Infiltrations rachidiennes autres que lombaires

Infiltrations rachidiennes autres que lombaires

G Model ARTICLE IN PRESS MONRHU-547; No. of Pages 6 Revue du rhumatisme monographies xxx (2020) xxx–xxx Disponible en ligne sur ScienceDirect www...

941KB Sizes 0 Downloads 168 Views

G Model

ARTICLE IN PRESS

MONRHU-547; No. of Pages 6

Revue du rhumatisme monographies xxx (2020) xxx–xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

Infiltrations rachidiennes autres que lombaires Spinal injection other than lumbar Marc Marty a,c,∗ , Jean Denis Laredo b a

Service de rhumatologie, Hôpital Henri-Mondor, 94000 Créteil, France Service de radiologie, Hôpital Lariboisière, 75475 Paris, France c Section Rachis reconnue par la Société Franc¸aise de Rhumatologie, France b

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : ´ 2019 Accepté le 6 decembre Disponible sur Internet le xxx Mots clés : Dorsalgie Cervicalgie Radiculalgie Infiltration

r é s u m é Les infiltrations rachidiennes à l’étage thoracique et cervical sont nettement moins fréquemment pratiquées qu’à l’étage lombaire. Avant de les envisager, une évaluation clinique et paraclinique avec des images pouvant détecter des lésions inflammatoires doit être conduite. À l’étage thoracique, des infiltrations des articulations costo-transversaires ou costo-vertébrales ou des articulaires postérieures (ou interapophysaires postérieures ou zygapohysaires) uni ou bilatérales peuvent être réalisées. La concordance anatomo-clinique peut être obtenue au mieux par la réalisation de blocs anesthésiques. S’agissant d’infiltration articulaire, un corticoïde particulaire (acétate de prednisolone) ou non particulaire (dexaméthasone) peut être utilisé. Les infiltrations épidurales à l’étage thoracique n’ont pas d’indication rhumatologique. À l’étage cervical, dans notre opinion, les infiltrations épidurales et foraminales ne doivent pas être pratiquées du fait du risque de complications en partie liées aux voies d’abord ellesmêmes et aux conditions anatomiques locales et de l’absence de supériorité démontrée de ces voies sur l’injection articulaire postérieure, tandis que les sociétés savantes franc¸aises d’imagerie médicale ont conservé des indications sous réserve de n’utiliser qu’un corticoïde non particulaire (dexaméthasone). Les infiltrations des articulaires postérieures à l’étage cervical doivent être réservées aux cas de névralgies cervicobrachiales résistants au traitement médical, sélectionnés en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire après s’être assuré que l’injection peut être faite à distance d’un étage opéré et qu’il n’y a pas sur une IRM de grosses veines en regard du massif articulaire où l’on projette de faire l’injection. Les infiltrations de l’articulation dans la zone de la charnière cervico-occipitale (notamment de l’articulation latérale C1C2 ou à son regard) doivent être précédées d’une décision en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire et le patient doit être informé des risques potentiels d’accident neurologiques graves. ´ e´ Franc¸aise de Rhumatologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits reserv ´ ´ es. © 2020 Societ

a b s t r a c t Keywords: Thoracic back pain Neck pain Radiculalgia Spinal injection

Spinal steroid injections are much less frequently performed at the thoracic or cervical levels than at the lumbar spine. Preoperative workup should include a clinical and para-clinical imaging evaluation to detect the inflammatory targets. At the thoracic level, steroid injections of the costo-transverse or costo-vertebral or posterior (or zygapohyseal) joints, unilateral or bilateral can be performed. The anatomo-clinical concordance can best be obtained by anesthetic blocks. For this injection, a particulate corticosteroid (prednisolone acetate) or non-particulate corticosteroid (dexamethasone) may be used. Thoracic epidural injections do not have indications in rheumatology. In our opinion, epidural injections should not be performed at the cervical level, Indications of steroid injections of the zygapohyseal joints at the cervical level should be limited to cases of cervical neuralgia resistant to conservative treatment, selected in a multidisciplinary collaborative meeting, after checking that the injection site is distant from

∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. Marty). https://doi.org/10.1016/j.monrhu.2019.12.005 ´ e´ Franc¸aise de Rhumatologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits reserv ´ ´ 1878-6227/© 2020 Societ es.

