of tha Less-Common Metals Elsevier Sequoia S.A., Lausanne - Printed in The Netherlands
Journal
COMPLEXES
TRIAMRIINfiS
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DU RHODIUM(III)
UN NOUVEAU COMPLEXE DU RHODIUM(II1): LA RHODIUM(III)-TRIHYDROXO-TRIAMMINE I.
PRI?PARATIOX, IDEKTIFICATION ET l?TlJDE SES PROPRIl?Tl?S PHYSIC@CHIMIQIJES
G. PANNETIER Luboratozre P.
ALEPEE,
Laboratoire
(Rep
DE QlJELQUES
I:NES
DE
ET R. BONNAIRE
de Cine’tique
Chimique,
P. DAVOUS de Recherches
ET
Facultt
des Scie*tces de Paris,
Paris
V” ( France)
V. HUYNH
de la Compagnie
des Mhfaux
Pre’c~ux.
94-Divvy (Fvance)
le ‘4 Mars 1969)
L’action de l’ammoniaque sur l’acide hexachlororhodique bouillant en presence d’eau oxygenee concentree conduit a un compose nouveau, peu soluble, que divers essais qualitatifs (analyse chromatographique et spectrometrie de masse des gaz de decomposition, spectrophotometrie d’absorption infrarouge) et quantitatifs (titre en metal, dosage de la vapeur d’eau d&gag&epar thermolyse sous vide) ont montre avoir pour formule [Rh(OH)3(NH&]o. Nous avons egalement fait, en fonction de la temperature, l’analyse du coniportement de ce compose dans diverses atmospheres: alors qu’en chauffage lent sous azote nous obtenons un melange de rhodium metallique et de Rhz03, nous aboutissons au metal sous hydrogene et a Rhz03 pur sous oxygene; les temperatures ou commencent les r&actions observees ont Ctk precides dans chaque cas. Le produit prepare, qui est la rhodium(III)-trihydroxo-triammine doit B ses groupements oxhydriles une trb grande reactivite : il est attaque par tous les acides : chlorhydrique, sulfurique, nitrique, perchlorique et acetique en particulier pour donner les derives triammines correspondants. SUMMARY
The action of ammonia on a mixture of boiling hexachlororhodic acid and hydrogen peroxide gives a new, sparingly soluble compound, which, according to qualitative tests (gas chromatography and mass spectrometry of effluent gases, infrared spectra) and quantitative tests (metal percentage, determination of water in decomposition gases) has been shown to have the formula [Rh(OH)3(NH&]O. The thermal behavior of the compound in different atmospheres has been studied : slow heating in nitrogen leads to a mixture of metallic rhodium and Rhs03; in J. Less-COWLmO%
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et d.
hydrogen, rhodium is obtained and in oxygen, pure Khz03; temperatures at which the reaction begin are given in each case. The product, rhodium(III)-trihydroxo-triammine, is very reactive owing to its hydroxo groups. It reacts with many acids: hydrochloric, sulfuric, nitric, perchloric, and acetic, giving the corresponding triammine derivatives.
INTRODUCTION LEBEDINSKII~ qui ivait mtrepris, il y a une quarantaine d’annees l’etude systematique des complexes ammines du rhodium avait note que les composis dont la stabilite est la plus grande et l’obtention la plus facile, sont ceux qui contiennent un nombre impair de groupements NHs. Or, bien que l’on connaisse un certain nombre de ces complexes, il faut noter que les don&es relatives aux derives triammines sont peu nombreuses et relativement anciennes. On doit, en particulier, s’attendre a trouver des derives neutres, stables, du type [RhY3(NH&]O ou Y est un anion monovalent. C’est le resultat de recherches entreprises dans ce sens que nous allons commencer d’exposer dans ce memoire en debutant par un compose nouveau : le derive trihydroxotriammine.
