T R A V A U X OR IG I N A U X
M~decine et Maladies Infectieuses
- 1987 --
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BACTERIOLOGIEDES OTITESMOYENNESAIGUESCHEZL'ENFANT ETSOUCHES PRODUCTRICESDE BETA-LACTAMASES* par P. GEHANNO** RESUME
L'~tude bact~riologique du pus d'otorrhde de 110 enfants a confirmd le rSle predominant
d'Haemophilus influenzae et de Streptococcuspneumoniae dans I'otite moyenne aigLie. Elle fait aussi ressortir I'importance quantitative de Staphylococcusaureus. Cette donn~e moins habituellement admise demande ~ ~tre confirm~e par d'autres ~tudes dpiddmiologiques. Dans cette sdrie d'otites moyennes aigLies de I'enfant, et surtout en raison du nombre ~levd de souches de Staphylococcusisol~es, 33 % des souches isoldes dtaient productrices de b~talactamase et donc r~sistantes aux aminop~nicillines. Mots-cl~s : Otites aigLies - Bactdriologie -Otites aig~s et production de b~talactamases, Une dtude multicentrique mende dans 3 services de p~diatrie et 10 services d'O.R.L. (5), destin~e ~ ~valuer I'intdr~t d'une association d'amino-p~nicil!ine et d'un inhibiteur de b~talactamase*** dans les otites moyennes aig~ies 1 de I'enfant, a permis dans le cadre d'un bilan bactdriologique avant traitement, Visolement dans le pus d'otorrhde chez 110 enfants, de 137 bactdries. Le ddnombrement de ces bactdries estimdes responsables de I'otite et la recherche des souches productrices de b~talactamases fait I'objet de cet article. La connaissance de ces donndes d'~pid~miologie bactdrienne, qui doivent ~tre actualisdes p~riodiquement, dans des environnements divers, permet d'adapter I'ant!biothdrapie habituellement prescrite de fa~on probabiliste dans les otites moyennes aigLies.
I'orifice de myringotomie. Le clampage de I'aspiration permettait de retenir un peu de liquide PUrulent dans la sonde qu! ~tait sectionn~e aseptiquement, et imm~diatement conduite au l a b o r a t o i r e * * * * dans un tube sterile. Les modalit~s du recueil ~taient identiques en cas d'otorrh~e spontan~e, la sonde ~tant p!ac~e au voisinage de la perforation. Seules les bact~ries adrobies ont ~td recherch~es. La sensibilitd des germes i sol~s dans le pus de I'oreille, vis-a-vis des diffdrents antibiotiques, a dtd test~e par la m~thode des disques (disques Pasteur OU M~rieux) comportant pour les disque s d ' a m o x i c i l l i n e 25 mcg d'amoxicilline et pour les disques d ' A u g m e n t i n 20 mcg d'amoxicilline et 10 mcg d'acide clavulanique. R~sultats des examens bact~riologiques Dans 14 cas les pr~l~vements ~taient st~riles, 4 enfants avaient requ une antibioth~rapie prdalable : amoxicilline 3 cas et josamycine 1 cas. Dans 16 cas des staphylocoques blancs ont ~t~ isol~es et consid~rds eu dgard ~ leur faible concentration comme dtant non pathog~nes.
PATIENTS ET M E T H O D E
L'otorrhde purulente de 110 enfants a dtd examinee, ils avaient entre 1 mois et 14 ans avec un ~ge moyen de 3 ans et demi, 56 % des enfants dtaient ~gds de 1 t] 30 mois. 40 % des enfants consultaient pour une premiere otite, 60 % avaient ddj~ prdsentd un ou plusieurs dpisodes. Oans 33 cas, il s'agissait d'une otite prolOngde non gudrie par une antibioth~rapie de premiere intention : ampicilline ou amoxicilline.dans 55 % des cas, macrolide dans 36 % des cas et enfin une cdphalosporine orale dans 9 % des cas.
Dans 80 c as la recherche bact~riologique a dtd positive. Chez Ces~80 enfants, 88 germes ont dtd identifids. Leur rdpartition est ind!qu~e dans le tableau I.
