Autres ectoparasitoses

Autres ectoparasitoses

Autres ectoparasitoses Pascal del Giudice 46 Myiases cutanées  255 Tungose  256 Tiques  256 Ectoparasites d'origine animale  257 Demodex  258 Pyemot...

5MB Sizes 0 Downloads 71 Views

Autres ectoparasitoses Pascal del Giudice

46

Myiases cutanées  255 Tungose  256 Tiques  256 Ectoparasites d'origine animale  257 Demodex  258 Pyemotes  258 Autres arthropodes ou ectoparasites  259 Figure 46.1.  Multiples myiases cutanées à Dermatobia hominis.

MYIASES CUTANÉES Les myiases cutanées sont dues à l'infestation de larve de mouches. Il existe plusieurs classifications proposées. On peut schématiquement les différencier en myiases furonculoïdes, myiases des plaies et myiases migratoires [1, 2].

MYIASES FURONCULOÏDES

Dermatobia hominis Il s'agit de la forme la plus commune du continent américain. On la retrouve surtout en Amérique du Sud et en Amérique centrale. Les mouches adultes peuvent déposer directement leurs œufs sur les arthropodes hématophages comme les moustiques. Ainsi ces derniers joueront le rôle de transporteurs lorsqu'ils rencontreront un hôte en déposant les œufs. Cliniquement la myiase se manifeste par un nodule paucisymptomatique, parfois une gêne avec sensation de picotement est rapportée par les personnes infestées. L'examen attentif montre un orifice qui est utilisé pour la respiration de la larve (figure 46.1). La myiase et en général unique, mais les formes multiples ne sont pas rares (figure 46.2). Un œdème local peut l'accompagner. Un rappel de vaccination antitétanique est recommandé. Les complications infectieuses sont rares tant que la larve est vivante. Le traitement consiste en l'extraction de la larve mécaniquement. L'ouverture de l'orifice permet l'extraction de la larve après une pression (figures  46.3 et 46.4). L'utilisation Dermatologie infectieuse © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Figure 46.2.  Extraction de la larve Dermatobia hominis.

Figure 46.3.  Dermatobia hominis.

255

46

PART 4 

 PARASITOLOGIE

Figure 46.4.  Myiases cutanées multiples à Cordylobia anthropophaga.

Figure 46.6.  Puce chique localisée au pied typique.

TUNGOSE

Figure 46.5.  Cordylobia anthropophaga.

d­ 'ivermectine topique permet une extraction plus facile. D'autres traitements tels que l'occlusion de l'orifice par de la vaseline ont été proposés.

Cordylobia anthropophaga On la rencontre en Afrique intertropicale. Les hommes se contaminent par le biais de vêtements étendus pour le séchage, sur lesquels les adultes femelles ont pondu leurs œufs. C'est la raison pour laquelle il est recommandé de repasser les vêtements au fer chaud. Cliniquement, elle forme un nodule cutané inflammatoire (figure 46.5) présentant, comme pour Dermatobia, un orifice permettant la respiration de la larve (figure 46.6). L'extraction est plus aisée que pour Dermatobia hominis.

Cuterebra myiasis et Wohfahrtia vigil Ces larves se rencontrent en Amérique du Nord.

La tungose ou « puce chique » est une infection cutanée bénigne causée par Tunga penetrans rencontrée dans les régions tropicales [3]. Les œufs éclosent dans le sable chaud et les puces infectent l'homme lors du contact avec le sable. La femelle gravide enfonce sa tête dans Le derme, laissant la partie distale de l'abdomen et de l'appareil génital à l'extérieur, permettant l'expulsion des œufs dans le milieu extérieur [3]. Les lésions sont donc naturellement présentes sur les zones de contact, principalement les pieds. L'aspect est très caractéristique, formant une papule arrondie asymptomatique ayant une forme de cible avec un point noir central (figure 46.6). Leur nombre varie, il est en général unique mais on peut en retrouver parfois plusieurs centaines chez un individu et les cas d'hyperinfestation sont exceptionnels (figure 46.7). Le diagnostic est clinique. Depuis peu le dermatoscope permet un diagnostic encore plus facile (figure 46.8). La découverte d'une tungose lors d'un diagnostic histologique est fortuite, car la biopsie n'est pas indiquée du fait que le diagnostic est cliniquement évident. Dans de nombreux pays en région tropicale, la tungose est endémique en particulier dans les communautés pauvres. Les complications à type de surinfections ou tétanos sont exceptionnelles sauf dans ces communautés. Le traitement repose sur l'extraction mécanique à la curette, ou aidée par de la vaseline salicylée en occlusion. Toutefois l'évolution spontanée est la chute spontanée de la puce. Le traitement préventif se pose surtout pour les communautés exposées, il repose sur le port de chaussures. L'utilisation de topiques répulsifs semble prometteuse.

