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Ddficit hdrdditaire en inhibiteur de la CI estdrase
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D6ficit h6reditaire en inhibiteur de la C1 esterase Lupus et glom6rulonephrite par B. HORY*, J. PANOUSE-PERRIN**, Y. SAINT-HILLIER* et C. PI~ROL*
Le d6ficit h6r6ditaire en inhibiteur de la C1 esterase (C1 INH) se manifeste le plus souvent par la survenue d'ced~mes des membres, de l'abdomen, de la glotte, clans ce cas parfois morel, d'ou sa denomination clinique d'm..deme angioneurotique. L'association de ce type de deficit avec un lupus 6ryth6mateux diss6mine a 6te d6crite clans 4 cas, avec un lupus disco'/de clans 4 cas. Chez tous ces malades, la recherche d'anticorps antinucleaires 6tait positive, mais l'atteinte r6nale n'est document6e que deux lois (une glom6rulon6phrite proliferative diffuse et une glom6rulon6phrite focale). L'association de deficit en C1 INH et de glom6rulon6phrite membrano-prolif6rative n'est rapportge que dans 2 observations (une glomerulon6phrite lobulaire et une glom6rulon6phrite de type dep6ts denses dans les basales). Notre observation associe un d6ficit en C1 INH et une glom6rulon6phrite prolif6rative lupique, en l'absence d'autre signe clinique et immunologique de LED. kes 16sions renales n'ont pas et6 recherch6es dans 9 cas d'association entre deficit en CI INH et pr6sence d'un auto-anticorps clivant le C3 (C3 NEF). Un determinisme g6n~tique c o m m u n /~ l'origine de ces associations semble 6tre exclu. L'aptitude des malades atteints de d6ficit en CI INH /~ synth6tiser des auto-anticorps sous l'influence de facteurs infectieux par exemple pourrait expliquer la plus grande pr6valence du lupus et des glom&ulopathies chez ces malades.
Mots clds : complement, lupus 6ryth6mateux~dis~mine, glom6rulon6phrite.
Le deficit h6reditaire en inhibiteur de la C1 est6rase (C1 INH) est le plus frequent des deficits h6r6ditaires en facteurs du complement. Sa frequence est estimee a 1 p. 1 000. Le plus souvent, il est r6v616 par des manifestations eedemateuses, de la glotte en particulier, qui en font toute la gravit6 et qui Font fait qualifier d'oed~me angioneurotique h6reditaire (OAH). Plus rarement, il est associe, comme d'ailleurs les autres d6ficits h6reditaires en compl6ment d'autres manifestations, en particulier au lupus (LE) e t a des glom6rulon6phrites (GN) lupiques ou non. Ces associations, comme celles des autres deficits en compl6ment, posent le probleme du r61e du deficit compl6mentaire dans ce type d'affection. Le but de ce * Service de n~phrologie (Pr Pdrol), CHU, place Saint-Jacques, 25000 Besan¢on. ** Centre de transfusion sanguine (Pr Peters), CHU, place SaOltJacques, 25000 Besan¢on.
travail est d'analyser les observations actuellement publi6es d'associations entre lupus et d6ficit en C I INH ainsi que les observations d'associations entre glomerulon6phrites non lupiques et deficit en C1 INH.
I. LE DI~FICIT HI~RI~DITAIRE EN INHIBITEUR DE LA C1 ESTI~RASE 1. Manifestations cliniques. D6crit en 1888 par William Osier, l'oed6me angioneurotique h6r6ditaire est une affection transraise sur le mode autosomique dominant, caracteris6e par un d6ficit en inhibiteur de la C1 est6rase, qui se manifeste le plus souvent par la survenue d'crxlemes
La R e v u e de Mddecine interne, tome IV, n ° 1, mars 1983, pp. 57 ~t 63.
Re~u le : 5-11-1981. Renvoi pour correction le: 16:4-1982. Acceptation d6finitive le : 20-11-1982.