Pour citer cet article : Marty M, Laredo JD. Infiltrations rachidiennes autres que lombaires. Revue du rhumatisme monographies (2020), https://doi.org/10.1016/j.monrhu.2019.12.005

G Model

ARTICLE IN PRESS

MONRHU-547; No. of Pages 6 2

M. Marty, J.D. Laredo / Revue du rhumatisme monographies xxx (2020) xxx–xxx

a operated level and that there is no large veins facing the articular mass at MRI at the site of planned injection. The injections of the joint in the area of the cervico-occipital hinge (in particular C1-C2 lateral joint) must be decided in a multidisciplinary meeting and the patient must be informed of the risks of serious neurological accident. ´ e´ Franc¸aise de Rhumatologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved. © 2020 Societ

Le sujet est limité aux infiltrations rachidiennes de corticoïdes à l’étage thoracique et cervical. Le sujet reste ouvert à controverse compte tenu du faible niveau de preuve d’efficacité de ces injections, des risques d’accidents neurologiques graves pour certaines injections, de la multiplicité des indications et des diverses techniques d’injections.

1. Corticoïdes injectables disponibles On distingue les corticoïdes particulaires (suspension) des corticoïdes non particulaires (solution). La dexaméthasone est le seul corticoïde non particulaire injectable existant. La seule formulation disponible de dexaméthasone injectable en France, en 2019, est la dexaméthasone Mylan (4 mg/mL). Sa délivrance n’est possible que dans les pharmacies des établissements de santé. Des sulfites (métabisulfites de sodium) parmi ses excipients peuvent être la cause de rares phénomènes allergiques mais ne sont pas neurotoxiques. Dans le Résumé des Caractéristiques Produit (RCP), il est mentionné que « ce produit contient des sulfites qui peuvent éventuellement entraîner ou aggraver des réactions de type anaphylactique ». Elle ne contient pas d’alcool benzylique, potentiellement neurotoxique. Ses indications rhumatologiques sont : injections péri-articulaires (tendinites, bursites) et les injections des parties molles : talalgies, syndrome du canal carpien, maladie de Dupuytren. L’indication « infiltrations épidurales » ne figure pas dans le RCP. Une forme injectable de dexaméthasone ne comportant pas de sulfites est commercialisée en Allemagne, en Suisse et au Canada, mais n’est pas disponible en France. En France, en 2019, seule l’Hydrocortancyl® 125 mg/5 mL suspension injectable (dénomination commune internationale : acétate de prednisolone) dispose d’une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) dans l’indication « injections épidurales : radiculalgies ». Cette spécialité expose à un risque d’ischémie médullaire en cas d’injection intra-artérielle involontaire, possible lors de certaines injections ou chez les patients opérés; c’est pourquoi cette spécialité est strictement contre-indiquée pour les infiltrations épidurales par voie foraminale (chez tous les patients) ou par voie postérieure, interépineuse ou interlamaire, (chez un patient opéré) quel que soit l’étage. Les autres corticoïdes injectables disponibles (acétate de méthylprednisolone, acétonide de triamcinolone, acétate de prednisolone) sont tous particulaires. L’injection intra-artérielle de la plupart des corticoïdes particulaires (acétate de méthylprednisolone, acétonide de triamcinolone, acétate de prednisolone) provoque une occlusion artérielle par un phénomène de déformation et d’agglutination des globules rouges alors que la dexaméthasone et le sérum physiologique n’en provoquent pas [1]. Ils exposent donc à un risque d’ischémie médullaire en cas d’injection intra-artérielle involontaire, possible lors de certaines injections rachidiennes du fait d’une disposition vasculaire anatomique particulière ou chez les patients opérés (en raison des remaniements artérioveineux postchirurgicaux).

