Évaluation de l’efficacité de la somatostatine ou de l’octréotidedans le traitement des fistules pancréatiques externes

Évaluation de l’efficacité de la somatostatine ou de l’octréotidedans le traitement des fistules pancréatiques externes

Article original Ann Chir 2001 ; 126 : 34-41 © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0003394400004545/FLA Éva...

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Article original

Ann Chir 2001 ; 126 : 34-41 © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0003394400004545/FLA

Évaluation de l’efficacité de la somatostatine ou de l’octréotide dans le traitement des fistules pancréatiques externes L. Brunaud*, H. Sebbag, F. Marchal, A. Verdier, L. Bresler, J.M. Tortuyaux, P. Boissel Service de chirurgie digestive et viscérale, CHU Nancy, hôpital Brabois, 54511 Vandoeuvre, France

RE´SUME´ But de l’étude : Évaluer la prévalence de l’apparition d’un pseudokyste après tarissement d’une fistule pancréatique persistante traitée par une somatostatine de synthèse ou l’octréotide. Comparer les caractéristiques des patients en fonction de l’apparition ou non d’un pseudokyste après le tarissement fistuleux. Patients et méthodes : Cette étude rétrospective entre janvier 1994 et août 1999 a porté sur 15 patients ayant une fistule pancréatique tarie après traitement par somatostatine ou octréotide. Une tomodensitométrie a été réalisée chez tous les patients 66 ± 34 jours après la fin du traitement. Les patients ont été séparés en groupe échec ou en groupe favorable en fonction de la présence ou non d’un pseudokyste. Résultats : La tomodensitométrie était normale neuf fois sur 15 (60 %) (groupe favorable) et a objectivé un pseudokyste pancréatique dans six cas (groupe échec). Les cinq patients ayant une fistule dans les suites d’une duodénopancréatectomie céphalique ont tous fait partie du groupe favorable. Six des dix patients qui avaient une fistule après drainage d’un pseudokyste ont fait partie du groupe échec. Aucune autre différence significative n’a pu être mise en évidence entre les deux groupes. Conclusion : La somatostatine ou l’octréotide peuvent être efficaces en cas de fistule pancréatique persistante. Ces résultats dépendent de l’étiologie de la fistule. Les fistules pancréatocutanées (FP) survenant après duodénopancréatectomie céphalique semblent pouvoir être traitées efficacement par la somatostatine ou l’octréotide. En revanche, la somatostatine ou l’octréotide ne peuvent pas être considérés comme un traitement efficace des FP persistantes après drainage externe d’un pseudokyste,

Reçu le 14 avril 2000 ; accepté le 27 octobre 2000. * Correspondance et tirés à part. Adresse e-mail : [email protected] (L. Brunaud).

même si quatre cas sur dix ont été traitées efficacement. © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS fistule pancréatique / pancréas / pseudokyste du pancréas / somatostatine

ABSTRACT Evaluation of somatostatin or octreotide efficacy in the treatment of external pancreatic fistulas. Aim of the study: To evaluate the prevalence of pancreatic pseudocyst after persistent fistula closure with somatostatin or octreotide. To compare the patient characteristics according to the subsequent presence or absence of pseudocyst. Patients and methods: This retrospective study from January 1994 to August 1999 included 15 patients with an external pancreatic fistula. Fistula closure was observed for all patients with somatostatin or octreotide. CT scan was performed 66 ± 34 days after the end of this treatment. Results: CT scan was normal in 9 patients (favorable group) and showed pancreatic pseudocyst (failure group) in 6 patients. Pancreatic fistula etiologies were different between the two groups. The 5 patients presenting pancreatic fistula after duodenopancreatectomy belonged to the favorable group. Six of the 10 patients presenting pancreatic fistula after pseudocyst drainage belonged to the failure group. There were no other differences between the two groups. Conclusion: Persistent pancreatic fistula can be cured with somatostatin or octreotide. However, fistulas occurring after duodenopancreatectomy are more easily cured with somatostatin or octreotide than fistulas occurring after external pseudocyst drainage. Somatostatin or octreotide cannot be considered to be an effective treatment for pancreatic fistula occurring after pseudocyst drainage,

Fistule pancréatique et somatostatine

despite the fact that 40% of them were permanently cured. © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS pancreatic fistula / pancreas / pseudocyst of the pancreas / somatostatin

