Atapuerca, le conte de deux sites

Atapuerca, le conte de deux sites

L'Anthropologie 105 (2001) 223-236 © 2001 l~ditionsscientifiques et m6dicales Elsevier SAS. Tous droits r6serv6s Atapuerca, le conte de deux sites Yo...

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L'Anthropologie 105 (2001) 223-236 © 2001 l~ditionsscientifiques et m6dicales Elsevier SAS. Tous droits r6serv6s

Atapuerca, le conte de deux sites Yolanda Fermlndez-Jalvo a*, Peter Andrews b

R6sum6 - La d6couverte de deux groupes diff6rents de hominid6s en deux sites diff6rentes en Sierra de Atapuerca (Espagne) a mis en lumi~re les modes diff6rents du comportement des hominid6s. Un groupe montre la pr6sence des pratiques de cannibalisme, alors que les autres montre des corps morts expos/:s possiblement par d'autres hominid6s un endroit particulier. Aucun rituel n'est pas 6vident dans ces deux cas mais ils sug~g&entune diversit6 du traitement des morts, qui peuvent ~tre consid6r6s comme une caract6ristique humain. © 2001 Editions scientifiques et m6dicales Elsevier SAS

Atapuerca / Dolina / Sima / taphonomie / cannibalisme Abstract - Atapuerca, a Tale of Two Sites. The discovery of two different groups of hominids at two distinct sites in Sierra de Atapuerca (Spain) has brought to light two different patterns of hominid behaviour. One group shows the presence of cannibalistic practices, while the other shows dead bodies brought together by other hominids to a particular place. No ritual is evident at either of these two cases but they suggest a diversity of treatment of the dead, which can be considered as a human characteristic. © 2001 l~ditions scientifiques et m6dicales Elsevier SAS

Atapuerca / Dolina / Sima / taphonomy / cannibalism

1. I n t r o d u c t i o n La d6couverte de la pr6histoire de l'humanit6 est toujours passionnante, mais nous sommes souvent limit6s par la raret6 des fossiles. M~me lorsque les hominid6s sont bien connus comme Olduvai ou Hadar en Afrique, on peut pas toujours aller au del~ d ' u n e simple identification ou de l'analyse de leur parent6 avec les autres esp6ces d'hominid6s. La complexit6 de leur comportement est encore plus difficile/l appr6hender. A Atapuerca r~gne une telle complexit6. Cette petite montagne pr6s de Burgos comprend un ensemble de g o r e s intfiqu6es (Aguirre, 1987 ; Aguirre et al., 1990 ; Carbonell et al., 1999a). Elles ont foumi des abris h plusieurs groupes d'hominid6s pendant pros d ' u n million d'ann6es au cours du P16istoc6ne et de l'Holoc6ne. En fair, 1'~ histoire de deux sites >~se r6fbre ~ Gran Dolina et ~ Sima de los Huesos, deux grottes fr6quent6es par les hominid6s au Pl~istoc6ne, ~i 400 m l'une de l'autre et 500 000 ans d'6cart. Plus sp6cifiquement, nous d6crirons dans cet

article, sur la base de traces observ6es sur les os des hominid6s, deux attitudes adopt6s par eux envers leurs morts.

2. Les sites La Sierra de Atapuerca est une petite hauteur 6rod6e de la moiti6 nord de la p6ninsule Ib6rique, dans le bassin du Duero (Par6s et Per6z Gonz~ilez, 1999). A u cours du Pl6istoc~ne, une for~t temp6r6e de chines recouvrait cette r6gion de la Sierra r6guli~rement oecup6e ou visit6e par les hominid6s car elle offrait un fiche environnement pour l'approvisionnement en nourriture. Fruits, graines et v6g6taux 6talent saisonni~rement abondants et A cette 6poque trois fleuves importants drainaient la r6gion foumissant eau, poissons, ainsi que d'autres animaux aquatiques et associations v6g6tales (Gareia-Ant6n, 1995). I1 y avait aussi une grande diversit6 d'esp~ces animales (Rodriguez, 2000). Nombre d'entre

* Correspondanee et tir6s ~tpart. [email protected] a Museo Nacional de Ciencias Naturales, Jos6 Guti6rrez Abascal, 2, 28006 Madrid, Espagne. b The Natural History Museum, Cromwell Road, SW7-5BD, Londres, Angleterre.

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Figure 1. Reconstitution d'un individu adulte de SH (Homo heidelbergensi.s) face fi d'une reconstruction d'un individujuv6nile de TD6 (Homo antecessor). Figure 1. Reconstruction of an adult individual from SH (Homo heidelbergensis) facing a reconstruction of a juvenile individual from TD6 (Homo antecessor). elles ne se trouvent plus en Europe, quelques unes se sont 6teintes tr6s t6t. t~lephants, rhinoc6ros, panth6res et hy6nes 6taient prdsents, faune actuellement limit6e/~ l'Afrique et cohabitaient avec des animaux comme le cerf, le cheval, l'ours, le loup, le renard et les bovid~s. Ce m61ange 6tait caract6ristique du Pl6istoc6ne en Europe. Le site de Gran Dolina est la plus ancienne grotte ayant livr6 des fossiles des premiers Homo en Europe, Homo antecessor, alors que Sima de los Huesos est un site plus r6cent avec les premiers t6moignages de la lign6e n6andertalienne (Homo heidelbergensis) (figure 1). Nous croyons que les deux ensembles r6sultaient de l'activit6 des hominid6s, mais la similitude s'arr6te lb. Alors que les ossements fossiles de Gran Dolina portent des marques 6tendues de d6coupe laiss6es lors du d6membrement des os par d'autres hominid6s, les vestiges beaucoup plus complets de Sima de los Huesos ne portent pas de trace d'activit6 humaine l'exception du fait que leur composition est biais6e et sugg6re que les hominid6s eux m6mes ~taient impliqu6s dans cette accumulation.

