Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen

Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen

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ARTICLE IN PRESS

VETCLI-78; No. of Pages 8

Revue vétérinaire clinique (2018) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

CAS CLINIQUE

Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen夽 Duodenal eosinophilic sclerosing fibroplasiain a young domestic shorthair: A case report B. Delrue a,∗, A. Drut b, O. Gauthier c, A. Bertrand d, M. Fusellier d a

Clinique Oniris, site de la Chantrerie, route de Gachet CS40706, 44307 Nantes, France Service de médecine interne, clinique Oniris, site de la Chantrerie, route de Gachet CS40706, 44307 Nantes, France c Service de chirurgie, clinique Oniris, site de la Chantrerie, route de Gachet CS40706, 44307 Nantes, France d Service d’imagerie médicale, clinique Oniris, site de la Chantrerie, route de Gachet CS40706, 44307 Nantes, France b

ut 2018 Rec ¸u le 15 septembre 2017 ; accepté le 21 aoˆ

MOTS CLÉS Tube digestif ; Inflammation ; Éosinophilie ; Fibrose

Résumé Une chatte européenne de 7 mois a été présentée pour des vomissements aigus. Une échographie abdominale a mis en évidence un élément hyperéchogène occasionnant un cône d’ombre entre le pylore et la papille duodénale, associé à une hypertrophie de la papille duodénale et une adénomégalie mésentérique modérée. Un corps étranger duodénal a été suspecté. Une laparotomie a permis de mettre en évidence une masse duodénale pariétale proximale à la papille duodénale, sans corps étranger identifié. Étant donné la localisation de la masse à proximité de la papille duodénale, une exérèse n’a pas été envisagée et une biopsie a été effectuée. L’analyse histologique a conclu à une lésion de fibroplasie sclérosante éosinophilique. Un

夽 La lecture de cet article ouvre droit à 0,05 CFC. La déclaration de lecture, individuelle et volontaire, est à effectuer auprès du CNVFCC (cf. sommaire). ∗ Auteur correspondant. Adresses e-mail : [email protected] (B. Delrue), [email protected] (A. Drut), [email protected] (O. Gauthier), [email protected] (A. Bertrand), [email protected] (M. Fusellier).

https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002 2214-5672/© 2018 AFVAC. Publi´ e par Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Pour citer cet article : Delrue B, et al. Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen. Revue vétérinaire clinique (2018), https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002

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B. Delrue et al. traitement médical a été mis en place et a permis une amélioration clinique et échographique. La fibroplasie sclérosante éosinophilique est une affection gastro-intestinale peu fréquente et de description récente. L’originalité de ce cas clinique repose sur la localisation de la lésion et la prise en charge médicale exclusive. © 2018 AFVAC. Publi´ e par Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

KEYWORDS Gastrointestinal tract; Inflammation; Eosinophilia; Fibrosis

Summary A 7 month-old domestic shorthair cat was presented with a history of acute vomiting. An abdominal ultrasound showed a hyperechoic element with posterior acoustic shadowing between the pylorus and the duodenal papilla, associated with hypertrophy of the duodenal papilla and moderate mesenteric lymphadenopathy. A duodenal foreign body was suspected. A laparotomy showed a duodenal mass proximal to the duodenal papilla, with no foreign body being identified. Due to the location of the mass in close proximity to the duodenal papilla, a surgical resection was not possible and a biopsy was performed. The histopathologic examination concluded that the lesion was an eosinophilic sclerosing fibroplasia. The cat received a medical treatment that resulted in an improvement of clinical signs and ultrasonographic abnormalities. Eosinophilic sclerosing fibroplasia is an uncommon gastrointestinal disease that was unknown until recently. This is an original case because of the localization of the lesion and the exclusive medical therapy. © 2018 AFVAC. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction Cet article présente un cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique (FSE) duodénale chez une chatte européenne de 7 mois. La FSE féline est une maladie gastro-intestinale peu fréquente et de description récente. Elle doit être incluse dans le diagnostic différentiel des masses gastro-intestinales et ne doit pas être confondue avec une lésion néoplasique.

