Diagnostic et thérapie des pathologies thyroïdiennes en médecine nucléaire

Diagnostic et thérapie des pathologies thyroïdiennes en médecine nucléaire

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Actualités pharmaceutiques hospitalières • n° 19 • Août 2009

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Diagnostic et thérapie des pathologies thyroïdiennes en médecine nucléaire Iode 123, iode 131, et technétium 99m, le recours aux radio-isotopes est fréquent pour le diagnostic et le traitement des pathologies thyroïdiennes. Pour comprendre les indications de ces médicaments radiopharmaceutiques en fonction de la pathologie, il est important de bien connaître les propriétés des différents radioéléments utilisés, mais aussi l’anatomie et la physiologie de la thyroïde.

Après administration au patient, le plus souvent par voie intraveineuse, les MRP vont se distribuer dans l’organisme du sujet en se fixant préférentiellement sur un organe ou un tissu à étudier en fonction du tropisme du MRP. Le MRP est soit un radionucléide seul (123I, 201Tl…), soit une molécule plus complexe comprenant un radionucléide. • En diagnostic, les radionucléides utilisés sont des émetteurs de rayonnements à fort pouvoir pénétrant, comme les rayonnements J ou, indirectement, E+ (annihilation du E+ par un électron de la matière et production de deux rayonnements J de 511 keV), et sont donc capables de traverser l’organisme du patient (figure 1). Ces rayonnements peuvent ainsi être détectés par une gamma-caméra permettant l’obtention d’une image reflet de la distribution du MRP, selon le fonctionnement de l’organe ciblé. La scintigraphie permet ainsi une imagerie fonctionnelle des organes. Elle est utilisée dans l’exploration de différents organes : la thyroïde, le squelette, le cœur, les reins… Les radionucléides utilisés en scintigraphie doivent irradier le moins possible le patient. Il s’agit donc généralement de radioéléments n’ayant pas d’émission corpusculaire (D, E-), c’est-à-dire des émetteurs J purs et présentant une période relativement courte, de quelques heures à quelques jours. Cependant, l’émission de rayonnements doit persister

L

es pathologies thyroïdiennes sont relativement fréquentes et représentent les principales pathologies endocriniennes. Deux pour cent des adultes sont touchés par ces pathologies, avec une prédominance chez les femmes. Leur diagnostic et leur traitement impliquent fortement des examens de médecine nucléaire, en particulier grâce à l’iode radioactif (123I et 131I) qui a été un des premiers radionucléides utilisé en médecine nucléaire.

Principe de la médecine nucléaire

Émission

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La médecine nucléaire est fondée sur l’utilisation de rayonnements ionisants, émis par des radioéléments artificiels en sources non scellées, qui sont administrés à un sujet à des fins diagnostiques (scintigraphie) et thérapeutiques (radiothérapie interne métabolique ou vectorisée). Les radioéléments artificiels utilisés sont considérés comme des médicaments appelés médicaments radiopharmaceutiques (MRP) et sont donc préparés à la pharmacie à usage intérieur, dans une unité de radiopharmacie.

suffisamment longtemps en fonction du phénomène étudié pour réaliser l’examen puis disparaître assez rapidement de l’organisme afin de ne pas continuer à irradier le patient. La disparition de la radioactivité résulte de la décroissance radioactive du radioélément (période physique) et de l’élimination biologique (demi-vie biologique) du MRP. Les principaux radioéléments utilisés en scintigraphie sont le technétium 99m, l’iode 123, l’indium 111 et le fluor 18. • En thérapie, les radioéléments utilisés sont, à l’inverse, des rayonnements peu pénétrants mais très irradiants, c’est-à-dire capables de déposer beaucoup d’énergie localement et donc d’induire un effet thérapeutique. Le rayonnement doit déposer le maximum d’énergie dans le volume tumoral ciblé par la molécule marquée. Actuellement, les radionucléides utilisés sont tous des émetteurs E-, comme l’iode 131, le samarium 153, l’yttrium 90... La période de ces radioéléments est variable, mais en général de quelques jours. La survenue de l’effet et sa durée seront fonction de cette période.

Radio-isotopes utilisés dans les pathologies thyroïdiennes L’iode rentrant dans la composition des hormones thyroïdiennes, l’iode radioactif, qui se comporte dans l’organisme exac-

Air

Tissu

Plomb

5-10 cm

1-5 mm

1-10 cm

Caractéristiques

D

Particule lourde et chargée

Faible pouvoir pénétrant Fortement ionisant

E

Particule légère et chargée (< 0)

Thérapie

E

Particule légère et chargée (> 0)

J

Photon sans charge ni masse

Fort pouvoir pénétrant Faiblement ionisant

Diagnostic • Figure 1. Parcours dans la matière des rayonnements D, E-, E+ et J.

