Apport de l’IRM cérébrale dans une série de 58 cas de malade lupique avec ou sans manifestations neuropsychiatriques

Apport de l’IRM cérébrale dans une série de 58 cas de malade lupique avec ou sans manifestations neuropsychiatriques

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Apport de l’IRM cérébrale dans une série de 58 cas de malade lupique avec ou sans manifestations neuropsychiatriques MRI of central nervous system in a series of 58 systemic lupus erythematosus (SLE) patients with or without overt neuropsychiatric manifestations F. Cotton a,*, J. Bouffard-Vercelli a, M. Hermier b, J. Tebib c, D. Vital Durand d, V.A. Tran Minh a,d, H. Rousset a

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Service de radiologie, centre hospitalier Lyon-Sud, 69495 Pierre-Bénite cedex, France Service de radiologie, hôpital neurologique et neurochirurgical Pierre-Wertheimer, 59, boulevard Pinel, 69394 Lyon cedex 03, France c Service de rhumatologie, centre hospitalier Lyon-Sud, 69495 Pierre-Bénite cedex, France d Service de médecine interne, centre hospitalier Lyon-Sud, 69495 Pierre-Bénite cedex, France Reçu le 4 octobre 2002 ; accepté le 7 juillet 2003

Résumé Propos. – L’atteinte cérébrale du lupus est fréquente et peut être évaluée par l’imagerie par résonance magnétique (IRM). L’objectif principal de l’étude était d’évaluer l’atteinte cérébrale des patients lupiques avec ou sans signes neuropsychiatriques. L’objectif secondaire était d’analyser la corrélation entre les anomalies IRM observées et les anomalies cliniques et/ou biologiques de ces patients. Méthodes. – Nous avons corrélé les données cliniques et biologiques de 58 patients ayant un lupus défini selon les critères révisés de l’American College of Rheumatology (ACR) dont 30 avec des manifestations neuropsychiatriques répondant aux critères de l’ACR aux résultats des séquences conventionnelles et modernes de l’IRM (diffusion, T1 haute résolution). La population étudiée a été comparée à un groupe de 18 sujets sains. Résultats. – Dans 69 % des cas l’IRM encéphalique des sujets lupiques était anormale, que les patients présentent des signes neuropsychiatriques (73,3 %) ou non (64,3 %) : micro-infarctus, accident vasculaire en relation avec des anticorps antiphospholipides, hypersignaux T1 des noyaux gris centraux, atrophie, dépôts d’hémosidérine aux jonctions cortico-sous-corticales en T2* et plages de démyélinisation postérieure associées à un élargissement des espaces périvasculaires. Conclusion. – L’IRM cérébrale avec des séquences adaptées objective des anomalies cérébrales dans approximativement 70 % des cas chez les malades lupiques ayant ou non des manifestations neuropsychiatriques. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Purpose. – Central nervous (CNS) involvement in SLE is common and can be evaluated with MRI. The primary goal of this study was to evaluate with high-field MRI the CNS involvement in a series of SLE patients with or without neuropsychiatric symptoms. The secondary goal was to detect a possible relationship between MRI and clinical or biological parameters in SLE. Materials and methods. – We correlated the clinical and biological parameters of 58 patients with a lupus defined according to the American College of Rheumatology criteria, including 30 with neuropsychiatric manifestations with conventional and modern MRI (including diffusion weighted-images, high-resolution 3D T1 weighted-images). The population studied was compared to a group of 18 normal controls.