PRLPARATION
Pour
preparer
la
rhodium(III)-trihydroxo-triammine
de
formule
on part d’une solution concentree d’acide hexachlororhodique [Rh(OH)3(NHs)31°, HaRhCle sur laquelle on fait agir a l’ebullition de l’ammoniaque en milieu eau oxyg&e; le complexe en precipite quantitativement sous forme dune poudre dense jaune paille. Globalement la reaction est la suivante. HsRhCls+gNHJOH
--f [Rh(OH)~(NHs)$J+GNH&1+6HzO
Voici a titre d’exemple le protocole suivi dans une operation portant sur de metal. L’acide HsRhCla correspondant a cette quantite de metal est d’abord amen& plusieurs fois presque a set pour chasser l’exces d’acide chlorhydrique utilise dans sa preparation; a chaque fois il est repris par 2-300 ml d’eau distill&e jusqu’a ce que l’on obtienne un acide de pH Cgal a 3 environ. On l’amene alors 8. la dilution convenable pour que les IOO g de metal employe correspondent a peu p&s a I 1 de solution. Ce volume de liquide est d’abord port6 a l’ebullition sur plaque chauffante; quand il bout on le pose a c&C de la source de chaleur et on 1111 ajoute par petites doses, environ I 1 d’eau oxygene’e a IIO volumes. Cette operation doit etre faite avec beaucoup de precaution car l’eau oxygen&e sit& ajoutee se decompose partiellement libirant d’une part une assez grande quantite de chaleur et dormant d’autre part un t&s important volume de gaz dont la production rapide risque de faire deborder le liquide si l’on n’y prend pas garde. Lorsque la totalite de l’eau oxygenee a ainsi CtC ajoutee avec prkaution, on arrive a un volume global de l’ordre de 1850 ml; quand la decomposition tumultueuse de l’eau oxygCn6e se reduit a un simple frissonnement de la surface du liquide on reIOO g
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place le recipient SW la plaque chauffante et, a l’~bullition, on ajoute de l’ammonial~ue (a 25% en NHa, d=o,91). Immediatement un precipite se forme a l’endroit du melange des solutions; la liqueur, de rouge t&s fence, devient plus Claire en mCme temps qu’un prkcipite jaune commence a se rassembler dans le fond du b&her. On arrete l’introduction de l’ammoniaque quand toute nouvelle addition ne provoque plus de precipitk ; le pH est alors voisin de g. Le chauffage est alors coupe; on laisse decanter le precipite; la solution surnageante devient limpide, Claire et a peine legerement coloree en jaune paille; on la s&pare du reste par transvasement en la remplacant par une solution ammoniacale de lavage; on agite ~nergiquenlent le precipite de facon a le remettre en suspension, puis on laisse reposer et on recommence deux & trois fois l’o~ration de facon B Gliminer le plus possible de chlorure ~ammonium. Enfin on filtre et lave B ~~moniaque pour obtenir un produit aussi propre que possible (ce qui est d’ailleurs difficile &ant donne la nature pratiquement inorganisee du precipitk constatee aux rayons S). Le @teau est ensuite soit s&he une vingtaine d’heures dans une Ctuve a 75”C, wit, mieux, dCbarass6 de son eau d’impregnation par sechage a froid sous vide (nous verrons en effet qu’il commence a l’air a se decomposer t&s t&s lentement vers 80°C ; si l’on veut Cviter un debut de decomposition-pouvant atteindre 2--3q: de la masse totale pour une dessication a 90°C pendant 48 h--i1 est done preferable de le dessechcr par lyophilisation). Le produit bien desseche se prbente sous forme d’une poudre dense, jaune paille, t&s homog&ne, t&s pulverulente quand elk est totalement anhydre et I&$xcment hygroscopique. Le rendement de la prkparation preddente est pratiquel~~ent qu~titatif (95-97%, le reste etant en solution). IDENTIFICATION
DU NOUVEAU
PRODUIT OBTENU