L’arrêt de l’alimentation orale, la réhydratation hydroélectrolytique et la nutrition parentérale constituent la prise en charge primaire établie des fistules pancréatocutanées (FP) [1]. La somatostatine et ses analogues possèdent la propriété d’inhiber la sécrétion pancréatique exocrine. Ces substances ont été utilisées pour essayer d’améliorer le délai et le taux de fermeture des FP [1-3]. En revanche, peu d’études ont évalué l’évolution des patients après l’obtention du tarissement d’une FP par la somatostatine et particulièrement l’apparition de pseudokystes pancréatiques. Le but de cette étude a été d’évaluer la prévalence de l’apparition de pseudokystes après tarissement des fistules pancréatiques traitées par drainage externe et somatostatine de synthèse (SMS) ou l’un de ses analogues (ASMS). Les FP ont été considérées quelle que soit leur origine et avaient été drainées au moins huit semaines avant le traitement par SMS ou ASMS. Les patients ont été classés en deux groupes : un groupe favorable et un groupe échec en fonction de l’absence ou de la présence d’un pseudokyste pancréatique après tarissement. Les caractéristiques de ces deux groupes ont été comparées. PATIENTS ET MÉTHODES Cette étude rétrospective a inclus tous les patients ayant une FP, quelle que soit sa cause, traités par SMS ou ASMS dans le même centre entre le 1er janvier 1994 et le 31 août 1999. La FP a été définie par l’extériorisation d’un liquide dont le débit était supérieur à 10 mL/24 h et dont la concentration en amylases était au moins supérieure à trois fois l’amylasémie [4]. Un patient a été éliminé dont la fistule n’était pas tarie à la fin du traitement par SMS ou ASMS. Le tarissement d’une fistule a été définie par l’absence d’extériorisation de liquide chez un patient asymptomatique mangeant normalement [4]. Il s’agissait de 15 patients (11 hommes et quatre femmes). L’âge moyen était de 50 ± 12 ans. La FP était apparue dix fois (67 %) dans les suites du drainage externe d’un pseudokyste survenant après

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pancréatite aiguë correspondant au type 1 (n = 7) et au type 3 (n = 3) de la classification de D’Egidio et Schein [5]. La définition du pseudokyste était une collection pancréatique ou péripancréatique persistante deux mois après le début de la pancréatite aiguë [6]. Parmi ces patients, trois avaient une pancréatite aiguë sévère et trois avaient une pancréatite chronique sous jacente [7]. L’étiologie des pancréatites était alcoolique sept fois, biliaire deux fois et mixte une fois. Les indications du drainage externe étaient le caractère symptomatique du pseudokyste (douleur) pour sept patients (la taille du pseudokyste était toujours supérieure ou égale à 4 cm) et la taille du pseudokyste supérieure à 4 cm pour trois patients asymptomatiques. Ces dix patients représentaient 14 % des patients traités pour pseudokyste et 32 % des patients traités par drainage externe dans notre service pendant la même période. Cinq fois, la fistule était apparue dans les suites d’une réintervention après duodénopancréatectomie céphalique (DPC). Les indications de la DPC étaient une polypose familiale deux fois, un adénocarcinome duodénal deux fois et un cholangiocarcinome une fois. Le parenchyme pancréatique était normal chez ces cinq patients. Au total, la FP était extériorisée après un drainage chirurgical huit fois et radiologique sept fois. Le taux moyen d’amylases du liquide fistuleux était de 41 066 ± 37 917 UI/L. Le débit moyen de la fistule avant traitement était de 231 ± 302 mL/24 h. Cinq patients (33 %) avaient une FP à haut débit (> 200 mL/24 h) [4]. L’examen bactériologique du liquide fistuleux a été réalisé 12 fois sur 15. Cet examen était stérile chez six patients et a trouvé entre un et quatre germes chez six patients. Une malnutrition était présente chez cinq patients (33 %), définie par une perte de poids d’au moins 15 % ou par la présence d’une hypoprotéinémie inférieure à 55 g/L au début du traitement par somatostatine ou octréotide [4] (tableau I). Aucun patient n’avait d’infection définie par la présence de deux des trois critères suivants [4] : température rectale > 38,5 °C, hémocultures positives, leucocytes > 12 000/mm3 ou < 3 000/mm3. Avant le début du traitement, toutes les FP avaient été drainées avec un recul moyen de 109 ± 58 jours. Les examens morphologiques ainsi que l’étiologie de la fistule ont permis de classer anatomiquement la fistule en type terminal ou latéral. Le type terminal

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L. Brunaud et al.