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (F. Cotton). © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/S0248-8663(03)00265-0

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Results. – In 69% of cases, MRI demonstrated involvement of the CNS both in asymptomatic patients (64.3%) and in patients with neuropsychiatric manifestations (73.3%): microembolic signals, cerebral infarctions (associated with the anti-phospholipid syndrome), atrophy, basal ganglia involvement, posterior leucoencephalopathy, subcortical calcification or hemosiderin deposits (T2*), dilated perivascular spaces. Conclusion. – MRI with adapted sequences clearly demonstrated the cerebral involvement in approximately 70% of SLE patients with or without neuropsychiatric symptoms. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Lupus érythémateux systémique ; Système nerveux central ; IRM Keywords: Systemic lupus erythematosus; Central nervous system; MRI

1. Introduction Le lupus érythémateux systémique (LES) est caractérisé par l’atteinte multisystémique, en particulier neurologique [1] qui représentait encore il y a une vingtaine d’années 10 % des causes de mortalité. Le pronostic de la maladie s’est nettement amélioré depuis les années 1950 avec l’utilisation de la corticothérapie à forte dose et des immunosuppresseurs et ce sont à l’heure actuelle les complications cardiovasculaires (37 %) et les causes infectieuses (29 %) qui sont les principales causes de mortalité [2]. Globalement, la fréquence des manifestations neuropsychiatriques est diversement appréciée dans la littérature, avec des chiffres variant de 14 à 75 % selon les critères utilisés [3,4]. Ces estimations très variables associent plusieurs explications : durée d’observation des patients, critères diagnostiques utilisés, mais aussi difficulté à discerner les atteintes neuropsychiatriques directement imputables au LES de celles causées par les traitements ou par des complications secondaires de la maladie. Il est difficile de faire la part entre le retentissement psychologique d’une maladie chronique et un trouble de la personnalité antérieure. Les deux principales manifestations observées sont les troubles psychiatriques et les troubles épileptiques, avant les manifestations centrales déficitaires, les céphalées, les atteintes de paires crâniennes, les méningites et enfin plus rarement les mouvements anormaux et les atteintes du système nerveux périphérique. La survenue d’accidents vasculaires cérébraux transitoires à répétition ou définitifs doit faire rechercher un syndrome des antiphospholipides. Les atteintes neuropsychiatriques inaugurent la maladie dans 5 à 10 % des cas [5]. Il est enfin admis que les manifestations psychiatriques fonctionnelles n’alourdissent pas le pronostic vital, alors que l’apparition de signes neurologiques centraux déficitaires ou d’une atteinte psychiatrique lésionnelle est péjorative. L’atteinte anatomique cérébrale montre des zones d’atrophie corticale avec encéphalomalacie, infiltration des parois vasculaires avec prolifération intimale et dépôts fibrinoïdes, ainsi que la présence de microthrombivasculaires, sources de microinfarctus [6,7]. Le développement de l’imagerie médicale a permis de supplanter les études anatomiques grâce au scanner, et dès le début des années 1980 grâce à la résonance magnétique (IRM) [4,8–10] qui permettent de faire un diagnostic plus

précoce et d’envisager un traitement adapté (corticoïdes, cyclophosphamide et/ou anticoagulant). L’utilisation de certaines séquences IRM, notamment le Flair (Fast Low Angle Inversion Recovery) et les séquences en transfert de magnétisation [11] augmentent la sensibilité de détection des anomalies de la substance blanche [12]. La fréquence des anomalies IRM observées chez les patients ayant un LES avec des signes neuropsychiatriques est diversement appréciée variant de 54 [13–15] à 81 % [16]. Les anomalies IRM sont présentes chez 15 [13,17] à 50 % des patients asymptomatiques. Notre objectif était de faire une analyse fine des anomalies mises en évidence sur l’IRM encéphalique des sujets présentant un LED, ayant ou non des symptômes neuropsychiatriques et de comparer les résultats à ceux d’un groupe de sujets témoins, de façon à déterminer la fréquence et la nature des lésions observées. L’objectif secondaire de l’étude était de corréler les anomalies IRM observées et les anomalies cliniques et/ou biologiques.