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Rappels sur la glande thyroïde ANATOMIE La thyroïde est une glande endocrine en forme de papillon située à la partie antéro-inférieure du cou. De consistance ferme, de couleur rosée, elle pèse environ 20 g chez l’adulte et est formée de deux lobes réunis par un isthme. Le parenchyme thyroïdien est formé de lobules résultant eux-mêmes de la coalescence des follicules thyroïdiens véritables pièges à iode produisant les hormones thyroïdiennes. Les cellules thyroïdiennes (ou follicules ou thyréocytes) sont grossièrement sphériques, formées chacune d’une couche de cellules limitant une cavité centrale. Elles comprennent un pôle basal en contact avec la circulation sanguine et un pôle apical hérissé de microvillosités en contact avec le colloïde. Ces cellules sont jointes les unes aux autres par leur paroi latérale et forment une couronne dont la lumière, au pôle apical, contient une substance amorphe appelée colloïde. Lumière folliculaire Colloïde

Thyroglobuline Iode activé

Golgi + galactose

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Peroxydase

Endocytose Vésicules

Lysosome Digestion Reticulum Protéine + mannose

Hormones thyroïdiennes T4 - T3

Capillaire sanguin

• Figure 1. Synthèse et sécrétion des HT.

PHYSIOLOGIE La synthèse et la sécrétion des hormones thyroïdiennes (figure 1). • La captation et l’oxydation de l’iodure Après ingestion alimentaire, l’iode est rapidement absorbé en partie dans l’estomac et surtout dans l’intestin sous forme d’iodure. L’iodure I - est ensuite activement capté par les cellules thyroïdiennes au niveau de la membrane basolatérale par un transport actif : le symporteur Na/I

(NIS). Ce transport est un phénomène réversible et saturable. La clairance thyroïdienne de l’iodure est adaptative : elle permet une entrée stable d’iode, malgré les fluctuations de l’apport d’iode. D’autres atomes ou molécules peuvent aussi être captés grâce au NIS par les cellules thyroïdiennes, en compétition avec l’iodure, mais ils ne seront ensuite pas organifiés (donc non incorporés). Parmi eux, on peut citer le pertechnétate radioactif utilisé pour les scintigraphies thyroïdiennes, et le perchlorate non radioactif utilisé pour mettre en évidence un trouble de l’organification de l’iodure. L’iodure est oxydé très rapidement (en quelques dizaines de secondes) grâce à une enzyme spécifique de la thyroïde la thyroperoxydase (TPO). • La synthèse dans la thyroglobuline La cellule thyroïdienne possède une polarité apicobasale importante. La captation de l’iodure par transport actif se produit au niveau de la membrane basale, alors que l’organification de l’iodure se situe au niveau du pôle apical. Il y a donc un transfert de l’iode vers le pôle apical. L’organification se déroule au sein de la thyroglobuline qui est une protéine spécifique, riche en résidus tyrosine, synthétisée par la cellule thyroïdienne. C’est un composant essentiel de la colloïde folliculaire. L’iode est couplé avec des résidus tyrosine de la thyroglobuline permettant la formation de monoiodotyrosine (MIT) et diiodotyrosine (DIT). Le couplage des iodo-tyrosines MIT et DIT donne la triiodotyronine (T3) et de la tétraiodotyronine ou thyroxine (T4). Les hormones T3 et T4 sont stockées sous forme de thyroglobuline dans le colloïde. • La libération dans la circulation Pour que la sécrétion hormonale puisse survenir, il faut que la thyroglobuline contenue dans le colloïde soit réabsorbée par la cellule puis dégradée. La réabsorption des gouttelettes de colloïde se fait par endocytose et des protéases permettent le clivage rapide aux extrémités de la T3 et la T4. Quant aux MIT et aux DIT, ils sont désiodés (désiodase) et l’iode est recyclé. La désiodase permet également la transformation intrathyroïdienne de T4 en T3. La thyroïde libère ainsi dans le sang 125 μg de T4 par jour, ainsi qu’une faible quantité de T3 (80 % de la T3 circulante vient de la désiodation périphérique de la T4). • Le transport plasmatique Les HT circulent principalement sous une forme liée à des protéines de transport : la thyroxin binding globulin (TBG) pour la plus grande partie ; une préalbumine ou thyroxin binding prealbumin (TBPA) ; et l’albumine.

La régulation de l’hormonogenèse La libération des HT est placée sous le contrôle de l’hormone thyréotrope ou thyroid stimulating hormone (TSH) hypophysaire, qui agit par l’intermédiaire d’un récepteur membranaire spécifique. La TSH est une hormone glycoprotéique sécrétée par les cellules thyréotropes de l’antéhypophyse. Sa sécrétion est elle-même contrôlée par la thyréolibérine (TRH), neurohormone synthétisée au niveau de l’hypothalamus (figure 2). Cette régulation fonctionne en rétrocontrôle négatif, c’est-à-dire que les HT exercent sur l’hypophyse et sur l’hypothalamus Hypothalamus TRH un rétrocontrôle négatif permettant de maintenir les + concentrations circulantes Hypophyse TSH d’hormones dans des limites précises : un excès + d’hormones T3 et T4 va freiner Thyroïde T ,T la sécrétion centrale de TSH et TRH et vice versa. Transport Désiodation Outre la régulation centrale, T il existe un type de régulation Tissus unique à la glande thyroïde : périphériques Gènes cibles l’effet Wolff-Chaikoff. La • Figure 2. Contrôle thyroïde possède la capacité de la sécrétion des HT. de s’adapter aux surcharges iodées, en réduisant l’organification de l’iode. Cet effet Wolff-Chaikoff s’observe après 48 heures et protège l’organisme d’une synthèse hormonale excessive. Il est ordinairement transitoire, et en quelques jours survient un échappement qui normalise la production hormonale. 4