Tableau I. Caractéristiques des patients traités par acétate de somatostatine ou acétate d’octréotide. Patients

Étiologie

Débit fistule (mL/24h)

Type fistule

Bactériologie fistule

Durée traitement (jours)

Malnutrition

Staphylococcus aureus, pyocyanique Klebsiella, streptocoque B stérile stérile Escherichia coli, streptocoque D Staphylococcus, meti R stérile Hemophilus influenzae type F – stérile stérile – Proteus vulgaris Enterococcus, Klebsiella – Stérile

7

non

12 6 8 5 7 6 5 9 7 8 10 7 6 8

non non oui oui non oui non non non oui oui non non non

1

PA sévère

130

L

2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15

PA (PC) PA DPC PA sévère PA PA DPC DPC DPC PA DPC PA sévère PA (PC) PA (PC)

30 165 450 1 200 50 110 100 250 400 350 150 15 20 50

L T T T L T L T T L L L L L

PA : pancréatite aiguë ; PC : pancréatite chronique ; DPC : duodénopancréatectomie céphalique ; L : latéral ; T : terminal.

a été défini par la présence d’une perte de continuité entre le canal de Wirsung et le tractus gastrointestinal. Le type latéral a été défini par une continuité maintenue entre le canal de Wirsung et le tractus gastro-intestinal [4]. Chez les dix patients ayant une FP après drainage d’un pseudokyste, une tomodensitométrie abdominopelvienne a été réalisée dix fois, une fistulographie par le drain huit fois, une cholangio-pancréato-IRM trois fois et un cathétérisme rétrograde endoscopique pour évaluation lésionnelle des voies canalaires du pancréas a été réalisé une fois. La tomodensitométrie a montré huit fistules latérales et deux terminales. La fistulographie a objectivé une fistule terminale et n’a pas permis d’obtenir une opacification suffisante du canal deWirsung sept fois. Elle a alors été considérée comme non contributive pour le classement des fistules en type terminal ou latéral. La cholangiopancréato-IRM a objectivé une fistule terminale une fois, latérale une fois et a été non contributive une fois. Le cathétérisme rétrograde n’a pas permis d’opacifier le canal de Wirsung et a été considéré comme non contributif. Les cinq patients ayant eu une fistule dans les suites d’une duodénopancréatectomie céphalique avaient une fistule terminale trois fois (réinterventions avec intubation du Wirsung) et latérale deux fois (réintervention avec drainage au contact de l’anastomose pancréatojéjunale). Au total,

la FP a été classée dix fois de type latéral et cinq fois de type terminal (tableau I). Le traitement de la fistule a été réalisé chez 12 patients (80 %) par de l’acétate de somatostatine (Modustatinet, Sanofi Winthrop) et chez trois patients (20 %) par de l’acétate d’octréotide (Sandostatinet, Novartis Pharma). La dose d’acétate de somatostatine était de 6 mg/24 h pour dix patients, de 8 mg/24 h pour le patient 6 et de 9 mg/24 h pour le patient 13. Pendant les deux derniers jours du traitement, la dose était limitée à 50 % de la dose initiale pour éviter un effet rebond. La dose d’acétate d’octréotide était de 100 µg par jour. Le type de traitement a été décidé arbitrairement par le médecin responsable. Aucun ajustement des doses n’a été réalisé en fonction de la variation du débit fistuleux. Une nutrition parentérale totale a toujours été réalisée pendant toute la durée du traitement. La durée du traitement a été en moyenne de 7,4 ± 1,8 jours (tableau I). L’efficacité immédiate de la somatostatine ou de l’octréotide a été estimée par la mesure du débit fistuleux le premier, le troisième et le cinquième jour du traitement. Après l’obtention du tarissement de la fistule, une tomodensitométrie abdominopelvienne a été réalisée chez les 15 patients en moyenne 66 ± 34 jours après le dernier jour du traitement. Cet examen a permis de visualiser la présence ou non de