2. Patients et méthodes 2.1. Sélection des patients Il s’agit d’une étude rétrospective fondée sur l’analyse des IRM encéphaliques de 58 patients suivis pour un LES par des services de médecine interne et de rhumatologie. Les IRM ont été réalisées sur une période de huit ans entre décembre 1993 et janvier 2002. Pour être inclus, les patients devaient satisfaire au moins quatre critères de la classification clinicobiologique révisée pour le lupus érythémateux systémique de l’American College of Rheumatology (ACR) [18]. 2.2. Population étudiée En fonction des données de l’examen clinique, obtenues au moment de la réalisation de l’IRM, les patients lupiques ont tout d’abord été classés comme symptomatiques (n = 30) ou asymptomatiques (n = 28) sur le plan neuropsychiatrique. L’anamnèse des 28 patients asymptomatiques (au moment de la réalisation de l’IRM) a permis de retrouver des antécédents neuropsychiatriques anciens chez cinq patients. Les IRM à

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titre systématique (absence de signes neuropsychiatriques) ont été réalisées chez des patients consécutifs et l’étude a débuté en même temps et sur les mêmes appareils pour les deux groupes de patients. À partir des données de l’examen clinique neuropsychiatrique et des éventuels examens et avis spécialisés complémentaires, les patients symptomatiques ont été classés en fonction de leur type d’atteinte neurologique et/ou psychiatrique en s’inspirant des critères de la classification de l’ACR [19]. Les données générales cliniques et biologiques de chaque patient au moment de la réalisation de l’IRM, ont été recueillies afin d’évaluer les autres causes possibles de manifestations neuropsychiatriques comme les troubles ioniques ou métaboliques, notamment hépatiques ou rénaux. Les patients ont été classés comme ayant un syndrome des antiphospholipides (APS) dès lors qu’ils présentaient au minimum un critère clinique et un critère biologique [20]. Les facteurs de risque cardiovasculaire (hypertension artérielle, diabète, tabac) ou embolique (AC/FA, valvulopathie, insuffisance cardiaque) ont été notés permettant de classer le sujet comme étant « à risque » (au moins un critère) ou non. Les antécédents familiaux psychiatriques et de maladie auto-immune ont été relevés. L’ancienneté du lupus au moment de la réalisation de l’IRM a été fixée à partir des premières manifestations imputables au lupus. Les résultats des principaux anticorps recherchés (Ac anti-ADN natif, Ac antinucléaire, Ac anti-Sm, fausse sérologie syphilitique, Ac anti-SSA, Ac anti-SSB, Ac anti-RNP), le dosage du complément et le résultat des biopsies rénales ont été notés, ainsi que les principaux traitements en cours au moment de la réalisation de l’IRM. 2.3. Analyse en IRM Les examens IRM ont été réalisés pour tous les patients sur des appareils à haut champ. Le délai entre le début des signes neuropsychiatriques des sujets symptomatiques et la réalisation de l’IRM cérébrale variait de quelques jours à deux mois en fonction de la disponibilité de l’appareil. Dixsept patients ont bénéficié d’un suivi temporel en IRM. Au total, 80 IRM furent évaluées. La lecture des données IRM a été pratiquée à partir des données originales sur les consoles de travail. Les fonctions de zoom, changement de fenêtres, comparaison d’images et de séquences ont permis une interprétation relativement fidèle et dynamique des images. Cette interprétation a été réalisée conjointement par deux lecteurs (JB, FC) ne connaissant pas les données cliniques à l’exception de la date de naissance du patient afin d’évaluer le degré d’atrophie cérébrale en fonction de l’âge. Les séquences conventionnelles en spin écho T1 et turbo spin écho T2 ont été réalisées pour chaque patient. D’autres séquences ont été réalisées : Flair, écho de gradient T2 pour huit patients, spin écho T1 après injection de gadoliniumDOTA, 3D Fast Fluid Echo (FFE) et séquence de diffusion pour les patients les plus récents.

