ARTICLE ORIGINAL
J Fr. Ophtalmol., 2005; 28, 7, 701-706 © Masson, Paris, 2005.
Évaluation clinique de 5FU-héparine dans la prévention de la prolifération vitréorétinienne S. Scheer, C. Morel, F. Poisson, S. Bonnel, O. Touzeau, J.-A. Sahel, L. Laroche Centre Hospitalier National d’Ophtalmologie des Quinze-Vingts, 28, rue de Charenton, 75012 Paris cedex 12. Correspondance : S. Scheer, à l’adresse ci-dessus. E-mail :
[email protected] Reçu le 1er juillet 2004. Accepté le 5 novembre 2004. Prevention of proliferative vitreoretinopathy using 5-FU heparin: clinical tolerance and efficacy S. Scheer, C. Morel, F. Poisson, S. Bonnel, O. Touzeau, J.-A. Sahel, L. Laroche J. Fr. Ophtalmol., 2005; 28, 7: 701-706 Purpose: To study the safety and efficacy of adjuvant combination therapy using 5-fluorouracil and heparin for prevention of proliferative vitreoretinopathy (PVR) during vitrectomy for retinal detachment surgery. Methods: Two consecutive groups of 30 eyes with a rhegmatogenous retinal detachment (grade C1 or more) were prospectively compared. In the study group, 5-FU and heparin were administrated in the intraoperative infusion. Clinical safety and the efficacy were regularly studied over 1 year. Results: In the 5-FU heparin therapy group, keratitis was more frequently observed the 1st day after surgery (p=0.005), but not after 1 week (p=0.54). However, conjunctival hyperemia was more severe after 1 and 7 days (p=0.04). In both groups, no differences were found concerning intraocular pressure, postoperative hemorrhage or inflammatory reaction (flare) of the anterior chamber and the aspect of the eyelids (p≥0.14). The number of reoperations resulting from PVR, after 1 month and 1 year, was not significantly different between the two groups (p≥0.3). The reattachment rate and visual acuity (BSCVA) were not statistically different after 1 year (p≥0.12). Conclusion: Adjuvant combination therapy using 5-FU and heparin seems to be safe. However, its efficacy needs to be demonstrated by larger studies including eyes presenting a lower grade of PVR (grade B).
Key-words: Proliferative vitreoretinopathy, 5-fluorouracil, heparin, retinal detachment. Évaluation clinique de 5FU-héparine dans la prévention de la prolifération vitréorétinienne Objectif : Le but de cette étude est d’évaluer la tolérance et l’efficacité de l’adjonction de 5FU et d’héparine dans le liquide de vitrectomie pour prévenir la prolifération vitréorétinienne (PVR) dans la chirurgie du décollement de rétine. Matériel et méthodes : Deux groupes consécutifs de 30 yeux présentant un décollement de rétine rhegmatogène (stade C1 ou plus) ont été prospectivement comparés. Une association de 5 fluoro-uracile (5-FU) et d’héparine a été ajoutée dans le liquide de vitrectomie d’un groupe. La tolérance clinique et l’efficacité ont été évaluées régulièrement durant 1 an. Résultats : Le nombre de kératites le lendemain de l’intervention était plus important dans le groupe traité (p = 0,005). Cette différence avait disparu une semaine après l’intervention (p = 0,54). L’hyperhémie conjonctivale était plus importante dans le groupe traité le lendemain et une semaine après l’intervention (p = 0,04). En revanche, l’état cutané, le Tyndall hématique, l’inflammation de la chambre antérieure et la pression intraoculaire n’étaient pas différents dans les deux groupes (p ≥ 0,14). Le nombre de ré interventions à 1 mois et à 1 an n’était pas significativement différent (p ≥ 0,3). L’état anatomique (« rétine à plat ») et fonctionnel (acuité visuelle) n’étaient pas différents dans les deux groupes à 1 an (p ≥ 0,12). Conclusion: L’adjonction de 5-FU et d’héparine dans le liquide de vitrectomie est bien tolérée. Toutefois, son efficacité non démontrée dans cette étude devrait être évaluée sur un plus grand nombre d’yeux avec des stades de PVR moins évolués (stade B).