2. Infiltrations à l’étage thoracique Affirmer l’origine exacte d’une douleur thoracique postérieure est difficile [2–5]. Parmi les causes rachidiennes, la douleur peut provenir du disque intervertébral, des articulaires postérieures, des articulations costo-transversaires ou costovertébrales. D’une fac¸on générale, la pratique d’infiltrations de corticoïdes à l’étage thoracique est assez rarement indiquée. Au vu de notre expérience et du manque de données de la littérature, d’une fac¸on générale, nous préconisons de ne réserver certaines infiltrations rachidiennes à l’étage thoracique qu’aux cas remplissant les quatre conditions suivantes : • plusieurs arguments (cliniques, paracliniques, notamment présence en IRM d’un œdème osseux ou des tissus mous en regard, bloc-test anesthésique) concordent pour penser que la zone anatomique que l’on envisage d’infiltrer est à l’origine de la douleur ; • la douleur est chronique et invalidante ; • les autres thérapeutiques ont échoué ; • il n’existe pas de contre-indication (infection par exemple). 2.1. Infiltrations costo-transversaires et costo-vertébrales La fréquence des atteintes des articulations costo-transversaires et costo-vertébrales (plus profondes) est difficile à estimer. Les affections responsables d’atteintes des articulations costotransversaires et/ou costo-vertébrales peuvent être d’origine dégénérative, infectieuse, inflammatoire comme dans les spondyloarthrites axiales [6], post-traumatique (fracture de côte, traumatisme thoracique. . .), ou postopératoire. Une déformation rachidienne de type scoliose peut s’accompagner de douleurs prenant leur origine dans ces articulations. Le syndrome de dysfonction costo-vertébrale ou costo-transversaire correspondrait à une mobilité anormale de ces articulations. Le diagnostic est suspecté par l’examen clinique et confirmé par les examens complémentaires (IRM, scanner). La présence d’anomalies au SPECT-CT (Single Photon Emission Computed Tomography) au Technitium 99 m méthylène biphosphonate (Scintigraphie osseuse volumique couplée à une acquisition scanner) n’aurait qu’une faible valeur prédictive de bonne réponse à une infiltration [7]. Un bloc anesthésique peut être utile pour confirmer l’origine de la douleur. Elles sont réalisées sous contrôle radiographique ou sous guidage échographique [8,9] ou scanner. S’agissant d’une infiltration articulaire, un corticoïde particulaire ou non particulaire peut être utilisé après opacification articulaire. À notre connaissance, il n’y a pas d’études comparatives, randomisées ayant évalué leur efficacité et aucune complication grave de type neurologique n’a été rapportée. 2.2. Infiltrations des articulaires postérieures (étage thoracique) Les atteintes des articulaires postérieures principalement d’origine dégénérative (ou articulations interapophysaires postérieures ou zygapophysaires) seraient responsables de 42 %

Pour citer cet article : Marty M, Laredo JD. Infiltrations rachidiennes autres que lombaires. Revue du rhumatisme monographies (2020), https://doi.org/10.1016/j.monrhu.2019.12.005

G Model MONRHU-547; No. of Pages 6

ARTICLE IN PRESS M. Marty, J.D. Laredo / Revue du rhumatisme monographies xxx (2020) xxx–xxx

[intervalle de confiance à 95 % 30–53 %] des douleurs thoraciques chroniques, lorsque le diagnostic est basé sur une réponse positive à deux blocs anesthésiques à 3 à 4 semaines d’intervalles [10]. Dans cette étude incluant 72 patients, les blocs anesthésiques étaient considérés comme positifs s’il existait une réduction de la douleur de plus de 80 % durant au moins 2 heures après une injection de 0,5 mL de lidocaïne et durant au moins 3 heures après une injection de 0,5 mL de bupivacaïne [10]. L’atteinte était bilatérale dans 64 % des cas [10]. Le diagnostic est suspecté par l’examen clinique et confirmé par les examens complémentaires (IRM, scanner). Les blocs anesthésiques sont utiles pour confirmer l’origine de la douleur [11]. Ils peuvent être intra-articulaires ou porter sur la branche médiale du rameau postérieur. Seulement deux études comparatives portant sur cette indication ont été publiées à notre connaissance. La première a comparé l’effet d’infiltrations de 0,5 mL de bupivacaïne et de 10 mg de dexaméthasone intra-articulaire postérieure thoracique (1 ou 2 étages de fac¸on unilatérale ou bilatérale) à celles, extra-articulaires, des branches médiales du rameau postérieur du nerf intercostal (2 ou 3 étages de fac¸on unilatérale ou bilatérale). Le diagnostic était confirmé cliniquement. 45 articulations ont été injectées dans le groupe des 20 patients traités par infiltrations intra-articulaires postérieures thoraciques tandis que 85 branches nerveuses ont été infiltrées chez les 20 patients du groupe infiltration des branches médiales du rameau postérieur. À 6 mois de suivi, une amélioration statistiquement significative de la douleur a été observée dans les deux groupes, sans différence statistiquement significative entre les deux groupes. Aucun événement indésirable grave n’a été rapporté [12]. L’autre étude, randomisée et en double aveugle, a comparé l’efficacité à 6 mois d’une infiltration des branches médiales du rameau postérieur d’un mL de bupivacaïne à 0,25 % avec ou sans 0,15 mg/mL d’une solution de phosphate disodique de bétaméthasone non particulaire (50 patients par groupe) [13]. Le diagnostic était confirmé par la positivité d’un bloc de branche anesthésique. À 24 mois, une amélioration statistiquement significative de la douleur et de la fonction était constatée dans les deux groupes, sans différence cliniquement et statistiquement significative entre les deux groupes. Aucun événement indésirable grave n’a été rapporté [13]. En termes de tolérance, sur 950 procédures d’injection intraarticulaires postérieures ou de blocs de branches médiales thoraciques (5821 étages infiltrés) pratiquées sous contrôle radiographique « intermittent » et sans produit de contraste, Manchikanti et al. [14] ne rapportent aucune complication majeure et notamment aucun accident médullaire. Les principales complications étaient des saignements locaux (75 %), des suintements (18 %), des injections intra-vasculaires sans conséquences neurologiques (6 %). S’agissant d’une infiltration articulaire, un corticoïde particulaire ou non particulaire peut être utilisé.