Une grille d’évaluation a été remplie pour chaque IRM. L’atrophie cérébrale a été corrélée qualitativement à l’âge du patient. Elle a été distinguée selon son type (corticale, souscorticale ou cortico-sous-corticale) et selon sa localisation (diffuse ou focale). Les hypersignaux de la substance blanche ont été classés selon leur taille, leur nombre, leur localisation au niveau de la substance blanche (sous-cortical, profond, périventriculaire ou périvasculaire) et en fonction du lobe cérébral intéressé. Les hypersignaux T2 correspondant à un élargissement des espaces périvasculaires dits de Virchow et Robin ont également été classés selon leur type [21]. Les élargissements de ces espaces au niveau des territoires perforants colliculaires et lenticulaires ont été considérés comme des variantes de la normale. De la même manière, les hypersignaux T2 adjacents aux parois antérolatérales des ventricules latéraux [22] n’ont pas été retenus comme des hypersignaux pathologiques. Nous avons comparé, de façon indépendante par deux observateurs les IRM en séquence T2 des patients de moins de 40 ans avec un groupe témoin de 18 sujets sains (étudiants en médecine et personnel paramédical) de 20 à 39 ans. Les outils d’analyse statistique sont descriptifs et analytiques (tests de Student et de v2 considérés comme significatifs pour des valeurs de p < 0,05). 3. Résultats 3.1. Analyse descriptive 3.1.1. Caractéristiques de la population étudiée L’âge moyen lors de la réalisation de la première IRM était de 39 ans (médiane : 36 ans). Le sex-ratio était de 7 hommes pour 51 femmes. La durée moyenne d’évolution de la maladie à partir des premières manifestations imputables au lupus lors de la réalisation de l’IRM était de six ans (médiane : 2,5 ans ; étendue : un mois à 35 ans). Les principaux antécédents personnels auto-immuns étaient représentés par un cas d’hypothyroïdie par thyroïdite d’Hashimoto, trois cas de syndrome de Gougerot-Sjögren, un cas de rhupus, un cas d’hépatite auto-immune et un cas de myélofibrose immunologique. Des facteurs de risque cardiovasculaire et emboligène ont été retenus chez 26 patients. Un livédo réticularis avec acrosyndrome était présent chez sept patients. Un acrosyndrome isolé était retrouvé chez 16 patients. Une biopsie rénale fut réalisée chez 10 patients : type IV (6/10), type III (2/10), type II (1/10) et type V (1/10). Les résultats des recherches immunologiques montraient la persistance d’anticorps : antinucléaires (58/58), anti-ADN natif : (57/58), anti-SSA (15/54), anti-RNP (9/54), anti-SSB (6/54), anti-Sm (5/53), antiribosomes (4/7). Le CH50 était abaissé chez 32/42 patients. La présence d’un anticoagulant circulant de type antiprothrombinase était retrouvée pour 17 des 58 patients. L’existence d’un syndrome des antiphospholipides était présent chez sept patients alors qu’il avait été suspecté 19 fois sur le plan clinique et qu’il existait à l’in-

