Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale 134 (2017) 199–201
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Cas clinique
Goitre ectopique parapharyngé gauche coexistant avec une thyroïde eutopique et syndrome de Claude Bernard-Horner postopératoire夽 W. Foma ∗ , E. Pegbessou , B. Amana , E. Kpemissi Service d’ORL et chirurgie cervico-faciale, CHU Sylvanus-Olympio, Lomé, Togo
i n f o
a r t i c l e
Mots clés : Goitre ectopique Espace parapharyngé Syndrome de Claude Bernard-Horner
r é s u m é Introduction. – Le but de cette observation est de rapporter un cas de goitre ectopique parapharyngé gauche dont l’exérèse a été marquée par un syndrome de Claude Bernard-Horner postopératoire tout en relevant les difficultés de prise en charge. Observation. – Il s’agissait d’une femme de 25 ans, qui a consulté pour dysphagie haute et qui présentait une masse parapharyngée gauche bien limitée refoulant les gros vaisseaux en dehors et en arrière. Une cervicotomie exploratrice a permis l’exérèse de cette masse. L’examen anatomopathologique de la pièce a noté un parenchyme thyroïdien hyperplasique. Le contrôle postopératoire a montré une glande thyroïde eutopique et euthyroïdienne. Les suites opératoires ont été marquées par un syndrome de Claude Bernard-Horner persistant avec un an de recul. Discussion. – L’ectopie thyroïdienne parapharyngée coexistant avec une thyroïde fonctionnelle est extrêmement rare. Les masses parapharyngées sont le plus souvent d’origine parotidienne et nerveuse. La chirurgie de l’espace parapharyngé peut entraîner une lésion du sympathique cervical à l’origine du syndrome de Claude Bernard-Horner, comme chez notre patiente. Conclusion. – L’ectopie thyroïdienne devrait être évoquée dans le diagnostic des masses de l’espace parapharyngé. Bien que rare, le syndrome de Claude Bernard-Horner est à redouter dans la chirurgie de ces masses. © 2017 Publie´ par Elsevier Masson SAS.
1. Introduction
2. Observation
L’ectopie thyroïdienne (ET) se définit par la présence d’un tissu thyroïdien en dehors de sa région habituelle prétrachéale. L’ET parapharyngée est une entité rare [1]. La chirurgie de l’espace parapharyngé est délicate et peut être émaillée de complications vasculo-nerveuses. Le but de cette observation est de rapporter un cas de goitre ectopique parapharyngé gauche coexistant avec une thyroïde fonctionnelle en position normale dont l’exérèse a été marquée par un syndrome de Claude Bernard-Horner (SCBH) postopératoire tout en relevant les difficultés de prise en charge.
Il s’agissait d’une femme de 25 ans qui a consulté pour une dysphagie aux solides, une voix couverte et des céphalées évoluant depuis 5 ans sur un fond d’altération progressive de l’état général. Elle n’avait pas d’antécédent pathologique particulier. L’examen clinique avait noté une masse sous digastrique gauche peu mobile, un bombement oropharyngé siégeant à la paroi latérale gauche comblant les deux-tiers de la lumière oropharyngée. Cette masse était de consistance ferme et refoulant l’amygdale palatine en dedans et en avant ; la muqueuse de l’oropharynx recouvrant la masse était normale. La tomodensitométrie (TDM) pharyngée montrait une masse parapharyngée gauche bien limitée, prenant légèrement le contraste de fac¸on hétérogène (Fig. 1). Une cervicotomie exploratrice a été réalisée à visée diagnostique. En peropératoire on notait une masse bien encapsulée, siégeant en dedans de la bifurcation carotidienne (Fig. 2A et B). Les suites opératoires immédiates étaient simples. À j4 postopératoire, la patiente a signalé une sensation de chaleur et de sécheresse de l’hémiface gauche ; l’examen clinique a noté un ptosis, un myosis et une énophtalmie apparente gauches évoquant un SCBH, sans atteinte morpho-fonctionnelle oculaire (Fig. 3). L’examen
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.anorl.2017.01.002. 夽 Ne pas utiliser pour citation la référence franc¸aise de cet article mais celle de l’article original paru dans European Annals of Otorhinolaryngology Head and Neck Diseases en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (W. Foma). http://dx.doi.org/10.1016/j.aforl.2016.11.004 1879-7261/© 2017 Publie´ par Elsevier Masson SAS.