Mots-clés : Prolifération vitréorétinienne, 5-FU, héparine, décollement de rétine.
INTRODUCTION La prolifération vitréorétinienne (PVR) est la cause essentielle de l’échec de la chirurgie du décollement de rétine. Le traitement du décollement de rétine compliqué de PVR repose actuellement sur un traitement chirurgical adéquat : pexie des déhiscences, vitrectomie, dissection des membranes rétractiles, rétinotomie et tamponnement. De nombreuses molécules susceptibles de limiter la PVR ont été étudiées in vitro et sur l’animal. Aucune n’est actuellement utilisée de façon courante. Le 5 fluorouracile (5-FU) et l’héparine ont été récemment utilisés seuls ou en association chez l’homme [1-5]. Une certaine efficacité de l’association de 5FU et de l’héparine de bas poids moléculaire dans le liquide de vitrectomie a été rapportée récemment [1]. Nous avons étudié la tolérance et l’efficacité clinique d’une association de 5-FU et d’héparine dans le liquide d’infusion chez des patients opérés de décollement de rétine complexe nécessitant une chirurgie ab interno.
MATÉRIEL ET MÉTHODE Description générale de l’étude Il s’agit d’une étude prospective non randomisée comparant deux séries consécutives de patients opérés entre septembre 2002 et mai 2003. La tolérance clinique d’un protocole de 5-FU et d’héparine a été étudiée in vivo sur des décollements de rétine
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S. Scheer et coll.
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opérés ab interno. Deux groupes d’yeux ont été comparés. Dans un groupe (groupe « traités »), une association de 5-FU et d’héparine a été ajoutée dans le liquide d’infusion de la vitrectomie contrairement à l’autre groupe (groupe « témoin »). La tolérance et l’efficacité du protocole ont été jugées sur des critères exclusivement cliniques. Deux séries chirurgicales de 30 yeux ont été comparées. Trente yeux de 29 patients présentant un décollement de la rétine avec une PVR de stade C1 ou plus, nécessitant une chirurgie ab interno et acceptant l’étude après information, ont été opérés avec adjonction de 5-FU et d’héparine. Les yeux de ce groupe qui ont nécessité plusieurs interventions n’ont reçu le protocole que lors de la 1re intervention. Un deuxième groupe de même effectif a été opéré sans ce protocole (patients présentant un décollement de rétine avec une PVR de stade C1 ou plus et nécessitant aussi une chirurgie ab interno). Deux chirurgiens expérimentés dans la chirurgie vitréorétinienne ont opéré l’ensemble des yeux entre décembre 2000 et mars 2001 selon une technique conventionnelle (vitrectomie 3 voies, dissection des membranes rétractiles, pexie des déhiscences, tamponnement interne par huile de silicone). Une indentation externe, une rétinotomie, une phacoexérèse avec ou sans implant ont été effectuées selon le besoin. Les deux groupes différaient par l’adjonction ou non dans le liquide d’infusion de la vitrectomie de 5-FU (5 FluoroUracile ICN, Orsay, France) et d’héparine (Héparine Choay, Sanofi-Synthélabo, Paris, France). Des poches de 500 ml de BSS® (Alcon, FortWorth, Texas, USA) ont été utilisées comme liquide d’infusion des deux groupes. Dans le groupe « traités », le dosage du 5-FU et de l’héparine était respectivement de 200 μg/ml et de 5 UI/ml. La poche d’infusion contenant l’association 5-FU héparine a été utilisée au maximum pendant une heure. Au bout de ce temps, cette poche était substituée par une poche de BSS®, si nécessaire. En fin d’intervention, une pommade à la dexaméthasone (Sterdex®, Novartis, Ciba Vision, Rueil-Malmaison, France) a été appliquée dans l’œil. Le traitement postopératoire comprenait trois gouttes par jour d’un collyre à la dexaméthasone (Tobradex®, Alcon, FortWorth, Texas, USA).
J. Fr. Ophtalmol.
rescéine) a permis de préciser l’état de la conjonctive (hyperhémie, chémosis), de la cornée (kératite, œdème), de la chambre antérieure (inflammation, hémorragie) et du cristallin. La pression intraoculaire a été mesurée par le tonomètre à l’aplanation de Goldmann. L’état du segment postérieur a été analysé par biomicroscopie indirecte. La PVR a été quantifiée selon la classification de la Vitreous Societey modifiée par Machemer en 1991 [6].