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verse des signes biologiques dans un nombre plus important de cas (Ac antiprothrombinase [17/58], Ac antiphospholipide [22/57], Ac anti-bêta2-microglobuline[6/47]). 3.1.2. Répartition des patients au moment de la réalisation de l’IRM (Tableau 1) Trente (52 %) patients étaient symptomatiques lors de la réalisation del’IRM. Six patients avaient un signe neurologique et un signe psychiatrique associé, et le critère mineur fut rattaché au critère majeur qui l’associait. Vingt-huit (48 %) patients étaient asymptomatiques lors de la réalisation de l’IRM. Sur les IRM des 58 patients étudiés, 40 étaient pathologiques. Parmi les 40 IRM anormales, 55 % des patients sont symptomatiques (n = 22) et 45 % asymptomatiques (n = 18). Les anomalies IRM étaient observées chez 73 % (22/30) des patients symptomatiques et 64 % (18/28) des patients asymptomatiques. En excluant de l’analyse les patients ayant eu des antécédents neuropsychiatriques (cinq patients), nous observons chez les patients asymptomatiques 54 % d’anomalies IRM. Huit patients avaient une IRM cérébrale normale en dépit de manifestations neuropsychiatriques : deux avaient des céphalées, deux des convulsions, deux des AIT, un patient avait des troubles de l’humeur à type de dépression et un autre avait présenté un syndrome confusionnel aigu. 3.1.3. Répartition des anomalies IRM observées (40 patients) L’analyse des images permettait de noter la présence des anomalies suivantes : atrophie diffuse isolée (n = 5) ; hypersignaux T2 isolés (n = 16); atrophie et hypersignaux T2 (n = 14) (Fig. 1) ; AVC et hypersignaux T2 (n = 1) ; AVC et hypersignaux T2 et atrophie (n = 3) (Fig. 2). Un patient ne correspondait pas à notre classification initiale et présentait une asymétrie des plexus choroïdes avec anomalie de signal hippocampique (n = 1). Sur un ensemble de 61 anomalies IRM individualisées, on peut décrire la prédominance des hypersignaux T2 de la Tableau 1 Répartition des manifestations neuropsychiatriques selon les résultats de l’IRM cérébrale chez 30 patients lupiques avec manifestations neuropsychiatriques Signes psychiatriques IRM – Trouble de l’humeur (1) Syndrome confusionnel aigu (1) IRM + Trouble de l’humeur (2) Syndrome confusionnel aigu (7)

Signes neurologiques Céphalées (2) Convulsions (2) AIT (2) AVC (3) Convulsion (1) Mouvement anormal (1) Céphalées (6) Troubles des fonctions cognitives (2)

– : normale ; + : anormale ; AVC : accident vasculaire cérébral ; AIT : accident ischémique transitoire

Fig. 1. Coupe axiale transverse passant par les ventricules latéraux. IRM réalisée chez une patiente de 70 ans qui présentait des troubles des fonctions cognitives : atrophie corticale et sous-corticale. Hypersignaux T2 en plages et arrondis dans la substance blanche profonde et sous-corticale.

substance blanche (34/61) et de l’atrophie (22/61). Deux patients sur huit présentaient sur la séquence en écho de gradient, un ou plusieurs dépôts à forte susceptibilité magnétique au niveau des jonctions cortico-sous-corticale évoquant la présence de microhémorragies (Fig. 3). Trente-quatre des 58 patients (59 %) ont des hypersignaux T2 de la substance blanche isolés ou associés à d’autres anomalies IRM : profond isolé (6), sous-cortical isolé (1), périventriculaire isolé (1), périvasculaire isolé (6), souscortical et profond (6) (Fig. 4), profond et périventriculaire (5), sous-cortical, profond et périvasculaire (1), souscortical, profond et périventriculaire (6), sous-cortical, profond, périventriculaire et périvasculaire (2). Les hypersignaux T2 les plus fréquemment observés touchent la substance blanche profonde et sous-corticale. Nous avons observé huit patients qui présentaient des plages occipitales qui sont apparues de façon isolée, dont deux patients avec un lupus de découverte récente deux et cinq mois. Quatre patients avaient une image d’AVC : sylvien gauche et total, PICA gauche, sylvien antérieur droit, jonctionnel. Ces AVC étaient tous associés à des hypersignaux de la substance blanche et les quatre patients présentaient des signes neuropsychiatriques. Les sept patients qui présentaient un syndrome des APS, avec ou sans manifestations neuropsychiatriques avaient tous des anomalies IRM (Tableau 2).

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Fig. 2. Coupe axiale transverse pondérée en T2 passant par les ventricules latéraux. IRM réalisée chez une patiente de 65 ans qui présentait une sémiologie neuropsychiatrique avec déficit de l’hémicorps droit. Facteurs de risques cardiovasculaires : tabac ; syndrome des antiphospholipides. Hypersignaux T2 intéressant la substance blanche et le cortex correspondant à la systématisation du territoire sylvien superficiel et profond gauche (AVC).

