Annales de chirurgie 128 (2003) 34–39 www.elsevier.com/locate/annchi
Article original
Endométriose vésicale ou urétérale, symptomatique : à propos de 8 cas et revue de la littérature Symptomatic bladder or ureteral endometriosis: report of 8 cases and review of the literature O. Acker a, Y. Robert b, F. Carpentier c, D. Vinatier d, M. Cosson d,* a
Service de gynécologie obstétrique, centre hospitalier de Roubaix, pavillon Paul-Gelle, 91, avenue J.-Lagache, BP 359, 59056 Roubaix cedex 1, France b Service de radiologie de l’hôpital Jeanne-de-Flandre, CHRU, 59037 Lille cedex, France c Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, centre hospitalier de Roubaix, boulevard Lacordaire, 59056 Roubaix cedex 1, France d Service de gynécologie obstétrique de l’hôpital Jeanne-de-Flandre, CHRU, 59037 Lille cedex, France Reçu le 5 février 2002 ; accepté le 7 novembre 2002
Résumé Buts. – À travers 8 cas d’endométrioses vésicales ou urétérales, nous analysons les symptômes permettant d’évoquer le diagnostic et nous étudions les possibilités thérapeutiques. Matériels et méthodes. – Nous avons recensé rétrospectivement les cas d’endométrioses vésicales et/ou urétérales sur une période de 11 ans (novembre 1989–juillet 2000), ayant eu soit un geste urétéral chirurgical (réimplantation, suture sur sonde) soit un geste d’exérèse vésicale. Résultats. – Sur 8 dossiers sélectionnés, trois comportaient des atteintes vésicales et cinq des lésions urétérales. La seule complication postopératoire était un reflux vésico-urétéral après réimplantation urétérale sur une vessie psoïque. Aucune récidive constatée sur l’arbre urinaire. Conclusion. – Les lésions d’endométrioses urétérales ou vésicales symptomatiques justifient un traitement par résection chirurgicale. Les atteintes vésicales peuvent dans la majorité des cas être traitées par cœliochirurgie lorsqu’elles sont isolées. Les lésions d’endométrioses urétérales mettent en jeu le pronostic fonctionnel rénal. Dans un premier temps, une urétérolyse percœlioscopique ou un geste de dilatation par urétéroscopie, associée à un traitement médical, peut être tentée sous couvert d’une surveillance rapprochée. En cas de persistance ou de récidive le geste d’exérèse est indiqué. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Objectives. – The aim of this study was to determine the symptoms of bladder and ureteral endometriosis and to review the treatment approaches. Materials and Methods. – We conducted a retrospective studyover the period November 1989–July 2000. We reviewed the medical data of all women with bladder or utereral endometriosis who underwent a major surgery (ureteral reimplementation on psoas bladder, partial resection of the ureter, partial cystectomy). Results. – Eight women met the defined selection criterion, three with bladder injuryand five with ureteral injury. The only adverse postoperative complication was a passive ureteral reflux following ureteral reimplementation on psoas bladder. No recurrence on the urinary tract were reported. Conclusion. – Surgical treatment is indicated for patient suffering from symptomatic bladder or ureteral endometriosis. Isolated bladder injuries due to endometriosis are mostly treated by laparoscopic surgery. Ureteral endometriosis may deteriorate the renal function. The initial
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M. Cosson) © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. PII: S 0 0 0 3 - 3 9 4 4 ( 0 2 ) 0 0 0 1 0 - X
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step of the treatment may include an uterolysis by coelioscopy or an ureteral dilatation by ureteroscopy together with a medical treatment. The renal function must be closely monitored. In case of persistent or recurrent endometriosis, an ureteral resection would be justified. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clés : Endométriose ; Vésicale ; Urétérale ; Urinaire Keywords: Endometriosis; Ureteral; Bladder; Urinary
1. Introduction L’endométriose est une pathologie de la femme en période d’activité génitale et se définit par la présence de tissus ressemblant à l’endomètre, en situations extra-utérines. Cette pathologie affecterait 10 à 20 % des femmes en période d’activité génitale [1]. Les localisations sont multiples, mais l’atteinte se situe souvent dans le pelvis (trompes, ovaires, ligaments larges, vessie, péritoine pelvien). Des cas rares font état de lésions digestives basses voire d’atteintes extrapelviennes (périnée, cicatrice de laparotomie, rein) [2]. Les atteintes endométriosiques les plus classiquement retrouvées siègent dans le culde-sac de Douglas, les ligaments utéro-sacrés, l’espace vésico-utérin et le septum rectovaginal [3]. On estime à 1 ou 2 % l’incidence de l’atteinte urinaire [1,3]. L’atteinte vésicale en représente de 25 à 85 % des cas, l’atteinte urétérale 15 à 75 % et exceptionnellement des localisations rénales (4 %) [4]. L’efficacité des traitements non chirurgicaux est variable, ces traitements sont parfois considérés comme palliatifs et temporaires [5]. L’endométriose vésicale et/ou urétérale pose trois problèmes spécifiques : • d’ordre diagnostique, puisque l’une et l’autre sont souvent peu, voire asymptomatiques ; • d’ordre fonctionnel sur le rein ipsilatéral et ne concerne que les formes où il existe une atteinte urétérale. Cette forme évolue souvent à bas bruit et doit être dépistée et suivie avant que ne surviennent des troubles irréversibles de la fonction rénale ; • de tactiques thérapeutiques nécessitant le meilleur rapport coût/bénéfice pour la patiente et devant être adaptée au type d’endométriose.