*Re(;u le 5.2.1987. Acceptation ddfinitive le 24.2.1987. **Service ORL, H6pital Claude Bernard, 10 av. de la Porte d'Aubervilliers, F-75019 Paris" " " • ***Augmentin Ba~:t~riologistes participant & I'dtude : Dr. Landragin (Nice), Dr. Courcol (Lille); Pr. Y, de la Roy (Poitiers), Dr. Fosse (Marseille) Pr. Michel-Briand (Besan¢;on), Pr. Lemeland (Rouen), Dr. J.L. Avril (Rennes), Dr. A. Bure (Paris), Dr. F. Megraud (Bordeaux),Dr. Weber (Nancy).
M~thode de recueil de I'otorrh~e Apr~s aseptisation du conduit auditif externe une paracent~se dtait effectu~e. L'exsudat dtait recuei!li par aspiration avec une sonde en PVC n ° 6 introduite en regard de 377
TABLEAU I Bact~ries isol6es chez les 80 enfants dont le pr~l~vement s'est r~v~l~ positif (sur un total de 110 cas)
TABLEAU III Observations des 3 nourrissons ayant moins de 3 mois
Age Haemophilus influenzae 25 cas (28,5 %) Staphylococcus aureus : 21 cas (24 %) Streptococcuspneumoniae 17 cas (19,3 %) Streptococcus. ~ Groupe A 11 cas ( 12,5 %) Proteus mirabilis 4 cas Branhamella catarrhalis 3 cas E. coli 2 cas Moraxella 1 cas Pseudomonas cepacia 1 cas Pseudomonas aeruginosa 3 cas
Chez 41 enfants ~g~s de 1 mois ~ 3 ans, chez lesquels ont ~t~ isol~s 49 germes, la r~partition des identifications bact~riennes est figur~e dans le tableau I1. Parmi ces 40 enfants, 3 avaient moins de 3 mois, ils sont d~crits dans le tableau II I.
-TABLEAU II Batteries isol6es ©hez 41 enfants ag6s de 1 mois & 36 mois
Nbre de Souches Souches Souches souches Amoxi- Amoxi-R/ Aug-R S Aug/S Haemophilus influenzae
14
9
11
11
, Staphylococcus aureus
9
2
Streptococcus A
7
7
Proteus mirabilis
3
1
2
Branhamella catarrhalis
2
1
1
1
1
Streptococcus pneumoniae
- E. .coil
"~,~
Pseudomonas cepacia
1
Pseudomonas aeruginosa
1
Total
5 (35 %)
49
7 (78 %)
1
1 32
16 (33 %)
1
Identification bact~rienne
Sensibilit~ I'amoxicilline
1 mois
Proteus mirabilis
Amoxi S
2 mois otite trainante
Staphylococcus aureus
Amoxi R Aug S
2 mois
Staphylococcus aureus
Amoxi S
C O M M E N T A I R ES
Tous ~ges confondus, Haemophilus reste le germe le plus fr~quemment impliqu~ puisqu'il repr~sente 28,4 % du tota! des isolements. Staphylococcus aureus et Streptococcus pneumoniae viennent ensuite avec une fr~quence respective de 24 et 19,3,%..St~eptoc~cus B-h~molytique du groupe A a ~t~ identifi~ dans 12,5 % des cas. La predominance de ces 4 esp~ces bact~riennes confirme toutes les ~tudes consacr~es ~ I'~pid~miologie des otites. Le trop petit ~chantillonnage n'autorise pas & tirer de conclusions concernant la r~partition en fonction de F~ge. II faut cependant remarquer que, conform~ment ~ une notion devenue classique, Haemophilus et Streptococcus pneumoniae sont impliqu~s surtout avant 3 arts, 33 enfants avaient une otite proIong~e d~j~ trait~e. Les pr~l~vements furent st~riles dans 6 cas ; 24 germes furent i sol~s dont la r~partition figure dans . le tableau. IV. Les 3 Pseudomonas retrouv~s darts l'~tude proviennent de ce groupe, mais les Staphylococcus aureus, contrairement & ce que I'on aurait pu penser, sont proportionnellement moins importants que dans I'ensemble de la population ~tudi~e. La production de b~talactamase, ddtectde par recherche directe ou indirectement par comparaison des sensibilitds respectives & I'amoxicilline et & I'association amoxicilline-acide clavulanique, est pour I'ensemble des souches de 28,4 % et de 3 3 % si I'on isole la poPulation des enfants ayant entre 1 mois et 3 ans (tableau III). Mise en dvidence pour Branhamella, Proteus mirabilis et E. co~i, esp~ces faiblement reprdsentdes, elle concerne surtout Haemophilus et Staphylococcus aureus ; 7 sur 25 s0uches d'Haemophilus (soit 28 %) sont amoxicilline rdsistantes ; cela reprdsente Un taux de r~sistance tr~s supdrieur & celuj qui est habituellement avancd en France. II exprim e u n biais de recrutement dvident : parmi la population dtudide, 33 enfants en effet ont dtd inclus apr~s dchec d'une thdrapeutique ar~tdrieure. Chez 8 d'entre eux, Haemophilus fut isold qui 4 fois ~tait producteur de b~talactamases (tableau II). 378 /.