Fig. 3. Coupe axiale transverse agrandie en écho de gradient T2 passant par la convexité. IRM réalisée chez une patiente symptomatique de 26 ans qui présentait des céphalées et un syndrome démyélinisant. Hyposignal millimétrique (flèche blanche) cortico-sous-cortical à la partie antérieure du gyrus précentral gauche. Cette image en asignal correspond à un dépôt à forte susceptibilité magnétique et peut correspondre soit à de l’hémosidérine (rupture de micro-anévrisme) soit à une calcification.

Nous n’avons pas trouvé de corrélation entre l’importance des anomalies IRM observées et l’ancienneté du lupus, en dehors d’une corrélation limitée avec la présence d’une atrophie cérébrale (p = 0,06).

3.2. L’analyse statistique 4. Discussion Elle devait permettre de répondre à deux questions : • les anomalies IRM étaient-elles plus fréquentes chez les sujets lupiques symptomatiques ? Il n’a pas été montré de différence entre les différentes anomalies IRM (hypersignaux T2, atrophie) observées chez les sujets symptomatiques et les sujets asymptomatiques (v2 = 0,55 ; odd ratio = 1,53 [0,43–5,43], p = 0,46) ; • les anomalies IRM étaient-elles plus fréquentes chez les sujets lupiques asymptomatiques que chez des témoins sains ? La comparaison de 18 malades lupiques de moins de 40 ans sans facteurs de risque cardiovasculaire et de 18 sujets sains de moins de 40 ans objective une différence significative entre les deux groupes (p < 0,05). Les anomalies IRM en T2 sont observées chez 30 % des patients lupiques et seulement 6 % des témoins (un élargissement d’un espace périvasculaire est observé dans la substance blanche périventriculaire postérieure chez un patient). De même, l’élargissement des EPV est significativement plus important chez les lupiques que chez les témoins (p < 0,05). Ces anomalies IRM sont observées chez 21 % des patients et 6 % des témoins.

L’IRM cérébrale a objectivé dans environ 70 % des cas des anomalies intraparenchymateuses aussi bien chez les sujets lupiques présentant des troubles neuropsychiatriques que chez ceux qui n’en présentaient pas, et celles-ci de façon significative sont plus fréquentes par rapport à un groupe témoin de même âge et de même sexe. Ceci est probablement dû à la diffusion de la maladie lupique, et on peut penser que les lésions cliniquement silencieuses sont, soit trop petites, soit situées dans des localisations sans retentissement clinique. Les lésions cliniquement silencieuses sont fréquentes comme dans d’autres pathologies de la substance blanche telle que la sclérose en plaques où l’IRM apparaît cinq à dix fois plus sensible que l’examen clinique [23]. La fréquence de détection des lésions de vasculopathie cérébrale dans notre série est concordante avec les études récentes en IRM [16] et probablement en relation avec les progrès de la technique d’analyse IRM (gradients, séquences et résolution). La fréquence des anomalies observées amène à envisager dans le détail, d’une part la sensibilité de l’IRM pour dépister

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Fig. 4. Coupe axiale transverse Flair passant par les ventricules latéraux [A] et par la convexité [B]. IRM réalisée chez une patiente asymptomatique (sans signe neuropsychiatrique) de 33 ans. Facteurs de risque cardiovasculaires absents. Hypersignaux Flair prédominant dans la substance blanche profonde (flèche droite) et sous-corticale (flèche courbe). Tableau 2 Anomalies cliniques et IRM trouvées chez les sept patients ayant un syndrome des antiphospholipides (tous les patients avaient une IRM anormale) Tableau clinique neuropsychiatrique 1. Asymptomatique 2. Syndrome cérébelleux 3. Asymptomatique 4. Asymptomatique 5. Céphalées 6. Antécédent de convulsions 7. Antécédent d’AVC

