Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés – Revue de la littérature

Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés – Revue de la littérature

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ANNPLA-1028; No. of Pages 7 Annales de chirurgie plastique esthétique (2014) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

´RALE REVUE GE´NE

Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés — Revue de la littérature Sequelae after harvesting latissimus dorsi flap and derivates — Review M. Ismaïl, F. Boucher *, J. Chauvel-Picard, H. Shipkov, F. Braye, A. Mojallal ´ tique, universite ´ Claude-Bernard Lyon 1, CHU, ho ˆ pital Service de chirurgie plastique, reconstructrice et esthe de la Croix-Rousse, hospices civils de Lyon, 103, Grande rue de la Croix-Rousse, 69004 Lyon, France Rec¸u le 28 juillet 2013 ; accepte´ le 8 mai 2014

MOTS CLÉS Lambeau grand dorsal ; Lambeau de grand dorsal à prélèvement partiel ; Lambeau perforant thoracodorsal ; Séquelles fonctionnelles et esthétiques

Résumé Introduction. — Le lambeau de latissimus dorsi apparaît comme une option thérapeutique dans de très nombreux cas de reconstruction. Sa très grande surface ainsi que sa fiabilité font de lui un choix thérapeutique idéal. Depuis sa description initiale par Tansini en 1896, de nombreuses publications ont été rapportées sur ses applications cliniques ainsi que sur la diminution de la morbidité du site donneur. Son prélèvement est potentiellement source de séquelles fonctionnelles, voire douloureuses et esthétiques. Le but de cette étude est de réaliser un état de la science quant aux séquelles potentielles fonctionnelles, douloureuses et esthétiques liées au prélèvement de ce lambeau de grand dorsal dans sa description initiale mais aussi dans ses évolutions (conservation partielle du muscle ou MSLD-flap et lambeau perforant thoracodorsal ou TAP-flap). Mate´riel et me ´thodes. — Une revue de la littérature a été réalisée. Une recherche bibliographique sur PubMed était menée avec les mots clés suivants : latissimus dorsi flap ; latissimus dorsi flap morbidity ; donor site sequelae of latissimus dorsi flap ; TAP-flap AND donor site morbidity ; MSLD-flap AND donor site morbidity. Re ´sultats. — Le prélèvement du muscle dans sa totalité montre des séquelles à type de douleurs et de déficits fonctionnels. Celles-ci s’amenuisent et tendent à disparaître dans le temps grâce notamment à une réadaptation par sollicitation d’autres groupes musculaires. La conservation

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (F. Boucher). http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.05.002 0294-1260/# 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Ismaïl M, et al. Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés — Revue de la littérature. Ann Chir Plast Esthet (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.05.002

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M. Ismaïl et al. partielle (MSLD) ou complète (TAP-flap) du muscle grand dorsal n’est source d’aucune séquelle douloureuse et fonctionnelle. Ces résultats sont étayés par des résultats provenant de tests objectifs, fiables et reproductibles. Conclusion. — Des études complémentaires bien ciblées et bien conduites pourraient permettre une meilleure connaissance de ses inconvénients, afin d’obtenir une sélection rigoureuse des patients pour chaque type de technique de grand dorsal. # 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Latissimus dorsi flap; MSLD; TAP flap; Functional and aesthetic sequelae