T A B L E A U IV Bact~ries isol~es chez les enfants ayant une otite trainante
mais il s'agit en majorit~ de S. epidermidis. Cette popula' tion bact~rienne est pour 68 % des cas productrice de b~talactamase . . . .
Nbre de Souches Souches Aug R souches Amoxi Amoxi R S Aug S
Haemophilus influenzae
8
4
4
Staphylococcus aureus
4
3
1
Pseudomonas aeruginosa 3
Harrison (5) chez 148 enfants d~nombre : Streptococcus pneumoniae : 68 souches, Staphylococcus aureus : 37 souches, Staphylococcus #pidermidis : 13 souches (soit 50 souches de staphylocoques), Haemophilus : 17 souches et Streptococcus A : 8 souches. L'auteur insiste sur le caract~re ~pid~mique des otites staphylococciques observ~es en majorit~ darts son ~tude, pendant I'automne. Inversement, d'autres auteurs ne retrouvent pratiquement jamais Staphylococcus (9) ou tr~s peu (3, 8). Bluestone notamment (2) dont I'~tude est I'une des plus connues en milieu p~diatrique, n'en retrouve que 2 % avec ~galement, il faut le souligner, une plus faible proportion d'Haernophilus que dans routes les publications r~centes (Tableau V).
3
Streptococcus pneumoniae
2
2
Streptococcus A
3
3
Proteus mirabilis
2
1
Branhamella catarrhalis
1
1
Moraxella
1
1
24
8
TABLEAU V Responsabilit~s bact~riennes dans I'otite moyenne aigiJe (Bluestone 1981)
1
Pr~l~vements st~riles
TOTA L
Streptococcus pneumoniae Haemophilus influenzae Streptococcus pyogenes Branhamella catharalis
En fait, et cela ne doit pas constituer une surprise, le plus fort contingent des germes producteurs de b~talactamase a ~t6 fourni par Staphylococcus aureus parce qu'ils viennent en deuxi~me position par ordre de fr~quence imm~diatement apr~s Haemophilus et qu'ils sont, bien entendu, pratiquement toujours producteurs de p~nicillinase. C'est une information importante qui n'est peut ~tre pas suffisamment prise en compte & propos de I'antibioth~rapie des otites moyennes aigLies. En effet Haemophilus influenzae a b~n~fici~ d'une promotion justifi~e ces dernitres ann~es, laissant compl~tement dans !'ombre les staphylocoques qui 6mergent en deuxi~me ou troisi~me position par leur fr~quence, qui r~sistent r~guli~rement ]'ampicilline et I'amoxicilline par production de b~talacmases.