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des membres, des s6reuses et de la face, parfois mortels (7, 14). C'est une maladie rare mais non exceptionnelle (environ 1500 cas decrits en 1977) (27). Les deux sexes sont touch6s, le d6but des manifestations cliniques se faisant en regle g6n6rale clans l'enfance ou dans l'adolescence. I1 n'a pas 6te mis en 6vidence de relations avec le systeme HLA. Malgre la transmisson autosomique dominante, environ 18 p. 100 seulement des sujets d'une famille sont atteints. La gravit6 de la maladie est variable d'une famille h l'autre et d'un individu a l'autre dans ta m6me famille. Les oed6mes cutan6s sont non inflarnmatoires, tum6factions hypodermiques dures, peu ou pas douloureuses, sans prurit, parfois accompagn6es de rash ou d'6ryth6me margine (32). Ils si~gent aux extr6mit6s distales des membres, a la face, aux paupi&es, aux 16vres, aux organes genitaux. Ils sont le plus souvent declench6s par un traumatisme physique ou psychique. Les cedemes muqueux y sont parfois associes mais sont souvent isol6s (19). Ils touchent le tractus digestif et les voles a6riennes sup6rieures. L'atteinte des muqueuses digestives se manifeste par des douleurs abdominales r6currentes, atypiques, par une diarrh6e ou parfois par un syndrome pseudo-chirurgical. L'cedeme de la glotte, mortel dans 25 a 40 p. 100 des cas, peut 6tre spontane ou d6clench6 par une avulsion dentaire.
2. Caracterisation du deficit en inhibiteur de la C1 esterase. Le diagnostic biologique de I'OAH repose sur le dosage des fractions C4 et C2 du complement, sur les epreuves fonctionnelles in vitro et sur le dosage de l'inhibiteur (Cl INH) (7). Parmi les 6preuves fonctionnelles in vitro, le test le plus simple est celui de Fong et coll. qui consiste a diluer le s&um dans un tampon de faible force ionique e t a etudier la stabilit6 de l'activite hemolytique apr6s 10 a 20 rain d'incubation a 37° (7). Alors que l'activit6 hemolytique d'un s&um normal reste stable, celle d'un sujet deficient en C1 INH diminue ou disparait compi6tement. La confirmation du deficit est apportee par le dosage immunochimique, hemolytique ou enzymatique du C1 INH. Deux formes biochimiques de deficit h6r6ditaire en C1 INH ont 6t6 d6crites ; clans 85 p. 100 des cas, il s'agit d'un d6ficit quantitatif alors que dans 15 p. 100 des cas la maladie est due a la pr6sence d'une prot6ine qualitativement anormale (7, 11). Dans les d6ficits quantitatifs, le taux de l'enzyme est effondre au dosage immunochimique tandis que dans le d6ficit qualitatif, le taux de C1 INH est normal ou 61ev6 et le diagnostic est affirm6 par les dosages enzymatiques ou hemolytiques. La pathogenie du declenchement des crises lots d'un traumatisme fait appel au systeme de la coagulation. En effet, le facteur Hageman, par le biais de la plasmine, activerait la C1 est6rase qui clive C4 et C2 en entrainant la formation de polypeptides
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vasodilatateurs responsables des oedemes (30, 31). La survenue des crises en dehors d'un traumatisme et l'arr6t spontan6 des crises sont mal compris. I1 faut enfin signaler qu'a c6te de l'ced6me angioneurotique h6r6ditaire existent des oed~mes angioneurotiques acquis, secondaires a un LED ou a une h6mopathie lymphoide (10).
3. Traitement. Le traitement de I'OAH comprend deux aspects: prophylaxie des crises et traitement des acc6s. La prophylaxie des crises fait appel aux inhibiteurs de la plasminoformation: acide epsilon amino caproique avec ses risques de thrombose, acide tranexamique mieux toler6, androg6nes et particulierement le danazol qui provoque une augmentation de la synth6se de l'inhibiteur et supprime les crises d'oed~me(9). Le traitement des crises comprend l'intubation ou la trach6otomie pour l'oed6me de la glotte, l'injection intramusculaire de xylocaine et les perfusions de plasma frais ou d'inhibiteur concentre (8).