MYIASES RAMPANTES Deux myiases sont à l'origine de myiases rampantes : Gasterophilus et Hypoderma.

MYIASES DES PLAIES Il s'agit de larves de mouches évoluant sur des plaies préexistantes. Elles sont le plus souvent non invasives et se contentent de se nourrir des tissus nécrosés, apportant ainsi un bénéfice qui est actuellement utilisé en thérapeutique. Dans de rares cas 256 elles peuvent être invasives.

TIQUES Les tiques sont des arachnides, et se divisent en deux familles Ixodidae (tiques dures) et Argasiae (tiques molles). Elles ont schématiquement trois stades d'évolution : larve, nymphe et adulte [4]. Les lésions dermatologiques provoquées par les tiques sont rares et se limitent à une réaction inflammatoire locale transitoire (figure 46.9).

Autres ectoparasitoses

46

La prévention des maladies infectieuses transmises par les tiques est essentiellement liée à l'éviction des piqûres par l'éducation des personnes exposées ainsi qu'à la protection vestimentaire. L'utilisation de répulsif est discutée. L'antibiothérapie préventive n'est pas recommandée dans la prévention de la maladie de Lyme. En revanche dans les zones d'endémie de fièvre boutonneuse méditerranéenne (sud de l'Europe et Maghreb), compte tenu de la brutalité d'installation des signes, de leur gravité potentielle, une antibiothérapie préventive peut se discuter, bien qu'il n'existe aucune recommandation dans ce cas. On proposera alors la doxycycline ou les macrolides pour les enfants. Figure 46.7.  Forme hyperinfestation.

ECTOPARASITES D'ORIGINE ANIMALE Plusieurs acariens d'origine animale peuvent toucher occasionnellement l'homme. La symptomatologie se caractérise par un prurit, des lésions de grattage et des papules. Le prurit cesse lors de la mise a l'écart de l'animal.

CHEYLETIELLA

Figure 46.8.  Puce chique en dermoscopie.

Il existe plusieurs espèces de Cheyletiella : C. blakei touche les chats, C. parasitivorax les lapins, C. yasguri les chiens [1, 2]. Chez les animaux ces acariens sont responsables d'une dermatite plus ou moins symptomatique. Les hommes se contaminent au contact des animaux. La symptomatologie se caractérise par un prurit généralisé, associé à quelques papules et lésions de grattage. Des éruptions vésiculobulleuses sont possibles [6, 7]. L'homme est un hôte accidentel. Le prurit cesse lors de la mise à l'écart du contact des animaux infestés. Le diagnostic repose sur l'examen de l'animal par un vétérinaire. Le traitement consiste en l'interruption de la contamination par l'animal, soit par son traitement, soit par sa mise à l'écart. Les lésions cessent spontanément quelques jours après l'interruption du contact. Les dermocorticoïdes permettent d'accélérer la résolution des signes.

DERMANYSSUS GALLINAE

Figure 46.9.  Réaction inflammatoire autour d'une piqûre de tique.

Le principal problème posé par les tiques est la possibilité de transmission de maladies infectieuses, qui sont principalement : n n n n n n

la maladie de Lyme ; l'encéphalite à tique (maladie virale) ; les rickettsioses ; la babésiose ; Borrelia miyamotoi ; d'autres bactéries plus rarement associées à une transmission par des tiques : tularémie, fièvre Q et Bartonella henselae.

Des paralysies ou parésies ascendantes (peudo-GuillainBarré) après piqûre de tique sont décrites [5]. La transmission des maladies infectieuses dépend surtout du temps de fixation de la tique à la peau.

Ces ectoparasites des oiseaux peuvent occasionnellement contaminer l'homme [8–10]. Les manifestations cliniques sont un prurit généralisé, des lésions de grattage et des papulovésicules. Occasionnellement le parasite peut être visualisé sur la peau, ce qui permet le diagnostic. Le diagnostic repose sur l'anamnèse qui retrouve une exposition à des oiseaux.

ORNITHONYSSUS Plusieurs espèces de cet acarien sont responsables, de façon accidentelle, d'un prurit et d'un prurigo généralisé, en particulier Ortonyssus bacoti, responsable de la rat mite dermatitis [11, 12].

GALES ANIMALES Sarcoptes scabiei var. hominis est spécifique de son hôte, l'homme. Il existe cependant des sarcoptes animaux qui peuvent occasionnellement infester l'homme, comme Scarcoptes scabiei var. canis [13]. Comme l'homme n'est pas l'hôte naturel de ces acariens, l'infestation cesse dès que le contact avec l'animal 257 source cesse.