Aujourd'hui, la Sierra de Atapuerca offre un paysage diff6rent de celui du pass6 puisqu'une ligne de chemin de fer a 6t6 cr~6e au d6but du XX e si6cle pour relier une carri~re de calcaire/~ la ville voisine. Heureusement, en coupant la montagne elle a fait affleurer les fossiles ainsi que les s~diments des grottes. C'est le cas par exemple de Gran Dolina qui comprend 18 m de remplissage et 11 unit~s stratigraphiques dont 8 sont riches en fossiles, avec des s6diments datant d'un million d'ann6es ~ 300 000 ans au sommet (Falgu6res et al., 1999). L'autre remplissage consid6r6 ici, Sima de los Huesos, 500 m de la ligne de chemin de fer se trouve encore /l l'int6rieur d'une grotte dat6e entre 250 000 et 300 000 arts. I1 y a un autre site h c6t6 de Gran Dolina, appel6 Galeria, o~ ont 6t6 trouv~s un petit fragment de crfine d'hominid6 (Arsuaga et al., 1999), un petit fragment de mandibule hors contexte (Bermfldez de Castro et Rosas, 1992) et une fiche industrie lithique avec une dizaine de niveaux d'occupation (Carbonell et al., 1999b). ces niveaux sont contemporains de Sima de los Huesos et des niveaux du sommet de Gran Dolina et c'est une

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Figure 2. Coupe de Gran Dolina de TD 11/i TD4-3 (TD 1 et TD2 sont cach6s par la v6g6tation ; photo prise en 1990). Le foss6 ferroviaire a ouvert la grotte et les d6p6ts affleurent. La plupart des unit6s sont riches en fossiles (sch6ma d'os) except6 les unit6s 1, 2 et 9. Des outils en pierre (triangles) ont 6t6 enregistr6s dans la plupart des unit6s fossilif6res, except6 les unit6s 7 (avec seulement un instrument) et 8. Des restes d'hominid6s ont 6t6 r6cup6r6s h TD6, nommant la strate contenant ces fossiles d'apr~s la d6couvreur Aurora. Les 6tudes de palaEomagnetisme ont montr6 que I'inversion Matuyama-Brunhes est enregistr6e 5. TD7. Figure 2. Gran Dolina cave infilling section from TDI 1 to TD4-3 (TD1 and TD2 are hidden by vegetation; picture taken in 1990). The rail-way trench opened the cave and left sediments exposed. Most units are rich in fossils (bone outline) with the exception of units 1, 2 and 9. Stone tools (triangles) have been recorded from most fossiliferous units, with the exception of units 7 (with only one implement) and 8. Hominid remains were recovered from TD6, naming the stratum containing those fossils after the discoverer Aurora. Palaeomagnetic studies showed the Matuyama-Brunhes reversal occurs at TD7.

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importante source d'informations sur l'environnement, la pal6o6cologie et l'6conomie des hominid6s fi cette 6poque.

3. Gran Dolina et nos anc~tres cannibales En juillet 1994, le site de Gran Dolina a foumi, sans aucun doute, l'6v6nement le plus excitant pour l'6quipe de fouille : des restes d'hominid6s ont 6t6 trouv6s dans le niveau TD6 (figure 2). Ils 6taient associ6s h des restes d'animaux et/L des outils lithiques. Pendant longtemps le site en avait livr6 d'abondants vestiges mais pas d'hominid6s. Une petite section lat6rale de 7 m 2 a ~t~ fouill6e depuis 1993, ~ des fins stratigraphiques depuis le sommet (TD11) jusqu'au fond de la s6quence de Gran Dolina. L'inversion de la polarit6 pal6omagn6tique a 6t6 r~cemment d&ect~e it TD7 (Par~s et Per~z Gonz~ilez, 1995) indiquant un age de 780 000 ans pour les hominid6s. Nous savions qu'il y avait des hominid6s dans cette r6gion ~ l'6poque car en 1991, nous avions trouv6 des outils lithiques au fond de la section dans l'unit6 4 (Carbonell et Rodriguez, 1994). La couche off furent trouv6s ces hominid~s fut appel6e Aurora, apr6s leur d6couverte. Elle est riche en esp6ces animales et en industrie lithique (300 6clats environ, Carbonell et al., 1999a) et associ~s apparemment ~ ces derniers, ii y a 92 fragments osseux d'hominid~s correspondant /~ 6 individus. Le groupe comprend deux enfants de 3-4 ans, deux adolescents, l'un d'environ 11 ans et un autre de 14 ans et deux jeunes adultes d'environ 16 ~ 18 ans (Bermfidez de Castro, 1999). Tous ont 6t6 victimes de pratiques cannibales il y a 800 000 ans (FemimdezJalvo et al., 1996). La configuration d'origine de la grotte fut d6truite par le creusement de la voie de chemin de fer qui r6v61a les d6p6ts mais l'entr6e se trouvait probablement h quelque distance au nordouest. I1 y a aussi un t6moin d'accumulation des s6diments dans un c6ne de talus au sud-est de cette salle, indiquant une entr6e de type fissure au dessus de l'endroit off les hominid6s et les animaux ont 6t~ d~pec6s. Animaux et hominid6s portent des marques de d6coupe 6tendues, faites intentionnellement l'aide d'outils lithiques incisant profond6ment la surface osseuse. Lafigure 3 montre un exemple de plusieurs traces sur un ossement d'hominid&