3

3

Action sur les cellules cibles L’entrée des HT dans les cellules cibles se fait probablement (mécanisme mal connu) par diffusion passive ou par un transport actif stéréospécifique. Les effets des HT sont dus à l’activation de récepteurs nucléaires spécifiques. Les HT accélèrent le métabolisme basal et interviennent dans la régulation de la température. Elles facilitent les effets du système nerveux sympathique et sont très importantes dans le métabolisme des lipides, glucides et protéines, en favorisant le catabolisme du glucose et en mobilisant les lipides, et sont essentielles à la production d’énergie pour la synthèse des protéines. Elles sont indispensables à la maturation du système nerveux central, à la croissance et à l’ossification du squelette, à la maturation pulmonaire.





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tement comme l’iode non radioactif, est un marqueur idéal de l’hormonogenèse thyroïdienne. Il est non seulement capté, mais aussi organifié par la cellule thyroïdienne. La fixation de l’iode sera proportionnelle au métabolisme du tissu thyroïdien (tableau 1). • L’iode 123 L’isotope de choix de l’iode pour faire de l’imagerie est l’iode 123. Il se désintègre par capture électronique en tellure 123. Cette transformation s’accompagne de l’émission d’un rayonnement J de 159 keV qui pourra être détecté. Sa période est de 13 heures, ce qui est intéressant pour favoriser la radioprotection du patient. Les inconvénients principaux de cet isotope sont son coût et sa disponibilité. En effet, il s’agit d’un produit de cyclotron : de l’iode 127 (non radioactif) est bombardé par des protons. Sa période brève ne permet pas un stockage prolongé. Il doit donc être utilisé le jour de la livraison et les commandes doivent être adaptées en fonction du planning de rendez-vous.

molybdène 99 sous la forme 99mMoO4- est déposé sur une colonne d’alumine. Par émission E-, il se désintègre en technétium 99m (métastable). Le technétium 99m, sous la forme 99mTcO4-, n’ayant pas d’affinité pour la colonne, va pouvoir être élué et récupéré en fonction des besoins. Le 99mTc décroît en technétium stable, avec une période de 6 heures, en émettant des rayonnements J (140 keV). De plus, le pertechnétate permet de diminuer l’irradiation du patient puisque sa période physique est plus courte que celle de l’iode 123.

• L’iode 131 Un autre radio-isotope de l’iode est également utilisé. Il s’agit de l’iode 131. Ce dernier est un émetteur mixte E- et J, il aura donc des indications en imagerie, mais surtout en thérapie. Sa période physique, de 8,02 jours, est plus longue que celle de l’iode 123. L’iode 131 est un radioélément beaucoup plus irradiant pour le patient et pour les manipulateurs. Il sera réservé à certaines indications. • Le technétium 99m La cellule thyroïdienne transporte de façon active non seulement l’iodure, stable ou radioactif, mais aussi d’autres atomes ou molécules comme le pertechnétate 99mTcO4-. L’ion pertechnétate est extrait du plasma par la thyroïde d’une manière analogue à celle de l’iodure, mais il n’est pas organifié. Il ne permet donc pas d’explorer l’hormonogenèse, mais seulement le transport actif. Le technétium 99m (99mTc) présente un certain nombre d’avantages pratiques majeurs par rapport à l’iode 123, notamment son coût et sa disponibilité. Le technétium 99m est l’élément fils du molybdène 99 : il est produit à partir d’un générateur de 99Mo/99mTc (figure 2). Du

Indications en thérapie et diagnostic Pour le traitement, le seul radio-isotope utilisable est l’iode 131. Différentes formes galéniques sont disponibles : solution buvable, injectable et gélules (tableau 2). L’activité administrée dépendra de l’indication : – hyperthyroïdies : maladie de Basedow, goitre multinodulaire toxique ou nodules autonomes. Les activités seront comprises entre 200 et 800 MBq ; – carcinome thyroïdien vésiculaire et/ou papillaire, y compris en cas de métastases

Eluant de NaCl à 0,9 %

Tableau 1 : Caractéristiques des radioéléments utilisés en médecine nucléaire pour les pathologies thyroïdiennes

Captation

Technétium 99m 99m Tc +

Iode 123 123 I +

Iode 131 I +

Organification

-

+

+

Période

6h

13 h

8j

Énergie J (keV)

140

159

364

Énergie moyenne E (keV)





190

Irradiation thyroïdienne (cGy/GBq)

