A propos d'une observation de colique saturnine liée à une ingestion de plombs de chasse

A propos d'une observation de colique saturnine liée à une ingestion de plombs de chasse

/ A propos d'une observation de colique saturnine li( e une ingestion de plombs de chasse V. DURLACH*, F. LISOVOSKI*, G. OSTERMANN*, A. GROSS* M. LEU...

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A propos d'une observation de colique saturnine li( e une ingestion de plombs de chasse V. DURLACH*, F. LISOVOSKI*, G. OSTERMANN*, A. GROSS* M. LEUTENEGGER*

Acute plumbism due to the ingestion of leadshot. Mots cl~s: eolique saturnine, plomb de chasse, appendicectomie.

Rev M ( d interne 1987 ; 8 : 419-420.

L'intoxication aigu~ par le plomb li6e/t l'ingestion de plombs de chasse est tout/t fait exceptionnelle en pathologie humaine. Une observation originale nous permet d'illustrer cette donn6e.

n6anmoins la surprise de d6couvrir de nombreux plombs de chasse radio-opaques (29 au total) diss6min6s dans le tube digestif et semblant se Iocaliser au niveau colique et appendiculaire (fig. 1). En l'absence de tout argument en faveur d'une 6tiologie lithiasique et du fait de ce contexte particulier, deux diagnostics 6taient 6voqu6s: crise de porphyrie aiguE et colique aiguE au plomb sachant qu'un saturnisme professionnel ou hydrique (r6gion d'origine/l sol calcaire) semblait d'embl6e devoir 6tre 61imin6. La biologie permettait de confirmer ce diagnostic de

OBSERVATION Un homme de 36 ans, agriculteur, avec dans ses ant6c6dents plusieurs 6pisodes de colique n6phrdtique (d6butants en 1969 et mis sur le compte de lithiases d'oxalate de calcium) 6tait hospitalis6 en urgence pour un syndrome douloureux abdominal aigu et apyr6tique, rebelle au traitement antalgiqueantispasmodique habituel. On notait, par ailleurs, que ce patient, grand consommateur de gibier, ingerait r6guli6rement des plombs de chasse. Cliniquement la symptomatologie douloureuse pr6dominait dans la fosse iliaque gauche, l'abdomen 6tait souple avec un discret m6t6orisme, les orifices herniaires libres et le toucher rectal normal. On remarquait une discr6te hyperleucocytose (10000 polynuct6aires neutrophiles) alors que le reste du brian biologique standard 6tait sans dnomalie (absence de syndr6me inflammatoire, d'an6mie, d'hyperuric6mie). Les urines 6taient st6riles. L'dchographie r6nale 6tait normale on pratiquait n6anmoins une urographie intraveineuse ; si celle-ci ne montrait pas d'anomalie morphologique ou fonctionnelle r6nale, on avait

* Clinique mddicale, h@ital Robert-Debr~, Reims Cedex.

CHU 51092 Fig. 1 Requ le 23-7-1986. Renvoi pour correction le 21-11-1986. Acceptation d6finitive le 17-12-1986.

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La Revue de M~decine interne Septembre-Octobre 1987

V. Durlach et coll.

Tableau

DISCUSSION

I

E V O L U T I O N DES P A R A M I ~ T R E S S A T U R N I N S P L A S M A T I Q U E ET U R 1 N A I R E

6 16 19 5 Aofit Aofit Aofit Sep. -- Plomb6mie --

Plomburie : -- de base -- sous EDTA 8 h/13 h 13/8 h Totale

Acide delta aminol6vulinique

764 108 1 330 2 193 2 593

522

245

368

172

15 Sep. 316 37

427 567 5 346 994

432 721 1153

--

276

132,3

Valeurs normales : Plomb6mie : < 400 microg/l Plomburie de base : < 80 microg/24 h Plomburie sous EDTA apr+s 2 4 h : < 1000 microg/24 h Acide delta aminol6vulinique : 7,6 ~. 38 micromol/ 24 h Perfusion d ' E D T A : du 16 au 19 aofJt Lavement 6vacuateur : 16 aofit Appendicectomie : 5 septembre