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Fistule pancréatique et somatostatine

pseudokyste et de classer les patients en fonction de leur évolution soit dans le groupe sans pseudokyste (groupe favorable), soit dans le groupe avec pseudokyste (groupe échec). Les données ont été exprimées en moyenne ± écart-type. Les données ont été exploitées à l’aide du logiciel Statviewt, Abacus Concepts, États-Unis. Un test exact de Fisher, un test U de Mann-Witney et une analyse de variance covariance avec mesures répétées ont été réalisés. La valeur de p définissant la significativité a été de p < 0,05. RÉSULTATS La tomodensitométrie abdominopelvienne réalisée à distance de l’obtention du tarissement de la fistule était normale neuf fois et a objectivé un pseudokyste pancréatique dans six cas. Cet examen a donc permis de définir un groupe favorable de neuf patients et un groupe échec de six patients. Dans ces deux groupes de patients, la répartition de l’étiologie des fistules pancréatiques était significativement différente (p = 0,019). Les cinq patients ayant eu une fistule après duodénopancréatectomie céphalique ont eu une évolution favorable. À l’inverse, les trois patients dont la fistule était apparue dans les suites d’une pancréatite aiguë sévère faisaient tous partie du groupe échec (patients 1, 5, 13). Parmi les sept patients qui avaient une fistule après drainage externe d’un pseudokyste, quatre faisaient partie du groupe favorable et trois du groupe échec (patients 6, 7, 11). Les trois patients qui avaient une pancréatite chronique sous-jacente faisaient partie du groupe favorable (tableau I). Dans le groupe échec, cinq patients étaient asymptomatiques et un patient avait des douleurs épigastriques peu intenses. Tous les patients de ce groupe avaient une fistule survenue dans les suites du drainage externe d’un pseudokyste. La localisation de ces pseudokystes avant le drainage et le traitement était céphalique deux fois et caudale quatre fois. La localisation des pseudokystes après le traitement était strictement identique. La taille des pseudokystes des patients de ce groupe était avant le drainage et le traitement de 5,6 ± 1,5 cm et après le traitement de 4,3 ± 1,6 cm. En comparaison, la taille initiale du pseudokyste des quatre autres patients qui avaient une fistule après drainage d’un pseudokyste mais qui ont fait partie du groupe favorable était de

7 ± 4,2 cm (p = 0,91). La localisation des pseudokystes chez ces quatre patients était céphalique. La répartition selon le type terminal ou latéral des fistules n’était pas différente dans les deux groupes. Les patients du groupe favorable avaient cinq fois une fistule latérale et quatre fois une terminale. Les patients du groupe échec avaient quatre fois une fistule latérale et deux fois une terminale (p = 0,47). La durée du drainage de la fistule avant le début du traitement a été de 125 ± 65 jours pour le groupe favorable et de 86 ± 40 jours pour le groupe échec (p = 0,26). Le type de drainage (chirurgical ou radiologique) extériorisant la fistule n’était pas différent entre les deux groupes (p = 0,20). L’étude bactériologique du liquide fistuleux a été réalisée chez sept patients du groupe favorable et chez cinq patients du groupe échec. Cette étude a objectivé un ou plusieurs germes chez deux patients du groupe favorable et chez quatre patients du groupe échec (p = 0,079). Au début du traitement, le nombre de patients malnutris et le nombre de patients ayant une FP à haut débit étaient équivalents dans les deux groupes (tableau II). Avant le traitement, le débit de la fistule était plus important chez les patients du groupe échec mais de manière non significative (p = 0,95). Une diminution significative a été observée entre le débit avant traitement et le débit au 3e jour du traitement (p < 0,0001). Cette diminution était présente dans les deux groupes. Il n’existait en revanche aucune différence significative entre les variations du débit fistuleux observé dans les deux groupes (p = 0,63) (figure 1). La durée du traitement a été plus courte chez les patients du groupe échec mais de manière non significative (p = 0,28). Il n’y avait pas de différence dans la répartition du nombre de patients traités par octréotide ou par somatostatine entre les deux groupes (p = 0,79). Enfin, les taux d’amylases dans le sang et dans la fistule étaient similaires dans les deux groupes (tableau II). DISCUSSION La prise en charge médicale initiale des FP comprend l’arrêt de l’alimentation orale, une réhydratation hydroélectrolytique parentérale, une nutrition parentérale, un appareillage au niveau de l’orifice cutané de la fistule et un drainage externe adéquat [1, 3, 8]. Avec cette prise en charge, le taux de fermeture des FP de haut ou de bas débit varie de 61

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L. Brunaud et al.