simple et sans complication peropératoire, ainsi que les lésions endométriosiques vésicales n’atteignant que la séreuse et donc facilement accessibles à un traitement superficiel. Huit patientes ont été retenues. Trois d’entre elles avaient une atteinte vésicale, les 5 autres une atteinte urétérale. Pour le groupe des lésions vésicales, deux étaient des résections programmées, la troisième concernait une plaie vésicale effectuée pour parfaire l’exérèse du nodule endométriosique. Le groupe des lésions urétérales a inclut 4 réimplantations urétérales sur vessie psoïque programmées et une suture de brèche urétérale sur sonde. Deux des trois lésions vésicales étaient traitées par cœlioscopie et une par laparotomie. L’indication de laparotomie (patiente 1) a été prise du fait d’un antécédent de laparotomie pour occlusion intestinale aiguë. C’est au cours de cette intervention qu’une résection rectosigmoïdienne a été pratiquée pour endométriose digestive. Deux des trois résections vésicales (patientes 1 et 3), étaient pratiquées après réalisation d’une cystoscopie préopératoire, permettant d’objectiver la lésion et d’en préciser les rapports avec les orifices urétéraux. La réparation des plaies vésicales a consisté, dans les trois interventions, en une suture à distance des orifices urétéraux, suivie d’un test d’étanchéité au bleu de méthylène. Seule une patiente présentant une atteinte urétérale a eu un traitement par cœliochirurgie (patiente 5). La brèche a été suturée sur sonde urétérale, préalablement posée sous contrôle cystoscopique. Les quatre autres patientes (patientes 4, 6, 7, 8) ont eu une laparotomie pour résection et réimplantation urétérale sur vessie psoïque. 3. Résultats
2. Matériel et méthodes Il s’agit d’une enquête descriptive, rétrospective et multicentrique concernant l’ensemble des dossiers présentant ce type de pathologie sur une période de 11 ans de novembre 1989 à juillet 2000 pour le service de gynécologieobstétrique de Roubaix et ceux pris en charge à l’hôpital Jeanne de Flandre à Lille, depuis 1996. Nous avons recensé parmi toutes les interventions chirurgicales pour endométriose, celles ayant nécessité un geste chirurgical sur le tractus urinaire mentionné dans le compte rendu opératoire. Parmi elles, furent éliminées les atteintes urétérales superficielles n’ayant nécessité qu’une urétérolyse
L’ensemble des cas sélectionnés est représenté dans le Tableau 1. L’âge moyen des patientes au moment du geste chirurgical vésical ou urétéral, était de 33,8 ans (extrêmes : 21–51). 3.1. Circonstances de découvertes Seule la pathologie de la patiente n° 1 s’est révélée sur un mode aigu. Pour les autres, la découverte de la maladie endométriosique s’est faite sur un mode classique à type de douleurs pelviennes à rythme cataménial associée selon les cas à des dyspareunies, algoménorrhées, pesanteur, dysurie, ténesme, cystalgie. Le délai moyen entre l’intervention sur le
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Tableau 1 Tableau récapitulatif des 8 cas d’endométriose vésicale ou urétérale Lésions vésicales Patiente n° Age lors du 1er traitement chirurgical Traitement chirurgical antérieur Douleur pelvienne Signes fonctionnels urinaires Délai entre le diagnostic et le traitement chirurgical Voie d’abord chirurgicale Geste réalisé
Lésions utérérales
1 28
2 31
3 41
4 51
5 47
6 21
7 27
8 25
+
–
+
+
+
+
+
+
– +
+ +
+ +
+ –
– +
+ +
+ +
+ –
1 an
?