Le produit precedent n’etant obtenu par aucun des protocoles de preparation des composes ou des complexes du rhodium, ni decrit sous aucune forme que ce soitz, il nous a fallu l’identifier et trouver sa formule. Pour exposer les preuves que nous allons dormer de son identite il nous sera plus commode de faire Ctat d&s maintenant des conclusions auxquelles nous sommes parvenus, et qui font de ce corps la rhodium(III}-trihydroxo-triammine, et de voir ce que chacune des observations que nous allons faire lui apportera. (I) L’une des prop&%% de ce corps est, tout d’abord, d’&tre thermiquement peu stable et de se decomposer assez facilement a la chaleur. Une de nos premikes preoccupations a done kte d’en faire une thermogravimetrie sous azote en temperature lineairement croissante (3o”C/h pendant 15 h) ; le produit finalement obtenu est tres facilement reductible par l’hydrogene pour donner du rhodium; on a pu alors obtenir la teneur en rhodium du produit prepare: il suffit, soit d’en chauffer une partie aliquote sous courant d’hydrogene vers 300~4oo°C, soit, comme nous le verrons plus loin, d’en chauffer en vase clos une masse prealablement pesee. Dans le premier cas on prend ainsi la precaution, s’il se formait un oxyde du type Rhz03, d’en empecher la formation; nous verrons dans le second cas, en operant en circuit ferme, que, s’il se produisait Rh~O~, l’hydrog&ne ou l’ammoniac decoulant de la destruction de l’ammine produirait le mCmc effet. La moyenne des titres en rhodium observes a 6te de 5x,8% contre une teneur theorique de 50,18% pour ~Rh(OH~~(~H~)~]. La difference
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et al.
des deux chiffres vient, ainsi que nous le montrerons plus loin, du fait que, lorsque le sechage a CtCfait sans precaution a l’etuve, le produit se decompose t&s lentement d&s.80°C pour donner des composes intermediaires naturellement plus riches en rhodium que le produit de depart. L’enrichissement correspondant du produit etudie est d’ailleurs partiellement compense, mais nous ne pouvions pas le supposer au depart, par du chlorure d’ammonium provenant de la preparation. (2) Autre Clement d’information: quand on pyrolyse le produit sous courant d’azote en le chauffant dans un long tube en Pyrex, on constate une condensation d’eau liquide dans les parties froides du tube; la preparation doit done necessairement contenir de l’hydrogiine et de l’oxygene. (3) Troisieme constatation experimentale: si l’on ajoute a notre produit de la soude concentree et froide, il ne se passe rien mais, en chauffant, le compose Ctudie se dissout et en maintenant l’ebullition, l’on per$oit alors une t&s nette odeur d’ammaniac qui indique que l’on a affaire a un compose’ ammine. Ce re’sultat nous a incites a rendre quantitative la determination preddente. Nous avons, pour ce faire, utilise un montage analogue a celui que l’on utilise en chimie analytique dans la methode de dosage de l’ammoniac: avec titrage en retour de la quantite connue d’acide chlorhydrique dans lequel on re$oit l’ammoniac deplace’a. Les resultats obtenus rapport& a un atome de rhodium sont trits disperses, oscillant entre I, 3 et 2, I molecules de NHa. La dispersion elle-m&me des valeurs trouvees ambne a conclure que cette methode ne permet pas le dosage de tous les groupes NH3 de la molecule, mais que celle-ci en contient au moins deux, peut-etre trois ou davantage par atome de rhodium. (4) A ce stade nous savions que le produit prepare contenait des groupements NH3 et vraisemblablement des oxhydriles (formation d’eau par pyrolyse, existence d’un hydrate exclue a cause de l’allure continue de la thermolysesous azote et necessite de la presence d’anion a cause du car-act&e cationique du rhodium) ; tout cela, avec la coordinance 6 du rhodium, permettst de faire l’hypothese de la reprbenta.tion par [Rh(OH)2(NH&l d e notre compose. Dans ces conditions la formation d’un oxyde reductible du type Rh203 aurait pu s’expliquer par une degradation suivant: [RWHb(NH)3)a]
-+;
Rh203 + 4 Hz0 +3NH3
Si une telle decomposition avait lieu, elle devait alors permettre d’evaluer le nombre de groupements NH3 contenus dans la molecule. Pour faire ce dosage, nous avons place une quantite connue du compose a l’interieur d’une nacelle dans un tube de Pyrex dispose dans un four; a la suite se trouve un flacon laveur a verre fritte’ contenant de l’acide chlorhydrique titre; un lent courant d’azote traverse tout le syteme de faGon a vehiculer les gaz de decomposition a travers l’acide. A notre grande surprise le titre de l’acide employe n’a nullement varie au tours de la decomposition montrant par la que la pyrolyse s’effectuait sans degagement d’ammoniac dans les conditions oti nous operions et que l’equation precedente n’etait pas valable dans ce cas. (5) Ce rbultat, nous en verrons plus loin l’explication, nous a cependant assez &tonne pour que nous nous posions dans l’absolu le probleme des elements associes au rhodium dans la molecule. Nous avons essay& de resoudre ce probleme dans deux directions, dune part 1. Less-COWWiWn Metals, 18 (1969) 275-284