La collection de fossiles de la couche Aurora comprend 4096 fragments (3 031 plus petits que 2 cm) dont 1 065 sont identifiables, soit par taxon ou par 616ment anatomique, 150 d'entre eux portent des traces de d6coupe. 16 animaux et 6 hominid6s, jeunes ou enfants ont 6t6 d6pec6s sur le site ainsi que deux vieux herbivores de grande taille. A part Homo antecessor (Bermfidez de Castro et al., 1997), les esp+ces animales identifi~es sont le bison d'Europe, le cheval sauvage maintenant 6teints, le mammouth, le sanglier, le cerf et d'autre cervid6s ainsi que Megaloceros, le rhinoc6ros ( Stephanorhinus etruscus), l'ours des cavemes, le renard, la panth6re et le chat sauvage ( van der Made, 1999 ; Garcia et Arsuaga, 1999) et un total de 26 taxons de faune aviaire (Sfinchez Marco 1999). Les petits mammif~res sont aussi pr6sents (Cuenca Bescos et al., 1999) et les analyses taphonomiques sugg6rent que les hulottes 6taient impliqu6es dans la chasse des rongeurs (Fem~mdez-Jalvo, 1995). La classe des plus grands mammif6res, ceux sup6rieurs/1350 k, montre une faible fr6quence en 616ments axiaux. Nous consid6rons que ce fait sugg~re une s61ection du squelette par les hominid6s afin de faciliter le transport des carcasses dans le site (Diez et al., 1999). En laissant la plus grosse partie de l'animal mais en rentrant les membres et les quartiers de viande, on minimisait le poids ~ porter. Par opposition, les petits animaux et les hominid6s semblent avoir les diff6rentes partie du squelette 6galement repr6sent~es puisqu'ils 6taient transport6s entiers (Fem~ndez-Jalvo et al., 1999). I1 n'y a pas de t6moignage direct du fait que les gros mammif~res aient 6t6 tu~s par les hominid6s et il est possible qu'ils aient fait l'objet d'un charognage apr6s avoir 6t6 tu6s par les grands f61ins comme les panth6res (Diez et al., 1999). Ce comportement est observ6 encore aujourd'hui en Afrique (Treves et Naughton-Treves, 1999), bien que ce soit une strat6gie ~ risque 61ev6. La fracturation d'os fossiles, humains ou non, est tr6s fr6quente dans l'ensemble du mat6riel de la touche Aurora, avec peu d'616ments complets du squelette axial, des membres et des 616ments cr~niens (crfine ou mandibules). Le sch6ma g6n6ral de fracturation montre que les os dont on attendait un plus grand contenu en moelle 6tait tr~s fractures et que ceux qui ne l'~taient pas 6taient ceux qui en avaient le moins (Fem/mdez-Jalvo et al., 1999).

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Figure 3. ATD6-43 Radius humain (fragment distal). Ce sprcimen a de nombreuses traces de drcoupes, h partir de la droite dessus vers la gauche en bas sur la longueur de ros, affectant les muscles pronator quadratus etflexor digitorum. L'extrrmit6 distale du radius a 6t6 cassre montrant un ~ peeling >>,lequel interrompt des marques lires au drcoupage de tendons et de muscles(flrche noire). Cela indiqueque des incisionsont 6t6 faites avant de drmembrer le poignetet probablementaussi la main. Figure 3. ATD6-43 human radius (distal end fragment). This specimen has abundant cutmarks, from right top to left down all along the length of the bone, affecting the pronator quadratus, as well as the attachment of flexor digitorum. The distal end of the radius has been broken showing peeling. Peeling interrupts cutmarks related to tendon and muscle cutting (black arrow). This indicates that incisions were made before dismemberingwhen the wrist and probably also the hand were still in connection. La distribution et la localisation des traces de drcoupe peuvent ~tre analysres afin de montrer le but de l'action, par exemple les traces associres au drcharnement sont obliques le long des diaphyses alors que celles de drsarticulation sont concentrres sur les articulations mrmes. Tous les restes du squelette, d ' h o m i n i d r s ou d ' a n i m a u x ont des types et une distribution similaire de marques de drcoupe, indiquant qu'ils ont tous 6t6 d r p e c r s de la m r m e manirre et pour le m~me but (Diez et al., 1999). Les carcasses des hominidrs et des animaux ont routes 6t6 d r p e c r e s , drsarticulres, d r c h a m r e s et 6viscrrres. La surface des os 6tait raclre pour enlever le prrioste, puis les os 6taient percutrs pour &re fendus probablement pour extraire la moelle. Les marques d'impact, de drcoupe et les traces observres sur les bords fracturrs indiquent toutes une intense activit6 des hominidrs utilisant leurs outils lithiques. En particulier, les os des hominidrs et des autres animaux de taille moyenne comme le chevreuil ou le daim 6taient courbrs comme des branchages et cassrs ~t deux mains (figure 4). Les os 6taient ensuite dispersrs de la m~me manirre, animaux et hominidrs m r l a n g r s au hasard, suggrrant qu'il n ' y avait pas de distribution diffrrente mais au contraire