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W. Foma et al. / Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale 134 (2017) 199–201
Fig. 1. TDM coupe axiale (A) et reconstitution sagittale (B) après injection de produit de contraste : masse parapharyngée gauche bien limitée, prenant le contraste de fac¸on hétérogène mesurant 69 mm × 61 mm × 47 mm.
de recul, on notait une absence de symptôme pharyngé mais une persistance du SCBH sans autre complication associée. 3. Discussion Notre observation présente une pathologie inhabituelle et fait ressortir la difficulté diagnostique et la délicatesse de l’abord des masses parapharyngées. Les tumeurs de l’espace parapharyngé sont rares (0,5 % des tumeurs de la tête et du cou) ; elles sont d’étiologies variées mais les adénomes pléomorphes du lobe profond de la parotide, les tumeurs nerveuses et les paragangliomes du nerf vague sont les plus fréquentes [2,3]. La rareté de ces lésions explique la difficulté diagnostique à laquelle nous avons été confrontés chez notre patiente dont le siège lésionnel et la symptomatologie n’orientaient pas vers une pathologie thyroïdienne. La plupart des ET sont asymptomatiques et la survenue des symptômes est liée à l’augmentation du volume du tissu thyroïdien ectopique et parfois aux complications. Chez notre patiente l’indication chirurgicale a été posée sur la base de la symptomatologie qui occasionnait une altération de son état général et sur le caractère bien encapsulé de la masse à la TDM. Dans l’ET, la chirurgie est indiquée chez les patients symptomatiques [4]. La chirurgie de l’espace parapharyngé peut entraîner une lésion du sympathique cervical comme chez notre patiente. L’étiologie la plus fréquente de lésion du sympathique cervical est la chirurgie cervicale, suivie des tumeurs malignes [5]. Fig. 2. Vue peropératoire (A), pièce opératoire (B) et coupe histologique de la pièce opératoire montrant un parenchyme thyroïdien hyperplasique avec des vésicules de taille variable à contenu colloïde (C).
anatomopathologique de la pièce opératoire a noté un parenchyme thyroïdien hyperplasique (Fig. 2C). L’échographie de contrôle postopératoire a montré une glande thyroïde eutopique et normale ; le dosage des hormones thyroïdiennes était normal. Après un an
4. Conclusion L’ET parapharyngée associée à une glande thyroïde en position normale prétrachéale est extrêmement rare mais devrait être évoquée dans le diagnostic des masses parapharyngées. Bien que rare, le SCBH est à redouter dans la chirurgie de l’espace parapharyngé. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Remerciements
Fig. 3. Syndrome de Claude Bernard-Horner gauche.
Aux services d’anatomie pathologique du CHU SylvanusOlympio et d’ophtalmologie du CHU Campus de Lomé pour leur collaboration.
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Références [1] Fiesal TK, Prepageran N, Shahrizal T, et al. Unusual parapharyngeal lesion: aberrant thyroid gland. Singapore Med J 2008;49:137–8. [2] Basaran B, Polat B, Unsaler S, et al. Parapharyngeal space tumours: the efficiency of a transcervical approach without mandibulotomy through review of 44 cases. Acta Otorhinolaryngol Ital 2014;34:310–6.
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[3] Makeieff M, Quaranta N, Guerrier B. Tumeurs parapharyngées. Encycl Med Chir Paris: Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS; 2000 [tous droits réservés, Oto-rhino-laryngologie, 20-605-C-10, 14 p]. [4] Adelchi C, Mara P, Melissa L, et al. Ectopic thyroid tissue in the head and neck: a case series. BMC Res Notes 2014;7:790. [5] Vilallonga R, Fort JM, Mazarro A, et al. Postthyroidectomy Horner’s Syndrome. Case Rep Med 2012;316984.