Tableau II. Comparaison des patients du groupe favorable et du groupe échec. Critères

Groupe favorable

Groupe échec

Patients (n) Malnutrition (n) Haut débit (n) Fistule terminale (n) Fistule latérale (n) Durée drainage avant traitement (j) Débit avant traitement (mL/24h) Débit 1er jour (mL/24h) Débit 3e jour (mL/24h) Débit 5e jour (mL/24h) Durée traitement (j) Amylases fistule (UI/L) Amylases sang (UI/L)

9 2 3 4 5 125 ± 65 179 ± 157 60 ± 80 16,6 ± 39,6 2,2 ± 6,6 7,8 ± 2,2 41 467 ± 36 864 58 ± 44

6 3 2 2 4 86 ± 40 309 ± 451 106 ± 135 24,1 ± 37,7 6,6 ± 16,3 6,6 ± 1 40 462 ± 43 017 43 ± 11

p – 0,25 0,9 0,47 0,47 0,26 0,95 0,59 0,59 0,81 0,28 0,90 0,40

n : nombre ; j : jour.

à 80 % dans un délai de 11 à 20 semaines [2, 8, 9]. Lors de l’utilisation de la somatostatine ou de l’octréotide, le délai de tarissement des fistules semble être diminué en comparaison avec les résultats obtenus avec la prise en charge médicale simple.

Figure 1. Débit fistuleux moyen au cours du traitement par somatostatine ou octréotide des patients des groupes favorable et pseudokyste. Il existait dans chaque groupe une diminution significative entre le débit mesuré avant et au 3e jour du traitement (p < 0,0001). Il n’existait pas de différence entre les variations de débit fistuleux observées dans les deux groupes (p = 0,63).

Les délais de tarissement observés chez des patients traités par somatostatine ou octréotide sont en effet respectivement de 0,6 à deux semaines et de une à 12 semaines [1, 2, 10-13]. Dans ces études, le taux de fermeture des fistules est en revanche inchangé par rapport à celui obtenu par la prise en charge médicale simple. Notre étude a confirmé que la somatostatine et l’octréotide permettaient de réduire significativement le débit d’une fistule pancréatique. La réduction du débit n’est cependant qu’un des facteurs du tarissement d’une fistule. D’autres facteurs comme les variations dans le temps de la concentration des enzymes pancréatiques dans le liquide fistuleux et la diminution des récepteurs de la somatostatine semblent être déterminants sur le tarissement [14]. La dénutrition et la présence de germes dans le liquide fistuleux n’étaient pas significativement différents chez les patients ayant une évolution favorable et chez ceux ayant un pseudokyste, dans deux études [4, 15]. Notre étude retrouve des résultats similaires. La durée de drainage de la fistule avant le début du traitement a été inférieure de 39 jours (31 %) dans le groupe échec. Bien que non significative, cette différence souligne que le maintien du drainage avant le traitement est peut-être un facteur d’évolution favorable. Le débit de la fistule au moment du traitement ne semble pas avoir d’incidence sur l’apparition de pseudokystes après tarissement [4, 15]. Notre étude retrouve des résultats similaires. Il n’existe pas par ailleurs de différence