un traitement identique des carcasses humaines ou non. Les trmoins sugg~rent qu'elles 6taient drpecres, d r m e m b r r e s et drcharnres et les os fracturrs/L des fins strictement nutritionnelles (classification de Villa et al., 1986), t o u s l e s os 6tant dispers6 sur toute la surface comme des drchets. De plus, les indications p a l r o r c o logiques ( Rodriguez, 1997 et ce numrro), palynologiques (Garcia-Antrn, 1995) et srdimentologiques (Aguirre et Hoyos, 1992) sugg~rent que le climat n ' r t a i t pas extreme mais temprrr. De plus, la couche Aurora avait livr6 la plus riche diversit6 d'esp~ces jamais trouvre ~ Atapuerca et les 22 individus reconnus dans le site (y compris les hominidrs) ont 6t6 mangrs fournissant pros de 5 t de nourriture (Diez et al., 1999). I1 n ' y a pas d'indication de famine et le mode d'activit6 intense sur les carcasses rrvr16 d'apr~s l'analyse taphonomique serait en corrrlation avec une intense exploitation de t o u s l e s aliments accessibles. Tous ces trmoins avec la prrsence apparente de restes d ' h o m i n i d r s /t travers toute l ' r p a i s s e u r de la couche Aurora et le spectre d'hges similaire h la fois chez les hommes et les animaux sugg~rent que le comportement des hominidrs se rapproche d ' u n cannibalisme gastronomique (White, 1992), les

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Figure 4. ~ Peeling ~>est un type de cassure, produit fr6quemment dans l'assemblage des fossiles de TD6-Aurora. I1 est produit quand l'os frais est cass6 entre deux mains, comme on courbe une petite branche. Figure 4. Peeling is a type of fracture, that occurs frequently in the TD6-Aurora Stratum fossil assemblage. It is produced when fresh bone is fractured and peeled apart similar to bending a small fresh twig from a tree branch between two hands. hominid6s n'&ant qu'une autre esp6ce dans le r6gime des autres plus qu'une strat6gie de survie. Dans l'6tat actuel de nos connaissances du site, avec l'essentiel d'Aurora encore h fouiller, d'autres interpr6tations comme des combats entre tribus, la soumission de tribus voisines, le charognage, la chasse, |e contr61e de la population ou toute autre version plus sensationnel comme le meurtre sont purement sp6culatives, pr6matur~es et anecdotiques. L'ensemble complet et la distribution des fossiles (seuls 7 m 2 sur 80 m 2) ne sont pas encore suffisants pour venir ~t l'appui d'interpr6tations ult6rieures fiables.

4. Sima de los Huesos et les anc~tres n~adertaliens Sima de los Huesos est une salle aveugle contenant des s6diments du P16istoc6ne moyen d'environ 300 000 ans. Elle est petite et on y accede aujourd'hui seulement par un puits vertical de 13 m (Arsuaga et al., 1997). L'entr6e

actuelle est ~ 400 m de la salle et passe par des couloirs 6troits, des passages resserr6s et plusieurs grandes salles. La g6omorphologie de la grotte sugg6re que durant le P16istoc6ne l'entr6e dtait plus proche du site, bien que l'6tude g6ologique n ' e n ait pas encore rdvdl6 la position exacte. Plusieurs dents ant6rieures d'hominid6 montrent des stries macroscopiques sur la face buccale selon un module spdcifique (figure 5a). L'analyse taphonomique conduite sur ces dents a sugg6r6 que ces stries avaient 6t6 r6alis6es accidentellement en tenant de la viande ou autre entre les dents et en la coupant avec des outils de silex (Femfindez-Jalvo et BermOdez de Castro, 1988). Cette analyse a montr6 que les stries 6taient ante mortem (figure 5b) et leur arrangement ainsi que les traits indiquant la direction (Bromage et Boyde, 1984) sugg6rent que la plupart des hominid6s 6taient droitiers fournissant un t6moignage indirect de la lat6ralisation du cerveau au Pl6istoc~ne (Berm6dez de Castro et al., 1988).

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Figure 5. a) AT-42 Incisive sup6rieure de SH montrant des striations sur l'ext6rieur buccal, visibles/l l'ceil nu. Elles ont une disposition oblique et une orientation r6currente, couvrant principalernent des zones centrales, et rnoins commun6ment vers les zones lat6rales (absentes sur les surfaces linguales). b) Reconstitution du mouvement qui pourrait produire des striations sur les dents ant6rieures de SH. Les hominid6s en tenant des morceaux de nourriture (viande ou toute autre mati~re) entre les dents ant6rieures, et puis les coupant accidentellement avec un outil lithique. Figure 5. a) AT-42 upper incisor from SH showing striations on the buccal surface, visible to the naked eye. Striations have an oblique disposition and a recurrent orientation, mainly covering central areas, and less common toward the lateral areas (absent on the lingual surfaces). b) Reconstruction of the motion that could produce striations on SH anterior teeth. Hominids held pieces of food (meat or other matter) in between the maxillary and mandibular anterior teeth, and then accidentally scratched their teeth while slicing them away with a stone knife.