0.5*10-4

0.5*10-2

0.5

Indications

Imagerie fonctionnelle générale Exploration d’anomalie d’organification

131

Mo

Colonne de verre

Générateur (réacteur nucléaire) Cyclotron

Cyclotron

Solution injectable

Gélule Solution buvable Solution injectable

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Production

Gélules

Avantages Inconvénients

Pharmacocinétique

Eluat de 99mTcO4-

Mettre en seringue dans une hotte haute énergie

Température ambiante

Température ambiante 2-8° après 1re utilisation, 8 h

Radioprotection Possibilité de fractionner au dernier moment Patients ne pas pouvant avaler Ne peuvent pas être fractionnées Radioprotection au dernier moment Iode 131 absorbé par la partie proximale du tube digestif Élimination urinaire importante : 90 à 95 %

B

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Conservation

Solution injectable

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Préparation

Solution buvable

A

Filtre

• Figure 2. Générateur de 99Mo / 99mTc : (A) Représentation schématique. (B-C) Exemples de générateur.

Tableau 2 : Formes galéniques d’131I disponibles Désoperculer dans une hotte pour éviter d’inhaler de l’iode 131

Alumine

Blindage de plomb

Exploration et traitement de la pathologie thyroïdienne

Présentations

Solution injectable

99

C

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et de tissu thyroïdien résiduel. Les activités seront plus élevées (1 850 et 5 500 MBq). En diagnostic, les trois radioélélements pourront être utilisés. Les critères de choix seront l’organification du traceur, l’irradiation et le coût. • Le pertechnétate 99mTcO4-, qui est le moins irradiant et le moins coûteux, sera utilisé pour les explorations courantes. En général, on injectera aux alentours de 111 MBq de 99mTcO 4- pour un adulte de 70 kg. La scintigraphie est réalisée 30 minutes après l’injection. • L’iode 123, plus coûteux, sera réservé au cas où l’on souhaite une approche fonctionnelle précise et prenant en compte l’organification : courbe de fixation avant traitement par l’iode 131 d’une hyperthyroïdie, doute sur un nodule chaud au technétium 99m avec biologie normale... On administrera de 5 à 15 MBq d’iode 123 chez un adulte. La scintigraphie a lieu 2 heures après l’injection. Dans le cas d’une courbe de fixation, des comptages sont réalisés 3, 6 et 24 heures après l’injection. • L’iode 131 sera utilisé pour les cartographies, scintigraphies du corps entier, dans le cadre de la surveillance des cancers thyroïdiens. Il faut noter qu’il n’y a pas d’allergie à l’iode dans les bilans isotopiques thyroïdiens.

Interactions médicamenteuses De nombreux médicaments ou produits interfèrent en pratique avec l’exploration in vivo : – les antithyroïdiens de synthèse, en inhibant l’organification de l’iodure. Un arrêt de 48 heures d’un traitement par des antithyroïdiens de synthèse est préférable pour réaliser une scintigraphie dans des conditions satisfaisantes ; – les hormones thyroïdiennes, dont le traitement devra être interrompu 4 semaines avant de pouvoir réaliser une scintigraphie thyroïdienne ; – toute surcharge iodée, d’origine médicamenteuse (amiodarone, produits de contraste iodé...), cosmétique ou alimentaire, interfère avec la fixation du radiotraceur : en fonction de l’indication de la scintigraphie, elle pourra ou non constituer une contre-indication et devra dans tous les cas être prise en compte dans l’interprétation de l’examen.

pharmacotechnie

Pathologies thyroïdiennes et médecine nucléaire On distinguera les nodules thyroïdiens, l’hyperthyroïdie, l’hypothyroïdie et le cancer de la thyroïde différencié de souche vésiculaire.

Les nodules thyroïdiens Ce sont des zones de modifications morphologiques du tissu thyroïdien détectées à la palpation ou par échographie. Ces nodules peuvent être uniques ou multiples, et la glande thyroïde peut être de taille normale ou hypertrophiée. Ce sont des anomalies fréquentes (5 % de la population), avec une prédominance féminine (sex-ratio 4/1). Le problème posé par les nodules thyroïdiens est la nature des cellules qu’ils contiennent, avec un risque de malignité modéré, mais réel (environ 10 % des nodules opérés). La scintigraphie est indiquée lorsqu’il existe des signes d’hyperthyroïdie, à la recherche d’un nodule toxique. La scintigraphie thyroïdienne détecte les nodules à partir de 10 mm. Elle permet d’apprécier leur caractère fonctionnel ou non ainsi que de distinguer en fonction de l’importance de la fixation du radiotraceur, des nodules hyperfixants, hypofixants ou isofixants. Il est inutile de la répéter lorsqu’elle a montré un nodule hypofixant. Les nodules hyperfixants, dits chauds (5 à 10 %) Les nodules chauds se présentent comme des zones qui fixent le radiotraceur de façon plus intense que le reste de la glande (présence de tissu thyroïdien normal hyperfonctionnel). En fonction de l’autonomie du tissu thyroïdien intranodulaire et de l’importance de sa production hormonale, on peut rencontrer : – un nodule chaud au sein d’une glande qui fixe normalement le traceur ; – un nodule chaud au sein d’une glande qui fixe peu le traceur (nodule chaud partiellement extinctif) ; – un nodule chaud isolé sans fixation du reste de la glande (nodule chaud extinctif). Les nodules chauds sont dans leur immense majorité des adénomes bénins faits de thyréocytes hyperactifs échappant au rétrocontrôle de la TSH. Il faut cependant connaître la possibilité de nodules chauds en 99mTc et froids en 123I. Ce sont des nodules dans lesquels il y a captation de l’iode, mais pas d’organification.