Analyse des données Avant d’analyser la tolérance du protocole, nous avons vérifié que le groupe « traités » et le groupe « témoins » étaient comparables. Toutes les analyses statistiques ont été faites à l’aide de tests non paramétriques. L’analyse de la distribution des variables qualitatives a été effectuée par le test du χ2 et la comparaison des variables quantitatives des deux groupes par le test de Mann-Whitney. L’absence de perception lumineuse et la perception lumineuse ne constituent pas véritablement une mesure quantitative de l’acuité visuelle. De plus, il existait de nombreuses acuités très basses, pour lesquelles les mesures étaient nécessairement très imprécises. Nous avons donc transformé les données quantitatives de l’acuité visuelle en variables qualitatives ordinales selon le codage suivant : absence de PL = 0, PL = 1, VBLM = 2, CLD = 3, AV > 1/20e = 4. Les autres variables quantitatives ordinales comprenaient le stade de la kératite (0 à 4 +), l’érythème conjonctival et le chémosis (0 à 4 +), l’érythème palpébral (de 0 à 4 +), le degré d’inflammation de la chambre antérieure (0 à 4 +). Celui-ci était différencié du tyndall hématique de chambre antérieure lui aussi coté de 0 à 4 +. Les variables quantitatives étaient la pression intra-oculaire, le nombre d’interventions et la durée de la chirurgie. L’analyse statistique a été réalisée à l’aide du logiciel Xlstat 6.0 (Grimmer® logiciel, Paris, France). Le seuil de 0,05 a été utilisé comme limite de significativité.
RÉSULTATS
Évaluation clinique
Comparaison des deux groupes avant la chirurgie
L’évaluation clinique de la tolérance a été faite par le chirurgien à intervalle régulier : au lendemain de l’intervention (J1), puis à une semaine (J7), à 1 mois (M1), 3 mois (M3) et 1 an (A1). La tolérance et l’efficacité ont été appréciées par l’examen clinique. L’acuité visuelle corrigée a été mesurée de loin sur l’échelle de Monoyer. Pour les acuités visuelles basses, le décompte des doigts (« CLD »), la visualisation de la main qui bouge (« VBLM ») ou la perception lumineuse (« PL ») ont été utilisés. L’érythème palpébral a été noté. L’examen biomicroscopique (avec instillation d’une goutte de fluo-
Les caractéristiques initiales des deux groupes sont indiquées dans le tableau I. Les deux groupes ne présentaient pas de différence significative pour l’âge, le sexe, l’acuité visuelle et la sévérité de la PVR (p ≥ 0,11).
Données de la chirurgie Dans le groupe des patients traités, la durée de perfusion du mélange était en moyenne de 48 min, le volume infusé contenant le 5-FU et l’héparine en moyenne de 266 ml. La durée de la chirurgie est compa-
Vol. 28, n° 7, 2005
5FU-héparine et prolifération vitréorétinienne
Tableau I Description clinique initiale des deux groupes.
Tableau II Tolérance clinique à J1 et J7.
Groupe Groupe « Témoins » « Traités » Âge (années)
57,1
59,2
femmes
40 %
40 %
homme
60 %
60 %
Étendue de la PVR postérieure
< 2 quadrants
48 %
53 %
> 2 quadrants
52 %
47 %
PVR antérieure
présente
60 %
70 %
absente
40 %
30 %
Sexe
Étendue de la PVR antérieure
< 2 quadrants
44 %
40 %
> 2 quadrants
56 %
60 %
PL Acuité visuelle VBLM préopératoire CLD ≥ 1/20
e
16,6 %
23,3 %
43,3 %
56,7 %
23,3 %
16,7 %
16,6 %
3,3 %
Date Critères
p 0,11
Érythème cutané
J1
1,00 J1 0,79
Kératite J7
0,42
0,79
0,54
rable entre les deux groupes : 86,2 min dans le groupe « témoins » contre 93,5 min dans le groupe « traités » (p = 0,32).