Atrophie

– + – – – + +

AVC

– + – – + – +

Hypersignaux T2 (en dehors de l’AVC) Localisation dans la substance blanche S/C P PVE PVA – – – oui – + – – – – – + – + + – – – – – – + + – – + – –

PO – – – + – – –

Taille

Nombre

2B < 5 mm 2B > 5 mm – > 5 mm < 5 mm

>5 <5 >5 6–10 – <5 <5

AVC : accident vasculaire cérébral ; + : présence ; – : absence ; S/C : sous-corticale ; P : profond ; PVE : périventriculaire ; PVA : périvasculaire ; 2B : espaces périvasculaires élargis (supérieurs à 5) situés dans la substance blanche profonde, à distance des noyaux gris centraux

les atteintes cérébrales du lupus qui sont essentiellement de nature microvasculaire et, d’autre part, à discuter, en fonction des anomalies observées, les corrélations possibles en distinguant les manifestations psychiatriques ou neurologiques, isolées ou associées et en ce qui concerne les atteintes neurologiques, les formes focalisées ou diffuses. Les études anatomopathologiques ont montré que l’atteinte neurologique est essentiellement microvasculaire, observée dans 65 % des cas de lupus cérébral et qu’elle intéresse principalement les artérioles de moins de 100 µ de diamètre, prenant rarement l’aspect de vascularite inflammatoire avec infiltration cellulaire des tuniques vasculaires (7 %) car les anomalies sont plutôt dégénératives et prolifératives. Il existe souvent de multiples foyers de microinfarctus et de microhémorragies satellites de ces lésions vasculaires.

Quel est l’apport possible de l’IRM pour la détection de ces anomalies minimes ? • l’élargissement des espaces périvasculaires, en dehors de la présence et du rôle des facteurs de risque cardiovasculaire, pourrait être lié à la vasculopathie primitive des petits vaisseaux [24] ainsi qu’à la congestion des vaisseaux leptoméningés [6]. Des microhémorragies sont parfois présentes au niveau de l’espace périvasculaire d’un vaisseau dégénéré, témoignant de troubles de la perméabilité vasculaire [7]. Les anomalies IRM de ces espaces de Virchow et Robin ne semblent pas avoir été décrites précédemment. Nous les avons retrouvées avec une fréquence significativement plus grande chez les sujets de moins de 40 ans avec un LES et sans facteurs de risque cardiovasculaire par comparaison avec un groupe de sujets sains de même âge ;