2.3. Infiltrations épidurales (étage thoracique) À notre avis, elles n’ont pas d’indication en rhumatologie que ce soit par voie interlamaire ou foraminale et quelle que soit la nature du corticoïde, même si certains auteurs ont rapporté son utilisation par voie interlamaire postérieure notamment pour des syndromes douloureux post thoracotomie [15,16]. Elles ne sont pas recommandées en cas de hernie discale thoracique symptomatique [17]. Elles exposent à des risques neurologiques majeurs à type de paraplégie [18].

3

3. Infiltrations à l’étage cervical 3.1. Infiltrations épidurales (étage cervical) La Section Rachis reconnue par la Société Franc¸aise de Rhumatologie (SR-SFR) et la SectionImagerie et Rhumatologie Interventionnelle de la Société Franc¸aise de Rhumatologie (SIRISSFR) recommandent de ne pas pratiquer d’infiltration épidurale cervicale par voie foraminale ou par voie postérieure (interépineuse ou interlamaire) quel que soit le type de corticoïde, particulaire ou non [19]. Cette position tient au fait que la supériorité de ces voies sur celle articulaire postérieure n’est pas démontrée et que les accidents neurologiques rapportés au rachis cervical au décours des infiltrations au rachis cervical ne sont pas uniquement d’origine ischémique [19]. Sur 24 cas identifiés dans la littérature, laquelle ne reflète certainement pas la réalité, 8 cas seulement pouvaient être attribués à une ischémie médullaire et étaient donc dépendants de la nature particulaire du corticoïde injecté [19]. Les autres mécanismes en cause étaient des blessures médullaires, des lésions de l’artère vertébrale, des hématomes, ou même des lésions discales. Dans ces accidents non ischémiques, il n’est pas possible d’exclure des problèmes de techniques à l’origine des accidents. Pour les auteurs de cet éditorial, le rapport bénéfice/risque de l’utilisation hors AMM d’une dexaméthasone sodique pure, dépourvue de neurotoxique et de conservateur reste à étudier, pour les patients ayant une radiculalgie invalidante et résistante aux traitements conventionnels, notamment pour les patients à haut risque chirurgical [19]. La Société d’Imagerie Musculosquelettique (SIMS), la Fédération de Radiologie Interventionnelle (FRI) de la Société Franc¸aise de Radiologie (SFRa) partagent cette position pour les corticoïdes particulaires [20] mais adopte une position plus nuancée [20] concernant la dexaméthasone. Ce groupe indique que si une infiltration cervicale (foraminale ou épidurale postérieure) est indiquée (absence de réponse thérapeutique suffisante avec le traitement antalgique anti-inflammatoire habituel ou à des fins diagnostiques), l’utilisation de la dexaméthasone chez les patients sans antécédents chirurgicaux expose à un risque de complications neurologiques plus limité que les corticoïdes particulaires et peut être utilisée. Dans ce cas, la dexaméthasone est utilisée hors Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) et son utilisation est sous la responsabilité du praticien. Le cadre réglementaire de toute prescription hors AMM doit être respecté (justification médicale, information du patient). Le prescripteur doit connaître les implications de la prescription et l’utilisation d’un médicament hors AMM [21]. Cohen et al. [22] avaient identifié 7 études comparatives, randomisées évaluant l’efficacité des infiltrations épidurales cervicales pour traiter les radiculalgies cervicales (6 études par voie interlamaire et 1 par voie foraminale). Les auteurs concluaient à un effet très modéré sur la douleur. Un groupe d’experts américains recommande de n’utiliser que la dexaméthasone par voie interlamaire cervicale (à faire préférentiellement en C7-T1 et pas au-dessus de C6-C7) ou foraminale et sous contrôle d’imagerie de face et de profil [23]. Ils contre-indiquent les corticoïdes particulaires. Des recommandations techniques précises sont faites dans cet article. La position du Benelux Working Group [24] est différente :

