels. Dans notre étude, certains thèmes concordaient, en particulier autour des conditions de travail, de la pression technique et temporelle, et de la vie personnelle. Notre étude portait sur une population de toutes spécialités et les expressions de ces dimensions étaient différentes. Nous avons montré que certains facteurs étaient à la fois perçus comme potentiellement positifs et négatifs. C'était le cas des relations et des conditions qui permettaient cette relation. Si la comparaison des deux études est fructueuse, notre étude apportait un éclairage plus général sur la situation des médecins dans un CHU. Notre étude est plus comparable avec celle de KaradzinskaBislimovska et al. qui ont étudié les facteurs de stress des médecins et des infirmières de leur hôpital de Macédoine, ainsi que les facteurs influençant la qualité des soins, au moyen d'une étude qualitative par groupes [25]. Plusieurs thèmes se rejoignaient dans leur étude et dans la nôtre. En premier lieu, les soignants exprimaient également une haute opinion du sens de leur travail : « we are health professionals and we are proud of our work ». Ensuite, les relations confraternelles entre médecins étaient également perçues comme un soutien, en particulier pour la prise de décision des jeunes médecins : « we are

independent in decision making, if we need help we have support » [25]. Les soignants de l'étude de KaradzinskaBislimovska et al. se sentaient aussi en tension entre leur vie professionnelle et leur vie familiale : « all problems and frustrations we deal with at work we carry back to the home; the whole family experiences these frustrations once again; the family suffers and experiences nervousness » [25]. En ce qui concernait les facteurs de stress, Karadzinska-Bislimovska et al. montraient que les soignants de leur hôpital se sentaient également soumis à ce que nous avons appelé une pression temporelle et une pression de volume importantes ; de même, les soignants de l'étude de Karadzinska-Bislimovska et al. se considéraient en nombre insuffisant pour faire leur travail [25]. Il existait entre les deux populations des différences d'appréciations notables sur certains sujets. Dans notre étude, les médecins souffraient des difficultés d'obtention de poste et de la précarité de certains statuts médicaux. À l'inverse, la souffrance liée aux carrières dans l'étude de KaradzinskaBislimovska et al. était due au manque de moyen pour participer au congrès : « because of deficiency of time and money we are not able to attend international meetings and to visit hospitals in foreign countries » [25]. La perception de la relation confraternelle ressortait peu de l'étude macédonienne. La principale différence se situait dans l'appréciation de l'impact des politiques de santé sur le soin quotidien. Notre population ressentait cela comme une nouvelle dynamique en pleine accélération. Mais, surtout, cette dynamique, issue d'une nouvelle vision du système de soins marquée par le primat de l'économie, était relayée diligemment par les différentes strates administratives. Ces différences peuvent s'expliquer par la différence de méthodologie. Notre étude ayant été réalisée par entretiens individuels, les conceptions personnelles et les ressentis pouvaient y être exprimés alors que, dans une approche de groupe, il s'agit plus de représentations issue d'un travail d'élaboration commun. Les deux approches méthodologiques se complètent.

Conclusion Le travail de médecin dans un structure hospitalo-universitaire comprend des aspects particuliers, tels que le travail en équipe, le manque de maîtrise des moyens, ou encore la participation au travail universitaire. Différents statuts médicaux peuvent s'y trouver, avec des missions variées. Cette étude a montré quel était le ressenti de médecins par rapport à cette situation de travail, mais aussi par rapport à leur travail même. Le fait de travailler dans un hôpital semble en lui-même source de valeurs et de sens dans le soin. Le travail avec les collègues était à construire en équipe, et avait une influence notable sur le ressenti au travail. Le travail universitaire était partagé par des médecins hospitaliers et des médecins hospitalo-universitaires. De manière générale, les organisations de travail pour répartir les deux types de missions, hospitalières et universitaires, ne semblaient pas toujours évidentes pour les médecins. Cette

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étude a mis en évidence, selon une approche narrative, certains déterminants de la santé au travail des médecins dans un CHU. Ceci peut être utile pour mieux cibler des actions de prévention, ou encore pour réfléchir à la manière dont les missions et les communications sont réalisées dans un CHU.

Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.

Article original

Travailler dans un hôpital est riche de sens et source de mal-être : analyse qualitative auprès de 9 médecins hospitaliers

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