46

PART 4 

 PARASITOLOGIE

Figure 46.10.  Dermatite à Pyemotes ventricosus.

DEMODEX Demodex folliculorum et Demodex brevis sont des ectoparasites permanents du follicule pilo-sébacé humain. Ils représentent les seuls parasites participant au microbiome cutané. Ils sont rares chez les enfants et leur prévalence augmente avec l'âge. D. folliculorum se retrouve dans des follicules des sillons nasogéniens, le nez et les paupières, qui sont les sites à forte concentration de glandes sébacées. Ces acariens ont été impliqués dans plusieurs pathologies ­dermatologiques : la rosacée, la dermatite périorale, la ­blépharite et la démodécidose ou démodécie selon les articles, forme ­profuse d'infestation à Demodex chez les sujets ­immunodéprimés [14–16]. Nous ne décrirons pas en détail ici ces pathologies car l'implication du Demodex reste controversée. De nombreuses inconnues demeurent sur l'implication réelle de cet acarien dans ces pathologies du fait de plusieurs facteurs. Tout d'abord les Demodex sont des acariens faisant partie de la flore cutanée normale et donc il est compliqué de baser leur implication dans une pathologie donnée sur leur seule présence. En général, ce sont des critères quantitatifs qui forment la base de l'argumentation mais les méthodes de quantification même ne sont pas exemptes de problèmes méthodologiques [14–16]. D'autre part, bien qu'il existe des Demodex chez les animaux responsables de dermatites sévères, on ne dispose pas de modèle animal pouvant reproduire les pathologies humaines. Enfin on ne dispose pas de traitement de référence (on ne cultive pas les Demodex) et même si l'ivermectine est très utile pour le traitement des démodécies animales, son action sur les Demodex humains n'est pas clairement établie. Pour toutes ces raisons, le rôle de ces acariens en pathologie humaine reste controversé. Mais ils restent un champ passionnant d'étude. Ainsi des travaux récents, dans la rosacée, tendent à montrer que les Demodex ne seraient pas impliqués directement mais par l'intermédiaire de bactéries qu'ils hébergeraient, ce qui expliquerait l'efficacité relative des antibiotiques dans cette pathologie. Une bactérie candidate a été citée : Bacillus oleronius [17].

PYEMOTES Encore presque totalement inconnu il y 5 ans, cet acarien est pourtant probablement à l'origine de très nombreux prurit et « piqûres d'arthropodes ». En 2008, nous avons décrit les caractéristiques cliniques et 258 épidémiologiques d'une dermatite prurigineuse particulière qui

Figure 46.11.  Pyemotes ventricosus. Collection Pascal Delaunay.

sévissait depuis quelques années dans notre région du sud de la France. Les histoires étaient caractéristiques, des familles arrivant dans une maison de vacances à la fin du printemps ou en été, étaient « attaquées » par des piqûres d'origine invisible [18]. La majorité des personnes d'une même famille étaient touchées par cette dermatite, plus ou moins selon les individus. Le début des signes survenait dès le lendemain de l'arrivée dans la maison. L'examen des sujets retrouvait des lésions maculopapuleuses centrées par une vésicule excoriée, typiques de piqûres d'arthropodes. Les maculopapules étaient en général multiples, allant de quelques unes à plusieurs centaines, n'épargnant aucune région du corps, protégée par un vêtement ou non. Une particularité clinique distinguait ces piqûres d'arthropode, la présence d'une traînée érythémateuse, donnant un aspect de « comète » aux lésions (figure 46.10). L'enquête entomologique dans les maisons a permis de trouver un acarien connu pour causer des dermatites : Pyemotes. Il existe plusieurs espèces de Pyemotes, nous avons identifié celle-ci comme Pyemotes ventricosus (figure  46.11). Pyemotes est connu pour être un parasite d'insectes. Nous avons identifié les insectes parasités par Pyemotes ventricosus, il s'agissait des vrillettes ou « vers de bois » ou Anobium punctatum qui forment des galeries dans les vieux bois. La dermatite occasionne un prurit sévère qui dure 3 semaines. Le seul traitement qui semble être efficace est une courte corticothérapie générale (1–2 mg/kg). Enfin le traitement des vieux bois colonisés par les vrillettes ou leur destruction permet l'élimination définitive de la source de Pyemotes. Plusieurs autres espèces de Pyemotes sont à l'origine de dermatites isolées ou d'épidémies qui surviennent dans des conditions différentes selon le contexte et les insectes parasités. Ainsi, au début du xxe siècle, la « gale » des céréaliers

Autres ectoparasitoses était décrite chez les gens qui manipulaient les sacs contenant les céréales, ces sacs étant contaminés par des insectes euxmêmes parasités par Pyemotes. Plus récemment P. herfsii était impliqué dans une épidémie de dermatite chez des étudiants qui étaient infectés en s'asseyant dans l'herbe dans plusieurs campus des États-Unis. La dermatite à Pyemotes est probablement très sous-estimée car les lésions, en dehors du signe de la « comète », sont peu spécifiques et similaires à n'importe quelle piqûre d'arthropode.