• « pour les infiltrations cervicales interlamaires (à faire préférentiellement en C7-T1 et pas au-dessus de C6-C7), aucune complication vasculaire n’a été rapportée et un corticoïde particulaire ou la dexaméthasone (10 mg) peut être utilisé. Si nécessaire, une solution à 0,9 % de Na Cl peut être utilisée ou

Pour citer cet article : Marty M, Laredo JD. Infiltrations rachidiennes autres que lombaires. Revue du rhumatisme monographies (2020), https://doi.org/10.1016/j.monrhu.2019.12.005

G Model MONRHU-547; No. of Pages 6 4

ARTICLE IN PRESS M. Marty, J.D. Laredo / Revue du rhumatisme monographies xxx (2020) xxx–xxx

de la lidocaïne concentrée à 1 ou 2 %. Le volume injecté doit être limité à 4 mL ; • pour les infiltrations cervicales foraminales, une recommandation négative est faite pour l’utilisation d’un corticoïde particulaire. Bien que non recommandée, il n’y a pas d’arguments contre l’utilisation de la dexaméthasone par voie foraminale cervicale. » Le volume injecté doit être limité à 4 mL ».

3.2. Infiltrations des articulaires postérieures (étage cervical) Les 2 groupes franc¸ais auteurs de publications récentes sur les infiltrations épidurales de corticostéroïdes [19,20] ne les ont pas évoquées. Cependant, en raison de la richesse du réseau veineux cervical postérieur, nous pensons que l’acétate de prednisolone ne doit pas être utilisé à l’étage cervical dans les infiltrations articulaires postérieures. Du fait de l’absence de démonstration de l’efficacité sur la douleur de cette infiltration [25], du recul et de la diffusion relativement faibles de cette technique, de la richesse du réseau veineux cervical postérieur et en l’absence de dexaméthasone pure disponible en France, nous proposons de réserver les indications des infiltrations articulaires postérieures à l’étage cervical avec la dexaméthasone disponible en France, aux seuls cas de névralgies cervicobrachiales résistants au traitement médical, sélectionnés en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire après s’être assuré que l’injection peut être faite à distance d’un étage opéré et qu’il n’y a pas sur une IRM de grosses veines en regard du massif articulaire où l’on projette de faire l’injection [26]. Dans une étude randomisée, en double-aveugle chez 56 patients présentant une névralgie cervicobrachiale, une infiltration articulaire postérieure cervicale était aussi efficace sur la douleur qu’une infiltration par voie foraminale, à l’exception des patients les plus douloureux [27]. Elle est réalisée sous contrôle radiographique (Fig. 1).

Fig. 1. Arthrographie confirmant le bon placement de l’aiguille et infiltration articulaire postérieure C5-C6 par voie postéro latérale guidée sous fluoroscopie chez un patient en procubitus.

Fig. 2. Arthrographie et infiltration C1-2 latérale par voie postérieure guidée sous fluoroscopie chez un patient en procubitus en maintenant la bouche ouverte pour placer les articulations C1-2 dans une fenêtre radiologique. A : mise en place de l’aiguille ; B : arthrographie avant infiltration confirmant le bon placement de l’aiguille.