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en utilisant la chromatographie, d’autre part en spectrographic de masse. La technique chromatographique a CtCemploy&e de deux faqons diffgrentes: d’une part pour la Gparation des gaz 6mis en diffkents moments de la pyrolyse, d’autre part pour faire l’analyse de l’ensemble des gaz r&_&ant d’une degradation thermique en vase ~10s; dans ce dernier cas les produits de la decomposition restent au contact d’une masse de rhodium, chaude, tres spongieuse; celle-ci modifiera, comme nous le verrons plus loin, la nature des combinaisons que l’on peut deceler; les conditions experimentales &ant differentes, il e’tait evident a$riopi que des reactions secondaires au contact du rhodium agissant comme catalyseur pouvaient simplifier, ou compliquer, Ie bilan de I’operation de craquage de la molecule. (a) Nous commencerons par I’etude de la separation chromatographique des gaz Cmis en tours de decomposition du produitd. Nous avons couple cette methode B une analyse thermique differentielle; l’experience Porte sur un echantillon de zoo150 mg place dans un four dont on &we ~in~airement la temperature; les produits gazeux de pyrolyse sont entrain&s par un courant d’helium ou du gaz choisi comme vecteur; a des intervalles de temps regulier un prelevement de ces gaz est fait et inject6 dans le chromatographe. Comme l’existence dans la molecule de groupements oxhydriles n’a jusqu’ici pu Ctre demontree qualitativement que par la formation d’eau dans la decomposition du produit et que celle-ci pourrait n’etre que de l’eau d’insertion, notre premier objectif a CtC d’en verifier la presence. La premiere chromatographie des gaz emis en tours de degradation thermique a CtCfaite avec une colonne de Chromosorb W-80-100 impregne a 20 o/o du melange diethanolamine (72 y/o), alcool laurique (18 “/o), iodure de sodium (10%) et fonctionnant 8. IZOT. Cette colonne, avec de l’hklium comme gaz vecteurs, permet la separation de l’eau du melange d’ammoniac et des gaz permanents (azote, hydrog~ne) ; les resultats observes sont assez complexes. Au debut du chauffage, jusque vers 150°C on constate un degagement faible d’eau, relativement lent et continu, accompagne d’un faible effet endothermique a partir de cette temperature, les effets thermiques sont plus importants; la decomposition est elle-m&me plus rapide et les analyses qui se succedent accusent la presence simultanee d’importants degagements d’eau et d’autres gaz: ammoniac, ou azote, ou hydrogene (que la colonne ne peut &parer). Cette experience confirme done la presence dans la molecule des elements constitutifs des oxhydriles ou de l’eau, mais rendait aussi necessaire l’identification des autres gaz degagb. Dans une autre suite d’experiences nous avons alors utilise une colonne d’oxyde de polyph~nyl~ne 30-60 (masse 7000) travaillant a 80°C. Un tel dispositifs permet en utilisant de I’helium comme gaz vecteur, de &parer I’eau de l’ammoniac et des gaz permanents. Des experiences prealables ont permis la determination des temps de retention des divers gaz susceptibles d’etre &par&: l’oxygene, l’azote et l’hydrogene “sortent” d’abord et en m4me temps, puis viennent ensuite NzO, l’ammoniac un peu plus tard et enfin l’eau en dernier. Le debut du chauffage se traduit par un Eger depart d’eau, qui peut @tre d’insertion ou form&e au detriment des constituants de la molecule. Cette perte d’eau croit lentement et regulierement au tours du chauffage et sans autre degagernent gazeux jusque vers 150°C; cl la temperature de 200°C commence a apparattre un leger degagement de NzO, puis, un peu plus loin, & partir de 225”C, concomitant d’un effet
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G.