Fistule pancréatique et somatostatine

significative entre les pentes de diminution des débits dans les deux groupes. Ceci semble souligner que les variations du débit fistuleux pendant les premiers jours du traitement ne peuvent pas être considérées comme un facteur pronostique de la présence ou non d’un pseudokyste après tarissement. Enfin, la durée du traitement des FP par somatostatine ou analogues ne semble pas corrélée avec le tarissement fistuleux ni avec l’apparition de pseudokyste après tarissement [4, 15]. Cette durée varie dans les études de quatre à 87 jours [1, 10]. Notre étude retrouve une durée de traitement similaire dans les deux groupes de patients. Les fistules pancréatiques latérales survenues après duodénopancréatectomie céphalique (réintervention sans intubation du canal de Wirsung) ont eu une évolution favorable dans notre étude. L’efficacité immédiate et à long terme de la somatostatine et de l’octréotide sur ce type de fistule a été rapportée dans 86 à 100 % des cas [4, 16, 17]. Ce taux important de fermeture sans apparition de pseudokyste à distance est connu et contribue à la diminution de la morbidité et de la mortalité des résections pancréatiques [18]. Les fistules pancréatiques survenues après réintervention (avec intubation du canal de Wirsung) dans les suites d’une duodénopancréatectomie céphalique sont un modèle expérimental de fistule terminale. Les fistules terminales sont habituellement considérées comme étant résistantes au traitement par somatostatine ou analogues. Aucun des huit patients ayant une fistule terminale dans l’étude de Howard et al. n’a pu être traité avec succès par l’octréotide [4]. Les trois patients de notre étude ont fait partie du groupe favorable. Nous n’avons pas d’explication objective à ces bons résultats. Le drainage externe chirurgical ou radiologique d’un pseudokyste est avec le drainage interne chirurgical ou endoscopique et la résection chirurgicale, une des modalités thérapeutiques des pseudokystes [19-21]. Aucune étude comparative prospective n’a évalué l’efficacité de ces différentes méthodes et chaque centre applique généralement la technique pour laquelle son expertise est maximale [6, 22, 23]. Les études initiales concernant le drainage externe trouvaient une efficacité de 70 à 90 % [24-26]. Actuellement, la place du drainage externe est controversée et ses principaux inconvénients sont la création d’une FP ainsi que la prévalence des

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récidives trouvées chez 10 à 79 % des patients [15, 21, 24, 25]. Dans une étude rétrospective récente, le taux de récidives était de 50 % après drainage externe chirurgical ou percutané [21]. Notre étude n’avait pas pour but d’évaluer ni de discuter l’efficacité du drainage externe, seul ou en association avec la somatostatine. En effet, les dix patients de notre étude correspondent à un sous groupe de patients ayant une fistule créée par le drainage externe spontanément non tarie dans un délai moyen de 109 jours. Ces patients ne représentent qu’une fraction (environ 30 %) de l’ensemble des patients traités par drainage externe dans notre service pendant la même période. Les résultats de cette étude ne peuvent donc pas être appliqués à l’ensemble des pseudokystes traités par drainage externe. Le but de notre étude a été d’évaluer le rôle adjuvant de la somatostatine chez les patients ayant une fistule persistante, non tarie après un délai minimal au-delà duquel le tarissement spontané a été considéré comme peu probable [23]. L’intérêt principal a été de sélectionner ces FP et d’éliminer celles qui avaient une évolution favorable spontanée, pour pouvoir évaluer au mieux l’efficacité de la somatostatine ou de l’octréotide. Nous rapportons un taux d’échec élevé de la somatostatine ou de l’octréotide dans cette indication. Si on ne considère que les patients ayant une fistule secondaire au drainage externe d’un pseudokyste, l’incidence d’un pseudokyste observé après le tarissement fistuleux a été de six sur dix. La localisation des pseudokystes des patients du groupe échec était identique avant et après le traitement. Il s’agit donc bien d’une récidive du pseudokyste et non pas de l’apparition de nouveaux pseudokystes. La seule différence significative entre les deux groupes de patients a été l’étiologie des fistules. Les patients ayant une FP dans les suites du drainage d’un pseudokyste survenu après pancréatite aiguë sévère étaient les seuls à faire partie du groupe échec. La présence d’échec sous forme de pseudokyste a été rapportée dans 47 % des cas d’une étude de 15 patients dont dix avaient une fistule latérale après pancréatite aiguë sévère, traitée par octréotide. Tous ces patients avaient une obstruction distale du canal de Wirsung lors de la réalisation d’un cathétérisme rétrograde [4]. L’obstruction et/ou la rupture canalaire associée à la nécrose pancréatique et l’inflammation persistante péripancréatique sont