Pour citer cet article : Marty M, Laredo JD. Infiltrations rachidiennes autres que lombaires. Revue du rhumatisme monographies (2020), https://doi.org/10.1016/j.monrhu.2019.12.005

G Model

ARTICLE IN PRESS

MONRHU-547; No. of Pages 6

M. Marty, J.D. Laredo / Revue du rhumatisme monographies xxx (2020) xxx–xxx

5

Tableau 1 Infiltrations rachidiennes à l’étage thoraciquea . Voie

Produit préconisé

Indications et conditions

Guidage

Commentaires

Costo-transversaire Costo-vertébrale

Dexaméthasone ou acétate de prednisolone Dexaméthasone ou acétate de prednisolone Aucun produit

Dorsalgie chronique et invalidante après échec des autres traitements médicaux Dorsalgie chronique et invalidante après échec des autres traitements médicaux Pas d’indication

RadioguidageAutresb

Contre-indiqués chez patients déjà opérés

RadioguidageAutresb

Contre-indiqués chez patients déjà opérés





Articulaire postérieure

Épidurale par voie foraminale ou interlamaire

a La pratique d’une infiltration rachidienne de corticoïdes doit respecter les règles suivantes : indication argumentée, prise en compte de l’antécédent chirurgical, information du patient, décision partagée avec le patient, respect des contre-indications et précautions de la technique et du(des) produit(s) à injecter choisi(s), utilisation d’un guidage, bon placement de l’aiguille, injecteur formé à ce type de geste. b Selon l’opérateur et sa qualification, cela peut être le scanner ou une autre technique.

Tableau 2 Infiltrations rachidiennes à l’étage cervicala . Site injection/voie

Produit préconisé

Indications et conditions

Guidage

Commentaires

Articulaire postérieure

Dexaméthasone

Radioguidage Autresb

Contre-indiqués chez patients déjà opérés

Épidurale par voie foraminale ou interlamaire

Aucun produit

Radiculalgie après échec des autres traitements médicaux RCP pour confirmer indication s’assurer que l’injection peut être faite à distance d’un étage opéré et qu’il n’y a pas sur une IRM de grosses veines en regard du massif articulaire où l’on projette de faire l’injection –



Infiltration articulaire latérale C1-C2 ou de la charnière cervico-occipitale

Dexaméthasone (usage hors AMM)

Le rapport bénéfice/risque ne nous apparaît pas en faveur de la poursuite de cette pratique quel que soit le produit utilisé. D’autres ont des positions plus nuancées sur cette pratique [20,23,24] Contre-indiqués chez patients déjà opérés

Névralgie d’Arnold ou cervicalgie chronique et invalidante après échec des autres traitements médicaux RCP pour confirmer indication et pour s’assurer que l’injection peut être faite à distance d’un étage opéré et qu’il n’y a pas sur une IRM de grosses veines en regard de la zone où l’on projette de faire l’injection

Radioguidage ou guidage scannographique

RCP : Réunion de Concertation Pluridisciplinaire. a La pratique d’une infiltration rachidienne de corticoïdes doit respecter les règles suivantes : indication argumentée, prise en compte de l’antécédent chirurgical, information du patient, décision partagée avec le patient, respect des contre-indications et précautions de la technique et du(des) produit(s) à injecter choisi(s), utilisation d’un guidage, bon placement de l’aiguille, injecteur formé à ce type de geste. b Selon l’opérateur et sa qualification, cela peut être le scanner ou une autre technique.

4. Infiltration articulaire latérale C1-C2 ou de la charnière cervico-occipitale Les infiltrations des articulations de la charnière cervicooccipitale peuvent être responsables d’accidents neurologiques graves pouvant conduire au décès, compte tenu de la proximité de l’artère vertébrale et des structures nerveuses et de l’existence de variantes anatomiques. Elles doivent faire l’objet d’une décision en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire et le patient doit être informé des risques potentiels. Pour l’infiltration articulaire latérale C1-C2, plusieurs voies ont été décrites. Ces injections ne pouvant être réalisées que par des opérateurs expérimentés et sous contrôle radiographique ou scannographique. La préférence d’un des auteurs est pour le guidage radiographique qui permet un repérage précis et permanent dans les 3 dimensions (Fig. 2). Après vérification à l’aide de l’injection-test d’1 mL de produit de contraste du siège strictement intra-articulaire de l’injection, il nous semble que la dexamethasone (1 mL) doit être préférée à l’acétate de prednisolone. Une minerve et un repos strict sont conseillés pour 48 heures [28]. L’infiltration d’une branche superficielle du grand nerf occipital est plus simple à réaliser, au mieux sous échographie [29].