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Sima de los Huesos a livr6 une grande quantit6 d'ossements d'hominid6s et d'ours des cavernes. L'6chantillon d'hominid6s comprend des hommes et des femmes jeunes qui constituent un groupe de plus de 30 individus (BermOdez de Castro et Nicolfis, 1997). I1 est tr~s intdressant de constater qu'ils sont exclusivement associ6s ~ des restes de carnivores. Cette association est inhabituelle, elle comprend 158 ours des cavernes (Ursus deningeri), trois lions des cavernes (Panthera leo) ainsi que d'autres grands f61ins, deux lynx (Lynx pardina), un seul chat sauvage (Felis sylvestris), deux types de canid6s incluant 23 renards (Vulpes vulpes) et un loup (Canis lupus) et cinq must61id6s (Garcia et al., 1997). Une telle association ne peut pas ~tre na0arelle. Celles apport6es par les pr6dateurs ou les charognards sont biais6es dans le sens de plus d'herbivores (Lyman 1994) b, l'exception de circonstances inhabituelles d'une extreme s61ection des proies. Un tel d6s6quilibre pourrait se produire, par exemple, dans le cas de tigres et de lions mangeurs d'homme dans des rdgions tr6s peupl6es ~ l'heure actuelle (Simons, 1966; Kingdon, 1974 ; Bourli6re, 1955 ; Schaller, 1972). Lh, des tigres sont connus pour avoir tu6 et d6vor6 plus de cent hommes en quelques mois apr6s qu'ils aient 6t6 bless6s et dans l'incapacit6 de chasser leurs proies habituelles. En consid6rant les populations modernes de chasseurs cueilleurs (Hassan, 1981) qui pourraient ~tre similaires aux groupes d'hominid6s d'il y a 300 000 ans ainsi que la disponibilit6 de la nourriture, tout ceci indique une taille moyenne de la population n'exc6dant pas un individu au km 2. I1 est improbable qu'Atapuerca ait pu ~tre le lieu de zones tr6s peupl6es pour avoir un tel nombre de victimes. L'hypoth~se alternative 6tait une mort accidentelle de ce groupe d'hominid6s h l'int6rieur ou pr6s de SH (Aguirre, 2000). I1 y a, cependant, un t6moignage de fractures des bords qui sugg6re un m61ange d'os fossiles et frais incompatible avec la mort simultan6e de 32 individus.

5. Sima de los Huesos ne pouvait ~tre un site magique C'est la composition inhabituelle d'humains et de carnivores et l'absence totale d'herbivores qui, en fait, indique une implication des hominidds. L'accumulation d'hommes par d'autres hommes a 6t6 ant~rieurement propos6e par l'un

de nous (YFJ) d'apr~s une 6rude taphonomique de 1988. Cette hypoth6se a 6t6 reprise par d'autres auteurs (Arsuaga et al., 1990, 1997) proposant que les cadavres 6taient jet6s dans la Sima de los Huesos fi traves la fissure verticale qui donne acc6s au site aujourd'hui. Cette hypoth~se a 6t6 attribu6e/l des croyances rituelles et magiques dans des documentaires et conf&ences de diffusion populaire qui parlaient d6j~ de ~ montagne magique >>. Bien que l'id6e soit jolie, elle est contraire aux t6moins recueillis. Notre analyse taphonomique du mat6riel (Andrews et Fernfindez-Jalvo, 1997) indique que les cadavres n'ont jamais pu ~tre jet6s dans la fissure verticale de 13 m et que l'association des fossiles trouv6s dans la Sima d6rivait d'une accumulation ant6rieure des corps quelque part ailleurs dans le syst~me karstique. Si les corps avaient 6t6 jet6s dans la Sima nous nous attendrions h voir deux choses. L'une est qu'ils devraient &re presque complets et au moins quelques os en connexion anatomique, mais ce n'est pas le cas. La plupart des parties du corps sont cependant repr6sent6es clans la Sima, avec mains, pieds, crane, membres et toutes les autres parties du squelette, mais elles ne sont pas conserv6es en proportions 6gales. On le montre, figure 6 ofa l'on peut voir que les seuls 616ments pr6sents dans les nombre attendus pour 32 individus sont les dents/l partir desquelles ce nombre a 6t6 calcul6. Les os des membres inf6rieurs ne sont pr6sents que pour 50 ~ 60 % du nombre attendu, ceux du membre sup6rieur entre 20 % et 40 %. Les mains et les pieds (phalanges, m6tapodes, os du tarse et du carpe) sont sous repr6sent6s avec moins de 15 % et en particulier les c6tes et les vert6bres ne pr6sentent que 3-6 % de ce qui devrait 6tre pr6sent si les corps entiers avaient 6t6 jet6s dans la Sima. La seconde caract6ristique de l'ensemble auquel on pourrait s'attendre dans ce cas est qu'il devrait y avoir plus ou moins de fractures que ce n'est pas le cas. Apr6s des expdrimentations de simulation (Andrews et FernfindezJalvo, 1997), nous pouvons conclure que les cr~,nes et les mandibules devraient &re plus fractur6es qu'elles ne le sont et, en fait, les cr~,nes n'auraient pas r6sist6 ~ une chute de 13 m sans signe de traumatisme. Par contraste, la plupart des os des membres sont demeur6s intacts au cours de l'exp6rimentation. A Sima de los Huesos, seuls neuf os longs de l'6chantillon analys~ (3 hum6rus, 2 f6murs, 3 tibias et un

