Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique 102 (2016) 588–592
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Note de technique
Apport de l’imagerie 3D naviguée en chirurgie de résection tumorale osseuse pelvienne夽 The role of intraoperative 3D navigation for pelvic bone tumor resection M. Ould-Slimane a,∗ , P. Thong a , A. Perez b , X. Roussignol a , F.-H. Dujardin a a b
Orthopaedic surgery department, Rouen University Hospital, 1, rue de Germont, 76031 Rouen, France Neurosurgery department, Rouen University Hospital, 1, rue de Germont, 76031 Rouen, France
i n f o
a r t i c l e
Historique de l’article : Rec¸u le 10 juillet 2015 Accepté le 3 avril 2016 Mots clés : Imagerie tridimensionnelle Tomodensitométrie Navigation Tumeur osseuse Pelvis
r é s u m é L’imagerie 3D interventionnelle est souvent utilisée en chirurgie rachidienne. Ce travail a pour objectif de détailler la technique et les premiers résultats de l’imagerie 3D opératoire (O-Arm, Medtronic, Louisville, CO) en chirurgie pelvienne. Six patients ont été inclus dont cinq souffrant de tumeurs osseuses primitives et un d’un cal vicieux post-traumatique. Toutes les procédures tomodensitométriques ont été poursuivies à leur terme sans modifier la technique chirurgicale sauf dans un cas justifiant une réinstallation peropératoire. Les durées opératoires n’ont pas été allongées avec une durée moyenne de 224 mins (min = 96 ; max = 380). L’irradiation enregistrée variait de 450 à 1125 mGrey.cm. Toutes les procédures ont pu être menées selon les planifications préopératoires aboutissant à des résections systématiquement en marge saine (R0). Une infection de site opératoire est survenue. Ces interventions auraient pu être réalisées sans imagerie 3-D ni navigation, mais ce système a apporté un contrôle et une sécurité opératoire continue. Niveau de preuve. – IV. ´ ´ es. © 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserv
1. Introduction L’imagerie 3D opératoire est utilisée en chirurgie rachidienne. La place de la navigation en chirurgie pelvienne et acétabulaire a déjà été décrite [1]. La description technique (faisabilité, apport et inconvénients) du scanner opératoire O-armTM (Medtronic, Louisville, CO) couplé à une navigation (StealthStation S7TM , Medtronic, Louisville, CO) est ici appliquée à la chirurgie pelvienne, notamment tumorale. Ce système permet le contrôle permanent des marges de résection optimales (conditionnant le pronostic vital) [2–6], tout en limitant le sacrifice osseux et donc fonctionnel [3–5]. 2. Description technique La première étape de la technique repose sur la planification des coupes osseuses à partir d’un scanner préopératoire.
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.otsr.2016.03.019. 夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Orthopaedics & Traumatology: Surgery & Research, en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M. Ould-Slimane). http://dx.doi.org/10.1016/j.rcot.2016.05.011 ´ ´ 1877-0517/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserv es.
L’orientation des ostéotomies et le volume de résection peuvent ainsi être anticipées avec l’idée d’économie maximale du capital osseux. Des marges de résection d’au moins 5 mm sont prévues [2] et seront contrôlées par l’imagerie 3D pendant la réalisation des coupes. Les patients sont installés sur une table opératoire radiotransparente. Les positionnements en décubitus dorsal, ventral ou latéral sont possibles. Les membres supérieurs devaient être alignés dans l’axe du corps pour permettre le déplacement longitudinal de l’anneau O’Arm. Une fois les expositions faites, les marqueurs de référence de navigation sont fixés sur le bassin. Des broches sont ensuite disposées, à l’aide du système de navigation 3D (StealthStation S7TM , Medtronic, Louisville, CO), pour figurer le siège et la direction des coupes osseuses planifiées. Le positionnement des broches est contrôlé par une acquisition 3-D, permettant un éventuel ajustement. Les coupes osseuses à l’ostéotome suivent le trajet des broches et sont sécurisées par la navigation virtuelle ou par une acquisition tomodensitométrique supplémentaire. En contexte carcinologique, toutes les coupes sont réalisées selon des directions convergentes pour obtenir une pièce de résection dont l’orientation des plans ne s’oppose pas à son extraction [7]. La reconstruction articulaire, anticipée à partir de la planification, tire elle aussi des avantages du contrôle 3D. L’orientation et la