Les causes de vomissements aigus peuvent être dichotomisées en affections d’origine digestive ou extradigestive (Tableau 1). L’épidémiologie (très jeune chat) a conduit à envisager en priorité l’hypothèse d’un corps étranger digestif totalement ou partiellement occlusif à ce stade de la démarche clinique. Les causes infectieuses de vomissements aigus (typhus notamment) n’ont toutefois pas été totalement exclues.

Observations

Examens complémentaires

Une chatte européenne stérilisée de 7 mois a été présentée au centre hospitalier vétérinaire universitaire (CHUV) d’Oniris pour des vomissements aigus.

Examens de laboratoire

Anamnèse Les vomissements ont été notés trois jours avant la consultation. Ils ont été décrits comme fréquents (plusieurs fois par jour), non liés aux repas, de nature alimentaire ou non (sucs gastriques). Une baisse d’appétit a été rapportée, sans altération de l’état général.

Examen clinique d’admission L’examen clinique d’admission n’a révélé aucune anomalie.

Hypothèses diagnostiques Les hypothèses diagnostiques ont été établies à partir des vomissements aigus. La baisse d’appétit a été considérée comme une anomalie secondaire, non spécifique.

Une analyse biochimique sanguine a été effectuée afin de rechercher des éléments d’orientation diagnostique et de détecter d’éventuelles complications des vomissements, par exemple l’hypokaliémie. Aucune anomalie cliniquement significative n’a été identifiée (Tableau 2). Sur demande de la propriétaire, un dépistage des rétro® viroses a été réalisé (SNAP FIV/FeLV Combo Test ). Le test s’est révélé négatif. Un hémogramme a été effectué afin de rechercher des éléments d’orientation diagnostique, par exemple une panleucopénie. La numération-formule sanguine (Tableau 2) a montré une légère microcytose sans anémie et une discrète leucocytose par éosinophilie.

Radiographie abdominale Un examen radiographique de l’abdomen a été effectué afin de rechercher un corps étranger digestif. Aucune anomalie n’a été identifiée.

Pour citer cet article : Delrue B, et al. Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen. Revue vétérinaire clinique (2018), https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002

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Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale féline Tableau 1

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Hypothèses diagnostiques lors de vomissements aigus.

Vomissements aigus Origine digestive

Origine extradigestive

Indiscrétion/intolérance alimentaire Intoxication Corps étranger Infectieux (viral, bactérien, parasitaire) Inflammatoire (MICI, FSE. . .) Néoplasique (lymphome, mastocytome, carcinome. . .) Intussusception Volvulus intestinal

Pancréatite Maladie hépato-biliaire Maladie rénale Maladie d’Addison Diabète en acidocétose Tout foyer inflammatoire ou néoplasique abdominal Syndrome vestibulaire Hernie diaphragmatique

Tableau 2

Résultats des analyses sanguines biochimiques et hématologiques.

Paramètre

Jour de la chirurgie

J + 20

Unité

Valeurs usuelles

Urée Créatinine PAL ALAT Albumine Protéines totales Sodium Potassium Chlore Globules rouges Hémoglobine Hématocrite VGM TCMH CCMH Réticulocytes Globules blancs Neutrophiles Lymphocytes Monocytes Eosinophiles Basophiles

0,5 8 92 45 27 66 161 4,0 120 8,3 101 31 37,6 12,1 32,3 41,7 19,6 10,9 6,4 0,4 1,8 0,1

/ / / / / / / / / 9,4 117 39 41,6 12,4 29,9 17,9 15,9 5,0 8,1 0,3 2,4 0,1

g/L mg/L U/L U/L g/L g/L mmol/L mmol/L mmol/L 106 /␮L g/L % fL Pg % 103 /␮L 103 /␮L 103 /␮L 103 /␮L 103 /␮L 103 /␮L 103 /␮L

0,2—0,6 0—12 0—200 0—80 27—40 60—80 145—160 3,8—5,2 105—115 5—10 80—150 24—45 39—55 12,5—17,5 30—36 0—80 5,5—19,5 2,5—12,5 1,5—7 0—0,8 0—1,5 0—0,1