Summary Introduction. — The latissimus dorsi (LD) appears as a therapeutic option in many cases of reconstruction. Its large surface and reliability make it an ideal therapeutic choice. Since its initial description in 1896 by Tansini, many publications have been reported on its clinical application and the low donor site morbidity. However, harvesting of LD can be a source of functionnal and aesthetic sequelae. The purpose of this study is to provide a state of the science regarding the potential functional, aesthetic and pain sequelae related to harvesting of LD flap in its original description, but also in its modifications (muscle-sparing LD flap [MSLD-flap] and thoracodorsal artery perforator flap [TAP-flap]). Material and methods. — A review of the literature was realized, the database PubMed was chosen. Keywords used for the research were: LD flap; LD flap morbidity; donor site sequelae of LD flap; TAP-flap AND donor site morbidity; MSLD-flap AND donor site morbidity. Results. — Literature report suggests that harvesting of the whole LD muscle flap can provoke pain and functional deficit which diminish and even tend to disappear over time due to functional replacement by the other muscle groups. The partial (MSLD) or total (TAP-flap) preservation of the muscle leads to less pain, functional and aesthetic sequelae. These results are supported by objective, reliable and reproducible studies. Conclusion. — Well-targeted and well-designed studies could allow for better evaluation of the advantages and disadvantages of each technique. This would lead to better selection of candidates for each technique. # 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction Le lambeau de latissimus dorsi (LD) apparaît comme une option thérapeutique dans de très nombreux cas de reconstruction. Depuis sa description initiale par Tansini en 1896 [1], de nombreuses publications ont été rapportées sur ses applications cliniques ainsi que sur la diminution de la morbidité du site donneur. Actuellement il apparaît être un lambeau universel de la chirurgie plastique. En effet, sa très grande surface ainsi que sa fiabilité en lambeau pédiculé font de lui un choix thérapeutique idéal. Le muscle grand dorsal est un adducteur et un rotateur interne du bras lorsque le point fixe se situe au niveau du tronc. Il permet également la rétropulsion et le soulèvement du tronc si l’humérus est fixe. Décrit comme type V de la classification de Mathes et Nahai, son pédicule dominant est l’artère thoracodorsale, issue de l’artère sous-scapulaire (ou scapulaire inférieure) branche de l’artère axillaire. L’artère thoracodorsale pénètre dans le muscle grand dorsal de 6 à 16 cm (en moyenne 9 cm) du creux axillaire et de 1 à 4 cm en arrière du bord antérieur du muscle. Après avoir pénétré le muscle, elle donne une branche descendante et une branche transverse. Les pédicules accessoires proviennent des artères lombaires et des artères intercostales [1,2]. Son prélèvement est ainsi potentiellement source de séquelles fonctionnelles, voire douloureuses et esthétiques.

Le rapport du 27e congrès de la SOFCPRE en 1982 indiquait que la diminution de la fonction était modérée voire nulle [2]. Il était montré que le prélèvement de ce lambeau avait des répercussions négligeables, sans preuves objectives. En effet, peu d’auteurs ont étudié la morbidité et les séquelles de ce lambeau, tant elles avaient été présentées et admises comme particulièrement faibles. L’évolution des techniques chirurgicales ainsi que la connaissance de l’anatomie vasculaire ont permis la description de lambeaux dérivés de la technique du lambeau de grand dorsal. En effet, le lambeau de latissimus dorsi avec conservationdumuscleestdécritcommelevéuniquementsurunebande musculaire incluant la branche descendante thoracodorsale [3,4]. Le lambeau perforant thoracodorsal quant à lui préserve complètementlemuscle,ilest levésur lesperforantes issuesde la branche descendante disséquée à travers le muscle [5]. Le but de cette étude est de réaliser un état de la science quant aux séquelles potentielles fonctionnelles, douloureusese et esthétiques liées au prélèvement de ce lambeau de grand dorsal dans sa description initiale mais aussi dans ses évolutions.

Matériel et méthodes Une revue de la littérature a été réalisée. Une recherche bibliographique sur PubMed était menée avec les mots clés suivants :

Pour citer cet article : Ismaïl M, et al. Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés — Revue de la littérature. Ann Chir Plast Esthet (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.05.002

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Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés     

latissimus dorsi flap ; latissimus dorsi flap morbidity ; donor site sequelae of latissimus dorsi flap ; TAP flap AND donor site morbidity ; MSLD flap AND donor site morbidity.

Il était retrouvé 375 articles traitant du sujet ; 125 articles ont été lus dans leur intégralité et leurs bibliographies étaient étudiées pour plus de publications pertinentes. Quinze articles pertinents abordant spécifiquement les séquelles fonctionnelles, algiques et esthétiques ont été retrouvées. Les critères d’inclusion étaient les articles anglophones et francophones traitant d’études comparatives de la fonction de l’épaule, de la qualité de vie, et des séquelles esthétiques et douloureuses après prélèvement de lambeau de grand dorsal classique ou avec épargne musculaire. Les critères d’exclusion étaient les articles rapportant un cas clinique et ceux traitant des séquelles du prélèvement du grand dorsal à type de séromes.