Hyperhémie conjonctivale Tyndall hématique Inflammation de la chambre antérieure PIO (mmHg)
J1 J7 J1 J1
Groupe Groupe « Témoins » «Traités»
modéré
33,3 %
43,3 %
sévère
66,7 %
56,7 %
absente
87,7 %
46,7 %
présente
13,3 %
53,3 %
absente
20,0 %
26,7 %
présente
80,0 %
73,3 %
modérée
83,3 %
40,0 %
sévère
16,7 %
60,0 %
modérée
73,3 %
46,7 %
sévère
26,7 %
53,3 %
absent
80,0 %
93,3 %
présent
20,0 %
6,7 %
modérée
63,3 %
73,3 %
sévère
36,7 %
27,7 %
p 0,42 0,005 0,54 0,04 0,04 0,13 0,40
modérée
16,7 %
33,3 %
sévère
83,3 %
66,7 %
J1
16,8
15,6
0,20
J7
16,8
15,6
0,20
J7
0,14
Tolérance (tableau II) En peropératoire, aucun problème majeur lié à la manipulation du 5-FU ou de l’héparine n’a été noté. Notamment, il n’y a eu aucune modification du cristallin ou de l’implant en peropératoire, ni d’hémorragie particulière avec l’utilisation du protocole. À une occasion, la poche du champ opératoire contenant le liquide mélangé au 5-FU héparine s’est renversée sur l’aide opératoire sans aucune conséquence. Le Tyndall hématique ou inflammatoire, la pression intraoculaire moyenne et l’état cutané palpébral n’étaient pas significativement différents en postopératoire immédiat (p ≥ 0,13). Le nombre de kératites était supérieur dans le groupe « traités » à J1, mais cette différence n’était pas retrouvée à J7. L’hyperhémie conjonctivale était plus importante dans le groupe « traités » à J1 et J7. Il y a eu deux hyphémas dans le groupe « traités » ; aucun dans le groupe « témoin ». Sur ces deux yeux, un seul avait eu une rétinotomie. Un an après l’opération, il n’y a eu aucune décompensation endothéliale de la cornée. La pression intraoculaire moyenne et le nombre de patients traités par hypotonisants n’a pas montré de différence entre les deux groupes de patients (tableau III). Le protocole ne semble pas cataractogène.
Tableau III État des deux groupes à 1 mois, 3 mois et 1 an. Groupe Groupe « Témoins » « Traités » Rétines à plat Présence de silicone
1 mois
66,7 %
76,7 %
0,39
3 mois
66,7 %
66,7 %
1,00
1 an
100 %
90 %
0,08
3 mois
76,7 %
86,7 %
0,31
1 an
36,7 %
23,3 %
0,26
10 %
3,3 %
0,30
1,8
1,6
0,46
PL + ou –
13,3 %
13,3 %
VBLM
Rétinotomies complémentaires à 1 mois Nombre de chirurgies rétiniennes à 1 an Acuité visuelle à 1 an
PIO à 1 an (mmHg)
p
10,0 %
10,0 %
CLD
30 %
26,7 %
≥ 1/20e
46,7%
50,0%
12,8
14,9
0,12
26,7 %
33,3 %
0,57
moyenne Traitement hypotonisant
0,99
703
S. Scheer et coll.
Résultats anatomiques et fonctionnels (tableau III) Le nombre de réinterventions complémentaires après 1 mois n’était pas statistiquement différent entre les deux groupes (p = 0,63). Le succès anatomique n’était pas différent entre les deux groupes à 1 et 3 mois et à 1 an postopératoires (p ≥ 0,08). À 3 mois et à 1 an, la proportion de patients avec de l’huile de silicone intraoculaire n’était pas différente dans les deux groupes (p ≥ 0,26). L’huile de silicone était encore en place dans environ un tiers des yeux après un an (refus du patient, hypotonie importante faisant craindre une atrophie après ablation, bonne tolérance du silicone et risque très important de récidive du décollement de rétine à l’ablation). À 1 an, l’acuité visuelle était significativement améliorée dans les deux groupes par rapport à l’acuité visuelle préopératoire (p ≤ 0,005). En revanche, les acuités visuelles à 1 an postopératoire n’étaient pas différentes entre les deux groupes (p = 0,99).