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• les lésions microhémorragiques peuvent être analysées en IRM sur les séquences en écho de gradient, malgré leur petite taille, grâce à l’effet de susceptibilité magnétique ; • les micro-infarctus sont bien identifiés sur les séquences en densité protonique et en Flair, notamment à proximité du cortex grâce à l’annulation du signal du liquide cérébrospinal. Les anomalies IRM les plus connues sont les hypersignaux T2 de la substance blanche qui sont statistiquement plus fréquents chez les patients lupiques que chez les sujets témoins. Nous avons utilisé un groupe de sujets témoins jeunes, sans facteurs de risque cardiovasculaire, comme d’autres auteurs [25], car la détection des hypersignaux T2 augmente avec l’âge et avec les facteurs de risques cardiovasculaire. Les lésions sous-corticales et de la substance blanche profonde, augmentent de 11 % vers la quarantaine à 83 % chez les sujets de plus de 70 ans et avec une fréquence significativement plus élevée chez les patients ayant des facteurs de risque cardiovasculaire [26]. Les anomalies de signal, en plages postérieures, ont été retrouvées chez huit patients. Ces anomalies pourraient correspondre à une leucoencéphalopathie postérieure réversible [15,27] mais nous ne disposons pas de suivi temporel pour ces patients. Quelle corrélation peut-on établir entre un syndrome des antiphospholipides et la présence de lésions d’infarctus ? Dans notre étude, tous les patients ayant un syndrome des antiphospholipides ont une anomalie IRM. Les quatre patients qui présentaient un AVC avaient un syndrome des antiphospholipides avec des signes neurologiques à l’examen clinique. Les infarctus surviennent dans 44 % des cas, se répartissant en 35 % de micro-infarctus et 12 % de macroinfarctus [7]. Plusieurs travaux montrent une relation claire entre la présence d’Ac anticardiolipine et la survenue d’infarctus cérébraux [28,29] ou du moins d’une présentation focalisée du neurolupus [4,30,31]. Quelle signification faut il attribuer à l’atrophie cérébrale ? L’atrophie cérébrale est un paramètre difficile à quantifier et doit être évaluée en fonction de l’âge et des traitements en cours notamment de la corticothérapie [4]. Nous l’avons retrouvée chez 38 % des patients. L’atrophie cérébrale au cours du lupus est ainsi estimée de façon extrêmement variable entre 1 [15] et 75 % [32]. Certains auteurs ont attribué l’atrophie cérébrale aux micro-infarctus souvent observés en étude histologique [33]. Dans 77 % des cas observés, l’atrophie était associée à des hypersignaux T2. Quel est l’apport des séquences après injection de gadolinium ? Nous avons observé chez deux patients une prise de contraste pathologique dans le parenchyme (un AVC subaigu, un cas d’abcès cérébraux). Les séquences après injection de complexe de gadolinium ne sont pas indispensables pour le diagnostic de neurolupus car les techniques de diffusion sont extrêmement pertinentes pour le diagnostic d’AVC et d’abcès cérébral. En revanche, l’injection de produit de contraste est utile pour le diagnostic différentiel avec la SEP

où les lésions se rehaussent fréquemment, surtout au début de la maladie. L’atteinte sous-tentorielle, la distribution des plaques perpendiculaires à l’axe des ventricules, la proximité avec les espaces sub-arachnoïdiens et surtout l’évolution temporelle sont d’autres arguments qui permettent la plupart du temps de faire le diagnostic de SEP. Dans un peu plus d’un quart des cas, l’IRM cérébrale s’est avérée normale en dépit de manifestations neuropsychiatriques, ce qui est estimé entre 19 [16] et 46 % [14] dans la littérature récente. Dans notre série, les patients avec une IRM normale en dépit de manifestations neuropsychiatriques présentaient, hormis les deux patients avec un AIT, des signes cliniques pouvant être attribués à des désordres métaboliques ou à des traitements médicamenteux notamment corticoïde. L’IRM peut méconnaître les AIT en l’absence de séquence de diffusion précoce et la recherche d’anomalie en terme de diminution des débits sanguins cérébraux nécessite la réalisation d’une imagerie fonctionnelle comme l’IRM de perfusion cérébrale, non utilisée en pratique courante dans notre étude. L’IRM cérébrale est donc un complément diagnostique souvent utile notamment pour éliminer les thromboses vasculaires cérébrales veineuses qui nécessitent un traitement anticoagulant et pour dépister d’éventuelles complications infectieuses. Dans les autres cas, elle montre l’atteinte diffuse précoce multisystémique particulièrement dans les cas de troubles psychiques dont on sait qu’ils sont très fréquents et habituellement imputés à des troubles métaboliques, iatrogènes ou psychologiques réactionnels. La diffusion précoce des lésions IRM montre que la participation lésionnelle doit également être prise en compte.

5. Conclusion L’IRM cérébrale avec des séquences adaptées (Flair, écho de gradient T2) objective l’atteinte cérébrale du lupus dans approximativement 70 % des cas, chez les sujets symptomatiques (manifestations neuropsychiatriques) ou non. Des anomalies IRM ont été observées chez tous les patients qui avaient un syndrome des antiphospholipides. La présence d’hypersignaux T2 et l’élargissement des espaces périvasculaires est significativement plus fréquente par rapport à un groupe témoins sains, et reflète probablement la présence d’une vasculopathie cérébrale.

Références [1] [2]

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