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[ Figure 6. Le NME des ~l~ments squelettiques pour l'assemblage humain de SH (barres) compar~ A l'abondance relative d'~l~ments squelettiques (carr6s) qui devraient correspondre aux 32 individus enregistr6s ~tSima de los Huesos. Notez l'abondance relative r6duite de quelques d6ments anatomiques (m6tacarpes, m6tatarses, tarses, carpes et phalanges - des pieds et des mains -, vert6bres ou c6tes). Si les corps complets atteignaient Sima de los Huesos, l'abondance relative de tousles 616ments anatomiques (carr6s) devrait ~tre de pr6s de 100 %. Les lions ne sont pas des mangeurs d'os et n'auraient pas ing6r6 les presque 6 500 os manquants de l'assemblage humain SH. Figure 6. Minimum numbers of skeletal elements (MNE) for the SH human assemblage (bars) compared to relative abundance of skeletal elements (squares) that should correspond to the 32 individuals recorded at Sima de los Huesos. Note the reduced relative abundance of some anatomical elements (metacarpal, metatarsal, tarsal, carpals and phalanges - feet and hands-, vertebrae or ribs). If complete bodies reached Sima de los Huesos, relative abundance of all anatomical elements (squares) should be close to 100 %. Lions are not bone eaters and could not ingest the almost 6,500 missing bones of the SH human assemblage.

p6ron6) sont intacts. Ceux-ci mis ~ part, presque tous les os longs retrouv6s dans les fouilles sont cass6s, la plupart transversalement (caract&istique de fracture diag6n6tique) avec l'autre bout de l'os quelques m6tres plus loin et les bords arrondis par l'6rosion s6dimentaire (24,8 % des fractures transversales de la fouille) sugg6rant des processus de remaniement, probablement r6sultant d'un transport dans une coulee boueuse. Cependant, le fait de trouver des 6mouss6s affectant les fractures transversales indique que ce processus s'est produit longtemps apr~s la perte des chairs, apr&s l'inhumation et sugg6re un possible remaniement c'est ~ dire l'exhumation de os d6jfi min6ralis6s et enterr6s. De plus, les bords fractur6s arrondis ~t diff6rents degr6s sugg~rent que le transport a produit un m61ange d'os anciens et frais. Selon un travail exp&i-

mental (Fem~ndez-Jalvo, 1992), un limon argileux peut produire cet arrondissement des bords sur quelques types d'os et quelques soient les s6diments (sable, cailloutis ou argile) les os fossiles sont toujours plus 6mouss6s que les os frais ou sees, ces derniers n'6tant presque pas affect6s par les s6diments fins. Nous concluons de tout cela que les restes d'hominid6s pr6sents dans la Sima n'y sont pas parvenus entiers et n ' y ont pas 6t6 jet6s par la fissure verticale de 13 m. Nous croyons que les t6moins indiquent un d6p6t ant6rieur quelque part ailleurs dans la grotte et un transport cons6cutif dans la Sima. Avant toutefois de nous 6tendre sur cela, il y quelques t6moins de plus h consid&er. II y a de larges traces de mhchonnements par les carnivores sur environ la moiti6 des os fossiles d'hominid6s. Notre recherche montre que

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les hominid6s de la Sima de los Huesos portent des traces de dents de grands f61ins, probablement des lions et de petits canid6s de la taille des renards. Les traces de grande taille sont pr6sentes sur le pelvis et les vert+bres lombaires (ce qui est compatible avec un acc6s primaire) en plus grandes proportions que sur les autres 616ments et les plus petites traces (consid6r6es comme provenant de renards) y sont absentes. Par contraste, le reste des carnivores de l'ensemble ne porte pas de telles traces. L'exception se manifeste sur les os des ours des cavernes qui ont 6t6 rong6s par d'autres ours des cavernes. Ceci sugg6re un second cas de cannibalisme fi Atapuerca, cette fois des ours mangeant des ours opposes fi des hominid6s en mangeant d'autres comme ~ Dolina. En fait, les ours sont une esp6ce de mammif6res parmi les plus cannibales, charognards ou tuant des individus faibles (trop fig6s ou trop jeunes) apr6s l'hibernation (Clevenger, 1991 ; Kurt, 1976). Finalement, on peut aussi souligner que si la fissure verticale 6tait ouverte ~ l'~poque et si les hominid6s y avaient 6t6 jet6s, quelques ours auraient pu aussi y tomber puisque qu'on sait qu'ils habitaient la salle sup6rieure. Darts ce cas, leurs restes auraient 6t6 m61ang6s avec ceux des hominid6s et leurs os rong6s indistinctement par les carnivores trouv6s ~ la Sima de los Huesos (Garcia et al., 1997). Au contraire, les hominid6s ont 6t6 rong6s exclusivement par les lions et les renards et les ours par d'autres ours. La seule explication qui convient ~ ce ph6nom6ne taphonomique est que les hominid6s et les ours habitaient des sites diff6rents et que la Sima de los Huesos n'a jamais 6t6 un pi6ge o~ les carnivores tombaient et mouraient de faim (Garcia et al., 1997). Si cela avait 6t6 le cas, au moins les carnivores qui auraient surv6cu ~ la chute et rong6 les os auraient subi des blessures (cals osseux) r6sultant de cette chute (membres, pelvis, c6tes) comme cela se produit dans les pi6ges naturels. Le t6moignage taphonomique sugg6re que ce que nous trouvons aujourd'hui la Sima de los Huesos r6sulte d'une accumulation secondaire, probablement par des coul6es de boue qui ont apporte ensemble des restes d'ours et d'hominid6s d6pos6s fi l'origine dans diff6rents endroits de le grotte. Sur cette base, nous proposons la s6quence suivante des 6v6nements : Premi6rement, d'autres hominid6s ont d6pos6s des cadavres dans un autre endroit de la