Échographie abdominale

Prise en charge immédiate

Un examen échographique de l’abdomen a été effectué afin d’améliorer la sensibilité diagnostique pour la recherche d’un corps étranger digestif. L’examen du duodénum a montré la présence d’un élément hyperéchogène mesurant 1,5 cm de long distalement au pylore, occasionnant un cône d’ombre (Fig. 1), associée à une hypertrophie de la papille duodénale. Une hypertrophie modérée des nœuds lymphatiques gastrique, mésentériques et hépatique (Fig. 2) a été identifiée. L’examen a également mis en évidence la présence de boue biliaire en quantité modérée et une légère dilatation des canaux biliaires. Un corps étranger duodénal a été suspecté, pouvant être associé à une cholangite secondaire à l’hypertrophie de la papille duodénale.

Laparotomie Une laparotomie par la ligne banche a permis l’accès à la cavité abdominale. Une masse duodénale de 1,5 cm de diamètre et de consistance ferme a été notée distalement au pylore. Le duodénum a été incisé sur son bord antimésentérique en regard de la masse, ce qui a permis de visualiser l’extension intraluminale de la masse. Une biopsie de la lésion a été effectuée. Le site d’entérotomie a été suturé par des points simples (monofilament résorbable Monocryl ND 4/0) et épiploïsé. La cavité péritonéale a été rincée avec du NaCl 0,9 % réchauffé. L’incision de laparotomie a été suturée plan par plan.

Pour citer cet article : Delrue B, et al. Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen. Revue vétérinaire clinique (2018), https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002

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B. Delrue et al.

Figure 1. Image échographique de la masse duodénale le jour de la présentation. Figure 3. Image échographique vingt jours après la chirurgie montrant la présence d’air dans la paroi duodénale, signant une zone d’ulcération.

Figure 2. Image échographique montrant le nœud lymphatique hépatique de taille augmentée.

Traitement per-opératoire L’animal a été hospitalisé pendant quatre jours, afin de recevoir une analgésie individualisée et une surveillance du transit intestinal. Une antibioprophylaxie a été effectuée avec de l’amoxicilline —– acide clavulanique à la dose de 12,5 mg/kg q12 h per os (PO), pour une durée totale de dix jours. Un traitement symptomatique a également été mis en place : maropitant à 1 mg/kg q24 h par voie intraveineuse ® (Cerenia ), pendant trois jours (prévention des vomisse® ments et des nausées) et sucralfate à 0,5 g q8 h PO [Keal ], pendant une durée totale de quinze jours). Pendant toute la durée de l’hospitalisation, la chatte a présenté un appétit et un transit digestif normaux.

Diagnostic L’analyse histologique de la biopsie duodénale (Fig. 3 et 4) a mis en évidence une lésion infiltrante et disséquante, visà-vis de l’épithélium de recouvrement fortement ulcéré et vis-à-vis des couches musculeuses : elle se présente sous la forme de faisceaux anastomosés, organisés de manière

Figure 4. Image échographique de la lésion duodénale, six mois après la chirurgie et un mois après l’arrêt des traitements montrant une augmentation de la taille de la masse sans ulcération.

concentrique ; ces faisceaux sont composés de fibroblastes activés, de polynucléaires éosinophiles, associés à des fibres de collagène d’agencement et de densité variables (fibroplasie à fibrose, voire sclérose). Cette description a permis de conclure à une fibroplasie sclérosante éosinophilique (FSE). Une coloration de Gram (Fig. 5) a été effectuée sur le prélèvement, mettant en évidence la présence de colonies de bacilles Gram positifs au sein de la lésion. Une coloration PAS n’a pas révélé la présence de micro-organismes fongiques.