5. Conclusion Les infiltrations rachidiennes à l’étage thoracique et cervical (Tableaux 1 et 2) sont nettement moins fréquemment pratiquées qu’à l’étage lombaire. Avant de les envisager, une évaluation clinique et paraclinique comprenant un examen IRM récent pour détecter des lésions inflammatoires doit être conduite. Dans tous les cas, le rapport bénéfice-risque d’une infiltration rachidienne à l’étage thoracique et cervical pour chaque profil de patient doit être mis en perspective avec celui des alternatives thérapeutiques. Dans de rares cas, des infiltrations à réputation dangereuse peuvent être discutées dans le cadre d’une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire. L’utilisation hors AMM de la dexaméthasone disponible en France pour une infiltration rachidienne est de la responsabilité du praticien. Elle doit être réalisée dans le cadre réglementaire de toute prescription hors AMM (justification médicale, information du patient). Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Pour citer cet article : Marty M, Laredo JD. Infiltrations rachidiennes autres que lombaires. Revue du rhumatisme monographies (2020), https://doi.org/10.1016/j.monrhu.2019.12.005

G Model MONRHU-547; No. of Pages 6

ARTICLE IN PRESS M. Marty, J.D. Laredo / Revue du rhumatisme monographies xxx (2020) xxx–xxx

6

Références [1] Laemmel E, Segal N, Mirshahi M, et al. Deleterious effects of intra-arterial administration of particulate steroids on microvascular perfusion in a mouse model. Radiology 2016;279:731–40. [2] Fruth SJ. Differential diagnosis and treatment in a patient with posterior upper thoracic pain. Phys Ther 2006;86:254–68. [3] Young BA, Gill HE, Wainner RS, et al. Thoracic costotransverse joint pain patterns: a study in normal volunteers. BMC Musculoskelet Disord 2008;9:140. [4] Maigne JY. Les dorsalgies communes. In: Rozenberg S, Marty M, editors. Le rachis thoracique : ce méconnu. Montpellier: Sauramps medical; 2012. p. 9–16. [5] Khalifa P. Les dorsalgies communes. In: Rozenberg S, Marty M, editors. Le rachis thoracique : ce méconnu. Montpellier: Sauramps medical; 2012. p. 17–26. [6] Braun H, Geniez C, Degboe Y, et al. Prevalence of inflammatory posterior arch abnormalities on lumbar spine MRI in spondyloarthritis patients compared with low back pain patients. Eur Radiol 2019;29:6405–15. [7] Verdoorn JT, Lehman V, Diehn F, et al. Increased 99mTc MDP activity in the costovertebral and costotransverse joints on SPECT-CT: is it predictive of associated back pain or response to percutaneous treatment? Diagn Interv Radiol 2015;21:342–7. [8] Deimel GW, Hurdle MF, Murthy N, et al. Sonographically guided costotransverse joint injections: a computed tomographically controlled cadaveric feasibility study. J Ultrasound Med 2013;32:2083–9. [9] Yoon KB, Kim SH, Park SJ, et al. Clinical effectiveness of ultrasound-guided costotransverse joint Injection in thoracic back pain patients. Korean J Pain 2016;29:197–201. [10] Manchikanti L, Boswell MV, Singh V, et al. Prevalence of facet joint pain in chronic spinal pain of cervical, thoracic, and lumbar regions. BMC Musculoskelet Disord 2004;28:15. [11] Boswell MV, Manchikanti L, Kaye AD, et al. A best-evidence systematic appraisal of the diagnostic accuracy and utility of facet (zygapophysial) joint injections in chronic spinal pain. Pain Physician 2015;18:E497–533. [12] Lee DG, Ahn SH, Cho YW, et al. Comparison of intra-articular thoracic facet joint steroid injection and thoracic medial branch block for the management of thoracic facet joint pain. Spine (Phila Pa 1976) 2018;43:76–80. [13] Manchikanti L, Singh V, Falco FJ, et al. The role of thoracic medial branch blocks in managing chronic mid and upper back pain: a randomized, doubleblind, active-control trial with a 2-year follow-up. Anesthesiol Res Pract 2012;15:E143–50. [14] Manchikanti L, Malla Y, Wargo BW, et al. Complications of fluoroscopically directed facet joint nerve blocks: a prospective evaluation of 7,500 episodes with 43,000 nerve blocks. Pain Physician 2012;15:E143–50. [15] Manchikanti L, Cash KA, McManus CD, et al. Thoracic interlaminar epidural injections in managing chronic thoracic pain: a randomized, double-blind, controlled trial with a 2-year follow-up. Pain Physicain 2014;17:E327–38. [16] Benyamin RM, Wang VC, Vallejo R, et al. A systematic evaluation of thoracic interlaminar epidural injections. Pain Physician 2012;15:E497–514.