Résultats Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal classique et étendu Les études présentent des résultats divergents (Tableau 1). Elles employaient le plus souvent des mesures subjectives comme des questionnaires sur la qualité de vie, sur la reprise d’une activité professionnelle, sur la capacité à effectuer certaines tâches de la vie quotidienne ou sur l’échelle visuelle analogique (EVA) et des tests musculaires manuels. Elles utilisaient en revanche très peu de mesures objectives. Les mesures objectives utilisées pour évaluer la fonction de l’épaule étaient des mesures dynamométriques, goniométriques, et des mesures de l’endurance, de la puissance. L’amplitude des mouvements était quant à elle étudiée à l’aide du Baltimore Therapeutic Equipment (BTE) : machine de travail informatisée de simulation de tâches de la vie professionnelle et domestique [6]. Laitung et al. [7] retrouvaient un déficit de 5 à 308 d’amplitude des mouvements de l’épaule, avec un recul compris entre deux mois à quatre ans, sans diminution de force. L’analyse de Russell et al. [8] situait à moins 18 % la perte fonctionnelle mécanique liée au muscle grand dorsal chez 73 % des patientes et de moins 5 à moins 10 % celle de l’amplitude des mouvements de l’épaule. Fraulin et al. [9], sur une population mixte de 26 opérés, objectivaient pour diverses activités gestuelles, une fonction musculaire ramenée à 80 % de celle observée du côté opposé, avec la particularité d’un déficit surtout perçu par les sujets féminins. Ils constataient sur une série de reconstructions mammaires unilatérales par lambeau de grand dorsal pédiculé, que la force et l’endurance du côté prélevé étaient significativement diminuées pour l’abduction, l’adduction, la traction (par exemple, peindre au-dessus de la tête ou se relever d’une chaise). Salmi et al. [10] objectivaient, par un testing musculaire manuel, chez douze patientes avec un lambeau libre, une réduction de la force musculaire de 33 % sur un suivi de neuf mois.

3

Dans le même sens, Clough et al. [11] objectivaient, par un questionnaire et un testing musculaire manuel sur trois mouvements (appui chaise, rotation interne, main dans le dos), sur une série de 30 patientes ayant bénéficié d’un lambeau pédiculé, une réduction de la force musculaire de 33 %, de la mobilité de 47 %. À l’opposé, en 1992 Brumback et al. [6] avaient conclu pour 17 patientes soumises à des tests isométriques et isodynamiques précis (BTE), à un impact peu marqué du prélèvement d’un lambeau libre de LD sur les différentes fonctions de l’épaule. Adams et al. [12] constataient sur 36 questionnaires et pour une période de cinq ans que la douleur séquellaire était qualifiée de minime ou modérée par 62 % des patientes et absente pour les 38 % restantes. Ils trouvaient que la force était diminuée pour les activités au-dessus de la tête, ainsi que pour soulever les courses au quotidien. En 2004, Spear et al. [13] publiaient une revue de la littérature au sujet des modifications biomécaniques induites par le transfert du lambeau de grand dorsal. Ils rappelaient que parmi les 26 muscles de l’épaule, six pouvaient pallier l’absence du grand dorsal pour les actions d’extension-adduction-rotation de l’épaule, et en premier lieu le grand rond (muscle teres major). Ils constataient que le principal déficit était une fatigabilité plus rapide du côté opéré, sans perte notable de la locomotion. Glassey et al. [14], dans une étude prospective à partir de 22 patientes, étaient les seuls à avoir effectué une évaluation par un kinésithérapeute de la fonction du membre supérieur en préopératoire, à six semaines, six mois et un an postopératoire. Ce qui permettait de montrer qu’il y avait une récupération de l’amplitude des mouvements, de la force et de la fonction du membre supérieur à un an. Faucher et al. [15] évaluaient par des questionnaires adressés à trois cohortes de patientes distinctes par l’ancienneté de leur reconstruction, la qualité de vie et le niveau de douleur postopératoire. La gêne principale signalée était celle d’une rigidité axillodorsale, surtout les deux à quatre premiers mois chez 68 et 66 % des patientes et 14 % ont des douleurs chroniques avec une EVA à trois.

Figure 1 Vue peropératoire de la levée d’un lambeau MSLD droit en décubitus latéral gauche. Une grande partie du muscle grand dorsal est laissée en place.