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Les nodules hypofixants, dits froids (80 %) Les nodules froids se présentent comme des zones qui fixent peu ou pas le radiotraceur. L’absence de fixation témoigne de l’absence de tissu thyroïdien fonctionnant normalement. Le problème posé par ce type de nodules est le risque de malignité, car ils peuvent être à contenu liquidien ou plein, ce qui peut alors correspondre à un carcinome (environ 10 % des nodules opérés). La nature exacte des nodules ne peut être déterminée que par l’examen anatomopathologique (chirurgie) ou éventuellement, pour certains, par la cytologie (ponction). Les nodules isofixants, dits tièdes (10 à 15 %) En fait, il s’agit le plus souvent de lésions froides enchâssées au sein du parenchyme thyroïdien et donc entourées de tissu sain. Ils doivent être considérés comme des nodules froids.

Hyperthyroïdie L’hyperthyroïdie est un dysfonctionnement avec sécrétion excessive d’hormones, conséquence d’un hyperfonctionnement autonome de la glande ou d’une stimulation exogène de celle-ci. Sur le plan clinique, l’hypermétabolisme se traduit par une nervosité, un tremblement fin des extrémités, une asthénie, une thermophobie, une diarrhée, une peau chaude et moite, une perte de poids avec appétit conservé, une tachycardie sinusale, parfois associée à des crises de tachycardie paroxystique, une exophtalmie (dans la maladie de Basedow). Les manifestations biologiques sont généralement une élévation des T4 et T3 et une TSH abaissée, mais ces valeurs peuvent rester normales dans des hyperthyroïdies infra-cliniques. La production excessive d’hormones thyroïdiennes peut provenir : • de l’ensemble de la thyroïde – la maladie de Basedow est liée à une stimulation par des immunoglogulines thyroïdostimulantes (TSI). C’est la cause la plus fréquente d’hyperthyroïdie. La scintigraphie met en évidence une fixation intense et homogène ; – l’hyperthyroïdie induite par prise excessive d’iode se traduit par une absence de fixation à la scintigraphie thyroïdienne. La TSH est basse et les hormones libres sont aug-

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mentées. Cette forme d’hyperthyroïdie est souvent liée à des produits riches en iode (examens de contraste) ou des médicaments (amiodarone). L’hyperthyroïdie liée à l’amiodarone peut être d’origine toxique (absence de fixation thyroïdienne) ou auto-immune (fixation faible) ; – la thyroïdite subaiguë de De Quervain est liée à une agression virale. La fixation thyroïdienne est faible et franchement hétérogène ; – la thyroïdite de Hashimoto dans sa phase initiale. La scintigraphie est très variable ; – la thyroïdite subaiguë du post-partum. En général, la scintigraphie est blanche ; • d’une partie de la glande – le nodule chaud toxique ; – le goitre multinodulaire avec nodules hyperfonctionnels, se traduit par une fixation très hétérogène avec une ou plusieurs zones d’hyperfixation intense (le ou les nodules chauds) ; • d’une production ectopique (rare). La scintigraphie est indiquée chaque fois qu’il existe un goitre uni ou multinodulaire et chaque fois qu’il existe un doute sur la cause de l’hyperthyroïdie (figures 3 et 4).

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• Figure 3. Scintigraphie au 99mTc montrant un goitre homogène intense en faveur d’une maladie de Basedow.

• Figure 4. Scintigraphie au 99mTc montrant une hyperfixation focalisée et l’absence de fixation en regard du reste du parenchyme thyroïdien en faveur d’un nodule chaud thyroïdien extinctif.