DISCUSSION
704
La survenue de la PVR constitue le problème majeur de la chirurgie du décollement de la rétine. Les essais thérapeutiques se sont multipliés ces dernières années sans aboutir à une application clinique courante (tableau IV) [2-5, 7-15] (pour revue, [16]). Les molécules les plus étudiées pour inhiber le développement de la PVR sont la daunomycine, le 5-FU, l’héparine et les corticoïdes. La puissance statistique de la plupart des études publiées est faible : absence de randomisation, pas de groupe témoin, durée de suivi faible (tableau IV). En 2001, Asaria et al. [1] ont rapporté une diminution significative de récidive de PVR postopératoire après utilisation de 5-FU et d’héparine de bas poids moléculaire dans le liquide d’infusion (13 % versus 26 %, p = 0,02 ; n = 169) [1]. Nous avons voulu étudier l’intérêt clinique de l’adjonction de cette association dans le liquide de l’infusion de vitrectomie. Le 5-FU est un anti-métabolite qui inhibe la synthèse de l’ADN et empêche la migration des cellules de l’épithélium pigmentaire. L’héparine inhibe la prolifération des cellules de l’épithélium pigmentaire et diminue la formation de fibrine sans augmenter le risque hémorragique [4]. Ces deux molécules pourraient avoir une action synergique sur la PVR. L’application du protocole est d’utilisation facile compte tenu de la grande disponibilité de ces produits en ophtalmologie et de leur relative facilité de manipulation, contrairement à la daunomycine. Chez l’animal, la dose efficace de daunomycine (5 μg en injection intravitréenne) est proche de la dose toxique avec, comme effets secondaires, la désorganisation et la vacuolisation des photorécepteurs, pouvant aller jusqu’à leur disparition [17, 18]. Cela n’est pas le cas pour le 5-
J. Fr. Ophtalmol.
FU ou l’héparine, molécules pour lesquelles la dose efficace chez l’animal n’est pas toxique [19-21]. Les propriétés anti-proliférantes du 5-FU sont déjà utilisées depuis longtemps dans la chirurgie du glaucome (trabéculectomie, sclérectomie non perforante). Cependant, la manipulation du 5-FU de façon régulière par le personnel soignant nécessite un ensemble de précautions permettant d’assurer la protection des utilisateurs. Il ne doit en aucun cas être manipulé par des femmes enceintes et, par conséquent, ne pas être administré en ophtalmologie à une patiente enceinte. Une vigilance particulière lors de l’utilisation de ce produit doit être respectée : pose et ablation du champ opératoire avec la poche de recueil, information du personnel. Cette étude confirme la bonne tolérance de l’association 5-FU et héparine. L’incidence des kératites et des érythèmes conjonctivaux est plus importante le lendemain de l’intervention chez les patients traités avec le protocole. Toutefois, ces signes sont fugaces puisqu’aucune différence sur l’état cornéen n’est observée au bout d’une semaine. La différence concernant l’érythème cutané est, quant à elle proche, du seuil de significativité. Bien qu’il ait eu deux cas d’hyphéma dans le groupe des patients traités par 5FU-héparine (1 sur 2 a eu une rétinotomie) et aucun dans le groupe « témoins », les deux groupes ne présentent pas de différence statistiquement significative sur le plan du risque hémorragique. Par ailleurs, aucune complication inflammatoire ou infectieuse n’a été relevée. De même, il n’y a pas eu de problème de cicatrisation des sclérotomies ou de la conjonctive. L’absence de différence d’acuité visuelle entre les deux groupes après 1 an de suivi confirme la bonne tolérance du protocole. Asaria et al. [1] avaient rapporté une meilleure acuité visuelle dans le groupe traité, avec toutefois un résultat à la limite du seuil de significativité (p = 0,047). Bien qu’il s’agisse d’un facteur pronostique important, l’ancienneté du décollement de rétine n’a pas pu être déterminée dans tous les cas. En effet, la plupart des yeux étaient multi-opérés. De plus, les patients étaient adressés par de multiples correspondants. L’interrogatoire ne pouvait être suffisamment fiable pour être pris en compte dans cette étude. Nous n’avons pas trouvé d’efficacité clinique que ce soit sur le plan anatomique (taux de rétines à plat) ou fonctionnel (acuité visuelle à 1 an). Toutefois, l’étude n’était pas randomisée, et son effectif faible (30 × 2). De plus, le stade de PVR était évolué (60 et 70 % de PVR antérieure). L’utilisation de 5FU-héparine à un stade moins évolué de PVR (stade A ou B) pourrait être plus efficace car réellement préventive. Il serait logique d’intervenir avant que la fibrose ne se constitue. D’autres études seront nécessaires pour démontrer l’efficacité de ce protocole.