II. ASSOCIATIONS ENTRE LUPUS, SYNDROMES LUPIQUES ET DI~FICIT HCRI~DITAIRE EN C1 INH Donaldson et coll. (6) decrivent les observations de 3 femmes non apparent6es porteuses d'un d6ficit en C1 INH et d'un lupus. Chez la premi6re, le diagnostic d'OAH est fait a l'~tge de 23 ans, et deux ans plus tard elle developpe un vespertilio. Les anticorps antinucl6aires initialement negatifs se positivent plus tard. Sa mere et son fr6re sont atteints d'OAH. Chez la deuxi~me, atteinte d'un deficit fonctionnel en CI INH, apparaissent un LE discoide puis des anticorps antinucl6aires. Son fds est aussi atteint d'OAH. La troisieme presente elle aussi un LE disco'/de et des anticorps antinucl6aires, 3 membres de sa famille sont porteurs du d6ficit en CI INH sans anticorps antinucleaires. Rosenfeld et coll. (25) rapportent l'histoire d'une jeune fille atteinte d'OAH qui d6veloppe h l'gtge de 14 ans un LED t~ classique ~ sur le plan clinique et immunologique. Les anticorps anti-DNA (recherches par le test de Farr) sont initialement n6gatifs, puis se positivent. La biopsie renale montre une glom6rulon6phrite prolif6rative diffuse. Les taux des facteurs du compl6ment 6voluent en trois phases: une premiere phase d'OAH seul off le C4 est it moins de 7 p. 100 de la normale, mais ou le C3 est normal ; une deuxieme phase (LED actif) ou le C3 baisse 50 p. 100 de la normale et le C4 reste bas; une troisi~me phase (LED trait6 par prednisone et azathioprine) ou le C3 se normalise et le C4
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augmente a 50 p. 100 de la normale. Le traitement f a r d'ailleurs disparaitre les manifestations crxl6mareuses. Ceci pose le probleme du caractere acquis du deficit. Kohler et coll. 0 6 ) rapportent le cas de 2 j u m e a u x monozygotes atteints de LED et d'OAH. Leur m6re presentait un LED depuis l'~ge de l0 ans avec s6rologie syphilitique positive, mais recherches de cellules LE n6gatives. Les premieres manifestations de I'OAH commencent chez elle h 20 ans, le taux de C1 INH 6tant bas. Elle met au monde 2 j u m e a u x monozygotes /i l'~ge de 22 ans puis pr6sente des crises d'epilepsie g6n~ralis6e et une h6miplegie gauche ~ l'~ge de 25 ans avant de d6c6der a 29 ans dans un tableau d'insuffisance cardiaque et d'une coronarite inflammatoire. Ses deux enfants presentent a l'~ge de 5 et 8 ans un lupus discoide et des manifestations cutan6es et digestives d'OAH. La recherche d'anticorps antinucleaires et d'anticorps a n t i - D N A est positive et la biopsie de peau en immunofluorescence montre des d6p6ts d'IgG /~ la jonction dermo-epidermique, en peau saine c o m m e en peau expos6e. Le complement total de m6me que les fractions C4 et C1 INH sont abaisses chez les j u m e a u x alors qu'ils sont n o r m a u x chez leur pete, mais aussi chez les grands-parents maternels. Les taux de C1 et C3 sont n o r m a u x chez t o u s l e s membres de la famille. L'6tude du metabolisme du C4 chez les j u m e a u x met en 6vidence son abaissement par consommation et defaut de synth~se.
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Young et coll. (34) decrivent l'histoire d'un patient de 43 ans qui presentait des pouss6es d'ced6me de la glotte depuis l'fige de 6 ans, rapportees en septembre 1975 h u n deficit h6reditaire en C l INH. Lots de la decouverte de la tare compl6mentaire, la recherche d'anticorps antinucl6aires homogenes est positive, un taux qui n'est pas pr6cis6, et le patient est traite par acide tranexamique et corticotherapie lors des pouss6es d'ced6mes. Six mois apr6s la decouverte de I'OAH, il pr6sente un s y n d r o m e n6phrotique i m p u r avec insuffisance renale. La biopsie renale montre en optique des 16sions prolif6ratives focales avec hyalinose et fibrose p6riglom6rulaire, un infiltrat interstitiel et une atrophie tubulaire alors qu'en immunofluorescence existent des d6p6ts granuleux d'IgG, d'IgM et de C3. Malgre la raise en route d'une corticoth6rapie continue, le patient presente des arthralgies et une leucop6nie. Un essai de traitement par cyclophosphamide est un 6chec et la remission n'est obtenue que par l'utilisation de plasmaph6reses. Ainsi, l'association lupus ou syndrome lupique et deficit en C1 INH ne parait pas fortuite et Donaldson et coll. (6) estiment a 2 p. 100 le risque de survenue d'un LED clans l'oedeme angioneurotique hereditaire alors que le risque est de 4 a 15/100 000 clans la population gen6rale. Plus g6n6ralement, la survenue d'un syndrome lupique chez les sujets her6ditairement d6ficients en C l r , C l s , C4, C2, C3, C5, C8 est possible (1, 12). Pour certains, les lupus associes aux d6ficits h6r6ditaires en compl6ment presentent les
TABLEAU I OA HI~RC:DITA1RE. ASSOCIATIONSMORBIDES
AUTEURS
PATHOLOGIEASSOCIFJ~A L'OAH
NI~PHROPATHIE
C 3 NEF
HLA
ANTICORPS ANTINUCL~dRES REF.