Modalités thérapeutiques Trois modalités thérapeutiques dominent le traitement des hyperthyroïdies : les antithyroïdiens de synthèse (ATS), la radiothérapie interne à l’iode 131, la chirurgie. Le traitement médical par les ATS est habituellement proposé lors du premier épisode d’hyperthyroïdie auto-immune, un traitement radical par l’iode 131 ou la chirurgie après le diagnostic d’hyperthyroïdie modérée autonome sur goitre uni ou multinodulaire. C’est le respect des indications et des contre-indications, l’avis éclairé du patient, qui permettent de faire le choix du traitement le mieux adapté à chaque cas. Dans tous les cas, il faut garder à l’esprit que le traitement de l’hyperthyroïdie par l’iode 131 est un traitement de fond non urgent dont le délai d’action est long, supérieur à 3 mois. Les objectifs et les modalités d’un traitement par l’iode 131 d’une hyperthyroïdie doivent être clairement identifiés. Un choix thérapeutique doit être fait entre un traitement à dose ablative, avec apparition précoce d’une hypothyroïdie, ou un traitement à dose plus faible dit antitoxique visant à préserver une fonction thyroïdienne normale avec installation plus tardive de l’hypothyroïdie. Les indications de la thérapie par l’iode 131 dans le cadre des hyperthyroïdies sont limitées aux hyperthyroïdies à fixation en iode préservée, supérieure à 5 % : – auto-immune lors d’intolérances aux ATS, d’impossibilité de sevrage des ATS après 24 mois de traitement, de pathologies associées, d’inobservance du traitement médical, de récidive quel que soit le premier traitement ; – autonome lors de goitre diffus, uni ou multinodulaire non compressif en hyperthyroïdie modérée sans suspicion de cancer associé. Plusieurs méthodes de calcul existent pour déterminer l’activité d’iode 131 à administrer : méthodes dosimétriques et non dosimétriques (modulation par la masse thyroïdienne ou activité fixe prédéterminée pour chaque pathologie). Contre-indications absolues La grossesse, l’allaitement – si la décision de traitement par l’iode 131 est prise en cours d’allaitement celui-ci sera définitivement stoppé avant l’administration de l’iode –, le désir de grossesse dans un délai de moins de 6 mois, une suspicion de cancer thy-

roïdien associé, un patient radiophobe ou n’adhérant pas aux mesures de radioprotection, une surcharge iodée et une espérance de vie limitée à moins de 6 mois sont des contre-indications absolues. Contre-indications relatives Une hyperthyroïdie sévère, une ophtalmopathie évolutive, un gros goitre de plus de 80 grammes, un goitre compressif avec sténose trachéale, une insuffisance rénale, l’incontinence sont des contre-indications relatives de la thérapie par l’iode 131.

Hypothyroïdie Il s’agit d’un hypométabolisme dû à une carence en hormones thyroïdiennes en rapport avec un hypofonctionnement thyroïdien. Sur le plan clinique, l’hypométabolisme se traduit par un ralentissement des capacités physiques et intellectuelles, une fatigue et un manque d’entrain, une frilosité, une constipation, des cheveux secs et cassants, une peau sèche, froide, rêche, jaunâtre, écaillée, une prise de poids, une bradycardie. Sur le plan étiologique, on distingue l’hypothyroïdie congénitale et les hypothyroïdies postnatales acquises. La scintigraphie montre une absence de fixation au niveau de la loge thyroïdienne ou une faible fixation d’allure hétérogène. Toutefois, les examens d’imagerie et la cytoponction n’ont pas d’indication dans le diagnostic positif de l’hypothyroïdie.

Cancer de la thyroïde différencié de souche vésiculaire Les cancers thyroïdiens différenciés, papillaires et folliculaires sont des tumeurs malignes épithéliales de souche folliculaire, dont ils conservent certaines caractéristiques morphologiques et fonctionnnelles. L’augmentation de l’incidence des cancers de la thyroïde observée depuis plusieurs décennies est liée à une augmentation du diagnostic des petits cancers papillaires permise par l’amélioration des pratiques. Alors que les nodules thyroïdiens sont fréquents, les cancers différenciés de la thyroïde sont relativement rares. La seule cause connue est l’exposition aux irradiations (externe ou par contamination interne) pendant l’enfance. D’autres facteurs ont pu être rapportés : carence en iode, polypose colique familiale,

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maladie de Cowden, l’existence d’une prédisposition génétique. La médecine nucléaire a une place tout particulièrement importante à la fois dans le diagnostic et le traitement de ces cancers, sachant que la première étape de la prise en charge de ce type de cancer est toujours l’ablation chirurgicale de la thyroïde.

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Diagnostic • Scintigraphie préthérapeutique Elle n’est pas recommandée, car elle est peu sensible et susceptible de diminuer l’efficacité du traitement par iode 131 (irathérapie), par effet de sidération des cellules thyroïdiennes (stunning ). Si l’importance du reliquat n’est pas accessible par le compte rendu opératoire ou l’échographie cervicale, il est recommandé de ne pas dépasser une dose de 37MBq (1mCi) d’iode 131 ou d’utiliser l’iode 123 qui donne une meilleure qualité d’image et de quantification standardisée. • Scintigraphie postthérapeutique Elle est réalisée 1 à 8 jours après le traitement par iode 131. Cet examen permet de renseigner sur les reliquats cervicaux laissés en place au décours de la chirurgie et surtout sur la présence d’éventuelles métastases fixant l’iode, ganglionnaires régionales ou extracervicales (figure 5). L’examen est informatif si la fixation des reliquats thyroïdiens est faible (< 2% de l’activité administrée) et sous réserve des artefacts et pièges diagnostiques. • La tomographie à émissions de positons (TEP) au 18 fluoro-2 desoxy-D glucose (18FDG)

