MALTRAITANCE En mars dernier, lors du Mkdec, la conference
du Comite national de I’enfance
sur le syndrome du bdbe secoue a permis de rappeler les difficult&
liees
21son diagnostic et a sa prise en charge, d’un point de vue medical et judiciaire. La gravite des sequelles necessite une vraie prise de conscience de la part des professionnels
de la Sante pour mettre en place une politique de prevention
eff icace.
du danger de secouer un nourrisson D. Renier service de neurochirurgie, A
CHU Necker-enfants
malades, Paris, France
I’occasion de circonstances qui resteraient sans cons&quences chez des enfants
plus 8g6s, une disposition anatomique patticuli&re des veines c&brales
du
nourrisson peut I’exposer 6 I’hkmatome sous-dural, c’est-A-dire ?I un saignement entre cerveau et mkninges.
D
want la premiere an&e de vie, I’espace sit& entre le cerveau et les
dam deux tiers des cas, des crises epileptiques souvent prolongees, dont les con-
meninges est Clargi, et les veines qui le traversent sont exposees au risque de rupture par cisaillement lors de secousses
sequences sur le cerveau sont a cet Age dramatiques en l’absence d’un traite-
brutales, et ce d’autant plus que la t&e du nourrisson, lourde par rapport au reste du corps, est mal maintenue par des muscles cervicaux encore trop faibles. La gravitt
de l’hematome
urgences neurochirurgicales pediatriques d’fle-de-France a l’hopital Neckerenfants malades, oh est situ4 le seul service de neurochirurgie pediatrique de 1’Assistance publique de Paris, nous a amen& a revoir completement notre appreciation de ce probleme. De 1996 a 2000, le nombre de nourrissons atteints d’hematome sous-dural hospitalises dans ce service se monte a 230, avec des tableaux cliniques graves que deux chiffres permettent devaluer : 10 % de mortalite et 60 % de sequelles neuropsychologiques dont la moitie sont gravissimes. La gravite de ces hematomes sousduraux est like au fait qu’ils provoquent, DE ~IATRIE
ET DE FW~WLTURE
ne 4 - 2001
?
Ce (( syndrome de l’enfant secoue B,correspond h une forme particulierement insidieuse de maltraitance, car elle est la plupart du temps inconsciente. Le probleme est de reconnaitre a temps les premiers symptomes, d’enrayer l’evolution
sous-dural
du nourrisson a td trop longtemps sous&al&e. Le regroupement recent des
murwh
ment energique precoce. Mal trait&s ou trait&s trop tar-d, ces crises aboutissent en effet a des lesions cerebrales irreversibles, source de debilite mentale.
inconsequence ou maltraitance
Ces hkmatomes
et de prevenir les recidives en prenant en charge les familles. Ainsi, apres les soins
sous-duraux
ntcessaires, faudra-t-i1 s’interroger sur ce qui a pu arriver. La question est ici tout a fait particuliere en ce que cette
provoquent
souvent
des crises kpileptiques qui aboutissent des I&ions
c6rCbrales
irrkersibles
+
ci
pathologie neurochirurgicale touche des bebes de quelques mois qui ne pourront jamais expliquer les circonstances du traumatisme. Elle est grave parce que, forctment, un tiers est responsable. Elle est difficile parce que l’evenement en cause n’est pas toujours, tant s’en faut, intentionnel, mais peut t&s bien etre en apparence tout a fait anodin. Comment determiner si la lesion constatee est le produit d’une inconstquence ou d’une brutalite intentionnelle ? Une constellation 233
d’eltments cliniques discrets doivent &re alors recherchts sysdmatiquement
en pratique
ves, prendre
en se fondant sur les donnees recueillies par les mtdecins, les psychologues et les
Que se passe-t-ii en pratique
culturelles, quelques
assistantes Demeler
sociales. la part de I’accidentel,
de
l’inconsequence et de l’intentionnel permettra de trouver la meilleure solution pour venir en aide a la famille et prc%enir les recidives. 11 s’agit la dune veritable enqu&te qui doit se fonder sur de nombreux elements (mtdicaux, psychologiques, sociaux) et qui suppose une tquipe multidisciplinaire. Veritable enqu&e : enqu&te policitre ?