Kohler
LED (3 obs.) dont 2 jumeaux homozygotes
-
NE
NE
+
15
Peters
-
GNMP type II
+
NE
NE
19
Pickering
-
GNMP
NE
NE
NE
20
Donaldson
LED (3 obs.)
-
NE
NE
+ secondaire
5
Rosenfeld
LED (1 obs.)
G. Proliferation diffuse
NE
NE
+
23
Seignalet
Deficit selectif en IGA (lobs.)
-
-
24
Peters
Lipodystrophie partieUe
-
NE
NE
-
19
Franck
Scl6rodermie
-
NE
NE
-
6
Young
LED (1 obs.)
G. prolif6ration diffuse
NE
NE
+
32
+ (9 obs.) pas de relation
NE : non 6tudi6 ; GNMP : glom6rulon6phrite membrano-proliferative ; L E D : lupus erythemateux dissemine. GNMP type II : glom6rulonephrite membrano-prolif6rative de type ~ dep6ts denses clans les basales ~.
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B. Hory et coll.
particularites suivantes (1, 4) : frequence de l'atteinte cutanee, possible n6gativit6 des anticorps antinucl6air e s e t des anticorps anti-DNA, raret6 de l'atteinte r6nale, fr6quente n6gativit6 de la recherche d'immunoglobulines et de complement dans la peau par immunofluorescence. Ainsi, dans les d6ficits homozygores en C2 avec LED, les anticorps antinucl6aires sont positifs dans 89 p. 100 des cas. Les anticorps anti-DNA, consid6r6s comme les stigmates les plus fiables du lupus, ne sont positifs que dans 37 p. 100 des cas seulement. L'atteinte r6nale n'est retrouv6e que darts 22 p. 100 des cas, un lupus disco'/de s'associe dans 33 p. 100 des cas et l'immunofluorescence n'est positive que dans 29 p. 100 des cas o/t elle est 6tudi6e. Dans les lupus discoides, les anticorps antinucl6aires sont positifs dans 50 p. 100 des cas et les anticorps anti-DNA sont toujours n6gatifs. Enfin, l'immunofluorescence ne d6c~le de d6p6ts d'immunoglobulines et de compl6ment que darts 1 cas et il n'y a jamais d'atteinte r6nale(1). D'autres auteurs(2) insistent sur l'absence de physionomie particuli~re des maladies lupiques survenant chez les sujets ayant un d6ficit homozygote en C2 et sur la frequence des infections bact6riennes graves ou r6pet6es. Comme le montre le tableau I, les anticorps antinucl6aires sont constants clans les LED associ6s au d6ficit en C1 INH. Une n6phropathie associ6e au LED n'est retrouvee que dans 2 cas sur 8, soit 25 p. 100, mais elle n'est pas recherchb,e syst6matiquement.