33 % 29 % 19 % dont 3 % Ampi R
7% 5%
Divers
4%
Staphylococcus aureus
2%
CONCLUSION
Le r61e pathog~ne de Streptococcus pneumoniae et d'Haemophilus influenzae dans I'~tiologie des otites moyennes aigOes est unanimement admis. Staphylococcus aureus (plus rarement et de fa(;on controvers~e S. epidermidis) est impliqu~ tr~s in~galement suivant les ~tudes dans I'~tiologie bact~rienne .des otites moyennes aigLies. Sa fr~quente responsabilit~ dans notre recensement et dans deux publications nous incite ~ mener une nouve!le enqu~te ~pid~mioIogique concernant les. otites moyennes aigLies trait~es en dehors du milieu hospitalier. II est possible en effet que ce mode de recrutement introduise un biais non n~gligeable susceptible de surestimer I'importance de Staphylococcus et d'HaemoPhilus producteurs de b~talactamase.
Cependant, une ~tude japonaise (4) chez 100 enfants de 7 mois ~ 14 ans (91 avaient moins de 6 ans) men/donne une r~partition o~ Staphylococcus aureus vient en 3~me position : Streptococcus pneumoniae : 2 8 souches, Haemophilus influenzae : 26 souches, Staphylococcus aureus : 19 souches et Streptococcus A : 6 souches. Cette incidence de Staphylococcus justifie pour les auteurs la prescriPtion de 2~me intention d'un anti-staphylococcique si une administration initiale probabiliste d'ampicilline n'avait pu obtenir un bon r~sultat ~ la 48~me heure.
Les implications th~rapeutiques de telles enquires sont importantes, elles conditionnent en effet le choix.de I'antibioth~rapie probabiliste et I'utilisation plus ou moins large d'une p~nici!line associ~e ~ un inhibiteur de b~talactamase, dans cette path01ogie. Mais le choix d'une c~phalosporine orale de premiere g~n~ration, se discute ~galement. Leurs performances vis-a-vis d'Haemophilus vont les situer entre I'Amoxicilline et I'association Amoxicilline-acide clavula nique qui gardera un avantage ~galement sur Staphylococcus.
L'~tude de Narcy chez 387 enfants (6) situe Staphylococcus en 2~me position (16 %) apr~s Haemophilus (17 %),
379
SUMMARY
Bacteriological study of otitis media in children and betalactamase producing strains
The bacteriological study of pus discharged from the ear in 110 patients children confirms that Hemophilus influenzae and Streptococcus pneumoniae are responsible for acute otitis media. This study also emphasize the implication of Staphylococcus aureus although this data is less generally admited and need to be confirmed by further studies. 33 % of the isolated strains were penicillase producers mainly because of the large proportion of strains of Staphylococcus round in this study. Key-words : Otitis media - Bacteriology - Otitis media and betalactamase producing
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SANTE PUBLIQUE ET MEDECINE PREVENTIVE par H. San Martin et collaborateurs Paris, Masson #dit., coll. ~Abr#g~s de M~decine~h 1987, 308 p., 91 schemas et tableaux
La Sant~ Publique inclut toutes les connaissances et les disciplines qui sont en rapport avec la sant~ et la maladie de I'individu et de la population, ses origines sociales, ses m~canismes ~cologiques et biologiques, ses consequences biologiques, ~conomiques et sociales. L'objectif precis de la Sant~ publique est la protection et la promotion de la sant~ humaine: protection directe de I'individu et de la population (m~decine preventive) ; protection indirecte ~ travers I'am~lioration permanente de la qualit~ sanitaire de I'environnement social de I'homme, ~ travers I'~l~vation du niveau de vie de la population, travers la protection du milieu ~cologique, ~ travers I'~ducation pour la sant~ de chaque individu. Plac~e dans cette situation multidisciplinaire, la Sant~ publique devient une discipline plus sociale que biologique, et une profession multi - et interdisciplinaire . . . Ce livre est un guide pour les ~tudiants et les professionnels de la sant& I[ r~pond aux nouveaux concepts de la Sant~ publique etde la M~decine preventive et suit les nouveaux programmes d'enseignement du Certificat d'~tudes sp~cia!es en sant~ publique, ainsi que ceux du deuxi~me cycle des ~tudes m~dicales (D.C.E.M.) et du concours du nouvel internat en France. Cet abr~g~ de Sant~ publique et de M~decine preventive est le produit de cinq ~ann~esd'enseignement et de recherche ~ I'U.E.R. exp~rimentale de sant~ et m~decine de Bobigny, Universit~ Paris-Nor& E.M. 380 ¸