Pour citer cet article : Ismaïl M, et al. Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés — Revue de la littérature. Ann Chir Plast Esthet (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.05.002

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M. Ismaïl et al. Tableau 1

Synthèse de la revue de littérature portant sur les séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal.

Auteur, journal et titre

Type d’étude

Laitung et al. [7]

19 Rétrospective Comparé au groupe témoin Rétrospective 24 Comparé à épaule controlatérale

19

0

13

11

Russell et al. [8]

Brumback et al. [6]

Rétrospective Comparé au groupe témoin

17

17

0

Fraulin et al. [9]

Rétrospective Comparé au groupe témoin

26

10

16

Prospective Salmi et al. [10] Rétrospective Clough et al. [11]

12

12

0

30

0

30

Rétrospective Adam et al. [12]

36

0

36

Revue de Spear et al. [13] littérature







Prospective Glassey et al. [14]

22

0

22

Rétrospective Faucher et al. [15]

A : 25 B : 96

Prospective

Suivi (mois)

Conclusion

Évaluation force en adduction par un dynamomètre Testing musculaire

2—48

Test isométrique et isodynamique (mesure par BTE et CYBEX machine) Mesure par BTE et Kin Com

22—96

Pas de modification de force Déficit de 5 à 308 d’amplitude des mouvements de l’épaule Chez 73 % des patients & amplitude des mouvements de 34 % par rapport au côté opposé Pas de modification de l’amplitude de l’épaule

Nombre Libre Pédiculé Méthode de de mesure patients

C : 61

4—24

15—92

& de la force et de l’endurance 55 à 68 % en extension et en adduction & 33 % de la force en extension 33 % & de la force 47 % & de la mobilité 40 % & répercutions dans la vie quotidienne

Testing musculaire 9 manuel Questionnaire et 19 (7—80) testing musculaire manuel 3 mouvements Appui chaise Rotation interne Main derrière le dos Questionnaire 34 (9—108) 50 à 73 % des patients ont des difficultés dans les tâches de la vie quotidienne et pour une activité sportive (ski, natation, tennis) — — 6 muscles peuvent pallier l’absence du grand dorsal surtout le grand rond (teres major) Fatigabilité plus rapide du côté opéré sans perte notable de la locomotion 12 Évaluation pré- et Pas de 6¼ significative postopératoire : 1 an postopératoire dynanométrique et de la force, de la goniométrique mobilité, et de la douleur 6¼ surtout les 6 premiers mois 24 Gêne principale : Questionnaire sur 87,5 la qualité de vie, rigidité axillodorsale EVA pour la douleur surtout les 2 à 4 premiers mois chez 68 et 66 % des patientes du groupe A et B 24 14 % ont des douleurs chroniques avec une EVA à 3

Pour citer cet article : Ismaïl M, et al. Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés — Revue de la littérature. Ann Chir Plast Esthet (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.05.002

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Tableau 2 Synthèse de la revue de littérature portant sur les séquelles du prélèvement partiel du lambeau de grand dorsal et du lambeau perforant thoracodorsal. Auteur, journal et titre

Type d’étude

Nombre de patients

Saint Cyr et al. [4]

Rétrospective Comparé à l’épaule controlatéral

20

Mojallal et al. [3]

Rétrospective

Tan et al. [17]

Hamdi et al. [18]

Libre

Pédiculé

Méthode de mesure

Suivi (mois)

Conclusion

0

20

Questionnaire BTE : évaluation isométrique et isotonique

17

15

0

15

Évaluation clinique



Prospective Comparé à l’épaule controlatérale

14

12

2

Évaluation clinique EMG : temps de latence et potentiel d’action du grand dorsal

12,3 (6—22)

Prospective Comparé à l’épaule controlatérale

22

0

22

Microfet 2 (force) Goniomètre (mobilité) — Ultrason (épaisseur à 6, 8 et 10 cm du creux axillaire)

19,4

Pas de 6¼ significative de la force et de l’amplitude de l’épaule Tous les patients ont retrouvé leur travail Cicatrice estimée satisfaisantes par les médecins Pas de séquelles fonctionnelles ni esthétiques Patientes satisfaites Adduction et extension identique 6¼ du temps de latence non significative ( p = 0,07) Pas de 6¼ significative du potentiel d’action ( p = 0,26) Pas de 6¼ significative pour : force musculaire mobilité épaisseur

Enfin Lutringer et al. [16] évaluaient par un questionnaire téléphonique sur une série de 75 patientes, le retentissement sur les activités sportives, sur la vie quotidienne et professionnelle, dans les suites de leur reconstruction. Quarante-trois pour cent des patientes présentaient une réduction de leurs activités sollicitant le membre supérieur, 83 % des patientes étaient gênées pour une des activités de la vie quotidienne étudiées.