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Le traceur utilisé, le 18FDG, est un analogue du glucose, marqué par un émetteur de positons, le fluor 18. Ce traceur s’accumule dans les cellules en fonction de leur consommation en glucose et donc dans les cellules cancéreuses très consommatrices de glucose. Les tumeurs agressives ou mal différenciées fixent généralement mieux que les tumeurs bien différenciées. Le 18FDG est indiqué dans le diagnostic et le suivi de différents types de cancers, dont les cancers thyroïdiens différenciés. La TEP au 18FDG est recommandée après traitement initial d’un cancer différencié (chirurgie suivie d’une dose ablative d’iode 131), lorsqu’il existe une élévation confirmée et significative du taux de thyroglobuline et lorsque la scintigraphie après dose traceuse ou thérapeutique d’iode 131 est négative. L’intérêt du TEP est discuté : – dans un but pronostique en cas de métastases d’emblée (révélatrices du cancer ou diagnostiquées au moment de l’ablation) fixant ou non l’iode 131 ; – lorsqu’il existe au cours de la surveillance une élévation confirmée du taux de thyroglobuline quels que soient les résultats de la scintigraphie après une dose traceuse ou thérapeutique d’iode 131. Totalisation isotopique • Objectifs du traitement par l’iode 131 L’administration après chirurgie d’iode 131 pour carcinome thyroïdien différencié, encore appelé radiothérapie métabolique interne vectorisée par iode 131, ablation isotopique, totalisation isotopique ou irathérapie de totalisation a pour but de : – détruire le tissu thyroïdien restant (ou reliquat thyroïdien) pour faciliter la surveillance ultérieure par le dosage de la thyroglobuline sérique, l’échographie cervicale et si néces-

• Figure 5. Scintigraphies du corps entier après plusieurs cures de 150 mCi d’iode 131. Multiples localisations métastatiques pulmonaires et osseuses fémorales gauches, comme indiqué par les flèches.

saire la scintigraphie du corps entier à l’iode 131 ; – traiter d’éventuels foyers tumoraux macro ou microscopiques, et diminuer ainsi le risque de rechute ; – compléter le bilan d’extension par la scintigraphie postthérapeutique réalisée 3 à 7 jours plus tard, examen de haute sensibilité lorsque les reliquats thyroïdiens sont de petites dimensions. Elle permet également de vérifier l’absence de fixation en dehors de l’aire thyroïdienne. • Indications L’irathérapie de totalisation n’est pas systématique. Elle est indiquée après thyroïdectomie totale ou quasi totale, chaque fois que l’âge du patient, l’extension de la tumeur (classification pTNM), le type histologique et/ou la multifocalité font craindre une maladie résiduelle postopératoire, une extension à distance ou un risque d’évolution ultérieure. Les indications de totalisation sont fonction du niveau de risque du patient. Trois groupes pronostiques sont définis : – chez les patients à très faible risque évolutif (tumeur < ou = à 1 cm, unique, intrathyroïdienne, sans métastase ganglionnaire), l’irathérapie n’a pas de bénéfice démontré, et n’est donc pas indiqué ; – chez les patients à haut risque évolutif (patient ayant une maladie persistante, exérèse chirurgicale incomplète ou des métastases à distance, ou des facteurs pronostiques défavorables), le traitement par iode 131 diminue le risque de récidive, facilite la détection précoce des foyers tumoraux résiduels, et pourrait diminuer la mortalité liée au cancer. Elle est réalisée à fortes doses, après sevrage en hormones thyroïdiennes ; – les autres patients ayant un risque faible, la décision de traiter par iode 131 dépend des facteurs pronostiques et de la qualité de l’exérèse chirurgicale ; en cas de chirurgie complète, le pronostic après chirurgie seule est favorable et peut difficilement être amélioré par les traitements complémentaires. De même l’iode n’est pas indiqué en cas de tumeur de petites dimensions sans métastases ganglionnaires. En cas de protocole chirurgical incomplet, un complément thérapeutique chirurgical ou par irathérapie peut être discuté en réunion

Actualités pharmaceutiques hospitalières • n° 19 • Août 2009

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de concertation multidisciplinaire, en fonction du volume du reliquat et du risque de maladie résiduelle. • Contre-indications Les contre-indications absolues sont la grossesse, l’allaitement et l’urgence médicale. Les contre-indications relatives sont plus nombreuses : la dysphagie, la sténose œsophagienne, une gastrite et ou un ulcère gastrique évolutif, l’incontinence urinaire, une surcharge iodée, une insuffisance rénale, une métastase cérébrale et une compression médullaire non traitée symptomatique, une espérance de vie de moins de 6 mois et la perte d’autonomie. • Modalités Les modalités ont fait l’objet d’un guide de procédure à l’usage des médecins nucléaires (publié en 2006 par la Société française de médecine nucléaire et imagerie moléculaire), inspiré du guideline européen de 2003 et prenant en compte la législation française en matière de radioprotection et de prise en charge de patients atteints de cancer. L’information du patient doit être faite par le médecin ayant proposé le traitement et par le médecin responsable de sa réalisation. Elle portera sur les buts, les modalités de l’examen, les bénéfices attendus, les effets secondaires potentiels, ainsi que sur les moyens