46

AUTRES ARTHROPODES OU ECTOPARASITES Nous ne ferons que citer d'autres insectes ou ectoparasites rarement rapportés dans la littérature à l'origine de lésions de prurigo et de prurit et dont le diagnostic étiologique est difficile tels que Limothrips cerealium (insecte), Dermatophagoides pteronyssinus (acarien), la pullicose (ou piqûre de puce) due à des espèces de puces animales comme la puce du chat (Ctenocephalides felis), piqûres d'aoûtat larve de Trombicula autumnalis.

RÉFÉRENCES [1] Robbins K, Khachemoune A. Cutaneous myiasis : a review of the common types of myiasis. Int J Dermatol 2010 ; 49 : 1092–8. [2] McGraw TA, Turiansky GW. Cutaneous myiasis. J Am Acad Dermatol 2008 ; 58 : 907–26. [3] Feldmeier H, Keysers A. Tungiasis – A Janus-faced parasitic skin disease. Travel Med Infect Dis 2013 ; 11 : 357–65. [4] Due C, Fox W, Medlock JM, Pietzsch M, Logan JG. Tick bite prevention and tick removal. BMJ 2013 ; 347 : f7123. [5] Hall-Mendelin S, Craig SB, Hall RA, O'Donoghue P, Atwell RB, Tulsiani SM, et al. Tick paralysis in Australia caused by Ixodes holocyclus Neumann. Ann Trop Med Parasitol 2011 ; 105 : 95–106. [6] Dobrosavljevic DD, Popovic ND, Radovanovic SS. Systemic manifestations of Cheyletiella infestation in man. Int J Dermatol 2007 ; 46 : 397–9. [7] Paradis M. Mite dermatitis caused by Cheyletiella blakei. J Am Acad Dermatol 1997 ; 37 : 265–7. [8] Koh WL, Liu TT, Tay YK. Formication due to true parasitic infestation : bird mites. Arch Dermatol 2011 ; 147 : 508–9. [9] Cafiero MA, Camarda A, Circella E, Santagada G, Schino G, Lomuto M. Pseudoscabies caused by Dermanyssus gallinae in Italian city dwellers : a new setting for an old dermatitis. J Eur Acad Dermatol Venereol 2008 ; 22 : 1382–3. [10] Green B, Sparling J, Sparling MB. What's eating you ? Pigeon mite (Dermanyssus gallinae). Cutis 2007 ; 80 : 461–2.

[11] Kong TK, To WK. Images in clinical medicine. Bird-mite infestation. N Engl J Med 2006 20 ; 354(16) : 1728. [12] Kelaher J, Jogi R, Katta R. An outbreak of rat mite dermatitis in an animal research facility. Cutis 2005 ; 75 : 282–6. [13] Aydıngöz IE, Mansur AT. Canine scabies in humans : a case report and review of the literature. Dermatology 2011 ; 223 : 104–6. [14] Forton FM. Papulopustular rosacea, skin immunity and Demodex : pityriasis folliculorum as a missing link. J Eur Acad Dermatol Venereol 2012 ; 26 : 19–28. [15] Forton F. Standardized skin surface biopsy : method to estimate the Demodex folliculorum density, not to study the Demodex folliculorum prevalence. J Eur Acad Dermatol Venereol 2007 ; 21(9) : 1301–2 ; author reply 1302. [16] Forton F, Song M. Limitations of standardized skin surface biopsy in measurement of the density of Demodex folliculorum. A case report. Br J Dermatol 1998 ; 139(4) : 697–700. [17] O'Reilly N, Menezes N, Kavanagh K. Positive correlation between serum immunoreactivity to Demodex-associated Bacillus proteins and erythematotelangiectatic rosacea. Br J Dermatol 2012 ; 167 : 1032–6. [18] Del Giudice P, Blanc-Amrane V, Bahadoran P, Caumes E, Marty P, Lazar M, et al. Pyemotes ventricosus dermatitis, southeastern France. Emerg Infect Dis 2008 ; 14 : 1759–61.

259