PANNETIER et d.
fortement endothermique, apparait un degagement de plus en plus important d’eau, de gaz permanents : azote ou hydrogbne et une augmentation de la quantite de NzO ; leurs maximums se situent vers 300°C : au-de&, seuls subsistent en diminution rapide, le depart d’eau et de gaz permanents; le rtkidu fixe de la pyrolyse est alors du rhodium. Le fait important de ces essais est qu’a aucun moment la pyrolyse n’a donne de l’ammoniac dont cependant la presence dans la molecule resulte du deplacement que l’on en peut faire par la soude. Nous avons repris les separations precedentes en utilisant non pas de l’helium comme gaz vecteur, mais de l’hydrogene. Un Ctalonnage prealable permet de verifier que les temps de retention des divers constituants a &parer ne sont pratiquement pas modifies et qu’ils “sortent” dans 1”ordre: azote, protoxyde d’azote, ammoniac et eau. On constate dans ces conditions que l’allure de la pyrolyse est totalement modifiee : si l’on a toujours au debut un leger degagement d’eau, la destruction rapide du produit par reduction intervient plus t6t dbs r10-Izo’C; le degagement de NaO debute d&s cette temperature et est concomitant dun t&s net degagement d’ammoniac; le maximum des departs de N20, NH3 et Hz0 se situe presque simultanement pour chacun d’entre eux vers 175’C : les degagements correspondants s’amenuisent ensuite tres vite. Si nous faisons le bilan, l’ensemble des etudes chromatographiques d&rites permet de degager un certain nombre de conclusions qualitatives. (i) Les constituants Clementaires du produit prepare ne peuvent dtre en dehors du rhodium, que de l’azote, de l’oxygene et de l’hydrogitne. (ii) La decomposition de notre produit se fait en mettant en jeu des reactions secondaires; celles-ci sont Q la fois catalysees par le metal lib&C et tributaires des atmospheres dans lesquelles a lieu la pyrolyse, soit qu’elles y participent directement commc I’hydrogene, soit qu’elles y intervie~ent comme vecteur en ~lirni~~t du milieu reactionnel les produits de la decomposition. Nous reviendrons plus loin sur cet aspect des phenombnes mais nous allons maintenant en venir a une serie #experiences justifiant le point precedent. (b) Au lieu de faire la chromato~aphie des gaz emis en tours de pyrolyse, nous avons d’abord place le produit prepare dans un tube scelle sous vide; puis nous l’avons chauffe a 450°C pendant 2-3 h. On a, dans ces conditions, &la m&me temperature, le residu solide et Ies gaz produits; nous avons enfin ouvert le tube scelle et fait l’analyse chromato~aphique des produits gazeux qu’il contenait. On constate que ces gaz ne contiennent que de I’azote, de l’hydrogene et de la vapeur d’eau; ils ne contiennent aucune trace de NH3 ni de N20. Quant au residu stable, c’est une mousse de rhodium mal cristallisi\ainsi qu’on peut le verifier aux rayons X. 11 y a done dune part confirmation de l’experience infructueuse tentee pour doser NH3 et ob l’on n’avait pu deceler ce corps, d’autre part, demonstration de l’existence de reactions secondaires, catalysees par le metal lib&. S’il se formait en particulier de l’oxyde de rhodium Rh203, comme nous l’avons verifie par thermogravimetrie, (nous reviendrons ult~rieurement sur de telles experiences) en entrainant par un courant d’azote sans les laisser reagir les gaz reducteurs, Hz ou NH3, qui se forment, cet oxyde serait reduit ; de m&me, s’il restait de l’ammoniac non decompose, celui-ci serait ramene a ses elements par le metal agissant comme catalyseur. Au total la decomposition en vase clos se traduit par: J. Less-Common
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LA RHODIUM(III)-TRIHYDROXO-TRIAMMINE
+Rh+3HzO [R~~(oH)~(NH~)~]
+ $+3H?.
