Arch Pkdiatr 1999 ; 6 Suppl2 0 Elsevier, Paris
: 387-8
lkoubles du langage : le dCpistage
Du langage oral au langage 6crit C. Billard, P. Gillet, M.A. Barthez Neurologie
pediatrique,
centre hospitalier
universitaire,
On entend sous le terme de <>.Dans une faible proportion des cas, appelee c>,ces troubles sont s&&es, durables bien apt& 7 ans. Plusieurs auteurs ont souligne la vulnerabilite de ces enfants aux difficult& d’apprentissage du langage Ccrit, particulibement s&&es et frequentes dans les dysphasies, mais aussi possible dans les retards [ 1,2]. Menyuck et al. [3] comparant les capacites en lecture a 8 ans, de trois groupes (anciens prematures, retard de langage, dysphasies) diagnostiques a 5 ans, a montre que 95 % des enfants dysphasiques et 15 % des retards Ctaient mauvais lecteurs, alors que cela ne concemait que 5 % des anciens prematures. Ces etudes ne font pas appel aux strategies de lecture deficitaires chez ces enfants. L’objectif de notre expose est d’illustrer a propos de deux observations les difficult& d’apprentissage du langage Ccrit communes dans les troubles specifiques du developpement du langage oral, en reference aux modeles cognitifs de la lecture, afin d’en souligner les consequences sur la reeducation et la pedagogic. LES TROIS STADES D’ACQUISITION DU LANGAGE BCRIT Le premier stade d’acquisition de la lecture chez l’enfant apprenti lecteur, selon Frith [4] est le stade (c logographique B oti l’enfant de grande section de matemelle N photographie >>les mots de son environnement et les lit sur la base de quelques indices visuels (maman, son prenom, coca cola, etc.). Dans un second temps, l’enfant aborde les mots nouveaux pour se constituer son stock inteme grace au stade Galphabetique H oti il met en place toutes les regles de la conversion graphophonologique (segmentation des
37044 Tours, Frame
mots, puis conversion et assemblage). Ce n’est qu’apres l’acquisition de ce stade qu’il peut aborder le troisieme stade cqorthographique B qui lui permet de devenir un lecteur competent, lisant de facon globale les mots connus et frequents et de facon analytique les mots inconnus. OBSERVATIONS Sebastien, 8 ans, debute son tours Clementaire 1 (CEI) apres deux tours preparatoires (CP) et est en grand echec. 11a CtC suivi en reeducation orthophonique en moyenne et grande section de matemelle pour un retard de langage et de parole. Ses deux CP ont CtC marques par un debut d’annee sans difficult& Sebastien sachant par coeur son livre de lecture, puis par un Cchec massif en lecture et Ccriture contrastant avec des acquisitions correctes en mathtmatiques. Son age de lecture a la batterie de <>,N bruit B lu G brute B). Damien, 8 ans 6 mois, est non lecteur malgre son troisieme CP et une reeducation orthophonique reguliere. Son eflicience intellectuelle est normale (QIP 96 au WISC-R) mais son niveau de lecture est de 6 ans. Son langage oral est encore difficilement intelligible, avec un niveau de comprehension lexicale et syntaxique discretement deficitaire (-2 DS), et un niveau d’expression considerablement perturb& En phonologie et syntaxe, son score est inferieur
388s
C. Billard
a -6 DS rendant sonexpressionencoredifficilement intelligible (banane : c)).II ne denomme que 40 % des lettres presenteesavec de nombreusesconfusions (),etc.), ne lit aucune syllabe et seulementtrois des 30 motscourants de CP (dans, maman,papa). INTERPRhTATION
ET PRISE
EN CHARGE