8 ans
1 an
8 ans
6 mois
2 ans
7 ans
Laparotomie Rpva
cœlioscopie Rpva
Laparotomie RuVpb
Laparotomie RuVpb
Laparotomie RuVpb
8j normale
8j normale
Laparotomie RuVpb avec ovariectomie bilatérale 15 j normale
cœlioscopie Rpuc
Durée d’hospitalisation Suite opératoire
cœlioscopie Rpva avec ovariectomie bilatérale 8j normale
15 j normale
15 j normale
9j normale
Complication post opératoire Récidive
–
–
–
–
–
–
+
–
–
–
–
reflux vésico-rénal –
14 j infection urinaire –
–
+
a
: résection partielle vésicale ; b : réimplantation urétérale sur vessie psoïque ; c : résection partielle urétérale a : partial cystectomy; b: ureteral reimplantation on psoas bladder; c: partial resection of ureter.
tractus urinaire et le diagnostic de la maladie est de 47,14 mois ( extrêmes 6–96 mois). 3.2. Traitements médicaux Sept patientes sur huit ont eu traitement médical de l’endométriose avant l’intervention sur le tractus urinaire. Aucun traitement par analogue de LHRH n’a été instauré avant d’avoir eu un diagnostic formel anatomopathologique. La symptomatologie de la patiente n° 8 justifia l’administration de cures d’analogues de la LHRH en pré et postopératoire. Les deux patientes n’ayant pas eu de traitement par analogue de la LHRH en préopératoire sont les patientes n° 2 et n° 5, chez qui un geste « agressif » sur le tractus urinaire n’était pas programmé à l’avance. 3.3. Les signes fonctionnels La symptomatologie urinaire était pauvre, mais surtout peu spécifique. La douleur pelvienne était présente dans la majorité des cas (75 %). Seule la patiente n° 1 décrivait des hématuries macroscopiques, soit environ 33 % des lésions vésicales. Les symptômes décrits par les patientes atteintes de lésions urétérales étaient des douleurs lombaires unilatérales ou des infections récidivantes du haut appareil urinaire. Trois patientes ayant des lésions urétérales, ont été suivies et traitées pour l’apparition ou la découverte fortuite d’une urétéro-hydronéphrose, soit au cours d’un bilan de débrouillage de la maladie endométriosique diffuse, soit à l’occasion d’examen de surveillance d’une endométriose traitée. Quatre des atteintes urétérales (patientes 5, 6, 7, 8) étaient localisées à gauche et une seule du côté droit.
3.4. Résultat postopératoire et récidive Toutes les patientes ont été immédiatement soulagées par le geste opératoire, avec l’obtention d’une nette régression de la symptomatologie pelvienne et urinaire lorsqu’elle existait. La durée d’hospitalisation tout geste confondu est en moyenne de 10,25 j (extrêmes 5 à 15 j). Les suites opératoires immédiates furent tout à fait simples pour l’ensemble de notre série. L’ablation des sondes urinaires après suture vésicale a été faite sans complication infectieuse. La patiente n° 1 a présenté une récidive 8 mois après l’intervention, sous la forme d’un nodule de la cloison rectovaginale. Elle fut perdue de vue malgré l’indication d’un nouveau traitement chirurgical. La patiente n° 2 présenta une grossesse normale dans le courant de l’année 2001. Aucune patiente ne bénéficia d’un geste de résection transurétrale en première intention. Les patientes n°4 et 5 ont eu une annexectomie bilatérale au cours du dernier traitement chirurgical. Ainsi, 3 de ces 5 patientes ont bénéficié d’une hormonosuppression transitoire ou définitive dans la période postopératoire. Dans ce groupe, nous n’avons observé qu’une seule complication postopératoire tardive à type de reflux vésicourétéral total et passif persistant 3 ans après l’intervention et restant asymptomatique (patiente n° 6).