[17] Pissonnier ML, Soubeyrand M, Parker F, et al. Hernie discale thoracique. Rev Rhum monographie 2014;81:36–45. [18] Loomba V, Kaveeshvar H, Dwivedi S. Paraplegia after thoracic epidural steroid injection. Case Rep 2016;7:118–21. [19] Marty M, Bard H, Rozenberg S, et al. Préconisations pour la réalisation des infiltrations épidurales rachidiennes de corticostéroïdes élaborées sous l’égide de la section « rachis » reconnue par la Société franc¸aise de rhumatologie, de la section « imagerie et rhumatologie interventionnelle » de la Société franc¸aise de rhumatologie. Rev Rhum 2018;85:413–27. [20] Cotten A, Drapé JL, Sans N, et al. Société d’imagerie musculosquelettique (SIMS), Fédération de radiologie interventionnelle (FRI), and Société Franc¸aise de Radiologie (SFR) recommendations for epidural and transforaminal corticosteroid injections. Diagn Interv Imaging 2018;99:219–21. [21] Bouvenot G, Juillet Y, Saint-Pierre A, et al. Les prescriptions médicamenteuses hors AMM (Autorisation de Mise sur le Marché) en France. Une clarification est indispensable. Rapport de l’académie nationale de médecine et de l’académie nationale de pharmacie. BMJ 2017;358:j3221, http://dx.doi.org/10.1136/bmj.j3221 [http://www.academie-medecine.fr/wpcontent/uploads/2018/11/Rapport-Hors-AMM-pour-ANM-vs-26-11-18.pdf]. [22] Cohen SP, Hooten WM. Advances in the diagnosis and management of neck pain. BMJ 2017;358:j3212. [23] Rathmell JP, Benzon HT, Dreyfuss P, et al. Safeguards to prevent neurologic complications after epidural steroid injections: consensus opinions from a multidisciplinary working group and national organizations. Anesthesiology 2015;122:974–84. [24] Van Boxem K, Rijsdijk M, Hans G, et al. Safe use of epidural corticosteroid injections: recommendations of the WIP Benelux workgroup. Pain Pract 2019;19:61–92. [25] Manchikanti L, Hirsch JA, Kaye AD, et al. Cervical zygapophysial (facet) joint pain: effectiveness of interventional management strategies. Postgrad Med 2016;128:54–68. [26] Marty M. Faut-il utiliser la dexaméthasone dans les infiltrations rachidiennes dans le contexte actuel ? In: Laredo JD, Wybier M, Bousson V, et al., editors. Savoir-faire en radiologie ostéo-articulaire. Questions brûlantes. Montpellier: Sauramps medical; 2019. p. 239–45. [27] Bureau NJ, Moser T, Dagher JH, et al. Transforaminal versus intra-articular facet corticosteroid injections for the treatment of cervical radiculopathy: a randomized, double-blind, controlled study. AJNR Am J Neuroradiol 2014;35:1467–74. [28] Morvan G, Wybier M, Mathieu P, et al. La radiologie interventionnelle rachidienne. e-mémoires de l’Académie Nationale de Chirurgie, 8; 2009. p. 55–64. [29] Pingree MJ, Sole JS, O’Brien TG, et al. Clinical efficacy of an ultrasoundguided greater occipital nerve block at the level of C2. Reg Anesth Pain Med 2017;42:99–104.

Pour citer cet article : Marty M, Laredo JD. Infiltrations rachidiennes autres que lombaires. Revue du rhumatisme monographies (2020), https://doi.org/10.1016/j.monrhu.2019.12.005