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associ6 aux nbphropathies de type ~( dep6ts denses dans les basales~. Ces n6phropathies sont tr6s souvent latentes (28). La biopsie r6nale n'est realis6e chez aucun des patients de Seignalet et l'association d'une telle n6phropathie associ6e au d6ficit en C1 INH ne peut &re que suspectee. Recemment, nous avons pu decrire la survenue d'une gtom6rulon6phrite (GN) a immuns complexes circulants (ICC) chez un jeune homme de 17 ans deficient en C1 INH (l 3). La biopsie de rein montrait en microscopie optique (fig. 1): une proliferation endocapillaire et m6sangiale irreguliere avec presence de d6bris nucl6aires et de dep6ts endomenbraneux (wire loop) et en immunofluorescence une proliferation mesangiale avec des d6p6ts endo et intramembraneux. Le complement total etait bas de m6me que les fractions C l q et C1 INtt. La recherche de C3 NEF etait negative de m6me que les recherches d'anticorps anti-DNA (par test de Farg) et de cellules LE. L'aspect de la biopsie de peau en immunofluorescence 6tait normal. La recherche d'immuns complexes circulants par la technique de Grangeot 6tait positive a un titre faible (serum non dilue). L'enqu6te g6n6tique permettait de retrouver 6 autres membres
III. ASSOCIATIONS GLOMI~RULONI~PHRITES DI=FICIT HI~RI~DITAIRE EN C1 INH Peters et coll. (21) signalent, dans un addendum/l leur article sur les n6phropathies associ6es aux lipodystr6phies avec hypocompl6mentemie, l'existence chez un patient atteint d'OAH d'une GN de type d6p6ts denses clans les basales. Pickering et coll. (22) decrivent l'histoire d'une fillette de 10 arts atteinte d'OAH qui pr6sente une hematurie associee /l une proteinurie. Elle est suivie pendant 7 ans, sans d6t6rioration des fonctions r6nales, et subit successivement quatre biopsies r6nales /t 11, 13, 16 et 17 arts. La premi6re met en 6vidence une proliferation mesangiale avec lobulation, un 6paississement de la membrane basale et un infiltrat interstitiel de cellules rondes (GN membranoproliferative lobulaire). Les biopsies suivantes montrent une 6volution vers la hyalinose et une diminution de la prolif&ation cellulaire. L'immunofluorescence r6v61e la presence de d6p6ts membranaires d'IgG et de b6ta 1c a topographie lobulaire. Le compl6ment s6rique total est tr~s bas de m6me que le C2, le C4 et le C1 INH tandis que le C3 est normal. Seignalet et coll. (26, 27) rapportent une famille comprenant 9 sujets atteints a la fois de d6ficit en C I INH et porteurs d'un auto-anticorps activant la voie alterne du compl6ment (C3 NEF) (18), souvent
Fig. 1 Biopsie de rein d'un patient atteint de nephropathie lupique et d'un deficit h6r6ditaire en C1 INH. Microscopie optique HES × 640 : presence de wire loop.
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~
~122%
5 6 7 87% 87%
5 t 6mois
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8 9#%
7
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8 tlSmok
.9 3~-%
10 130%
9 10 11 12 13 lff 15 16 17 92% 8,7% <5% 9~-%10~Y~2~-% 77Y.70%
OlI
1
Fig. 2 Arbre genealogique d'une famille atteinte d'OAH.
vivants atteints du d6ficit dont 2 atteints de diabete et 1 pr6sentant une proteinurie (fig. 2). Chez 3 de ces 6 patients (dont Fun fig6 de 83 ans), le deficit en CI INH n'avait jamais entrain~ de manifestations oedemateuses.
IV. HYPOTHI~SES PATHOGI~NIQUES SUR L'ASSOCIATION ENTRE LUPUS, GLOMI~RULOPATHIES ET DI~FICIT HC:RI~DITAIREEN C1 INH La survenue de lupus familiaux chez les sujets hereditairement d6ficients en complement peut paraitre paradoxale. En effet, ces sujets sont incapables d'activer correctement leur compl6ment (d'ol) la frequence des infections); or on connait le r61e du complement dans les mecanismes inflammatoires qui preludent aux lesions tissulaires du LED. Pourtant, la bonne connaissance des facteurs etiopathog6niques du LED (3, 5) permet de soulever deux hypotheses (17) : Le d6ficit h6reditaire en complement faciliterait la survenue d'infections virales qui jouent probablement un r61e dans le lupus. I1 y aurait transmission simultanee de la tare d'activation de la chaine du compl6ment et d'un gene favorisant le LED. L'hypoth6se de la transmission simultan6e de la tare d'activafion de la chaine du complement et d'un g6ne favorisant le LED est tr6s plausible pour les deficits en C2 lids au HLA DRw2, groupe favorisant le LED (5). Elle explique la -
-
survenue de plusieurs cas de LED familiaux. Par contre, dans le deficit en C1 INH cette hypothese est peu probable, puisque, en dehors du cas de Kolaler et coll. (16), les patients atteints de LE ne sont pas apparentes. Le caractere acquis du d~ficit en C1 INH n'est d'ailleurs pas exclu darts cette observation. La susceptibilit6 aux infections virales serait alors l'un des facteurs favorisants du LED dans les d6ficits en CI INH. ke r61e initiateur des virus dans le diab6te de type II est souligne par Rayfield (24) et Smith (29), et l'existence d'un tel diab6te chez 1 de nos patients atteint du deficit en C1 INH est peut-~tre un argument en faveur de cette hypothese. L'impossibilite d'activer normalement le complement expliquerait alors le caractere degrade des lupus associes aux deficits en C2, alors que clans les deficits en C1 INH l'activation plus compl6te (puisqu'il ne manque qu'un inactivateur) conf6rerait un caract6re plus typique au lupus. ka responsabilit~ des immuns complexes est gen6ralement admise clans la genese des glomerulon6phrites membrano-proliferatives lobulaires et la presence d'IgG au niveau du rein a ete document6e dans un cas d'association de ce type(22). La plus grande susceptibilit6 aux infections des sujets deficients en C1 INH pourrait peut-6tre expliquer la survenue de ce type de nephropathie. On sait, en effet, qu'en l'absence de complement on observe un d&aut de l'inhibition de l'immune adherence des immuns complexes sur les lymphocytes B et une accumulation de ces immuns complexes/~ la surface des membranes de ces cellules. De plus, la production d'anticorps est modul6e par les modifications membranaires dues /~ la fixation des immuns complexes a la surface des lymphocytes B (20).