colique aiguE au pl0mb (tableau I). Dans un premier temps le traitement associait donc un lavement 6vacuateur, puis une perfusion d ' E D T A (1 g/j pendant 3 jours) suivis d'une nette am61ioration clinique et biologique (tableau I). N6anmoins, l'abdomen sans pr6paration objectivait la persistance d'un contingent de plombs de chasse semblant s6questr6s dans l'appendice. On 6tait donc amen6 & proposer une a.ppendicectomie de faqon ~ 6radiquer le gite saturnm. Celle-ci 6tait pratiqu6e dans les semaines suivantes permettant une quasi-normalisation des param6tres biologiques (tableau I) et la disparition de t o u s l e s plombs radio-opaques sur l'abdomen sans pr6paration de contr61e.

Les manifestations d'intoxication li6e a l'ingestion de piomb solide, si elles sont |argement document6es dans la litt6rature v6t6rinaire (1, 2), restent tout fi fait exceptionnelles en pathologie humaine et plus particuli6rement sous leur forme aigu~. Nous n'avons retrouv6 qu'un seul cas document8 chez un enfant ayant ing6r6 les fragments d'un jouet (3). De mSme chez l'adulte, on rapporte un cas de polyneuropathie saturnine li6e h une s6questration appendiculaire de plombs de chasse (4) r6gressive apr6s appendicectomie, sans manifestation aigue. La fr6quence de la persistance d'un gite appendiculaire saturnin a pu 8tre 6valu6 ~_ 0,21 p. 100 sur l'6tude de 71 000 pi6ces d'appendicectomie (5), souvent asymptomatique, ailleurs responsable d'appendicite gangr6neuse ou de p6ritonite appendiculaire en l'absence d'616vation de la plomb6mie (6, 7). L'absorption digestive du plomb se fait essentiellement au niveau de l'intestin gr61e et de faqon plus r6duite au niveau du c61on. La persistance de plomb dans le c61on et l'appendice a donc permis la diffusion de ce dernier dans la circulation g6n6rale probablement facilit6e par un s6jour prolong6 et une longue mac6ration [Sollman cit6 par (4)]. Deux points restent cependant obscurs : l'absence de signe d'intoxication chronique par le plomb d'une part, chez ce patient qui se savait porteur de plombs de chasse depuis plusieurs ann6es et d'autre part le facteur d6clenchant des manifestations aigu~s. On peut 6voquer la possibilit6 d'un stockage du plomb au niveau du squelette & partir d'une absorption digestive progressive. Le saturnisme peut rester pauci voire asymptomatique et & l'occasion d'une immobilisation ou d'un stress peut se produire une lib6ration brutale du stock avec apparition de signes aigus. I1 ne s'agit que d'une hypoth6se pourtant corrobor6e par la r6ascension de la plomburie provoqu6e 10 jours apr6s l'intervention. Ce cas exceptionnel d'intoxication aigue par le plomb li6e ~ une s6questration colo-appendiculaire de plombs de chasse nous permet de souligner l'int6r6t de deux donn6es: mS.cher soigneusement le gibier avant de l'avaler (!), pratiquer syst6matiquement un ASP devant tout tableau douloureux abdominal aigu.

BIBLIOGRAPHIE

1. Kendall ILl, Scanlon PF, Di Giulio RT, Toxicology of ingested lead shot in ringed turtled doves. Arch Enrivon Contam Toxicology 1982 ; 11 : 259-253. 2. Fimreite N. Effects of lead shot ingestion in willow grouse. Bull Environ Contam Toxicology 1984; 33: 121-126. 3, Greensher J, Mofenson HC, Balakrishnan C, Aleem A. Lead poisoning from ingestion of lead shot. Pediatrics 1974; 54: 641-643. 4. Hillman FE. A rare case of chronic lead poisoning traced to lead shot in the appendix. Industrial Medecine and Surgery 1967; 36: 488492.

5. Collins DC. 71000 Human appendix specimens: A final report summarizing forty years study. Am J Proctology 1963 ; 14 : 265-281. 6. Carey LS. Lead shot appendicitis in northern native people. J Can Assoc Radiol 1977 ; 28 : 171-174. 7. Reddy ER. Retained lead shot in the appendix. J Can Assoc Radiol 1985 ; 36 : 47.-48.