Ces deux observationsrentrent danslescriteres diagnostiques des troubles specifiquesdu developpement du langage oral : Sebastienprtsente un retard de langageet Damien une dysphasie.Les deux enfantsn’ont pasdepassele stadelogographique de la lecture [4] et de ce fait sont de pauvreslecteurs.En ce qui concemeSebastienqui ne garde que peu de difficult& a parler, on peut penserque les difficult& de perception(discrimination de sonset decoupage syllabique) rentre en compte, commele soulignela litttrature [6], dartscette difficulte Bmettre en place lesreglesde conversion graphophonologiquecaracdristiques du stade alphabetique.On peut penserque chezDamien, lesgrosses difficult& dans la programmation des sons prononces I’empechent d’associerune graphie 2 son >propre. Si on admet que les difficult& phonologiquesg&rent la conversion des graphemesen phonemes,on peut penser qu’un code gestuel, utilist comme palliatif au code de parole defectueux, aiderait cesenfantspour apprendrea fcdenommer >>gestuellementet oralement les lettres puis les syllabes, et done a acquerir le stadealphabetiquede la lecture. La methodeBorel-Maisonny [7] a 6tCtlaboree pragmatiquement au tours d’une experience aupresdes enfants Cprouvantdesdifficult& d’apprentissagede la lecture. Elle est baseesur I’associationd’un gestepour chaquegraphie ou groupe de graphies(commeCH). Par exemple, I’enfant apprend a associerau 0 un gestemimant avec le pouce et I’index la forme rondede la lettre. Pour Michael, cette methode utilisee en reeducation orthophonique trois fois par semaineet deux fois par semainepar le reseaud’aide de l’ecole lui a permis d’avoir en fin d’annee scolaire un niveau de lecture de 7 ans6 mois. II pouvait alors lire toutes les lettres, toutes les syllabessimpleset la plupart dessyllabes complexes. Seulesquelquesconfusions de sonset
et al
unedysorthographiepersistaient.II lisait touslesmotscourants d’un CP. Damien, compte tenu de son handicap,est rentre dansune structure specifique pour enfant dysphasique [8]. oti cette mtthode a CtCinstituee intensivementpar I’institutrice et I’orthophoniste. A 11 ans, son niveau de lecture est superposablea celui d’un enfant de CM I et il pourra &treintegre en 6eSGPA I’annCesuivante. Cette methode a permisaces deux enfantsd’acdder au stadealphabetiquede la lecture et de devenir lecteur, alorsqu’on peut supposerqu’en I’absence d’un tel apprentissage,ils seraient rest& illettres. Cesdonneessuggerentque les enfantsporteurs de troublessptcifiques du developpementdu langageoral sont a risque de difficult& d’apprentissagede la lecture, en particulier s’ils sont dysphasiques.Elles suggerenttgalement qu’ils peuvent neanmoinsapprendrea lire, a condition d’un environnementorthopedagogiqueadapte.Cela ne fait que souligner le sensde la creation de classesd’integration scolaire(CLIS), encore trop peu nombreusesen France,et susceptiblesd’accueillir ceux qui sontle plusen difficult& pour leur permettred’acctder a I’avenir socioprofessionnel qu’ils meritent. RhFhENCES Billard C, Loisel ML. Gillet P Boineau L. Les troubles du langage tcrit dans les dysphasies de developpement. Bull Audiophonol 1991 : I ; 271-88. Bishop DVM. Adams C. A prospective study of the relationship between specific Language impairments, phonological disorders and reading retardation. Child Psycho1 Psychiatry 1990 : 31 : 1027-50. Menyuck P, Chesnik M, Liebergott JW. Predicting reading problems in at-risk children. J Speech Hearing Res 1991 ; 34 : 893-903. Frith U. Beneath the surface of developmental dyslexia. In: Patterson K, Marshall J, Coltheart M. eds. Surface dyslexia. London: Lawrence Erlbaum; 1985. p. 301-30. Content A, Morais J, Alegria J, Bettelson P. Acquisition de la lecture et analyse segmentale de la parole. Psycho1 Belg 1986 ; 26, I-15. Snowling M. The development of grapheme-phoneme correspondance in normal and dyslexic readers. J Exp Child Psycho1 1980 : 29 : 294-30.5. Borel-Maisonny S, De Sacy S. Bien lire et aimer lire : methode phonetique gestuelle de Borel-Maisonny. Paris : ESF : 1957. De Becque B, Blot S, Durant H, Le Lay C, Hannequart D. Billard C, et al. A propos d’une experience integrative pour la pedagogic des enfants porteurs d’une dysphasie de developpement. ANAE 1990 : 2 : 205-7.