Nous noterons enfin que les manipulations precedentes nous ont permis d’observer la presence dune leg&e impurete dans la preparation, a savoir du chlorure d’ammonium. Pour acdlerer, en effet, la rotation des gaz dans le montage decrit en (b), une partie du tube scelle dans lequel a lieu la decomposition est laisske en dehors du four; le chlorure d’ammonium vient s’y condenser sous forme d’une fine pellicule blanche. L’experience qui suit a permis d’evaluer sa teneur dans la preparation :I-1,5 OS; cn poids environ. (c) Le fait qu’en vase clos tout l’oxygene de Rh(OH)s(NH& se retrouve sous forme d’eau nous a alors effectivement servi a doser les groupements OH. Un poids p determine de la preparation est d’abord place dans un tube en Pyrex &ire aux deux extremites: on en scelle une au chalumeau et par l’autre on y fait un vide de 10-2 torr environ; on scelle alors la deuxieme extremite et on place pendant 3 h le tube dans un four a 400-450X ; la longueur du tube est determinCe de facon que l’une des extremtes du tube depasse largement d’une trentaine de cm, l’autre &ant en dedans; le chlorure d’ammonium vient alors s’y deposer. Le four est ensuite refroidi vers 1z5T et, sans briser les bouts effiles, on s’arrange pour les enfiler sur un tube de caoutchouc relic d’un c&e a une bouteille d’azote et de l’autre a un tube absorbeur a PzO5 convenablement tare’. On brise les parties effilees de faGon a permettre le balayage du tube et il suffit devaluer d’une part l’augmentation de masse du PzO 5 et d’autre part celle du tube (sans oublier les bouts) pour avoir la masse de NH.&1 ddposk. De l’eau absorbee, on peut remonter aux -OH de la molecule; I’experience les fait figurer pour 23,10/o
contre:
5I>OI __
205,oo
= 24,87%
theorique.
(d) Nous avons eu une confirmation de cc qui precede et notamment des informations chromatographiques par la spectrometrie de masse: la degradation thermique sous vide a 350°C et l’analyse des gaz de decomposition permet, lh encore, de remonter qualitativement a HgO, Nz, HZ. NzO et NH3; certes les conditions de decomposition sont differentes mais les resultats obtenus sont en accord avec ce que nous avons ecrit precedemment (6) D’autres elements, en parfait accord avec ce qui precede, sont apport& par l’etude du spectre d’absorption infrarouge du produit. Pour I’observer entre 4000 et 250 cm-i nous avons utilise la technique des pastilles de bromure de potassium et un spectrophotometre infrarouge Perkin-Elmer 521. Les bandes enregistrees (Fig. I) sont attribuables a la presence de groupements -OH et NHa. Les bandes a 3410, 3280 et 3180 cm-1 correspondent aux mouvements de valence des vibrateurs OH et NH ; les bandes a 1625 et rz3g cm-r sont attribuables aux mouvements de deformation, de’gCnQC et symetrique, de NHa. L’epaulement note a 930 cm-i peut correspondre a un mouvement de deformation Rh-O-H6 tandis que la bande d’intensite moyenne observee a 790 cm-1 correspondrait au balancement du groupement NHa7. La bande symt%rique intense a 505 cm-r se trouve dans la region des vibrations “de valence” Rh-N, ou Rh-0. Les caracteristiques de ce spectre sont done compatibles avec la formule d’un compose hydroxo-ammint! de rhodium. Nous noterons de plus que l’enregistrement observe ne contient aucune des bandes de la liaison Rh-Cl dont les vibrations se situeraient, comme nous le montrerons dans un prochain memoire sur J. Less-Comwton
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(rghq)
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et a/.