Traitement spécifique Une corticothérapie a été initiée avec de la predniso® lone per os à la dose de 1 mg/kg q24 h (Dermipred ). L’antibiothérapie a également été poursuivie pendant une durée prolongée (trois mois au total) avec une association d’amoxicilline—acide clavulanique à 20 mg/kg ® q12 h (Synulox ) et de métronidazole à 15 mg/kg q12 h ® (Metrobactin ). Une vermifugation a été effectuée PO avec de la milbémycine oxime à la dose de 2 mg/kg et du pra® ziquantel à la dose de 5 mg/kg (Milbemax chat ). Une

Pour citer cet article : Delrue B, et al. Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen. Revue vétérinaire clinique (2018), https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002

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Figure 5. Photographie de coupe histologique de la lésion prélevée, au grossissement × 100, coloration HES.

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Figure 6. Photographie de coupe histologique de la lésion prélevée, au grossissement × 400, coloration HES.

alimentation hypoallergénique a été préconisée, toutefois ce régime n’a pas pu être respecté du fait du mode de vie (accès à l’extérieur). Un traitement de la cholangite a également été prescrit, avec de l’acide ursodésoxycholique à ® la dose de 15 mg/kg q12 h (Ursolvan ) sur une durée totale de deux mois.

Suivi Une résolution complète des troubles digestifs a été notée suite à l’intervention chirurgicale. Plusieurs suivis échographiques ont été effectués. Les premiers contrôles réalisés en période postopératoire (J1, J4, J13) ont montré une bonne cicatrisation du site d’entérotomie, sans signe de déhiscence. Au vingtième jour, un épisode aigu de vomissements est survenu. Une zone d’ulcération en région de la lésion de FSE (Fig. 6) a été identifiée lors du suivi échographique, malgré une diminution de taille de la masse duodénale. La dose de prednisolone a été diminuée à 0,5 mg/kg q24 h, l’antibiothérapie a été poursuivie à l’identique et l’administration de sucralfate a été initiée de nouveau. Environ un mois après l’intervention chirurgicale, une régression de la masse duodénale a de nouveau été signalée (1 cm de diamètre), mais une persistance de l’ulcération duodénale sur la face luminale été notée à l’échographie abdominale. Le traitement a été poursuivi sans modification. Une disparition de l’ulcération duodénale est survenue environ 2 mois après l’intervention chirurgicale. Le traitement corticoïde et antibiotique a été interrompu après une durée totale de trois mois. Une récidive des vomissements a été notée environ un mois après l’arrêt du traitement médical. Un contrôle échographique a révélé une augmentation modérée de la

Figure 7. Photographie de coupe histologique de la lésion prélevée, au grossissement × 100, coloration Gram soulignant la présence de colonies Gram+.

taille de la masse (Fig. 7), sans ulcération associée. La corticothérapie a été instaurée de nouveau dans le but de trouver la dose minimum efficace.

Pour citer cet article : Delrue B, et al. Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen. Revue vétérinaire clinique (2018), https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002

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Récapitulatif des rapports de cas concernant la FSEF.

Étude

Nombre de cas

Âge

18 européens, 2 type siamois, 2 type maine coon, 1 croisé, 1 himalayen, 1 persan

Sexe

Éosinophilie périphérique

Localisation de la lésion

8,8 ± 4,4 ans 18 MC, 7 FS (14 semaines — 16 ans)

7/12 (58 %)

Pylore (12), jéjunum (2), intestin grêle sans autre détail (1), iléon (1), jonction iléocolique (6), côlon (3), nœuds lymphatiques (7) Jéjunum + estomac, côlon, duodénum proximal, jéjunum + foie Estomac-duodénum

Craig et al. 2009 [2]

25

Weissman et al. 2012 [5]

4

4 européens

5, 7, 9, 11 ans

2 M, 1 MC, 1 FS

1/4

Suzuki et al. 2013 [7] Grau-Roma et al. 2014 [6] Linton et al. 2015 [4]

1

Scottish fold

8 mois

MC

NR

1

Persan

9 mois

M

Oui

7 ragdolls, 5 européens, 1 persan

7 ans (2—11 ans)

9 MC, 4 FS

5/11

Européen

8 ans

FS

Oui

Brloznik et al. 2017 [8]

13

1

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Races

Pylore-duodénum proximal Grande courbure de l’estomac (1), pylore (2), jonction iléocolique (8) Jéjunum

MC : mâle castré ; M : mâle entier ; FS : femelle stérilisée.