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taille des implants, voire des allogreffes osseuses sont ainsi validées dans les 3 plans de l’espace [8]. 3. Série clinique Six patients ont été opérés selon cette procédure entre juin et décembre 2014. 3.1. Cas no 1 La lésion (Fig. 1) correspondait à un carcinome sarcomatoïde de lignée exacte imprécise. Elle justifiait une arthrectomie élargie à la branche iliopubienne respectant la colonne postérieure épargnée par la tumeur. Le guidage 3-D a permis de conserver une continuité osseuse extra-articulaire de la colonne postérieure tout en assurant avec sécurité une résection extra-marginale (Fig. 2). La reconstruction comprenait une cupule à tige isthmique cimentée avec des vis pilotis. À 6 mois, le score MTS était de 100 % (marche sans canne et sans boiterie), sans complication périopératoire. 3.2. Cas no 2 Il s’agissait de la résection d’un chondrosarcome de grade 2 avec remaniements mixoïdes développé autour de l’épine iliaque
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postéro-supérieure, compliqué d’une synostose extra-anatomique provenant du sacrum et interférant avec la région tumorale. La patiente souffrait d’obésité morbide (105 kg, 1 m 65). Le contrôle 3D opératoire a compensé les difficultés soulevées par la synostose et l’obésité. À 6 mois, le score MTS était de 100 %. 3.3. Cas no 3 Il s’agissait d’un chordome sacré développé sous S-3. Les structures digestives et gynécologiques étaient refoulées mais non envahies. Le contrôle 3-D a permis de sectionner le sacrum d’arrière en avant par une seule voie postérieure, après ouverture du canal sacré en S2 et S3 et contrôle des racines S3. La protection du canal anal était assurée par une exposition antérieure minimale sans risque d’effraction de la tumeur adjacente. Les suites ont été simples sans séquelles uro-digestives. 3.4. Cas no 4 Ce cas était un chondrosarcome de bas grade s’étendant de l’articulation sacro-iliaque droite à la hanche ipsilatérale et infiltrant le muscle psoas, les muscles glutéus minimus et médius sans lésion métastatique connue. Après une chimiothérapie première inefficace, une hémi-pelvectomie a été décidée, s’étendant
Fig. 1. Planification préopératoire du cas no 1.
Fig. 2. Imagerie 3D peropératoire montrant l’encorbellement de la lésion.
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Fig. 3. Cas no 4. A et B : coupes frontales et axiales. C : radiographies postopératoires.
de l’aileron sacré au cadre obturateur. La reconstruction atypique comprenait une cupule à tige isthmique impactée dans le reste de l’aileron sacré vers L5 ainsi qu’une arthrodèse antérieure L5-S1 (Fig. 3). Une tige fémorale de reconstruction a compensé la perte de longueur du membre liée à la résection. Une complication septique et une luxation ont nécessité un lavage chirurgical et une réduction. Au dernier recul (12 mois), l’évolution est favorable avec une autonomie à la marche (score MSTS = 12).
3.5. Cas no 5 Le cas no 5 (Fig. 4) était un cal vicieux pelvien post-traumatique dont la fixation externe initiale laissait une déformation résiduelle rigide (Fig. 4A). L’intervention a été menée en décubitus latéral par voie antérieure. Les contrôles 3-D peropératoires ont repéré les plans fracturaires, guidant les ostéotomies de libération et vérifiant la qualité de la réduction (Fig. 4B).
Fig. 4. Cal vicieux (cas no 5). A : radiographie préopératoire. B : radiographie postopératoire. C : imagerie 3D peropératoire.
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Fig. 5. Tumeur à cellules géantes (cas no 6). A : radiographie. B : coupes frontales IRM.
Tableau 1 Données histologiques et chirurgicales. Cas
Âge
Sexe
Histologie
Localisation
Pertes sanguines (mL)
Irradiation DLP (mGrey.cm)
1 2 3 4 5 6
46 32 44 71 38 38
H F F F H H
Chondrosarcome Chondrosarcome Chordome Sarcome Cal vicieux Tumeur à cellules géantes
Colonne antérieure Epine iliaque postéro-supérieure S3-Coccyx Hemi-bassin Sacro-iliaque Colonne postérieure
1900 150 700 3000 1300 4500
1124 1080 450 884 909 908
DLP : dose length product.