? Un nour-
risson est ament a l’hopital, envoy6 par son pediatre ou amen.5 par ses parents ou sa nourrice, le plus souvent dam un dimat d’urgence. Les premiers soins sont souvent lourds, spectaculaires. On parle de reanimation, de soins intensifs, de chirurgie. Dam ce contexte, le premier contact avec la famille est particulitrement prtcieux. Que s’est-il passe ? Quand ? Qui ? Ce dialogue sera poursuivi dans les jours qui suivent, avec tous
d’un
les membres de l’equipe. Ce dialogue n’est pas facile, entre des professionnels
traumatisme in&$ (unecc maltraitance .), le probleme se pose aussit& du signale-
qui doivent se garder de projections negatives sur les familles (ou a l’inverse
ment judiciaire.
dune identification fallacieuse), 6viter la banalisation ou la dramatisation excessi-
Puisqu’on
Cvoque la possibilite
C’est une des questions
importantes.
prendre
en compte
les differences
face a des familles qui precautions qu’on puisse
- se sentent
t8t ou tard suspec-
tees voire accusees. Les diff&ences (techniques, psychologiques) de point de vue
ne sont done pas les seuls justificatifs de la ntcessitt d’une Cquipe multidisciplinaire dans ce d&bat douloureux, tmotionnellement fort ; les impressions personnelles et le.3convictions intimes, mais aussi les incertitudes, doivent &re discutees et confront6es. Dam la quasi-totalit& des cas, la v&it6 ne sera approchte que pas Apas. 11est exceptionnel que le trauma&me causal soit unique et parfaitement determinable. L’enfant martyr de parents bourreaux, dam cette tranche d%ge, nous ne l’avons jamais rencontre. Tout est plus insidieux, subtil et nuance.
les manifestations oculaires dons le syndrome des enfants secoubs J.L. Dufier service d’ophtalmologie,
C/W Necker-Enfants-Ma/odes,
Paris, France
Devant toute l&ion hemorragique intrac6r~brale chez le nourrisson, l’examen du fond d’ceil est indispensable
pour d&ecter une hkmorragie intra-oculaire,
I’association de ces symptbmes laissant suspecter une maltraitance avec toutes ses conskquences medico-judiciaires.
Le syndrome forme l’enfant animte chiques
des enfants secoub est une
serieuse de maltraitance chez de moins de deux am. La dte est de mouvements rapides et anarsans veritable trauma&me cm-
nien. 11s’ensuit des htmorragies niennes et des hemorragies
intracrC intra-
oculaires. Certains auteurs afErment que l’association d’hemorragies intra-oculaires et intracrtiiennes cha un enfant de moins de deux ans signe une maltraitanoe. L’etude retrospective d’enfants hospitalises dam le service de neurochirurgie de I’hopital Necker-enfants malades durant les annees 98-99 met en Cvidence des atteintes neurologiques au premier plan avec des htmatomes sousduraux et des hemorragies cerebra234
mtningtes. Un examen du fond d’ceil Ctait pratique initialement, puis rep&e a intervalle regulier.
II
y a une corrklation entre I’importonce du saignement intro-oculaire et la graviti!
de I’ktat
neurologique initial
+
Nous avons observe une grande quence d’htmorragies intra-oculaires
frtini-
tialement rencontrtes. II y a une correlation entre l’importance du saignement intra-oculaire et la gravitt de l’ttat neurologique initial et du pronostic vital. L’htmorragie intra-oculaire
n’est pas
systematiquement homolattrale par rapport h I’htmatome sous-dural, les lesions vitreoretiniennes Cvoluent ensuite pour leur propre compte. Un traumatisme crhnien avec fracas osseux et lesions intracrlniennes ne s’accompagne pas de saignement intraoculaire. L’association d’hemorragies intra-oculaires et d’htmorragies intracraniennes traduit done le fait que l’enfant a et6 secoue.
JOURNAL DE ~DL~TRIE
m DE PUORICULWRE
no4 - 2001