B. Delrue et al.

Pour citer cet article : Delrue B, et al. Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen. Revue vétérinaire clinique (2018), https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002

Tableau 3

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Discussion La FSE est une maladie gastro-intestinale émergente chez le chat, dont la première description date de l’année 2003 [1], dont la caractérisation a été effectuée en 2009 [2]. Toutefois, il semble que les lésions histologiques aient pu être confondues précédemment avec des affections néoplasiques, telles que le mastocytome du fait de l’observation fréquente de mastocytes intralésionnels ou l’ostéosarcome du fait d’une possible sclérose significative la trame collagénique [2,3]. Cette entité n’est pas décrite en médecine humaine. L’origine de la FSE reste méconnue. Certains auteurs ont proposé le rôle déclencheur de l’inflammation de microorganismes intralésionnels. Les micro-organismes identifiés le plus fréquemment lors de FSE sont des coques Gram positif, des bacilles Gram positif (comme dans le cas présenté) ou Gram négatif [1,2,4,5], voire des phycomycètes [6]. Le facteur déclencheur de l’inflammation pourrait plus largement être d’origine alimentaire ou parasitaire ; un traumatisme permettant une pénétration de bactéries dans la paroi intestinale, par exemple via l’ingestion de corps étrangers, semble également possible [2,4]. Une prédisposition génétique, favorisant le développement d’une inflammation de nature éosinophilique en réponse à la présence de micro-organismes, est suspectée chez les chats atteints de FSE [2]. Toutefois, la détection de microorganismes dans les lésions de FSE n’est pas systématique [2,4,5,7,8]. Cette entité pourrait constituer une forme de réaction éosinophilique à intégrer dans le complexe granulome éosinophilique du chat [2]. Les données épidémiologiques du cas décrit et les caractéristiques de la lésion de FSE (localisation, présence de bactéries intralésionnelles) sont en accord avec les descriptions de la littérature (Tableau 3). Dans la majorité des cas, cette lésion est retrouvée sur le pylore (15 cas sur 45) ou la jonction iléo-colique (14 cas sur 45) ; toutefois la localisation en partie proximale du duodénum a également été rapportée [5]. La présence d’une éosinophilie sanguine, bien que non spécifique de cette maladie, a été décrite dans 15 cas sur les 29pour lesquels un hémogramme était disponible [2,4,8]. Une discrète éosinophilie a également été mise en évidence dans le cas présenté. La prise en charge de la FSE ne fait pas l’objet d’un consensus. Plusieurs traitements ont été évoqués : exérèse partielle ou totale de la lésion, antibiothérapie prolongée, molécules immunosuppressives (corticostéroïdes notamment) ou une combinaison de ces modalités thérapeutiques. L’antibiothérapie a été justifiée par le rôle supposé des bactéries dans l’apparition de la lésion, bien que celles-ci ne soient pas systématiquement mises en évidence par l’analyse histologique. La corticothérapie vise à diminuer l’inflammation à composante éosinophilique présente dans la FSE. L’usage d’autres molécules immunosuppressives (seules ou en association avec des glucocorticoïdes) pourrait être indiqué dans certains cas [4]. Aucune étude n’a pu comparer les différentes modalités thérapeutiques. L’étude de Craig et al. semble indiquer une supériorité de la corticothérapie par rapport à l’antibiothérapie comme traitement adjuvant à l’exérèse chirurgicale [2]. Toutefois, des recommandations plus récentes préconisent une prise en charge

7 multimodale incluant une exérèse chirurgicale, ainsi qu’une corticothérapie et une antibiothérapie prolongées [4]. La durée de vie des chats atteints de FSE semble variable (de l’euthanasie immédiate à une survie de plusieurs années) et dépend notamment de la localisation de la lésion et des modalités thérapeutiques choisies [4]. Il semble que les chats ayant une lésion de FSE située à la jonction iléo-colique ou dans le côlon aient une médiane de survie plus élevée que les chats présentant une lésion pylorique [2]. Dans le cas présenté, la localisation de la lésion n’a pas permis l’exérèse chirurgicale et un traitement médical multimodal a permis d’obtenir une rémission clinique pendant 4 mois, avant un arrêt du traitement qui a conduit à une récidive des signes cliniques.