4. Discussion L’endométriose symptomatique du tractus urinaire est une pathologie rare, qui nécessite un traitement spécifique. Nous la différencions des atteintes mineures, asymptomati-
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ques, facilement traitées lors d’un geste chirurgical gynécologique. L’endométriose vésicale, comme celle de l’arbre urinaire en général, est de diagnostic difficile, puisqu’il n’existe pas de signe pathognomonique et que la symptomatologie est souvent très discrète [6]. Nous recherchons sa présence devant des signes évocateurs tels que dysurie, douleur ou pesanteur suspubienne, rarement des hématuries, mais en majorité à rythme cataménial [7–10]. L’examen clinique est souvent peu contributif, mais peut retrouver un nodule sensible palpable au toucher vaginal dans environ 50 % des cas [5]. La douleur lors de la période menstruelle, empêche dans de nombreux cas un examen satisfaisant. Seule la patiente n° 1 décrit des hématuries macroscopiques, ce qui est en accord avec la fréquence rencontrée dans des études plus vastes [3]. Le diagnostic formel dans ce cas de figure est fait par une biopsie transmurale percystoscopique sur un nodule bleuté souvent sous-muqueux, à réaliser en période cataméniale pour en augmenter la sensibilité [9]. Cet examen permet en outre d’infirmer le diagnostic de lésion carcinomateuse vésicale, mais également de préciser la topographie du nodule, notamment sa situation par rapport aux orifices urétéraux et enfin dans certaines conditions d’en réaliser le traitement. Les 3 cas d’atteintes vésicales présentaient une infiltration de la musculeuse vésicale. Certaines de ces patientes s’orientent d’emblée en consultation urologique. L’hématurie macroscopique persistante constitue alors le principal motif de consultation. Dans de nombreux cas lors du bilan endoscopique, la résection de la lésion est possible et permet d’obtenir de bons résultats. Le traitement peut être médical (progestatifs, analogues de la LHRH) et constitue une bonne alternative, permettant sinon la régression tout au moins la diminution de la taille des lésions [11]. Il semble en fait que l’efficacité des traitements médicaux varie selon la profondeur de l’atteinte endométriosique. Leur indication peut être maintenue pour les atteintes vésicales en cas de symptomatologie peu gênante chez des patientes préménopausiques ou chez de jeunes patientes ayant un désir de grossesse à court terme [12]. En cas d’échec de ces différentes techniques, le traitement chirurgical de référence de l’endométriose vésicale infiltrante est, à la lumière des dernières publications, cœliochirurgical, permettant de façon comparable, voire supérieure aux laparotomies, d’obtenir des résultats durables sans trouble de la fertilité ultérieure [3,7,11]. L’exérèse vésicale doit être la plus complète possible, évitant au maximum les récidives [3,7]. Dans sa série de 13 patientes, Chapron et al. [11] ont indiqué qu’ils réalisaient préférentiellement des points séparés en un plan pour la suture vésicale, après mise en place dans le temps préopératoire de deux sondes urétérales. Dans le cas d’une atteinte urétérale, deux types de lésions sont classiquement décrites [4,9]. La forme extrinsèque, la plus fréquente 75 à 80 %, est caractérisée par la présence de glandes endométriales et de stroma en périphérie de l’adventice et des tissus scléreux
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Fig. 1. Patiente n° 4 : endométriose urétérale intrinsèque. HES (× 25).
engainant l’uretère. Elle correspond en fait à l’inclusion accidentelle de l’uretère dans un nodule endométriosique. La forme intrinsèque dont la fréquence est estimée à 20 à 25 %, correspond à la présence de glande et de stroma dans la muqueuse, la lamina propria et/ou la musculeuse de l’uretère (Fig. 1 ), voire même dans la lumière urétérale [4,11]. Cette distinction n’a pas d’implication directe sur le traitement chirurgical puisque son diagnostique est fait sur l’étude anatomopathologique des pièces d’exérèses. Mais la forme dite « intrinsèque » présente pour l’uretère atteint un caractère plus péjoratif et une exérèse incomplète de ce type de lésion expose à un risque accru de récidive. Les lésions urétérales sont unilatérales dans 89 % des cas, siégeant dans 48 % des cas à gauche et 41 % des cas à droite. Douze cas de lésions bilatérales ont été publiés et leur fréquence est estimée à 15–20 % de l’ensemble des atteintes urétérales [4,13–15]. Dans notre série les lésions sont toutes unilatérales et contrairement aux séries publiées, 80 % d’entre-elles se situent à gauche. Cette particularité est également décrite par Vercellini et al. [16]. Toutes les lésions urétérales de notre