de radioprotection des personnes de son entourage. La préparation au traitement par l’iode 131 rend nécessaire d’éviter toute surcharge iodée alimentaire et/ou médicamenteuse dans les deux semaines précédant l’administration d’iode radioactif. Si une surcharge iodée est suspectée, ou de manière systématique, l’iodurie est mesurée (sur les urines de 24 heures). La stimulation des thyréocytes est obtenue soit par sevrage, soit par TSH recombinante humaine (rh TSH) (Thyrogen®) : – la préparation par sevrage doit assurer un taux de TSH > 30 mU/L (valeur empirique) et nécessite un arrêt de la T4 pendant 4 à 5 semaines avec possibilité de relais par la T3 et arrêt de la T3 pendant 2 semaines. Le traitement par hormones thyroïdiennes est repris dans les 2 à 4 jours qui suivent la prise d’iode ; – la préparation par rhTSH (injection IM de Thyrogen® 48 et 24 heures avant l’administration d’iode 131) est autorisée pour la totalisation isotopique des formes de bon pronostic (pT1-T2, N0-N1) par 3 700 MBq d’iode 131. Les phénomènes inflammatoires parfois observés lors du traitement de reliquats volumineux seront traités par corticothérapie. Un prélèvement sanguin est effectué avant l’administration du traitement pour mesurer le taux de thyroglobuline, accompagné du

taux de TSH et des anticorps antithyroglobuline, et un dosage de E-HCG est réalisé chez les femmes en âge de procréer. L’activité administrée d’iode 131, après thyroïdectomie totale ou quasi-totale, consiste à administrer en vue d’éliminer les reliquats de tissus thyroïdiens normaux est comprise entre 1 100 MBq et 3 700 MBq (30 et 100 mCi) d’iode 131. Elle est déterminée en fonction des facteurs pronostiques initiaux. L’activité minimale nécessaire à la destruction des reliquats n’est pas encore définie de manière consensuelle. En l’état actuel des connaissances, si des foyers tumoraux persistent, après exérèse incomplète connue ou présumée ou en cas de métastase à distance, ils doivent être traités avec une activité d’au moins 3 700 MBq, administrée après sevrage. „ Hélène Carpenet Service de médecine nucléaire Pharmacie à usage intérieur, CHU Dupuytren, Limoges (87)

Assmae El Badaoui Service de médecine nucléaire, CHU Dupuytren, Limoges (87)

Isabelle Quelven Service de médecine nucléaire Pharmacie à usage intérieur, CHU Dupuytren, Limoges (87) [email protected]

Radioprotection lors des traitements par l’iode 131 Les contraintes de radioprotection pour la réalisation des traitements par iode 131 sont importantes, tout particulièrement dans le cadre des cancers où les activités administrées sont plus élevées que pour les hyperthyroïdies. Ces contraintes doivent tenir compte des émissions E-, mais surtout des rayonnements J très énergétiques et pénétrants (Emoy = 364 keV). Ces mesures concernent le personnel (préparation, administration, suivi du patient), mais surtout le patient. Dans le cas du traitement des cancers, le patient est hospitalisé dans des chambres plombées pendant 3 à 5 jours. Ces chambres disposent de toilettes reliées à des cuves de décroissance, une grande partie de l’iode 131 étant éliminée dans les urines durant les jours suivants l’administration. Dans ces chambres, les visites ne sont pas autorisées. Une hospitalisation n’est pas obligatoire lorsque l’activité administrée est inférieure à 740 MBq, ce qui est le cas dans les traitements d’hyperthyroïdie. Durant les jours suivant sa sortie de chambre plombée, le sujet doit prendre un certain nombre de précautions pour limiter l’exposition de son entourage. Ces recommandations sont formulées afin de limiter les risques de dépassement des valeurs de contrainte de dose de : 1 mSv pour le public, les enfants de moins de 10 ans et la femme enceinte, 3 mSv pour les personnes constituant les proches du patient entre 10 et 60 ans, 15 mSv pour les personnes constituant les proches du patient de plus de 60 ans. Les principales mesures sont la limitation du contact avec les femmes enceintes et les enfants en bas âge (qui sont plus radiosensibles), avec le conjoint, la limitation de la durée de transport en commun, l’arrêt du travail… La durée de ces mesures est fonction du débit de dose à sa sortie. Elles s’appliquent au traitement des cancers et des hyperthyroïdies.

Références Piketty ML. Physiologie de la thyroïde. Moniteur de l’internat 2001;4. Farinotti R. Médicaments des dysfonctionnements thyroïdiens. Moniteur de l’internat 2002; 6. Guide pour la rédaction de protocoles de traitements des hyperthyroïdies par iode 131. Société française de Médecine nucléaire 2006. Recommandations pour la prise en charge des cancers thyroïdiens différenciés de souche vésiculaire. Annales d’endocrinologie décembre 2007; 68-S2: S53-S94. Schlumberger M. Cancer papillaire et folliculaire de la thyroïde. Annales d’endocrinologie juin 2007; 2-3: 120-128. Bachelot A et al. Démarche diagnostique devant un nodule thyroïdien. Médecine thérapeutique, endocrinologie et reproduction janvier-février 2002; 4; 1: 48-52. Schlumberger M. Iode radioactif et tumeurs de la thyroïde. Eurocancer 2001, John Libbey; 9-10.