grotte, tr~s probablement, l'ancienne entr6e (figure 7). De grands f61ins, probablement des lions, mang6rent ces hominid6s r6cemment morts. II n'est pas probable que les lions aient attaqu6 les hominid6s (comme cela a 6t6 interpr6t6 de fagon erron6e par d'autres auteurs comme Boquet-Appel et Arsuaga, 1999), ils les ont trouv6s d6j~ morts. Ce qui peut sugg6rer que les corps 6taient expos6s car les lions ne creusent pas pour exhumer leur nourriture comme les hy6nes ou les canid6s peuvent le faire. Apparemment les lions ont train6 les corps dans la grotte afin de prot6ger leur nourriture des autres carnivores comme font la plupart des f61ins. En fait, les traces caract6ristiques de mfichonnement des grands canid6s n'ont 6t6 observ6es sur aucun des ossements de Sima de los Huesos, bien qu'ils soient les charognards les plus communs ~ Galeria (Huguet et al., 1999). Ceci nous fait penser que l'ensemble de SH ne repr6sente que des cadavres tra~n6s dans la grotte et mang6s par les lions, d6daignant quelques autres corps qui avaient fit6 abandonn6s a l'entr6e et qui auraient aussi bien pu avoir fait l'objet de charognage d'autres carnivores. Par contraste, les petits canid6s comme les renards 6taient pr6sents et faisaient probablement suite aux lions. Cette histoire a pu se r6p6ter plusieurs fois et, ~tl'occasion, les renards en essayant d'attraper la viande ont pu avoir 6t6 tu6s par les lions, comme en t6moignage l'abondance de leurs restes ~ SH. Ils pouvaient avoir enlev6 des parties d'hominid6s qui manquent dans le site comme les vert6bres, les mains et les pieds qui sont ais6s/t transporter. Les raisons pour lesquelles ces hominid6s ont rassembl6 les morts dans un endroit particulier pouvaient &re nombreuses et vari~es. Peut~tre pour des raisons d'hygibne les corps ~taient ils laiss6s pour ~tre d6charn6s par les carnivores. Cela est pratiqu6 par les villageois d'I~thiopie qui, aujourd'hui, exposent les corps aux hy6nes avant l'inhumation. II se peut aussi qu'il y ait eu quelque conscience de la mort et qu'on ait cherche ~ 6vacuer les corps. Malheureusement, dans un d6p6t arch6ologique, on ne peut inf6rer une intention fun6raire qu'en l'absence de facteurs non humains et fi la Sima de los Huesos, des facteurs biologiques et g6ologiques ont 6t6 impliqu6s. En cons6quence, nous ne disposons pas du contexte originel dans lequel les corps des hominides ont 6t6 abandonn6s et jusqu'fi la

Atapuerca, te conte de deux sites

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Figure 7. Les hominid6s apparemment apport~rent, apr~s un comportement encore mconnu, des corps morts/l un endroit particulier, l'ancienneentr6e de la grotte dont l'emplacement est toujours inconnu. Les lions r6dant dans la zone ont tir6 profit de cette nourriture, et train6 ces corps r6cemment morts dans la grotte pour les manger. Les 6vidences taphonomiques infirment le fait que les hominid6s aient jet6 les corps morts vers le bas dans la fissure verticale actuelle de Sima de los Huesos (voir texte).