3.6. Cas no 6 Le cas no 6 était une volumineuse tumeur à cellules géantes agressive développée autour de la colonne postérieure, depuis la hanche incluse jusqu’à l’ischion (Fig. 5). La destruction articulaire s’associait à une hypervascularisation avec de nombreuses afférences inaccessibles à une embolisation. Un traitement médical premier par biphosphonates aurait pu être entrepris pour réduire le volume de la lésion mais il n’a pas été proposé ici. L’intervention a été menée en décubitus latéral par double abord. L’anatomopathologie des cinq résections tumorales était R0. Toutes les procédures tomodensitométriques ont été poursuivies jusqu’à leur terme. La navigation a été interrompue deux fois (patients nos 4 et 5) du fait de défauts de fixation des capteurs. L’encombrement du système O-Arm n’a pas empêché le déroulement aisé de l’intervention hormis dans le cas no 5 où le scanner a dû être réinstallé. Les artéfacts des broches et des ostéotomes n’ont pas gêné l’analyse des images. Les durées d’intervention (Tableau 1) constatées ne suggèrent pas d’allongement lié à la technique. Les irradiations propres à l’utilisation de l’O-Arm variaient de 450 à 1125 mGrey.cm (dose length product [DLP]). Le temps consacré à celle-ci n’a pu être spécifiquement évalué. Les acquisitions tomodensitométriques opératoires n’excédaient pas quelques minutes. 4. Discussion Les systèmes d’imagerie 3-D sont utilisables lors d’interventions orthopédiques majeures améliorant repérage et contrôle opératoire. Toutes les procédures ont ici été menées conformément aux planifications préopératoires. Réalisables sans imagerie 3-D ou navigation, les gestes sont cependant optimisés en termes de positionnement des coupes osseuses, de sécurité carcinologique, et de reconstruction prothétique.
La résection extra-tumorale dans les localisations pelviennes est souvent techniquement difficile [9], expliquant la fréquence des pièces contaminées [3,5,6]. Les taux d’obtention de marges saines varient de 25 à 82 %. Des guides de coupes personnalisés ont été proposés. Les premières applications cliniques ont été décrites par Gouin et al. [7] avec des résultats préliminaires satisfaisants. Des préparatifs supplémentaires et une exposition chirurgicale élargie sont nécessaires pour permettre l’application des gabarits de coupe. Ils permettent une très bonne fiabilité probablement supérieure aux coupes guidées par des broches [10]. Ils facilitent également la préparation d’une allogreffe osseuse aux mesures exactes de la résection. Les difficultés reposent sur une utilisation très rigoureuse (notamment en termes de positionnement) et sur l’absence d’évolution tumorale entre la préparation et l’utilisation de cet outil. Le contrôle opératoire 3-D apparaît plus simple tout en permettant les mêmes objectifs [8]. Il fourni surtout des informations en temps réel sur la phase de résection comme sur celle de la reconstruction articulaire [11]. Au total, l’association de ces 2 techniques semble être complémentaire et même envisageable pour optimiser le positionnement des guides dans les 3 dimensions et sécuriser la progression des ostéotomes. Les inconvénients potentiels de l’utilisation du système Oarm apparaissent limités : durée et pertes sanguines ne sont pas affectées d’autant que l’exposition chirurgicale est réduite, compensant largement le temps de mise en œuvre et d’acquisition. L’encombrement du dispositif reste compatible avec cette chirurgie et comporte une adaptabilité partielle. L’irradiation des patients apparaît comme un inconvénient relatif au vu de l’enjeu thérapeutique et reste inférieure aux « Niveaux de référence diagnostiques » (irradiation inférieure à 2400 mGrey.cm pour une hélice abdomino-pelvienne avec injection [12]). Le coût reste un inconvénient réel alourdi des aménagements inhérents (salle plombée et plancher renforcé). Cette application n’est pas encore validée
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pour la résection des tumeurs des parties molles. Cette technique innovante est pertinente, son développement apparaît souhaitable. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Remerciements M. le professeur Franc¸ois Gouin et M. le docteur Paul Michelin. Références [1] Stöckle U, König B, Dahne M, Raschke M, Haas NP. Computer assisted pelvic and acetabular surgery. Clinical experiences and indications. Unfallchirurg 2002;105:886–92. [2] Anract P, Biau D, Babinet A, Tomeno B. Pelvic reconstructions after bone tumor resection. Bull Cancer 2014;101:184–94. [3] Siebenrock KA, Hertel R, Ganz R. Unexpected resection of soft-tissue sarcoma. More mutilating surgery, higher local recurrence rates, and obscure prognosis as consequences of improper surgery. Arch Orthop Trauma Surg 2000;120:65–9. [4] Han I, Lee YM, Cho HS, Oh JH, Lee SH, Kim HS. Outcome after surgical treatment of pelvic sarcomas. Clin Orthop Surg 2010;2:160–6.
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