[RhrrrCls(NH&]O, dans la region 250-350 cm- 1; la presence de chlore dans la molecule est d’ailleurs incompatible avec la forte teneur en rhodium. Nous devons ajouter que, chronolo~quement, cette etude infrarouge a et6 faite avant les analyses chromatographiques et qu’elle nous a autant servi de guide que de piece A conviction pour arriver A nos conclusions.
Fig. I. Spectre d’absorption infrarouge.
(7) Une derniere preuve de l’exactitude de la representation choisie est basee sur la reactivite de [~(OH)~{NH~)~]. N ous verronss, en effect, que ce produit reagit tres facilement en particuher sur l’acide chlorhyd~que concentre pour donner un prkipite dont l’analyse, faite independamment de toute origine, donne comme formule [RhrriCls(NHa)a]O. La structure du precurseur de cette rhodium(III)trichloro-triammine s’en deduit facilement si l’on imagine que celui-ci est attaque par HCl suivant [~hrIr(OH)~{N~3)3]“+3HCl
-P [Rh~IICl3(NH3)3]0-I-3HzO
Cette accumulation de preuves qualitatives et quantitatives nous amene ainsi a la conclusion que le produit de la reaction de l’ammoniaque sur I’acide hexachlororhodique en presence d’un excits d’eau oxygen&e est un complexe triammine inedit [Rhrrr(OH)3(NH3)8]0 qui fait de ce corps une rhodium(III)-trihydroxo-triammine.
ETUDE DE LA DEGRADATION
THERMIQUE
DE
[Rh(OH)s(NH)]3
3
DANS DIVERSES ATMOS-
PH$RES
Nous avons cornpI& les etudes precddentes par celles de la thermolyse de ce produit en atmosphere d’azote ou d’hydrogene. Dans Ies deux cas les informat~ons recueillies confirment les conclusions auxquelles nous nous sommes deja arretes, en particulier la complexite des reactions primaires et secondaires de decomposition; elles apportent de plus quelques precisions supplementaires. La balance utilisee est un
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LA RHODIUM(III)-TRIHYDROXO-TRIAMMINE
appareil Ugine-Eyraud B-60; la prise d’essai d&passe rarement 70-100 mg, contenus dans une nacelle soit en verre soit en platine. Sous atmosphere d’azote (Fig. 2) avec une vitesse de chauffage lente (3o”C/h) et une circulation de l’azote amour de la nacelle de l’ordre de 3-5 l/h, on aboutit a 300°C a unresidu fixe, lui-meme reductible d&s 350°C par l’hydrogene pour donner du rhodium metallique tres mal cristallise; la reaction a lieu suivant.
[Rh(WW ) ] 3 3
-+
2
RhzOa + i Hz0 + (; Nz + ; Hz) (0~ 3NfL)
si l’on monte un peu plus rapidement en temperature, l’experience montre qu’au lieu de RhsOa on obtient un melange de ce sesquioxyde avec du rhodium lui-m&me obtenu par reduction de Rhs03 par I’ammoniac ou l’hydrogene resultant de sa decomposition.
---.-
Fig.
2. Courbes
d’analyse
SousNZ ChauFfy* Icnt *I NZ I,
Hz
thermogravimetrique.