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considérées comme étant à l’origine de la prévalence importante des échecs observés chez ces patients [3, 4, 23]. D’une manière plus générale, l’obstruction canalaire est considérée comme responsable de la persistance des FP après drainage externe ainsi que des échecs sous la forme de pseudokystes lors d’un traitement par somatostatine [1, 6, 23, 27]. En conséquence, nous avons probablement traité des patients ayant des lésions canalaires pancréatiques sous jacentes lorsque nous avons sélectionné le sous groupe de patients avec des fistules persistantes après un délai d’environ trois mois. Cette notion pourrait expliquer le taux d’échecs important observé dans notre étude. En dehors de l’obstruction canalaire, il ne semble pas exister d’autres facteurs prédictifs d’échec de la somatostatine après drainage externe d’un pseudokyste. Cette notion demande confirmation en raison du faible nombre d’études rapportant ce type d’échec et du faible nombre de patients dans les études [1, 27, 28]. Dans notre étude, la taille des pseudokystes chez les patients du groupe échec avant drainage et traitement était inférieure à celle observée chez les patients du groupe favorable (p = 0,91). La taille des pseudokystes avant drainage externe n’est donc pas un bon critère pour sélectionner au moment du drainage, les patients qui seront traités efficacement par la somatostatine ou analogues. Par ailleurs, cette notion avait déjà été retrouvée dans une étude de 42 patients ayant un pseudokyste traité par drainage percutané seul [15]. La présence des échecs sous la forme de pseudokystes est rarement précisée dans la littérature mais a été rapportée sous forme de cas cliniques [29, 30]. Deux principales études rétrospectives rapportent ce type d’échec. Une étude chez 12 patients (dont quatre avaient une FP après drainage externe d’un pseudokyste) traités par octréotide a retrouvé l’apparition d’un pseudokyste pancréatique chez deux patients après un délai moyen de dix mois et demi après tarissement de la fistule [1]. Une autre étude chez huit patients traités par octréotide pour une FP créée par drainage externe d’un pseudokyste, a objectivé la présence d’un pseudokyste chez deux patients après un délai de trois mois [27]. Une étude prospective multicentrique évaluant l’intérêt adjuvant de l’octréotide du 7e au 21e jour après drainage externe d’un pseudokyste a trouvé la présence d’un

pseudokyste chez trois des neuf patients du bras octréotide [28]. L’hétérogénéité de l’étiologie des fistules, la non réalisation systématique d’une tomodensitométrie abdominale et l’utilisation de la somatostatine avant un délai suffisant pour ne sélectionner que les fistules persistantes expliquent probablement ces résultats favorables. CONCLUSION La somatostatine ou l’octréotide peuvent être un traitement adjuvant efficace en présence d’une fistule pancréatique persistante. Cependant, ces résultats dépendent largement de l’étiologie des fistules ainsi que de l’atteinte ou non du canal de Wirsung (obstruction/rupture). Les FP survenant dans les suites d’une duodénopancréatectomie céphalique avec un parenchyme pancréatique et un canal de Wirsung sains semblent pouvoir être traitées efficacement par la somatostatine ou l’octréotide. L’efficacité de la somatostatine et de l’octréotide dans le traitement des pseudokystes après drainage externe est moins évidente. Une première question se pose en amont : la place du drainage externe dans le traitement des pseudokystes par rapport à celle du drainage interne chirurgical ou endoscopique. En l’absence d’expertise endoscopique, le drainage externe des pseudokystes, avec réalisation d’une dérivation interne chirurgicale en cas d’échec, est actuellement une des stratégies possible pour le traitement des pseudokystes [6]. Indépendamment de cette question, il apparaît que la somatostatine ou l’octréotide ne peuvent pas être considérés comme un moyen efficace de traitement des FP persistantes après drainage externe. Ce taux d’échec important peut d’ailleurs être retenu comme un argument contre le drainage externe des pseudokystes même si quatre des fistules persistantes sur dix ont été traitées efficacement. Ces deux problèmes devraient à l’avenir être évalués séparément de façon prospective et contrôlée [6]. RE´ FE´ RENCES 1 Barnes S, Kontny BG, Prinz RA. Somatostatin analog treatment of pancreatic fistulas. Int J Pancreatol 1993 ; 14 : 181-8. 2 Pederzoli P, Bassi C, Falconi M, Albrigo R, Vantini I, Micciolo R. Conservative treatment of external pancreatic fistulas with parenteral nutrition alone or in combination with continuous intravenous infusion of somatostatin, glucagon or calcitonin. Surg Gynecol Obstet 1986 ; 163 : 428-32.

Fistule pancréatique et somatostatine

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