Figure 7. Hominids apparently brought dead bodies, following a still unknown behaviour, to a particular place, the old cave entrance which location is still unknown. Lions prowling the area took advantage of this windfall food, and drag these recently dead hominid bodies into the cave and ate them. The resulting taphonomic evidences do not support that hominids threw dead bodies down into the current vertical shaft of Sima de los Huesos (see the text).

d6couverte de l ' a n c i e n n e entr6e de la grotte nous ne p o u v o n s que sp6culer sur ces raisons. 6. N o u r r i t u r e

de la pens6e

Les c o m p o r t e m e n t s observ6s ~ Gran D o l i n a et ~t S i m a de los Huesos, c a n n i b a l i s m e et 6vacuation des corps apr6s la mort sont encore observes actuellement. Ces attitudes sont des 616ments de distinction entre les cultures m o d e m e s off l ' o n enterre ses morts ou bien on les jette l ' e a u ou encore on les brfile, ou on les expose aux charognards c o m m e les hy6nes ou les vautours, ou encore on les d6chame, ou on les d6vore. Beaucoup de ces activit6s laissent des traces sur les os des morts et leur 6tude peut nous en faire connaitre le processus. Ceci, en revanche, sugg6re des caract~res, de c o u t u m e s et de croyances

des peuples pass6s, plus particuli6rement concernant le d 6 v e l o p p e m e n t de leurs rituels. Les rites sont i n c o n n u s de nos plus proches parents, les chimpanz6s. Mais on les a observ6s dans des activit6s guerri~res, recherchant et tuant d'autres chimpanz6s qui pouvaient ~tre leurs proches (Goodall, 1979). O n les a vus, quelquefois, les m a n g e r et le c a n n i b a l i s m e est illustr6 dans quelques groupes humains m o d e m e s (Degusta, 1999). Si cela est le cas peut &re attest6 par les traces laiss6es sur les os lors de la d6carnisation, ou de leur fracture pour l'extraction de la moelle, darts des modes identiques de traitement des restes h u m a i n s et animaux. Des marques de d6coupe ont r 6 c e m m e n t 6t6 d6crites sur des N 6 a n d e r t a l i e n s ( D e f l e u r et al., 1999) et des australopith6cin6s du site pl6istoc6ne de Sterkfontein en Afrique du sud entre 2,4 et

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1,7 ma (Kuman et Clarke, 2000). Le but des traces observ6es sur les os des australopith6cin6s est incertain e t a 6t6 interpr6t6 soit comme une forme de d6carnisation rituelle ou comme une activit6 de boucherie ou encore curative (Pickering et al., 2000). De fagon plus probl6matique, les chimpanz6s (Plummer & Stanford, 2000) de m~me que les hominid6s d'avant 2,5 ma n'avaient pas encore acquis la technologie lithique, et ainsi les traces faites par des outils lithiques ne peuvent servir /~ 6tablir le cannibalisme bien qu'il ait pu se produire. I1 y a de nombreux faits qui indiquent que Homo sapiens se nourrissait de sa propre esp~ce (Degusta, 1999) et un but rituel, la subordination de tribus voisines ou la faim ont ~t~ proposes pour expliquer les cas de cannibalisme moderne (Turner et Tumer, 1999 ; White, 1992). Loin de tout t~moignage de rituel, ce que l'on observe sugg6re que le cannibalisme de Gran Dolina r6sultait d'un seul but nutritionnel. Une autre 6tude de possible cannibalisme est en cours actuellement par les auteurs (Andrews et Femgndez-Jalvo, sous presse), cette lois en Angleterre beaucoup plus r6cemment (il y a environ 12 000 ans). En consid6rant ceci ainsi que d'autres 6tudes taphonomiques appliqu6es/t plusieurs sites, on en arrive au fait que le cannibalisme n'est pas une conduite rare chez l'homme. C'est notre impression que le cannibalisme doit ~tre accept6 comme 6tant plus inh6rent/t notre lign6e qu'on ne le pensait autrefois.

La question qui se pose est : les s6pultures sont-elles la seule manifestation du traitement mortuaire ? Nous savons qu'il existe une grande diversit6 d'attitudes adopt6es par les diff6rentes soci6t6s envers les morts. A c e point nous ne pouvons que proposer que quelles que soient les raisons, il y a 800 000 ans, des hominid6s ont 6t6 mang6s par d'autres et qu'il y a 300 000 ans, des hominid6s en ont accumul6 d'autres dans un endroit particulier pendant une p6riode de temps d'une dur6e inconnue. Ce traitement different n'est pas 1i6 /t l'6volution du comportement humain (comme l'a sugg&6 Paul Bahn, 1999) puisque le cannibalisme est encore pratiqu6 de nos jours (rituel ou non) et que les tombes en masse aujourd'hui sont dans la plupart des soci6t6s la marque d'un traitement anonyme et plut6t irrespectueux des morts.

Traduit de l'anglais par Christiane Leroy-Prost

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15-36. la Sima de los Huesos, cependant, un mod61e diff6rent 6merge, inconnu ~t ce moment de l'6volution humaine. L/t, nous croyons que les hominid6s ont abandonn6 les corps quelque part, mais ils ne les ont modifi6s en aucune fagon. Nous ne pouvons pas parler d'une quelconque possibilit6 de rituel /t Sima de los Huesos, puisqu'il s'agit d'un d6p6t secondaire. Les rituels anciens d'inhumation sont un autre th6me de controverse (Gargett, 1999 ; Hovers et al., 2000; Gargett, 2000). Les inhumations intentionnelles chez les N6andertaliens et les Homo sapiens archa'/ques ont 6t6 tr~s d6battues. Quelques auteurs pr6tendent qu'il y une absence de t6moins fiables, non ambigOs de ces s6pultures qui peuvent aussi bien &re consid&6es comme naturelles. Quelques auteurs sont plus r6ticents ~ d6nier cette possibilit6, bien qu'ils consid~rent qu'en d6finitive les N6andertaliens n'enterraient pas r6guli~rement leurs morts.

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