Ce resultat est Q rapprocher de celui que l’on obtient en chauffant brutalement [Rh(OH)a(NH&] ; l’oxyde, s’il s’en formait, &ant port6 rapidement a une temperature oti il Ctait reduit par l’ammoniac ou l’hydrogene, ne pouvait pas se former et cela explique que clans de telles pyrolyses on obtienne toujours du rhodium metallique. Nous noterons dans le thermogramme de la decomposition que celle-ci commence d&s7o”C, tres lentement il est vrai, mais avec une vitesse qui n’en est pas moins mesurable. Dans le cas dun produit s&he a l’etuve a 90°C pendant 48 h cela explique que le titre apparent en rhodium soit voisin de 52 5/, ; la presence d’impuretes comme le chlorure d’ammonium ferait bien baisser le titre theorique de 50~8% mais un debut de decomposition pouvant porter sur ~-3% du produit peut alors le faire remonter jusqu’aux 5I,5-52,5o/o que nous avons pu constater sur des preparations correspondantes; l’ideal comme nous l’avons indique, serait de pouvoir effectuer l’evaporation de l’eau de mouillage vers 0°C et sous un vide de 10-1 torr. En atmosphere d’hydrogene la reduction s’amorce des 60°C avec une vitesse assez lente qui s’accelere et devient t&s rapide a 110%; finalement tout est reduit en rhodium metallique des 140°C; le metal ainsi prepare (contrairement aux autres cas ou il est gris) se presente sous forme dune poudre noire t&s certainement dotee d’une t&s grande surface specifique et qui chimisorbe des quantites t&s grandes d’hydrogbne ; nous ne reviendrons pas sur la nature des gaz Cmis qui subissent au J. Less-Common
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et al.
contact
du rhodium comme catalyseur un trbs grand nombre de r&actions secondaires : nature des gaz obtenus mais surtout leur composition dependent essentiellement des conditions de contact avec le soiide. Un exemple d’allure de courbe de thermolyse sous hydrogene est represent6 Fig. 2. Sous oxygene enfin, l’attaque conduit directement au sesquioxyde sans trace de metal; RhgOs ainsi forme’ a une temperature qui n’excede pas 300°C est ma1 cristallise, ainsi qu’on peut le constater aux rayons ;)I=. la
CONCLUSION
L’action de ~ammoniaque sur l’acide hexach~ororho~que bouillant en presence d’eau oxyg&Ge coneentree conduit a un compose nouveau, peu soluble, que divers es&s qualitatifs (l’analyse chromatographique et la spectrometrie de masse des gaz de decomposition, la spectrophotometrie d’absorption infrarouge) et quan titatifs [titre en metal, dosage de la vapeur d’eau d&a&e par thermolyse sous vide) ont montre avoir pour formule [Rh(OH)s(NHs)s]O. Nous avons Cgalement fait, en fonction de la temperature, l’analyse du comportement de ce compos6 dans diverses atmospheres: alors qu’en chauffage lent sous azote nous obtenons un melange de rhodium metallique et de RhzOa, nous aboutissons au metal sous hydrogene et B RhsOa pur sous oxygene; les temperatures oti commencent les r6actions observees ont 61-Cp&cis&es dans chaque cas. Le produit prepare, qui est la rhodium(rrr)-trihydroxo-t~amn~ine doit a ses ~oupements oxhydriles une tres grande reactivite : il est attaqud par tous les acides: chlorhydrique, sulfurique, nitrique, perc~orique et acetique en particulier pour donner les d&iv& triammines correspondants. Nous reviendrons ultCrieurement sur ces reactions pour preciser les composes form& et decrire quelques unes de leurs proprietes. REMERCIEMENTS
Les signataires de ce mCmoire appartenant a la FacultC des Sciences de Paris, sont redevables au Centre National d’Etudes Spatiales de la possibilit6 qui leur a BtC donnee de faire ce travail.
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