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B. Hory el coll.
Bien qu'un seul cas de GN type d6p6ts denses dans les basales soit rapporte, une association fortuite peut 6tre exclue puisque 10 patients deficitaires en C1 INH sont porteurs d'un C3 NEF: auto-anticorps souvent associe / t c e type de nephropathie. Le r61e determinant des dep6ts d'immuns complexes circulants produits en exces par les sujets deficients en C I INH ne peut 6tre affirm& En effet, classiquement, les GN de type dep6ts denses dans les basales ne s'accompagnent pas de dep6ts d'IgG, et l'absence de documentation dans l'observation de Peters et coll. (21) ne permet pas d'infirmer cette donnee classique. La n6phrotoxicite du C3 NEF n'est pas non plus demontr6e puisqu'il n'est associe qu'une fois sur deux une nephropathie (5). La frequence du C3 NEF (6/ 1000) chez les sujets deficients en CI INH peut s'expliquer comme pour le lupus par leur plus grande aptitude a synth6tiser des auto-anticorps sous l'infhience de facteurs exog6nes (infectieux ou autres). Les auto-anticorps produits pourraient 6tre soit de type anticorps antinucleaires, soit de type C3 NEF.
V. CONCLUSION L'association d6ficit her6ditaire en inhibiteur de la C1 est6rase et sYndrome lupique ou glom6rulon6phrite permet d'illustrer les donnees classiques concernant le r61e du compl6ment dans la clairance des immuns complexes. Le d6ficit compl6mentaire permettrait la fixation prolongee des immuns complexes sur les lymphocytes B, les immuns complexes fixes fi la surface des cellules B 6tant peut6tre eux-m6mes capables de moduler la synth6se des anticorps clans le sens d'une hyperproduction d'autoanticorps type anticorps anti-DNA ou ~ anticorps n6phritique ~ (C3 NEF).
SUMMARY Congenital deficit of the inhibitor of C1 esterase (C1 INH) usually presents by oedema of the lower limbs, abdomen and glottis (sometimes lethal), which explains its clinical denomination of angioneurotic oedema. The association of this condition with disseminated lupus erythematosis has been reported in 4 cases and with discoid lupus in 4 cases. Antinuclear factors were found in all these cases but there were only two documented cases of nephropathy (one diffuse proliferative glomerulonephritis arts one local glomerulonephritis). The association of a deficit of C1 INH and membrano-proliferative glomerulonephritis has only been reported in 2 cases (one lobular glomerulonephritis and one glomerulonephritis with dense basal membrane deposits). Our case had C1 INH deficiency and proliferative lupic
La Revue de M(decine interne Mars 1983
glomerulonephritis in the absence of other clinical and immunological signs of DLE. Nephropathy was not looked for in 9 cases of association of C1 INH deficiency and C3-shearing autoantibody (C3 NEF). A common genetic mechanism for these associations seems very improbable. The aptitude of patients with C1 INH deficiency to synthesise autoantibodies under the influence of infections factors, for example, could explain the higher incidence of lupus and glomerulopathies in these patients.
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