Séquelles du prélèvement du MSLD et du TAPflap Les études retrouvées présentaient des critères d’évaluation objectifs et ne présentaient pas de discordance dans leurs résultats (Tableau 2). Les mesures objectives étaient faites par le BTE, par dynamomètre, par goniomètre, par électromyogramme ou par ultrason. Saint Cyr et al. [4] ne retrouvaient pas de modification de la force ni de l’amplitude de l’épaule et constataient une reprise de l’activité professionnelle antérieure à la chirurgie pour toutes les patientes. Mojallal et al. [3] constataient, par cette technique, des patientes satisfaites de leurs reconstructions mammaires et aucune séquelle n’était retrouvée. Tan et al. [17] montraient que l’amplitude et les potentiels d’actions mesurés au niveau du site de prélèvement par rapport au côté controlatéral ne présentaient pas de différence significative.

Hamdi et al. [18] montraient que la force musculaire n’était pas modifiée par rapport au côté controlatéral ainsi que les mouvements de l’épaule et l’épaisseur du muscle grand dorsal, après le prélèvement d’un lambeau perforant de l’artère thoracodorsale (TAP-flap).

Discussion La compréhension des séquelles repose avant toute chose sur la connaissance des différentes techniques de prélèvement du lambeau de grand dorsal ou équivalent. Le Tableau 3 synthétise ces différences techniques [4,19—21]. Les études portant sur les séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal, malgré son utilisation courante, sont pauvres aussi bien par leurs limites méthodologiques (type d’évaluation, description des techniques utilisées), que par l’homogénéité des groupes d’échantillonnage. De plus, les méthodes d’évaluation apparaissent subjectives pour la plupart [6,7,12,13,19], le type de technique (classique ou étendue) n’est pas toujours précisé [12,13], les critères d’inclusion des groupes rendent difficile l’interprétation des résultats. En effet, il persiste de nombreux facteurs de confusion notamment dans les études portant sur la reconstruction mammaire. Dans ce sens, les patientes ayant eu un curage axillaire extensif ou par ganglion sentinelle ne sont pas évaluées dans un groupe à part entière [12,13,16], engendrant ainsi un facteur de confusion sur la mobilité de l’épaule.

Pour citer cet article : Ismaïl M, et al. Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés — Revue de la littérature. Ann Chir Plast Esthet (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.05.002

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M. Ismaïl et al. Tableau 3

Synthèse des différences techniques de prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés.

LD classique flap [1,2,19]

LD extended flap [20]

MSLD flap [4]

TAP flap [21]

Point de pénétration du pédicule dans le muscle : 1 travers de main sous le creux axillaire et 2 cm en arrière du bord antérieur du muscle Séparation du grand dorsal et du grand dentelé Section en bas des insertions du grand dorsal sur les 4 dernières côtes Dissection en remontant le long du pédicule la section musculaire est possible jusqu’au tendon

Incision de la palette cutanée jusqu’au fascia superficialis La dissection suit la face profonde du fascia superficialis en laissant la graisse profonde (zone 2) contre le muscle Limite supérieure du décollement : l’épine scapulaire Limite interne du décollement : muscle trapèze L’ensemble du tissu adipeux situé entre ces 2 limites : (zone 3) Limite inférieure du décollement : stéatoméries sus-iliaques (zone 5) En avant du bord antérieur du LD se situe la zone adipeuse 4 Le LD est séparé en profondeur du muscle grand dentelé, en emportant la graisse profonde (zone 6)