Protocole Molécules
Voie
Prospective randomisée
Effectif total
5 μg
oui
30
Recul Toxicité (mois) 3
non
Références
« Rétine à plat » Traité (%)
Témoins (%)
86
66,6
Autres résultats
p 0,05
Infusion
7,5 μg
oui
286
6
Infusion
7,5 μg
non
68
18
5 μg
non
13
6
IVT ou infusion
5-FU
54,1
0,07
–
non
73
–
–
–
non
100
–
–
–
non
51
6
non
IVT ou sous-conjonctivale
1 mg 10 mg
non
22
6
non
60
–
–
Complexe
oui
141
6
non
75,3
63,3
0,05
1 mg
non
31
3
non
Non analysé (étude de tolérance)
81,2
–
–
1998 [8] Wiedemann et al.
1991 [9]
Blankenship et al.
1989 [2]
Blumenkranz et al.
1984 [3]
1987 [10]
33
3
–
IV ou Infusion
Complexe
oui
73
–
non
Héparine + corticoïdes
Infusion
2 mg + 500 UI
oui
62
6
non
84
73,5
0,16
Héparine + 5 FU
Infusion
200 μg/ml + 5 UI/ml
oui
169
6
non
78,2
71,3
0,47
Colchicine
Per os
0,6 mg/J
non
22
8
–
Acide rétinoïque
Per os
40 mg/J
non
20
20
–
Étude de tolérance
–
Non analysé
100
100
– réaction inflammatoire
2003 [13] Johnson et al. 1988 [4]
réinterventions Williams et al. 1996 [5] à 1 an récidive PVR et Asaria et al.
2001 [1]
AV
> 0,1 Pas d’effet sur AV 0,6
2000 [12] Jonas et al.
→
Non précisés
1982 [11] Koerner et al.
–
Berman et al.
1989 [14]
Fekrat et al.
1995 [15]
5FU-héparine et prolifération vitréorétinienne
non
Fibrose corticosensible ou non
→
25 mg
Héparine
67
–
–
→
IVT
2002 [7]
7,5 μg 10 mg
IVT
Année
AV
62,7
IVT
Per os Corticoïdes
non
→
Daunomycine
Auteurs
récidive PVR et Kumar et al.
→
Dose
Résultats
→
IVT
Méthodologie
Vol. 28, n° 7, 2005
Tableau IV Résumé des études cliniques sur les molécules inhibant la PVR chez l’homme d’après l’article référent (pour revue, [16]).
705
S. Scheer et coll.
J. Fr. Ophtalmol.
CONCLUSION L’adjonction d’une association de 5-FU et d’héparine dans le liquide de vitrectomie pour la prévention de la PVR est bien tolérée bien que l’efficacité anatomique et fonctionnelle ne soit pas encore établie. Des études seront nécessaires pour évaluer l’efficacité d’une telle association chez un plus grand nombre de patients et pour des stades plus précoces de PVR (stade B).
RÉFÉRENCES
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RECTIFICATIF Dans l’article intitulé « Maculopathie ischémique drépanocytaire résolutive après échange érythrocytaire. À propos d’un cas » paru sous la référence J Fr. Ophtalmol., 2005 ; 28 : 642-5 dans le Journal Français d’Ophtalmologie N° 6-2005, la liste des auteurs aurait dû apparaître de la façon suivante : N. Leveziel (1), E. Frau (1, 4), O. Kirsch (1), M. Lautier-Frau (2), F. Driss (3), M. Labetoulle (1), H. Offret (1, 4) (1) Service d’Ophtalmologie, CHU du Kremlin-Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre. (2) Cabinet Médical, Paris. (3) Unité thérapeutique transfusionnelle, CHU du Kremlin-Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre. (4) Institut Gustave Roussy, Villejuif.