étude sont des lésions intrinsèques, ceci explique les discordances de notre série avec les études antérieures, concernant le nombre de lésions rencontrées, les modes de prise en charge et leurs résultats. Environ 30 % des cas d’urétéro-hydronéphrose par atteinte urétérale endométriosique, se solderaient par la perte du rein homolatéral [6,11]. Ces lésions évoluant à bas bruit, le pronostic rénal est souvent mis en danger et doit inciter, en cas de tentative de traitement médical de première intention, à surveiller très régulièrement la fonction et l’aspect de l’arbre urinaire [4,6,11]. En ce qui concerne les atteintes urinaires symptomatiques, l’arsenal des possibilités médicales est très restreint. L’utilisation de progestatifs ou de danazol ne saurait constituer un traitement spécifique. Leur efficacité symptomatique est inconstante et n’évite pas, dans notre expérience, contrairement à certaines séries publiées [17], une sanction chirurgicale. L’apport des analogues de la LHRH a permis la facilitation des gestes chirurgicaux ultérieurs, ainsi qu’un réel im-
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pact sur la symptomatologie douloureuse [18,19]. Rivlin et al. [1] ont montré qu’utilisé, pour des atteintes urétérales obstructives extrinsèques, un traitement par analogue de la LHRH, pouvait éviter le traitement chirurgical. Celui-ci semble plus efficace en cas de lésion jeune, rompant ainsi précocement le cycle inflammatoire propice à la formation d’une sclérose cicatricielle [4]. Dans la majorité des cas, l’étendue de l’obstruction urétérale est modérée (< 3 cm). Le traitement chirurgical proposé est donc soit une résection anastomose du tronçon pathologique, soit une résection réimplantation de l’uretère en cas d’atteinte urétérale distale ou vésicale à proximité des orifices urétéraux. En cas de lésion jeune chez une patiente en période d’activité ovarienne, un traitement médical temporaire par analogue de la LHRH peut être proposé, associé ou non à des gestes de protection du parenchyme rénal (sonde JJ, dilatation par sonde urétérale à ballonnet) selon l’importance du retentissement rénal [2,20]. Parallèlement, l’urétérolyse doit être systématiquement pratiquée, lorsqu’elle est possible, lors d’une cœlioscopie diagnostique. En cas d’échec des traitements médicaux ou bien de récidive après un traitement chirurgical modéré, l’exérèse chirurgicale devient inévitable, puisqu’elle a comme but le sauvetage du rein homolatéral [21]. En cas de suspicion d’atteinte du tractus urinaire (symptômes évocateurs, endométriose diffuse), une échographie rénale est systématiquement pratiquée à la recherche d’un syndrome obstructif infraclinique. Cet examen est complété par une urographie intraveineuse, voire un examen par IRM qui est moins spécifique mais plus sensible (Figs. 2 et 3 ). Les informations fournies se révèlent essentielles en cas d’exérèse programmée, notamment par cœlioscopie [22]. Lorsqu’une atteinte vésicale est suspectée, la cystoscopie est l’examen de choix, soit (comme nous l’avons déjà vu) pratiquée par un urologue dans un but thérapeutique ; soit en préopératoire immédiat, pour visualiser la lésion et sa distance par rapport aux orifices urétéraux [23]. L’intervention programmée s’effectue alors en présence d’un gynécologue et d’un urologue, pour qu’un geste optimal soit pratiqué selon les constatations peropératoires, secondés par les résultats des examens radiologiques.
Fig. 2. Patiente n° 4 : obstruction urétérale droite. RMN coupe frontale, T2.
5. Conclusion La symptomatologie urinaire basse et cyclique doit donc conduire à faire réaliser une cystoscopie pour ne pas omettre une lésion vésicale infiltrante, qui modifierait la voie et le geste chirurgical. Une atteinte vésicale invalidante et isolée, lorsqu’elle est confirmée par la cystoscopie, doit faire l’objet d’une exérèse. L’atteinte urétérale impose une stratégie particulière du fait de son caractère insidieux et doit être systématiquement recherchée en cas de lésions profondes. Tout traitement à minima (analogues de la LHRH ou urétérolyse par cœlioscopie) d’une sténose urétérale, doit être suivi d’une surveillance accrue de la fonction rénale.
Fig. 3. Patiente n° 3 : nodule endométriosique vésical latéral gauche. RMN coupe transversale, en suppression de graisse.
Dans un second temps, si la sténose s’avère récidivante ou d’emblée si l’uretère est intimement lié au nodule endométriosique, la résection segmentaire s’impose. Cette résection sera suivie par un geste d’anastomose termino-terminale ou par une réimplantation urétérale sur vessie psoïque selon la topographie et la longueur du moignon restant.
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