Vascularisation : branche descendante du pédicule thoracodorsal La face superficielle du muscle est exposée dans la partie proximale du lambeau Dissection de la face profonde du muscle sur son bord antérieur pour contrôler la branche descendante par une vue profonde Section du muscle sur la largeur pour obtenir une bandelette mesurant 3 à 4 cm contenant la branche descendante du pédicule (Fig. 1) Dissection de distal en proximal Dissection jusqu’à la bifurcation de l’artère thoracodorsale afin de préserver la branche transversale et le nerf correspondant : (point pivot du lambeau)

Vascularisation : perforante principale issue de la branche descendante : 8 cm sous le point axillaire postérieur et 2 cm en dedans du bord latéral du LD L’incision au bord antéroinférieur du tracé afin d’identifier le bord antérieur du muscle grand dorsal et la perforante Avec le repérage doppler de la perforante, toute la palette cutanée est incisée d’emblée Décollement de dorsal en ventral jusqu’à rencontrer la perforante préalablement repérée, en sus- ou sous-facial La perforante est isolée dans son trajet intramusculaire en disséquant le muscle dans le sens des fibres, respectant ainsi son intégrité La dissection du pédicule thoracodorsal est débutée sur la longueur souhaitée

Par ailleurs, certains auteurs omettent de préciser si une rééducation postopératoire a été faite, privant ainsi de conclure à un effet positif ou négatif dans cette indication. Le recul de toutes ces études est variable ainsi que le délai postopératoire, notamment sur la douleur. La fiabilité et l’exactitude des réponses restent donc incertaines, du fait d’un recueil rétrospectif des données et d’une fenêtre temporelle plus ou moins importante. En outre, la dominance du membre a été peu prise en considération ; celle-ci pouvant avoir un rôle dans la rééducation et la sollicitation d’autres muscles synergiques. De plus, ces études n’ont pas eu recours à des tests utilisés fréquemment en orthopédie, validés et pertinents pour l’évaluation de l’épaule comme le score fonctionnel de Constant [22] (Annexe 1), qui prend en compte à la fois des éléments de réponse subjectifs, la dominance, le sexe mais aussi des données objectives comme des mesures goniométriques et dynamométriques. Concernant les études portant sur le MSLD et le TAP-flap, toutes vont dans le sens d’une absence de séquelle fonctionnelle. La fonction du muscle grand dorsal est préservée. Il s’agit d’études avec des critères d’inclusions bien définis mais surtout avec des tests objectifs comme le BTE pour Saint Cyr et al. [4], l’électromyogramme pour Tan et al. [17], Microfet 2 et ultrason pour Hamdi et al. [18]. Ainsi, afin d’avoir des études pertinentes, il semble intéressant de prendre en compte dans l’évaluation, des facteurs tels que l’âge, le suivi, la chirurgie axillaire, la

dominance, le niveau de sportivité ou l’irradiation afin de cibler les indications et réduire les facteurs de confusion. Même si de nombreuses patientes pourraient accepter les conséquences fonctionnelles du sacrifice du muscle grand dorsal, l’information de l’existence d’autres techniques épargnant le muscle dans les reconstructions semble indispensable.

Conclusion Le prélèvement du muscle expose à des douleurs et des séquelles fonctionnelles mais qui s’amenuisent et tendent à disparaître dans le temps grâce notamment à une réadaptation par sollicitation d’autres groupes musculaires. De plus, le prélèvement partiel du muscle (MSLD) ou la préservation du muscle (TAP-flap) montre une diminution des séquelles fonctionnelles du site donneur. En effet, sa fonction est préservée, cette constatation est étayée par des tests objectifs, fiables et reproductibles. Des études complémentaires bien ciblées et bien conduites pourraient permettre une meilleure connaissance de ses inconvénients, afin d’obtenir une sélection rigoureuse des patients pour chaque type de technique de grand dorsal.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Pour citer cet article : Ismaïl M, et al. Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés — Revue de la littérature. Ann Chir Plast Esthet (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.05.002

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Annexe 1. Matériel complémentaire Le matériel complémentaire accompagnant la version en ligne de cet article est disponible sur http://www.sciencedirect.com et doi:10.1016/j.anplas.2014.05.002.

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Pour citer cet article : Ismaïl M, et al. Séquelles du prélèvement du lambeau de grand dorsal et ses dérivés — Revue de la littérature. Ann Chir Plast Esthet (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.05.002