Conclusion La FSE est une maladie gastro-intestinale spécifique du chat dont la description est récente et incomplète. Toutefois, cette maladie doit être intégrée dans le diagnostic différentiel des masses gastro-intestinales. L’aspect échographique est variable et non spécifique d’une lésion inflammatoire. Il est facile de confondre une FSE avec une lésion néoplasique. Seule l’analyse histologique permet l’obtention d’un diagnostic de certitude. Le traitement de cette affection n’est pas consensuel. Il repose actuellement sur l’exérèse chirurgicale, l’antibiothérapie et les traitements immunomodulateurs, au premier rang desquels figure la corticothérapie. Il semble qu’un traitement multimodal offre une médiane de survie de l’ordre de plusieurs années.

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Références [1] Ozaki K, Yamagami T, Nomura K, Haritani M, Tsutsumi Y, Narama I. Abscess-forming inflammatory granulation tissue with Gram-positive cocci and prominent eosinophil infiltration in cats: possible infection of methicillin-resistant Staphylococcus. Vet Pathol 2003;40(3):283—7 [Disponible sur : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/12724569]. [2] Craig LE, Hardam EE, Hertzke DM, Flatland B, Rohrbach BW, Moore RR. Feline gastrointestinal eosinophilic sclerosing fibroplasia. Vet Pathol 2009;46(1):63—70 [Disponible sur : http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/ S0749072012000631]. [3] Stimson EL, Cook WT, Smith MM, Dru Forrester S, Moon ML, Saunders GK. Extraskeletal Osteosarcoma in the Duodenum of a Cat. J Am Anim Hosp Assoc 2000;36(1):332—6. [4] Linton M, Nimmo JS, Norris JM, Churcher R, Haynes S, Zoltowska A, et al. Feline gastrointestinal eosinophilic sclerosing fibroplasia: 13 cases and review of an emerging clinical entity. J Feline Med Surg 2015;17(5):392—404 [Disponible sur : http://jfm.sagepub.com/content/17/5/392.Abstract]. [5] Weissman A, Penninck D, Webster C, Hecht S, Keating J, Craig LE. Ultrasonographic and clinicopathological features of feline gastrointestinal eosinophilic sclerosing fibroplasia in four cats. J Feline Med Surg 2012;15(2):148—54 [Disponible sur : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23076597].

Pour citer cet article : Delrue B, et al. Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen. Revue vétérinaire clinique (2018), https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002

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B. Delrue et al.

[6] Grau-Roma L, Galindo-Cardiel I, Isidoro-Ayza M, Fernández M, Majó N. A case of feline gastrointestinal eosinophilic sclerosing fibroplasia associated with phycomycetes. J Comp Pathol 2014;151(4):318—21. [7] Suzuki M, Onchi M, Ozaki M. A case of feline gastrointestinal eosinophilic sclerosing fibroplasia. J Toxicol Pathol 2013;26(1):51—3 [Disponible sur : http://jlc.jst.go.jp/DN/JST. JSTAGE/tox/26.51?lang=en&from=CrossRef&type=Abstract].

[8] Brloznik M, Faraguna S, Goc M, Svara T. Recurrent feline gastrointestinal eosinophilic sclerosing fibroplasia and presumptive eosinophilic cystitis in a domestic short-haired cat: a case report. Vet Med (Praha) 2017;62(5):295—300 [Disponible sur : http://www.agriculturejournals.cz/web/vetmed.htm?volume =62&firstPage=295&type=publishedArticle].

Pour citer cet article : Delrue B, et al. Cas de fibroplasie sclérosante éosinophilique duodénale chez un jeune chat européen. Revue vétérinaire clinique (2018), https://doi.org/10.1016/j.anicom.2018.08.002